MEMOIRE DE D.U. DE PSYCHOTHERAPIE INSTITUTIONNELLE
PSYCHOTHERAPIE INSTITUTIONNELLE ET HIERARCHIE
SUBJECTALE
INTRODUCTION
Nul doute au moment du choix du sujet : c'est le terme de « hiérarchie » qui nous a attiré ;
évoquant pour certains la notion de rapport de force, pour d'autres des schémas d'organisation
napoléoniens, et pour tous des souvenirs hospitaliers de rencontres plus ou moins riches ou
difficiles.
Infirmier, interne, cadres infirmiers, médecin du travail, psychiatre, assistant généraliste :
notre groupe de travail est marqué par des trajectoires professionnelles différentes, et c'est tant
mieux pour qui se réclame d'une « hétérogénéïté » si chère à J.OURY. Malgré ces expériences
variées, nous sommes facilement tombés d'accord sur l'existence de différentes formes de
hiérarchie.
Mais voilà que la hiérarchie devient « subjectale », et que le débat s'anime au sein du
groupe. Les avis divergent sur le sens à donner à ce mot, et ce d'autant plus qu'aucun dictionnaire ne
peut nous venir en aide...quelle fichue manie que celle de ces psychiatres qui ne peuvent s'exprimer
comme tout le monde ! Ceci dit, les néologismes présentent un avantage certain : ils permettent à
chacun de les cuisiner à sa sauce ; subjectal comme subjectif, subjectal comme sujet, subjectal
comme spatial, comme l'espace des compréhensions qui s'offre à nous.
Après que chacun ait donner son opinion, et que la somme des opinions égale le nombre
de personnes présentes, nous avons pensé qu'il était plus intéressant de faire part de nos
cheminements personnels dans la hiérarchie subjectale plutôt que de trouver à tout prix un
consensus, tout en essayant de mettre en lumière quelques uns de nos points de convergence.
En somme, respecter notre côté subjectif, tel a été notre objectif...ou peut-être notre
« objectal » !Cathy FERREIRA, cadre infirmier.
DIPLOME UNIVERSITAIRE
PSYCHOTHERAPIE INSTITUTIONNELLE
EQUIPE SOIGNANTE ET HIERARCHIE SUBJECTALE : DANS QUEL
CADRE ?
Cadre de santé depuis un peu plus d’un an , j’ai pris mes fonctions en psychiatrie adulte
dans une unité dite de réhabilitation psychosociale mais en fait prenant en charge des
patients atteints de pathologies chroniques.
Consciente de l’importance que peut revêtir la psychothérapie institutionnelle dans le bon
fonctionnement d’un service, j’ai tenu dans un premier temps à recevoir chacun des
membres du personnel en entretien pour entendre leurs attentes, leurs désirs, leurs
projets au sein du service, mais aussi les critiques éventuelles sur le fonctionnement du
service. Dans un deuxième temps, il m’est paru tout aussi important de rencontrer un à un
les patients parfois hospitalisés depuis plus de vingt ans dans le service afin de faire
connaissance et d’entendre ce qu’ils avaient à me dire.
Il me paraît essentiel de trouver sa place et de définir des objectifs de travail en tant que
cadre soignant dans un service de psychiatrie au sein d’un hôpital général. En effet,
aujourd’hui le poids de l’administration, le système hospitalier imposent au cadre de
nombreuses fonctions administratives (ainsi qu’aux infirmiers) de gestion de temps de
travail, gestion de stocks, tableau de bord…. En effet, la lourdeur des charges
administratives et la volonté de la hiérarchie hospitalière font que le cadre de santé est
bien souvent réduit à un travail de gestionnaire et nié dans sa fonction de cadre soignant.
Un autre écueil me paraît être la position d’un service de psychiatrie dans un hôpital
général, service qui doit être et rester un lieu de rencontres et de désirs mais le poids
de l’administration et la technocratie essaient de formater le fonctionnement des services
de psychiatrie comme des services de médecines ou de chirurgie. Des directives
d’application de protocoles, de transmissions ciblées, de règles d’homogénéisation, de
polyvalence des infirmiers (comme s’ils étaient des personnes interchangeables donc
niant la question du transfert) annulent le moindre espace d’autonomie et de créativité
donc de désirs pour cré des lieux mortifères.
