LETTRE A MENECEE,
Cours sur une œuvre de lecture suivie
EXPLICATION DU TEXTE :
Introduction :
a) Pourquoi une méthode du bonheur ?
Epicure propose une méthode du bonheur dans cette lettre, qui comporte deux
originalités :
-c’est une méthode corrective. Elle ne concerne que ceux qui ne parviennent pas à être
heureux. Sous-entendu que ce n’est pas la seule méthode possible, même si elle lui
semble la plus efficace. Elle repose, comme il l’indique en préambule, sur l’activité
philosophique, au sens à la fois de réflexion sur soi-même et de connaissance du
monde qui nous entoure. Et elle est très simple : il s’agit dêtre heureux le plus
rapidement possible.
-c’est une méthode qui s’appuie sur un présupposé original : elle suppose que l’homme
est naturellemet heureux. Le malheur est donc comme une maladie dont il souffrirait et
qu’il faut guérir. Mais ce bonheur naturel à l’homme n’a rien à voir avec ce qu’on appelle
spontannément bonheur (réalisation de tous ses désirs). Il ne s’agit pas de trouver le
bonheur au sens de me donner les moyens de satisfaire tous mes désirs, mais de faire
disparaître ce qui m’empêche d’y accéder : le malheur. Le bonheur ici, c’est l’absence
de malheur, dans lequel je peux profiter sereinement de certains plaisirs, qui ne sont pas
infinis, car l’homme ne peut disposer dans toute société que d’un pouvoir limité. Il y a
donc des désirs absurdes. Pourquoi les ressent-on ?
Parce que je suis malheureux, c’est-à-dire malade, troublé. Donc je ne désire plus
naturellement, je sire -pour me divertir de mon malheur- toutes sortes de choses
vaines et irréalisables qui ne me viendraient même pas à l’idée si je n’étais pas
malheureux, comme être le plus riche, l’homme le plus honoré
Je ne peux être heureux, c’est-à-dire profiter des plaisirs que je ressens dans ma vie
qu’à deux conditions : l’aponie (absence de trouble du corps) et l’ataraxie (absence de
trouble de l‘âme). Ces deux conditions sont ce que recherche naturellement l’homme.
Donc la méthode que construit Epicure ne cherche pas tant à me rendre heureux qu’à
me permettre de profiter à nouveau d’un bonheur qui est donné à l’homme dès son
enfance, qui suppose l’absence d’inquiétude. Elle suppose, parce que je n’y arrive pas
en étant insouciant, l’accès à un exercice particulier de la raison, et la mise en place de
ce qu’il appelle Béatitude (aponi et ataraxie). Une fois l’accès à celle-ci assuré, tout ce
qui m’arrive dans ma vie me permettra d’être heureux, même la souffrance car elle ne
m’inquiètera plus. Je serais alors « tel un dieux parmi les hommes », car satisfait de
tout, et jamais troublé. Epicure ne cherche pas tant à me rendre heureux qu’à me
garantir l’accès inconditionnel au bonheur, que je trouverai en suivant ensuite mon
chemin, mes inclinations, mes goûts ou la vie qui m’est donnée.
b Plan de la lettre à Ménécée :
Voyons donc quelle est cette méthode qui doit me permettre de retrouver un bonheur
perdu depuis l’enfance :
Elle se découpe en deux temps :
Une fois le préalable à toute méthode donné, (il faut faire de la philosophie), Epicure
ennonce des conditions négatives au bonheur : ne pas craindre la mort et les dieux.
Elles sont négatives, car la crainte de la mort, comme des dieux sont des passions.
Comme toute passion (cf les stoïciens) elles troublent mon esprit. Elles empèchent
l’exercice de ma raison, qui ne sait plus distinguer quels sont les désirs possibles à
réaliser et qui correspondent à un vrai besoin du corps. Elles favorisent la création de
désirs substitués, où je ne sais plus lesquels sont miens et lesquels sont produits par la
société. Or il est facile de comprendre (cf Freud) que si je passe mon temps à réaliser
des désirs qui ne me sont pas propres, je n’en ressors pas satisfait, je n’y trouve pas
vraiment de plaisir, et il me manque toujours autant de choses. Donc le manque ressenti
m’empèche d’être heureux. Tant que je ressens la crainte, je ne pourrai jamais être
heureux, quoique je fasse. Donc ce sont des conditions préalables à toute recherche du
bonheur.
