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G10 : UN ETAT ET UN ESPACE EN RECOMPOSITION : LA RUSSIE
Introduction
La Russie actuelle est née en 1991 du démantèlement de l’URSS. La Russie qui, bien que ramenée, à l'ouest, à ses frontières du début du
XVIIème siècle, demeure néanmoins le plus vaste État du monde (17 075 400 km2).
Etat considéré alors comme développé. Ce nouvel Etat, engagé dans un long processus de recomposition, connaît les problèmes du re-
développement.
Cette nouvelle Russie s’est engagée depuis sa création et même depuis la perestroïka dans la voie de la libéralisation tant politique
qu’économique.
Cette transition est ressentie par nombre de Russes comme un véritable traumatisme, le passage brutal à l’économie de marché s’étant
révélé extrêmement difficile : des pans entiers de l’économie s’écroulent, les structures sociales d’ « ancien régime» disparaissent, le
chômage et la misère se développent. L’image ainsi véhiculée par les médias est celle d’un pays au bord de l’abîme, remisé au rang d’un
pays en voie de développement.
Cependant, la Russie montre des signes certains de redressement depuis 1999 et bénéficie d’atouts importants que la nature et l’héritage
de l’Union soviétique lui ont offerts : espace immense dode ressources considérables (ressources qui sont en grande partie le moteur de
la reprise économie des dernières années), population nombreuse et hautement qualifiée, potentiel économie, militaire et diplomatique de
poids.
La Russie peut apparaître ainsi comme une « grande puissance pauvre » = une puissance n’ayant pas aujourd’hui les moyens suffisants
pour exprimer toute sa vitalité et sa force.
Problématique :
Quelles sont la place et l’influence de la Russie dans l’espace mondialisé ? Sur quelle base la Russie reconstruit-elle son développement ? Comment
les réformes recomposent-elles le territoire russe ?
I- Un Etat en pleine mutation
la fin du communisme en Russie a signifié la fin d’un régime politique, mais également la fin d’un régime économique et social
La perestroïka entame la transition d’une économique socialiste vers une économie de marché, transition difficile à ses débuts, mais dont
les résultats sont aujourd’hui très prometteurs.
Mais surtout rupture brutale avec l’économie socialiste à partir de 1992 (liberté de commerce et des prix)
installation définitive de l’économie de marché depuis 1997 (autorisation de vente des terres agricoles, demande d’adhésion à l’OMC)
A- La Russie : une fédération multinationale
Fédération complexe mise en place par le traité de la Fédération du 31 mars 1992 : organise l’Etat en 89 « sujets » égaux en droits
o 21 républiques,
49 régions (oblast),
6 territoires (kraï),
2 agglomérations urbaines (Moscou et Saint-Pétersbourg)
11 régions ou districts autonomes.
Ce traité a été signé par toutes les parties sauf la Tchétchénie.
La Russie étant un Etat fédéral, ses « sujets » bénéficient d’une autonomie importante à laquelle ils sont très attachés.
De son côté, le pouvoir central veut maintenir son autorité sur l’ensemble du pays. En 2000, Vladimir Poutine a nommé 7 représentants du
Président. Pour contrôler ces entités
De, plus la Fédération de Russie, c’est 134 ethnies différentes dont seules 32 ont un territoire national
Domination des slaves et en particulier des Russes (83 % = 120 millions) puis loin derrière les Tatars (5.5 millions) et les Ukrainiens (4
millions)
On trouve des Russes partout.
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La domination des Russes est plus ou moins bien vécue par les différentes minorités, notamment par celles qui souhaitent davantage
d’autonomie : en effet, les Russes peuvent aussi avoir un comportement nationaliste, notamment vis-à-vis des Caucasiens qu’ils appellent
les « culs-noirs » => importance des revendications nationalistes (la Tchétchénie notamment).
Les textes fondamentaux de la Constitution de 1993 garantissent les libertés fondamentales.
La transition démocratique est très imparfaite. Le contrôle des médias par l’Etat est étroit et la vie politique est étouffée par le parti
présidentiel. L’Etat contrôle la nomination des gouverneurs de toute la Fédération de Russie et renationalise les entreprises énergétiques
considérées comme stratégiques.
B- Le bilan de l’ouverture à l’économie de marché
1. Un bilan immédiat négatif
1er point : Une économie en déroute
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o écroulement des productions et chute du PIB :
- la production industrielle totale diminue de plus de la moitié, l’industrie lourde résiste à peu près, mais les industries de biens intermédiaire et
de consommation s’effondrent (ex : textile et confection) ainsi que le CMI (complexe militaro-industriel), qui a connu une baisse de 80% de sa
production et de 65% de ses emplois.