La nouvelle gouvernance, l’hôpital entreprise où tout doit être organisé, contrôlé, maîtrisé,
contribuent à rétrécir, étouffer cet espace de liberté.
En concertation avec l’équipe soignante, l’idée est venue de mettre en place des réunions
soignants-soignés supervisées par un psychologue. Ces réunions ont pour but d’entendre
la parole du patient, d’évoquer leur quotidien. Ceci permet de donner une place de sujet
au patient, place souvent oubliée au sein d’une institution toute puissante (service fermé,
des journées répétitives, sans responsabilité, absence de clubs thérapeutiques…).
Il m’est apparu nécessaire de travailler en collaboration avec une psychologue extérieure
au service afin d’instaurer une réunion mensuelle avec le personnel soignant. Ces
réunions répondaient aussi à un besoin exprimé lors des entretiens individuels que j’avais
pu avoir avec les membres de l’équipe. Ce temps de travail leur permet de parler de leur
pratique, de prendre de la distance par rapport à certains patients, d’analyser les
situations de transferts et de contre transfert. En psychiatrie, il n’y a pas de réponses
toutes faites, de protocoles ou de solutions miracles pour la prise en charge des patients.
La gestion des phénomènes transférentiels passent par la réflexion sur le déroulement de
la relation soignant-soigné.
J’ai pu constater une résistance de la part de certains soignants qui ne venaient jamais à
ces réunions. Ils ne voyaient pas la nécessité de ce travail. Une des raisons pouvant
expliquer cette résistance peut-être dans le fait que ces réunions au niveau historique de
l’institution n’ont jamais été proposé auparavant.
Un travail sur l’anamnèse des patients a également lieu dans le service. L’idée de se
réunir pour parler d’un malade permet de changer le regard que l’on porte sur lui et ainsi
de changer l’ambiance, ce que Jean Oury appelle la pathoplastie.
Ce travail institutionnel a pu être mis en place progressivement sur une année grâce à un
espace de liberté que l’on a bien voulu m’accorder malgré l’absence de soutien ou de
reconnaissance dans cette démarche par la hiérarchie. Il ne s’agit pas d’un travail mené
collectivement en psychiatrie adulte car les médecins ne sont pas impliqués.
Bibliographie
Ouvrages :
GUATTARI F, OURY J., TOSQUELLES F., « Pratique de l’institutionnel et politique »,
Ed., Matrice, 1985, 165 pages.
OURY J., « Il, donc », Ed. Matrice, 1998, 223 pages.
Revues :
Soins psychiatrique n°186 ;1996
Soins psychiatrie n°239 juillet/août 2005
L’information psychiatrique n°6 juin 1997Michel BOUSSEMAERE, cadre infirmier
Hiérarchie subjectale et équipe soignante. Dans quel cadre ?
Reconfiguration des hiérarchies au sein de l’hôpital entreprise « en dehors du cadre
institutionnel »…Ou vers une organisation scientifique d’un cadre de soins normalisés en
psychiatrie
Dans cette période de transformation du milieu du travail des soignants et donc d’un changement
de cadre pour les soignés, il semble que « c’est un enjeu décisif que de parvenir à interroger de
telles évolutions qui s’affirment en déstabilisant les cadres de représentations traditionnelles sur le
travail et des hiérarchies » (8) et à terme « sur la relation soignant soigné » .
Jean Oury (9 ) développe à maintes reprises, sur la base de concepts psychanalytiques, les enjeux
des » rapports hiérarchiques au sein de l’équipe soignante qui sont transposés tels quels auprès
des soignés « ainsi que la « valeur structurelle de l’entourage dans l’édification d’une partie du
syndrome psychiatrique » (encore appelée « pathoplastie. ». P Delion (6) développe le concept de
hiérarchie subjectale …« les rencontres entre un sujet malade mental et les soignants qui
l’accueillent dans un service de psychiatrie ne peuvent passer que par un premier niveau, celui du
sujet dont la fonction peut être soignant puisqu’il en a le statut et donc le rôle. Mais pour qu’une
telle promesse soit tenue, il est incontournable que le soignant soit lui aussi respecté par « sa
hiérarchie » comme un sujet « . Cette définition de la hiérarchie institutionnelle répond sans doute
au souhait de L Bonafé d’une hiérarchie permettant « un ordonnancement équilibré, harmonieux,
des rôles et des responsabilités ».