Pour m’en libérer, Epicure propose un double travail : sur les causes de ces craintes
(l’ignorance, qui favorise l’imagination qu’un mal peut nous arriver). On ne remédie à ces
causes que par la connaissance scientifique. Et une fois ces causes anéanties, sur leur
mise en pratique : il faut comprendre le lien entre l’ignorance d’un événement et mon
comportement, grâce à une flexion personnelle, pour pouvoir corriger ces
comportements volontairement.
Puis Epicure enonce ce qu’il appelle des conditions positives au bonheur : le calcul
des plaisirs et des peines, ou prudence, et la capacité à supporter la souffrance. Ici
encore, ces deux conditions ne signifient pas que je suis heureux immédiatement, mais
leur application doit me libérer de toute souffrance (objective cette fois, et non
imaginée) excessive que mon corps ou mon esprit n’aurait pas la force de supporter, et
qui me prive souvent d’un bonheur acquis, en rendant celui-ci illusoire car non durable .
Ces deux condtions sont plus pratiques : il nous propse des « recettes », une diététique
de vie, qui me rendrait heureux si je l’appliquais. Mais ces recettes s’appuient
implicitement sur des connaissances scientifiques, ce qui légitime leur universalité et
leur efficacité.
Une fois ces quatres remèdes appliqués dans l’ordre, je ne peux plus me dire
malheureux. Donc les plaisirs ou satisfactions que je pourrais rencontrer dans ma vie
suffiront à me rendre heureux. Ils suffisent donc, en supprimant les sources de
souffrances insurmontables à m’éviter d’être malheureux. Mais il faut admettre une
chose : mon bonheur, analogue à celui des dieux, ne sera jamais le même que celui qe
peut ressentir un être parfait, tout puissant et immortel dont je rêve aujourd’hui. Mais ne
souffrant pas trop, je l’admettrai facilement : il ne me manquera plus ce bonheur idéal et
illusoire.
DECOUPAGE DETAILLE DU TEXTE :
A) PREAMBULE : (§ 122)
- Il est urgent de devenir heureux car nous mourrons demain.
- La satisfaction de nos désirs ne nous rend pas heureux. Il faut donc changer de méthode.
-Seule la philosophie peut nous donner le bonheur.
-Il est donc urgent de philosopher, c’est-à-dire non pas acquérir des connaissances, mais
transformer sa vie en la pensant.
Comment faire ? il y a quatre conditions
B) CONDITIONS NEGATIVES DU BONHEUR : (§ 123-127)
Il faut d’abord se libérer de certaines opinions fausses pour ne plus craindre ce qui n’a pas lieu
d’être.
I PREMIERE CONDITION NEGATIVE DU BONHEUR : § 123-124,5
Des dieux : il ne faut pas en avoir d’opinions fausses de façon à ne pas les craindre
a) Il faut rompre avec la religion populaire et savante des platoniciens, car elles sont la
cause essentielle du malheur humain, et reposent sur une fausse piété.
b) Il faut avoir une connaissance exacte de ce que sont les dieux, en se fondant sur la
prénotion que chaque homme possède en son fond.
II DEUXIEME CONDITION NEGATIVE DU BONHEUR : § 124,6- 127,6
De la mort : il ne faut pas en avoir d’opinion fausse de façon à ne pas la craindre
a) Ce que l’on craint dans la mort :
b) Les effets de la crainte de la mort
c) Il n’y a rien à craindre dans la mort : EXPLICATION
C) CONDITIONS POSITIVES DU BONHEUR : (§ 127-135)
Vivre sans crainte, ce n’est pas vivre heureux. Et il ne suffit pas de ne pas souffrir pour l’être,
sinon les huîtres apathiques le seraient, comme les pierres. Comment faire, donc, pour être
effectivement heureux ?
I PREMIERE CONDITION POSITIVE DU BONHEUR : § 127-132
De la vie prudente : il faut réguler ses désirs
a) Des plaisirs : la nature recherche les plaisirs, il faut donc assouvir certains plaisirs. La
question est de savoir lesquels, et de quelle façon : comment distinguer désirs et plaisir .
b) Des désirs :
Tous les désirs ne sont pas naturels. Certains désirs, comme nous l’avons vu, sont les produits de
l’angoisse.
