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LES INTOXICATIONS AIGUES
Les intoxications aiguës accidentelles ou volontaires sont fréquentes, et représentent une part
importante de l’activité des services d’urgence et de réanimation.
Intoxications médicamenteuses
Parfois accidentelles notamment chez le jeune enfant.
Le surdosage par posologie erronée ou inadaptée : intoxication aiguë.
Essentiellement volontaires : tentatives de suicide, fréquente, leur gravité a nettement
diminué depuis 25 ans : disparition des barbituriques, au profit des benzodiazépines peu
toxiques, diminution plus récente des antidépresseurs tricycliques.
Intoxications non médicamenteuses
Souvent accidentelles.
Les produits les plus divers sont en causes : monoxyde de carbone, produits ménagers,
alimentaires, chimiques, végétaux, agricoles, absorbés ou inhalés accidentellement.
Plus rarement il s’agit d’intoxications volontaires avec des produits divers, caustiques,
ménagers, gazeux …
L’alcool éthylique est aussi fréquemment en cause, et volontiers associés aux médicaments.
Autres intoxications
Les surdosages chez les toxicomanes : divers produits, stupéfiants, cocaïne, médicaments
détournés, ecstasy et autres dérivés des amphétamines, produits de synthèse.
Les intoxications criminelles : très rares.
A noter l’intoxication par benzodiazépines (FLUNITRAZEPAM), GAMMA
HYDROXYBUTYRATE (GHB) à l’insu de la victime : « soumissions chimiques », suivie
d’agression sexuelle.
Les intoxications terroristes chimiques.
La prise en charge des intoxications aiguës
Elle a lieu dans un service d’urgence, de soins intensifs ou de réanimation, selon la gravité de
la situation, éventuellement précédée d’une intervention préhospitalière.
La mise en condition, la surveillance, les mesures thérapeutiques sont réalisées par une équipe
médicale et paramédicale, avec l’aide éventuelle du centre anti-poison.
La phase préhospitalière
Elles sont caractérisées par la nécessité d’une évaluation rapide de la situation sur les lieux :
Le patient : l’état clinique, les fonctions vitales, l’état de conscience sont appréciés
rapidement.
Le produit toxique : les renseignements recueillis et les constatations sur les lieux sont
précieux.
La phase préhospitalière : les mesures immédiates
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Mise en sécurité de la victime et des sauveteurs par exemple lors d’une intoxication par
inhalation de gaz toxique : intérêt des détecteurs de CO2.
Les mesures vont de la surveillance simple à la réanimation cardiorespiratoire :
généralement remplissage vasculaire, oxygénation, intubation et ventilation mécanique selon
nécessité : mesure de la glycémie capillaire, prélèvement sanguin immédiat éventuellement
(intoxication au monoxyde de carbone)
La phase préhospitalière
En cas d’intoxication par ingestion : l’évacuation digestive préhospitalière est limitée et
généralement le charbon activé est le seul moyen utilisable.
L’irrigation cutanée et muqueuse est nécessaire en cas de contact avec des produits irritants
ou caustiques. Lavage eau froide pendant 10 à 15 minutes.
La Diphotérine * efficacité discutable.
La phase préhospitalière : traitements
Des antidotes peuvent êtres utilisés : NALOXONE (Narcan *, Nalone *), opiacés,
FLUMAZENIL (Anexate *), benzodiazépines, HYDROXOCOBOLAMINE (Cyanokit *)
intoxications par cyanure (fumées d’incendie).
La alisation des gestes initiaux est évaluée en fonction du rapport risque bénéfice et de la
durée du transport afin de l’assurer dans les meilleures conditions.
L’évaluation diagnostique et la surveillance
Le produit toxique : l’identification du produit, les circonstances de l’intoxication, doivent
être précisés et complétés. La dose supposée ingérée (DSI) a une très grande valeur
décisionnelle et pronostique dans certains cas d’intoxications médicamenteuses
potentiellement gravissimes : CHLOROQUINE (Nivaquine *), COLCHICINE.
Evolutivité d’une intoxication
Délai de l’intoxication = notion importante car une intoxication est un processus dynamique.
Phase précoce de résorption du toxique et diffusion : les symptômes peuvent ne pas être
encore apparus, observer un temps suffisant (médicaments à libération prolongée, toxiques à
symptomatologies retardées tels les AVK, le PARACETAMOL …).
Phase d’état : symptomatologie complète.
Phase de guérison : régression des symptômes.