Cependant il me semble que la mutation actuelle de l’hôpital et sa pseudo-logique économique
risque de contaminer l’espace institutionnel. Cette crainte me semble confirmée par les auteurs d’un
rapport de recherche « sur les relations hiérarchiques au sein des établissements de santé de
septembre 2006 du Centre d’Etudes de l’Emploi. Ces auteurs constatent en effet une
« reconfiguration de la hiérarchie »(8) imposée par de nouvelles techniques de management de
« scientificisation du travail » (8)au sein des « établissement de santé. « Les établissements de
santé ne sont pas organisés selon une unique structure hiérarchique mais selon une structure
complexe croisant plusieurs hiérarchies interdépendantes : hiérarchies managériales (un cadre
infirmier donnant des ordres à ses subordonnées), hiérarchie médicale (pouvoir prescriptif des
médecins), mais aussi un ensemble de règles formelles (consignes thérapeutiques, managériales) et
informelles (autorégulation des collectifs et arrangements interpersonnels) ou de pratiques
incorporées ( les gestions de métiers) ». De cette reconfiguration émergent une « confrontation de
logiques différentes et parfois concurrentes : logique technicienne bien soigner voir guérir » ),
logique managériale soigner à un moindre coût ») ; logique relationnelle(« informer ;
accompagner, écouter») ». (8)
La logique financière semble ainsi prévaloir et justifier des techniques managériales qui tendent
quant à elle « à supprimer les spécificités » de la pratique au sein des différents services et d’un
service à l’autre (8): « Protocolisation et certification de l’activité dans une démarche
d’accréditation qui tend à uniformiser les pratiques » et « centralisation de la gestion de la main
d’œuvre afin de casser les îlots susceptibles de se former dans les services, dans les unités ».
L’objectif est de faire tourner davantage les équipes d’un service à l’autre et ainsi de supprimer des
spécificités : turn-over des soignants au sein des différents services, sociétés prestataires.. ». C
Dejours (4), quant à lui, démontre combien « ces nouvelles méthodes managériales ne peuvent
être imputées comme on le pense à l’implacable logique économique, à la loi du marché, à la
mondialisation et à la guerre économique. En effet ces techniques sont extrêmement lourdes et
augmentent significativement la charge de travail « .
Par ailleurs « Ces méthodes ne doivent pas leur succès à leur pertinence technique vis-à-vis du
travail, mais bel et bien à ce qu’elles apportent comme supplément de puissance. .. » .il parle même
de »méthodes de domination »(4)
Les auteurs du rapport de recherche (8) constatent un décalage constant entre le travail prescrit(la
tâche ) et le travail réel (l’activité) et insistent sur le fait que « la réalité du travail
ne peut être réduite aux plans des organisateurs, car ce sont des professions qui plus que d’autres
appellent à l’improvisation ». Ils confirment ainsi le concept de C Dejours sur « le travail comme
épreuve pour la subjectivité « . Intelligence pratique et opiniâtreté ne conduisent à la formation de
nouveau savoir-faire que si la subjectivité entière est mise à contribution dans le rapport à la
tâche »(3).« Aucune organisation, aucune administration, aucune institution aucune entreprise ne
fonctionne si les agents s’en tiennent à exécuter strictement les prescriptions. Car si tel était le cas,
il s’agirait d’une grève du zèle et le système tomberait en panne. »(4).
Au sein de l’équipe soignante il me semble nécessaire de réfléchir à la place dévolue aux
psychiatres au sein de ces hiérarchies hospitalières complexes et inter-dépendantes. Ainsi
l’évaluation des pratiques professionnelles prescrite sur le plan national par le ministère de la santé
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