- Il faut donc distinguer différents types de désirs :
vains : à proscrire. Il s’agit d’une part de désirs naturels illimités (manger comme un goinfre…),
d’autre part de désirs ni naturels ni nécessaires.
naturels. Et parmi les désirs naturels, il y a des désirs simples et d’autres nécessaires. Ces désirs
nécessaires peuvent être nécessaires à la vie ( avoir faim, soif), au bien-être du corps (se protéger
du froid …), au bonheur, ou bien-être de l’âme (philosopher. Les désirs naturels simples : ils
visent l’agréable, en tant qu’il n’entraîne aucune douleur (désir sexuel, désir esthétique).
c) Le plaisir selon la nature : L’analyse des désirs grâce à la philosophie nous permet
d’apprécier une recherche du plaisir conforme à notre nature. Le bonheur est alors
possible, dès lors que l’on recherche, c’est-à-dire désire pour le corps l’absence de
douleur et pour l’âme l’absence de crainte.
d) Il faut donc agir de façon à souffrir le moins possible, et faire le calcul des plaisirs et des
peines avant de désirer agir.
e) Enfin, les vertus ne doivent pas être recherchées pour elle-même mais pour le bonheur
qu’elles peuvent apporter, et n’ont de valeur que comme telles.
II DEUXIEME CONDITION POSITIVE DU BONHEUR : § 133-135
Pour ne plus craindre la mort, se libérer de la douleur Il faut nécessairement croire que
certaines choses sont en notre pouvoir, c’est-à-dire que l’homme n’est pas soumis à un destin,
même s’il est soumis à la nécessité, autrement dit, que l’homme est libre dans une certaine
mesure. a) Comment la nécessité est-elle compatible avec la liberté : la théorie du Clinamen
b) Qu’est-ce que le hasard ?
c) La contingence, en tant qu’indétermination rend possible l’action libre.
D) CONCLUSION : LE SAGE (§ 135)
Le sage est heureux car il est dans la vérité, comme un Dieu, il est donc libre et connaît la paix
EXPLICATION DETAILLEE DU TEXTE :
I PREAMBULE : § 122
Ce paragraphe veut montrer deux choses : qui si l’on est malheureux, le seul
outil pour acéder au bonheur, c’est la philosophie.
Et que si je suis malheureux, c’est urgent de s’y mettre que je sois jeune ou vieux.
a) Pourquoi la philosophie est-elle un préalable à la méthode du bonheur ?
On a vu que chez Platon aussi c’est un préalable. Il faut faire de la philosophie, des
maths, de la bio… pendant un nombre d’années indéfini. Dans ce cas, je ne suis pas
prêt d’être heureux.
Mais ici, il faut entendre cela en un sens différent.
La philosophie n’a aucun intérêt pour Epicure du point de vue de la méthode de penser
qu’elle permet d’acquérir, raison pour laquelle il faut philosopher chez Platon. Et l’intérêt
des connaissances qu’apporte la philosophie est limité.
La philosophie ici est un outil de la raison qui m’aide à juger, mais cette philosophie ou
réflexion ne demande pas de connaissances préalables, seulement de distinguer le vrai
de l’opinion, et de douter de ce qui semble évident. Et cette réflexion repose sur un
contenu scientifique (aujourd’hui on dirait connaissance physique et biologique) qui
fonde les bases de mes raisonnements « de bon sens »
En fait, on comprend bien, comme il le dit dans les deux autres lettres (lettre à
Herodote et lettre à Pytoclès), que seules quelques connaissances faciles à apprendre
et que je n’ai même pas besoin de pouvoir démontrer absolument nous intéressent :
celles qui ont un rapport avec notre vie quotidienne, et dont l’ignorance est cause de
passion, c’est-dire oblige l’imagination à inventer des explications farfelues qui
légitiment la peur.
Les connaissances intéressantes sont ainsi de deux types :
-celles qui me permettent de me connaître moi-même, comment fonctionne mon corps,
(donc surtout ce qu’on appellerait aujourd’hui la biologie), car sans elles, la consicence
ne peut pas savoir de quoi j’ai besoin objectivement.
-celles qui me permettent d’expliquer des phénomènes extraordinaires, qui me
surprennent et que je ne comprends pas spontanément grâce à l’exprérience sensible,
ou aux prénotions, comme la mort, les phénomènes célestes, ou météorologiques
(foudre, séismes, inondations …)
Ces connaissances sont construites par des savants, qui passent leur vie à les
construire. Mais pour être heureux, je n’ai pas besoin de refaire le chemin qu’ils ont fait.
Je peux me contenter des résultats, et de quelques éléments de preuves élémentaires
qui m’aident à les comprendre, qui les rendent vraissemblables et m’aident à interpréter
mon expérience sensible, sinon fiable.