- la production agricole a baissé aussi de moins de la moitié : les légumes et les pommes de terre résistent (produits essentiellement dans les
lopins et constituant pour beaucoup la base de l’alimentation), mais les céréales, la betterave à sucre et surtout l’élevage s’effondrent.
o chute des investissements (baisse de ¾)
o situation financière catastrophique (effondrement du rouble et inflation galopante).
o D’où à la fin des années 90, la société russe semble minée par les pratiques mafieuses et celles relevant du système
D :
- affirmation d’une économie parallèle qui a pu constituer, selon les estimations, entre 30 et 50% du PIB et qui a profité à la criminaliorganisée
(évasion des capitaux à l’étranger, opérations de blanchiment et explosion de la corruption (7 fonctionnaires sur 10 seraient corrompus) ;
généralisation du troc à tous les niveaux, l’un des seuls moyens pour la pop de faire face aux difficultés de la vie quotidienne.
- apparition du chômage, phénomène jusqu’alors inconnu en Union Soviétique ; facteurs explicatif : le sureffectif de l’époque soviétique (surtout dans
l’industrie) ; progression très rapide jusqu’en 1998 (9 millions soit 14% des actifs) ; chômage très sélectif (surtout les femmes et les jeunes, surtout
dans les régions périphériques, mais peu à Moscou)
2ème point : Les facteurs de cette déroute
o les effets de l’éclatement de l’URSS (rupture pour de nombreux secteurs de partenariats)
o les effets de la mise en place de l’économie de marché (concurrence accrue, baisse des commandes et des subventions
publiques) et d’un outil industriel soviétique inadapté, obsolète, aux effectifs pléthoriques
o les effets de l’incertitude politique des années 90 (disparition de l’investissement étranger)
2. Un net redressement depuis 1999
1er point : Un rétablissement spectaculaire 2 et 3p311
o relance de la production et progression du PIB :
- le principal secteur bénéficiaire est le secteur énergétique qui représente en 2002 plus de 20% du PIB de la Russie
- l’agriculture participe également à la relance de l’économie (entre 1998 et 2001, la production a augmenté de 20% => exportations de céréales, pour
la première fois dans l’histoire de la Russie
o une économie privée de + en + concentrée :
- privatisation réussie dans le domaine industriel et tertiaire (près de 95% des entreprises industrielles et des commerces relèvent du privé)
- privatisation plus discutable dans l’agriculture (maintien d’une gestion collective dans le cadre des nouvelles exploitations)
o une concentration du capital de + en + importante : affirmation des oligarques (définition p310): gros actionnaires principaux
bénéficiaires des privatisations « contre espèces » entre 1994 et 1997)
o progression constante du secteur tertiaire
o secteur monétaire et financier en voie d’assainissement (stabilisation du rouble, diminution de l’inflation, reprise de
l’investissement)
o redressement du commerce extérieur mais il reste particulièrement tributaire des prix du pétrole
o baisse du chômage (autour de 8% des actifs en 2002)
o augmentation des revenus, progression des salaires et des retraites, mais les inégalités sociales demeurent très fortes
2ème point : Les fondements du redressement
o les facteurs politique : une stabilité retrouvée : Poutine (homme fort, ancien président mais reste au pouvoir sorte de « super » 1°
ministre)
o les facteurs financiers (dévaluation du rouble, augmentation du prix du pétrole)
o les facteurs économiques (une plus grande facilité à la création d’entreprise, relance de la conso des ménages)
bilan encourageant, même si la reprise demeure fragile
transition économique accompagnée de profonds bouleversements de la société, qui apparaît à bien des égards
traumatisée par ces multiples transformations.
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3ème point : Aujourd’hui, à la recherche d’un nouveau modèle :
o Après avoir enregistré une récession record depuis l’effondrement du bloc soviétique, le Russie a retrouvé en 2010 une croissance
de l’ordre de 5%. L’inflation mal chronique de l’économie russe a été maîtrisé et les déficits publics qui s’étaient t creusés en 2009
ne devraient pas dépasser 3% du PIB. Cependant l’économie russe reste rongée par la corruption et demeure la plus fragile des
BRIC.
o Délaissée à la fin de la période soviétique, l’agriculture est revenue au cœur des priorités gouvernementales. Un plan quinquennal
a été mis en place avec des objectifs ambitieux : atteindre l’autosuffisance alimentaire alors que le pays doit acheter à l’étranger
30% de sa viande, 20% de ses produits laitiers et 70% de ses fruits. Le gouvernement a favorisé de grands groupes pour
développer le secteur. La Russie tente aussi de redevenir un grenier à blé en exploitant la totalité de ses 220 millions d’hectares
cultivables (10% des terres agricoles mondiales), dont beaucoup restent inutilisées, et en accroissant ses rendements, qui sont
par exemple, trois fois plus faibles que ceux de l’agriculture française. A terme le pays ambitionne de doubler sa production et de
devenir le premier exportateur mondial de blé.
o L’industrie qui représente plus d’un tiers du PIB repose encore sur les infrastructures de l’ère soviétique et reste traditionnelle,
spécialisée dans l’exploitation minière et les industries lourdes, comme la construction mécanique ou la production d’aluminium.
En 2009, la production industrielle a chude 11%, une première depuis le début des années 2000. Le président de l’Union des
Métallurgistes a par exemple reconnu que faute d’investissements, la branche n’était plus compétitive. Et malgré la reprise de
nombreuses industries restent en crise. Le gouvernement tente de dynamiser de nouveaux secteurs, comme celui de l’automobile.
AvtoVaz, fabricant des Lada et plus grand constructeur automobile du pays, a été sauvé l’automne. En échange d’une aide accrue
de l’Etat russe, Renault, entré dans le capital en 2008, s’est engagé à investir 240 millions d’euros en technologie et en matériel.
o La crise a révélée la principale faiblesse de l’économie russe : sa trop grande dépendance aux hydrocarbures, qui représentent
60% des exportations. Dès que les cours mondiaux ont baissé, l’économie du premier exportateur mondial de gaz et le deuxième
de pétrole s’est écroulée. En six mois le prix du brut de l’Oural a par exemple été divisé par quatre et selon les estimations des
économistes, une baisse de 20 dollars du prix du baril entraîne automatiquement une perte de 4 points de croissance du PIB
russe. Le géant Gazprom, moteur de l’économie et arme diplomatique du Kremlin, a vu ses bénéfices chuter. Le fond de réserve
russe, alimenté par les revenus issus des hydrocarbures, a permis des mesures de relance pour lutter contre la crise sans recourir
à un prêt du FMI, mais il a fondu d’un tiers en quelques mois et menace de s’épuiser. Pour augmenter sa production
d’hydrocarbures et trouver de nouveaux débouchés, Moscou multiplie les projets de gazoducs et d’oléoducs. Les gazoducs North
Stream, qui relliera l’Allemagne via la Baltique, et South Stream, qui traversera la mer Noire, la Bulgarie et l’Italie, devraient entrer
en service d’ici à 2025. Ils permettront de faire transiter 100 milliards de m3 par an vers l’Europe, en contournant l’Ukraine. Un
oléoduc d’une capacité de 15 millions de tonnes de brut par an est en construction vers la Chine, devenue premier partenaire
commercial de la Russie.
o Le pays a été également confronà un assèchement des liquidités et de nombreux pans de son économie très endettés ont été
asphyxiés. La raréfaction des crédits a stoppé net la croissance des secteurs de la construction, de l’hôtellerie ou des industries de
transformation. Les banques et les oligarques ont recourir aux marchés internationaux pour financer leurs investissements et
ont levé à l’étranger plus de 400 milliards de dollars. Le secteur bancaire a néanmoins résisté à la crise. Relativement concentré
(Sberbank) la plus grande banque d’Europe orientale détient 40% des dépôts russes, il a bénéficdes aides de l’Etat. La banque
centrale russe a elle débloquée 600 milliards de dollars pour relancer le marché du crédit.
o Face à cette crise, le changement de modèle économique est devenu un enjeu vital pour le Kremlin. Dimitri Medvedev a fait de la
modernisation du pays une priorité pour sortir d’une économie basée sur les rentes issues des hydrocarbures. Les nouveaux
domaines privilégiés sont la production d’énergie, les technologies spatiales et de l’information et le développement de la
recherche médicale. Le gouvernement tente ainsi de fonder, sur les ruines de l’industrie soviétique, un grand constructeur national
d’aéronautique et Vladimir Poutine ont annoncé la construction de 26 nouveaux réacteurs nucléaires d’ici 2020, soit presque
autant que l’URSS en avait bâti en soixante-dix ans pour devenir un leader mondial du nucléaire civil. Le premier ministre a
également appelé les oligarques a participé à l’efforts de relance et de diversification. Pris au piège de la crise après avoir bâti
leurs empires grâce à des prêts gagés sur la valeur de l’action de leur entreprise, ils ont néficiés d’aides du Kremlin et sont
soumis au pouvoir politique. Ainsi le magnat des matières premières, Viktor Vekselberg, a été chargé de fonder un pôle de
nouvelles technologies, s’inspirant de la Sillicon Valley, dans les environs de Moscou. Et plusieurs grands groupes participent aux
travaux du site des jeux olympiques d’hiver de 2014 à Sotchi. Environ 12 milliards d’euros de capitaux ont déjà été investis,
presque de 10 fois plus que le coût global de ceux de Vancouver.
o L’économie russe reste ainsi sous la coupe de grands groupes proches du pouvoir et d’entreprises d’Etat, qui tiennent des
secteurs clés comme ceux de l’armement, de l’énergie atomique ou des nano technologies. Le président a estimé que les
conglomérats publics devaient à termes disparaître mais le plan de privatisation prévu pour 2010 est moins massif qu’annoncé.
L’Etat ne cède que des parts des assurances, des compagnies maritimes ou des aéroports qu’il détient tout en y restant
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majoritaire. En revanche il a privatisé ses compagnies riennes régionales pour les intégrer à la compagnie nationale Aeroflot et
créer ainsi un géant du secteur.
o Moscou cherche aussi à relancer la consommation intérieure, qui a chuté de plus de 8% en 2009, et a augmenté les salaires des
fonctionnaires et les pensions de retraites. Grâce au plan de relance qui s’est élevé à presque 7% du PIB, le taux de chômage a
été contenu à 8,2% et le taux de pauvreté est resté stable aux alentours de 15%. Et pour la première fois depuis la fin de l’URSS,
avec l’augmentation du taux de natalité et la baisse de l’émigration, la population russe n’a pas diminué.
C- Une société profondément bouleversée
1. Une crise démographique sévère
La fédération de Russie demeure une grande puissance démographique : 142 500 000 millions d’habitants en 2008.
D’importants contrastes de peuplement
2p307 et questions 2 et 3
2. La majorité de la population russe vit à l’Ouest, en Russie d’Europe. Dans la partie asiatique le peuplement se limite le long du transsibérien de
façon de plus en plus discontinue à l’Est. La carte montre surtout l’importance spatiale des vides ou des régions peuplées situées majoritairement au
Nord et à l’Est en Sibérie.
3. la carte 1 montre des facteurs naturels qui contribuent à expliquer la répartition de la population russe : froid extrême, reliefs élevés… inversement
la population se concentre pour l’essentiel sur les zones cultivables. Se distinguent également la mise en valeur des ressources du sous-sol : Oural et
foyers de peuplement sibérien et le rôle des fleuves de Sibérie.
La carte 2 montre un autre facteur majeur : l’urbanisation et la métropolisation du territoire russe
Doc. 3 p. 316
Comme dans les pays développés, la natalité et la fécondité de la Russie diminuent depuis les années 60 (indice de fécondité = 1.3 enfant par
femme), mais la Russie présente des caractères démographiques spécifiques.
le bilan naturel est négatif depuis 1992 :
- taux de natalité = 10 (en baisse constante depuis 1990)
- taux de mortalité = 15 (en hausse constante depuis 1990)
l’accroissement naturel est négatif depuis 1992
la population russe ne cesse de décliner (- 6.3 % en 1999) : la Russie comptait 148. millions d’habitants en 1992, elle n’en a
plus que 145 millions en 2001, 142 500 000 en 2008 et 141 800 000 aujourd’hui.
l’espérance de vie diminue depuis 1990 :
- pour les hommes, on est passé de 64 ans en 1990 à 59 ans en 2001 ; 58,9 ans en 2005 pour les hommes et 57,2 pour la population rurale alors
qu’elle est de 61 ans en Inde ;
- pour les femmes, on est passé de 74.3 ans en 1990 à 72.3 en 2001 ; 72,5 ans en 2005.
les raisons sont multiples :
la hausse du taux de mortalité provient en partie du vieillissement de la population.
baisse du niveau de vie (crise due au passage à l ‘économie de marché => près de la moitié de la population vit sous le seuil
de pauvreté)
alcoolisme, maladie cardio-vasculaire.
société plus violente (montée de la criminalité)
détérioration de la protection sociale et de l’infrastructure sanitaire [exemple : la mortalité infantile augmente depuis les
années 70 : 1,7% en 1990 il est en 2004 à 1,1% ce qui montre les progrès réalisés mais il est encore trois fois plus élevé
que les taux de la France (0,4%) ou du Japon (0,3%)]
2. L’aggravation des inégalités sociales
2p316
Paupérisation de la majeure partie de la population à cause de
- l’inflation (cela touche surtout les personnes recevant un salaire fixe, victimes de l’inflation : militaires, enseignants, fonctionnaires en général
et retraités, chômeurs et mendiants de + en + nombreux).
- la fin des « acquis sociaux » et des solidarités publiques (crèches, éducation et soins gratuits, logements et moyens de transport bon
marché)
généralisation du troc à tous les niveaux, l’un des seuls moyens pour la population de faire face aux difficultés de la vie quotidienne
petite frange de la société de plus en plus riche : plus d’1/3 des richesses du pays appartiennent aux 10% les plus riches.
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