La phase hospitalière
La prise en charge, de durée plus prolongée, comporte la conduite simultanée : d’une
démarche d’évaluation diagnostique avec une surveillance clinique et biologique, et d’une
démarche thérapeutique avec décision de traitement (épurateur, symptomatique, antidotique)
Certaines mesures ont pu être initiées dans le cadre préhospitalier.
Le patient intoxiqué
L’âge, l’état de grossesse, les pathologies sous-jacentes, l’existence d’allergies, peuvent
modifier la gravité de l’intoxication et les indications thérapeutiques.
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L’installation du malade à l’arrivée n’a pas de particularités que lorsqu’une décontamination
cutanée est nécessaire : attention aux vêtements imprégnés de produits toxiques, voir le
contenu des poches.
Evaluation et surveillance
La période initiale d’incertitude nécessite une surveillance rigoureuse : les symptômes sont-
ils concordants avec l’intoxication présumée ?
Toujours penser à l’éventualité d’une affection associée : traumatismes en particulier.
Evaluation clinique
Existe-t-il une défaillance vitale nécessitant un traitement immédiat ?
L’état de conscience : l’altération de la conscience est un symptôme fréquent => Score de
Glasgow (le coma peut être calme, hypotonique, hyporéflexique : lors d’intoxications par
benzodiazépines, carbamates (Equanil *), phénotiazines sédatives (Nozinan *)
Evaluation clinique état neurologique
Le coma est plutôt agité, hypertonique, avec hypertonie extrapyramidale, lors
d’intoxications par neuroleptiques, benzamides substitués (Solian *), butyrophénones (Haldol
), monoxyde de carbone …, avec hypertonie pyramidale lors d’intoxications par anti-
dépresseurs tricycliques, sérotoninergiques, anticholinergiques, antihistaminiques
Les convulsions et les myclonies surviennent lors d’intoxications par anti-dépresseurs
tricycliques, BUPROPION, cocaïne, ecstasy, ISONIAZIDE, THEOPHYLLINE (enfant),
agents rotoninergiques, insecticides organochlorés, organophosphorés, monoxyde de
carbone strychnine, métaux (plomb, aluminium), toxines naturelles (tetrodotoxine)
Hallucinations, avec LSD, phencyclidine, belladonnés
Evaluation clinique état respiratoire
Rythme respiratoire, encombrement, saturation en O2 sont les éléments de base à surveiller.
Tachypnée : intoxications par salicylés, éthylène glycol, méthanol, (acidoses)
sympathomimétiques, THEOPHYLLINE, ISONIAZIDE (Rimifon *), DINITROPHENOL,
réponse à l’hypoxie
Bradypnée : intoxications par opiacés, barbituriques
L’insuffisance respiratoire est multifactorielle : dépression centrale (psychotropes, opiacés,
alcools…), paralysie des muscles respiratoires (inhibiteurs des cholinestérases), irritation
glottique, laryngée (inhalation de fumées, gaz irritants, ingestions de caustiques).
Encombrement bronchique (hypersécrétion, pneumopathie).
Bronchospasme (gaz irritants, bétâ-bloqueurs, manifestations anaphylactiques…).
Œdème pulmonaire non cardiogénique (monoxyde de carbone, cocaïne, opiacés, chlore,
phosgène…), ou cardiogénique (agents cardiotropes), pneumopathie d’inhalation.
Evaluation clinique état cardiovasculaire
Des modifications du rythme cardiaque peuvent correspondre à certaines intoxications :
Bradycardie : anti-arythmiques, alpha adrénergiques, bétâ-bloqueurs, calcium bloqueur,
CLONIDINE (Catapressan *), digitaliques, opiacés, organophosphorés et carbamates.
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Tachycardie : sympathicomimétiques, stimulants, amphétamines, anticholinergiques,
cocaïne, antidépresseur tricyclique
Etat cardiovasculaire troubles du rythme
Troubles du rythme grave : hyperexcitabilité, troubles de conduction qui peuvent survenir
rapidement (cardiotropes) => attention aux signes d’alerte comme élargissement du QRS
>10/100ème, par effet stabilisant de membrane (anti-arythmiques de classe 1, antidépresseurs
tricycliques, chloroquine).
Mécanismes indirects : hypoxie, dyskaliémies, hypocalcémie, hypovolémie, hypothermie.
Mécanismes des troubles du rythme
Effet stabilisant de membrane : antiarythmiques de classe 1, anesthésiques locaux,
chloroquine, ATC, DEXTROPROPOXYPHENE, ciguatoxine, tetrodotoxine qui permet la
diminution de l’automaticité, de la conduction, effet proarythmogène, de la contractilité.