Ainsi, je peux apprendre la philosophie en quelques heures pour Epicure (le
temps de lire et de comprendre les deux lettres qui précèdent celle à Ménécée), et
ensuite, j’aurais qu’à réfléchir lorsque je devrais agir. Ces connaissances sont faciles
d’accès, ne demandent pas d’efforts inconsidérés, ne sont pas réservés à une élite qui
n’a rien d’autre à faire, et m’aideront à me libérer de mes craintes comme nous le
verrons.
b) Pourquoi est-il urgent de philosopher qu’on soit jeune ou vieux ?
Pour les mêmes raisons qui conduisent Epicure à réduire l’apprentissage de la
philosophie au strict nécessaire pour être heureux :
L’homme est mortel, c’est un fait indéniable, et comme Epicure est matérialiste (il pense
que tout ce qui existe est composé de matière, en l’occurrence d’atomes), il est
convaincu que les corps ne survivent pas à la mort : l’esprit n’est pas une autre chose
qu’un organe du corps. Le corps mort, l’esprit ne vit plus. Il l’explique clairement lorsqu’il
montre pourquoi il ne faut pas crainde la mort. Donc nous n’avons qu’une seule vie
pendant laquelle il faut atteindre le bonheur, qui est naturellement l’objectif de chacun.
Et - comme le souligne Pascal- le drame, c’est que nous ne savons jamais quand nous
allons mourir.
Donc il est urgent d’être heureux avant de mourir, si c’est l’objectif de notre vie.
On ne se reprochera jamais d’avoir été heureux plus longtemps que prévu. Par contre
tout homme voyant la mort arriver avant d’avoir été heureux, car la méthode choisie,
comme celle de Platon est trop longue pour la vie qui lui est impartie, le regrettera.
Inversement, les hédonistes, qui choisissent de vivre au jour le jour, sans tenir compte
de la durée possible de leur vie, peuvent se retrouver confrontés à la mort en n’étant
plus heureux car, en mourrant vieux, ils doivent assumer les conséquences de leurs
choix inconscients plus jeunes (maladie, accident, prison …). Donc comme je ne sais
pas quand je vais mourir, il faut absolument pour ne rien regretter (le regret est une
passion qui m’empèche d’être heureux), que je me dépèche d’être heureux, et que je le
sois le plus longtemps possible.
Mais dans ce cas, on peut considérer que Epicure devrait s’adresser à tous les
hommes, et pas seulement aux jeunes ou aux vieux. Pourquoi n’est-ce pas urgent pour
tout homme de faire de la philosophie pour être heureux ?
Il y a des hommes actifs heureux, parce qu’ils ont accomplis leurs rêves, sont
occupés par leurs activiés l’adulte ni jeune ni vieux est soit déjà heureux, et dans ce
cas n’a pas besoin de méthode pour l’être, ou n’en ressent pas le besoin. Celui qu’il
faudrait convaincre, c’est celui qui, trop occuppé par ses affaires, voit bien qu’il n’est pas
très heureux, mais a trop à faire pour s’en inquiéter. Mais celui-ci n’est plus disponible
pour mettre en place une méthode du bonheur, il n’a pas le temps, il est trop dépendant
du divertissement.
Et l’adulte malheureux ? On peut considérer qu’il s’inquiète déjà d’une manière d’être
heureux pour remédier à ses difficultés. Donc il n’est pas à convaincre.
Les jeunes et les vieux sont donc ces individus qu’une exhorte doit suffire à convaincre
et qui ont le plus besoin d’une méthode de bonheur. Reste qu’ils ont besoin d’une
méthode légèrement différente, car ils souffrent de choses différentes :
-Le jeune ne sait rien. Pourquoi commencer par cette méthode du bonheur ? N’a-t-il rien
de plus urgent à faire ? Il doit acquérir une bonne méthode du bonheur pour deux
raisons. La première raison, c’est qu’étant jeune, il n’a pas encore de convictions bien
arrétées, mais plutôt des habitudes de pensées, dont il peut encore facilement se
défaire. Il lui sera alors facile de se libérer des opinions infondées qui suscitent la
crainte. Et parce que, sans expérience, il ressent le besoin d’outils pour comprendre le
monde et savoir coment agir : son ignorance peut l’inquiéter. Il a besoin de guide pour
réussir sa vie. Donc la méthode d’Epicure a un double intérêt : elle va l’aider à construire
des opinons vraies, et lui évitera de développer des passions sans fondement, et par
ailleurs, elle lui permet de régler sa vie pour avoir l’assurance d’accéder au bonheur, ce
qui le libère de l’angoisse de l’échec.
1 / 23 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !