L’enfant roi anxieux est donc celui qui souffre du laxisme. Ne pouvant s'appuyer sur
aucune référence qui pourrait lui servir en quelque sorte de balises et de guide pour
encadrer sa conduite et soutenir son processus décisionnel, il évolue dans une espèce
de ¨vide existentiel¨; il est comme un drapeau qui dépend du vent pour déterminer la
direction vers laquelle il doit flotter. Je me rappelle à cet effet une jeune étudiante âgée
de 19 ans et qui désirait me rencontrer afin de modifier son plan d’études. Lui
soulignant qu’il valait peut-être mieux consulter un professionnel de l’orientation, elle
insiste en me soulignant son incapacité absolue à prendre une telle décision et que
c’était là le motif pour lequel elle désirait me rencontrer.
Ce n’est qu’après de nombreuses rencontres cliniques qu’une phrase jaillit de sa
bouche pour me permettre de comprendre ce qui n’allait pas. Rongée par l’anxiété, elle
lance : ¨Depuis que je suis toute petite, je peux faire ce que je veux…. Cela ne veut pas
dire que mes parents ne m’aimaient pas… cela veux dire qu’on me faisait confiance¨.
Ces paroles étalaient tout le drame fatidique du laxisme éducatif dont elle avait été la
victime, particulièrement le doute d’avoir été aimée qu’avait généré l’absence
d’encadrement. Mes questions visant la compréhension précise de ces paroles l’ont
effectivement conduite à la verbalisation de souvenirs à l’âge de 6 ans alors qu’elle
suppliait en pleurs ses parents de lui signifier à quelle heure devait-elle aller simplement
se coucher. Ses parents, dans une volonté manifeste de bien faire, lui répondaient
régulièrement qu’elle était maintenant une grande fille et qu’elle pouvait elle-même
juger de l’heure à laquelle elle devait aller se coucher. Toute son enfance avait été
caractérisée par l’absence de cadres, d’une structure qui lui aurait éviter la culture d’une
anxiété morbide contre laquelle elle devait dorénavant se battre, probablement pour le
reste de sa vie.
Tout son processus décisionnel en était ainsi affecté de sorte qu’elle évoluait dans
une dépendance affective chronique, caractérisée par une référence constante à autrui
pour la prise de quelque décision que ce soit. Sans cadre éducatif, cette jeune fille était
devenue incapable de distinction entre le possible, le souhaitable et le désiré.
Essentiellement passive dans ses relations, l’analyse de sa personnalité indiquait en
outre une absence marquée d’agressivité au point où elle subissait toute action de cette
nature de la part d’autrui.
Cette ¨enfant¨, traitée comme une petite reine durant toute son enfance et sans
aucune confiance en elle, en son propre jugement, croulait littéralement sous son
anxiété. Sans agressivité, incapable d’affirmation de soi et de décisions, craignant au
plus haut point le rejet d’autrui, elle n’avait cesse de rechercher l’amour, l’affection et la
sécurité : elle cherchait auprès des autres à établir la relation de sécurité dont elle avait