Effet bêta-bloquant : diminution de la fréquence, de l’excitabilité, de la conduction et de la
contractilité cardiaque.
Effet des inhibiteurs des canaux calciques : vasodilatation, diminution de la contractilité,
diminution de la fréquence et de la conduction auricule-ventricule.
Blocage des canaux potassiques : l’AMIODARONE (Cordarone *) diminue l’automaticité,
allonge QT.
Inhibition de l’ATPase membranaire : digoxine.
Effet anticholinergique ou vagolytique : atropine belladone, tricycliques à faible dose :
tachycardie.
Effet cholinergique ou parasympathomimétique : prostigmine, organophosphorés :
bradycardie.
Effet beta-mimétique : SALBUTAMOL, THEOPHYLLINE, tachycardie, augmentation de
l’excitabilité.
Tension artérielle
Hypotension artérielle.
Etat de choc : il peut être multifactoriel (hypovolémie, effet inotrope négatif, troubles du
rythme, hypoxie…) : effet alphalytique (hypotension, bradycardie), effet vasodilatateur
veineux prédominant des dérivés nitrés, effets mal élucidés : arsenic, méprobamate,
colchicine, héroïne.
Hypertension artérielle = effet alpha-mimétique : amphétamines, cocaïne, ergotamine.
Evaluation clinique température
L’hyperthermie sévère : syndrome adrénergique (amphétamine, cocaïne…), syndrome
anticholinergique (atropine, antidépresseurs tricycliques), syndrome sérotoninergiques
(ISRS), syndrome malin des neuroleptiques, hyperthermie maligne, intoxication au
DINITROPHENOL, et Aspirine * chez l’enfant
L’hypothermie : intox phénotiazines, froid.
Evaluation clinique signes oculaires
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Pupille : le myosis évoque une intoxication par opiacés ou anticholinestérasiques, la
mydriase évoque une intoxication par belladonne, antihistaminiques, antidépresseurs
tricycliques, cocaïne, sympathomimétiques, syndrome de sevrage et la souffrance cérébrale
anoxique.
Autres troubles visuels : anomalies du champ visuel, ou de la perception des couleurs se
rencontrent lors d’intoxications au méthanol, à la quinine, aux digitaliques
Evaluation clinique signes cutanés
On peut observer pâleur, cyanose, ictère, sueurs (produits adrénergiques), phlyctène,
sécheresse (produits anticholinergiques), érythèmes, zones de compression cutanée et
musculaire, appui prolongé, traces des ponctions veineuses, veinite, toxicomanie IV, brûlures
cutanées chimiques (acide fluorhydrique).
Evaluation clinique : morsures et piqûres
Les cas particuliers des morsures ou piqûres : les morsures de serpent entraînent un aspect
ecchymotique du site de la morsure, œdème extensif à mesurer. Les piqûres d’animaux marins
et d’hyménoptères qui peuvent nécessiter des mesures spécifiques telles l’application de
chaleur.
Evaluation clinique
L’odeur de l’haleine : peut être caractéristique : odeur d’acétone (alcool isopropylique,
hydrate de chloral, bromure de méthyle), odeur d’amande amère (cyanures), salicylate de
méthyle, trichloréthylène, camphre
L’état buccal : on recherche les lésions caustiques, l’hypersiallorhée.
Evaluation clinique abdomen
L’état abdominal : auscultation des bruits intestinaux, colchicine, trichloréthylène, métaux
lourds, inhibiteurs des cholinestérases, champions… provoquent une diarrhée.
L’état rénal : on surveille la diurèse, la coloration des urines
Evaluation paraclinique examens biologiques courants
Acidose = méthanol.
Hyperkaliémie = digitaliques.
Hypokaliémie = théophylline, chloroquine.
Altérations hépatiques = paracétamol, amanite phalloïde
Altérations hématologiques (colchicine…), ou de coagulation, hémolyse,
méthémoglobinémie, examens à réaliser selon nécessité.
Elévation des CK = myolyse, décubitus prolongé ou hyperactivité musculaire.
Evaluation paraclinique analyses toxicologiques
Elles confirment la réalité de l’intoxication : essentiellement sur le sang, si nécessaire sur les
urines, le liquide gastrique. Se font selon des méthodes de complexité variable, avec des
analyses qualitatives, de dépistages (présence de benzodiazépines, d’antidépresseurs
tricycliques), pas très informatives.
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