2007 - Belgique (uk)

publicité
LIDC CONGRESS 2007 – BELGIAN REPORT
Question B: Ambush-marketing
Belgian reporter:
Grégory Sorreaux
Lawyer
Simont Braun
Introduction
The expression ambush-marketing was coined by Mr. Jerry Welsh when he was working for
American Express. A typical example of ambush-marketing was the campaign by American
Express during the 1994 Winter Olympics sponsored by Visa: "If you are travelling to
Lillehammer, you'll need a passport, but you don't need a visa".
Initially conceived and depicted as very competitive type of marketing and a way to outsmart
lazy sponsorship, ambush-marketing was contested by international organisations such as the
CIO, FIFA, and similar organizers of world or regional events, who labelled them as
“parasite marketing”, “gorilla marketing”, “piggyback marketing”, etc. In their view,
ambush-marketing was a way for competitors to take advantage of the investments made by
the sponsors of such events.
A distinction is usually made between marketing methods which directly infringe trademark
rights or copyrights (reference or usage of the trademark or images of the official sponsor) or
general and undisputed principles of unfair competition (untrue statements as its quality as
an official supplier or sponsor) and more subtle marketing practices the qualification of
which as unfair is more difficult or questionable. It is to address those more subtle practices
that countries tempted to organise international sport events adopted specific provisions
protecting the official sponsors of such events. These legislations gave rise to controversies
as to their utility, effectiveness and efficiency.
The main question is therefore whether or not there is a need to adapt unfair competition
legislation to ambush-marketing and whether such idea is appropriate from an economic
standpoint. Isn't the scope of the current legislation (in particular unfair competition)
sufficient to tackle such practices when unfair or does it need to be buttressed by the
introduction of specific provisions, prohibiting certain ambush-marketing practices or
protecting names, logos, images, beyond the usual scope of trademark and copyright laws?
Question B: Ambush-marketing
Page 2
Legal questions
1
Has your country enacted legislation specifically aimed at prohibiting ambushmarketing? Or are there (concrete) plans to enact such legislation?
A l’heure actuelle, il n’existe en droit belge aucune législation spécifique visant à lutter
contre l’ambush marketing.
Un projet en ce sens n’a d’ailleurs jamais été déposé au Parlement, malgré le fait que la
Belgique accueille régulièrement des événements sportifs ou culturels de dimension
internationale susceptibles de donner lieu à des pratiques d’ambush marketing, comme le
championnat d’Europe de football « Euro 2000 », le Grand prix de Formule 1 de SpaFrancorchamps, le meeting d’athlétisme « Mémorial Vandamme », des courses cyclistes,
des festivals de musique,…
2.
What are the interests protected by the anti ambush-marketing provisions adopted in
your country?
Cette question n’est pas applicable à la Belgique, à défaut de législation spécifique
destinée à lutter contre l’ambush marketing.
3.
In the absence of specific ambush-marketing provisions in your country or in addition
to such specific anti ambush-marketing provisions, are there other legal grounds on
which such practices can be prohibited? Are there, for instance, special property rights
for sport events or are the current unfair competition law or trade mark principles or
other principles based on civil law or else, applicable to ambush-marketing?
Can you describe all the provisions that could be applicable to ambushmarketing situations? Is there a criterion or test common to all these different
provisions?
a.
Hors les cas d’atteinte à un droit de propriété intellectuelle, la jurisprudence
belge n’a pas eu à notre connaissance à traiter, à ce jour, de cas d’ambush marketing
entendu dans le sens d’une technique de marketing par laquelle une entreprise ne faisant
pas partie des sponsors officiels d’un événement tente d’y associer son image, son nom
ou sa marque.
Question B: Ambush-marketing
Page 3
Les raisons sont diverses. L’une d’elles tient sans doute au fait que la pratique
incriminée sera bien souvent de courte durée, ce qui rend difficile la saisine du tribunal
et l’obtention d’une mesure judiciaire de nature à mettre fin à cette pratique en temps
utile (D. Van Engelen, S. Kaak, « Ambush marketing – party crashing voor
gevorderden », BMM Bulletin, 2006/2, p. 61 ; voir également point 3.2. ci-dessous).
Par ailleurs, l’arsenal juridique existant sera parfois impuissant à lutter contre
l’ensemble des cas d’ambush marketing qui se présentent, à défaut de législation
spécifique à de telles pratiques.
Les bases juridiques qui peuvent être utilisées sont cependant multiples. Elles varient en
fonction de la nature de la technique de marketing utilisée.
b.
En premier lieu, il convient de mentionner les législations spécifiques
pertinentes en matière de propriété intellectuelle. Tout comme dans la plupart des autres
pays, celles-ci ne permettent de lutter que contre les formes les plus sommaires
d’ambush marketing. Compte tenu de l’objet de la présente contribution, nous nous
limiterons à un bref aperçu de celles-ci, envisagées dans la perspective de l’étude de
l’ambush marketing.
La loi du 30 juin 1994 sur le droit d’auteur et les droits voisins assure la protection des
œuvres « littéraires ou artistiques ». Conformément à l’énumération non limitative
contenue à l’article 2 de la convention de Berne (actes de Paris et de Bruxelles) cette
expression s’entend toutefois de manière large. Outre la condition de mise en forme,
l’œuvre doit satisfaire à la condition d’originalité pour être protégée. Suivant la
jurisprudence de la Cour de cassation, l’originalité signifie que la création doit porter
l’empreinte de la personne de son auteur, la Cour considérant qu’ « il faut, mais il suffit
qu’elle soit l’expression de l’effort intellectuel de son auteur, condition indispensable
pour donner à l’œuvre le caractère d’individualité nécessaire pour qu’il y ait création »
(Cass., 27 avr. 1989, Pas., I, p. 908 ; Cass., 25 oct. 1989, Pas., 1990, I, p. 239 ; Cass., 2
mars 1993, Ing.-Cons., 1993, p. 145).
En particulier, notons que les œuvres d’architectures peuvent être protégées pour autant
qu’elles soient originales, tout en tenant compte des limites inhérentes à la nature
fonctionnelle de l’œuvre (A. Braun, E. Cornu, « Le droit moral de l’auteur », A.L.A.I.,
1993, pp. 377-379 ; F. Brison, « Architectuur : de assepoester van het auteursrecht »,
R.W., 1991, p. 313 ; A. Berenboom, « Le nouveau droit d’auteur », 2e éd., Larcier, 1997,
p. 71, n° 43). Cette protection pourra porter tant sur les plans originaux que sur l’édifice
lui-même, tels que stades ou autres bâtiments.
Question B: Ambush-marketing
Page 4
Au titre du droit des marques, nous mentionnerons le règlement n° 40/94 du Conseil de
l’Union Européenne sur la marque communautaire ainsi que la Convention Benelux en
matière de propriété intellectuelle du 25 février 2005 (ci-après « CBPI »). Cette dernière
remplace l’ancienne Loi Uniforme Benelux sur les Marques du 19 mars 1962.
Outre la protection classique offerte aux titulaires de marques enregistrées dans le
Benelux contre l’usage d’un signe utilisé à titre de marque, la CBPI permet au titulaire
de marque de s’opposer à l’usage d’un signe à des fins autres que celles de distinguer
des produits ou des services, lorsque l’usage de ce signe sans juste motif tire indûment
profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque ou leur porte préjudice. Le
législateur Benelux a ainsi fait usage de l’option qui lui avait été offerte par l’article 5, §
5 de la directive du 21 décembre 1988 du Conseil de Communautés Européennes
rapprochant les législations des Etats membres sur les marques.
Dans certains cas, cette protection élargie de la marque ordinaire pourra offrir un moyen
d’action efficace à la victime d’ambush marketing, puisqu’elle permet, sous certaines
conditions, de s’opposer à l’usage d’un signe distinctif d’une autre nature que la marque
(nom de domaine, nom commercial, dénomination sociale,…), mais également à
l’usage de la marque comme marque d’appel (cf. notamment l’affaire « 501 jeans à 501
francs, Comm. Nivelles, 29 mai 1998, Ing.-Cons., 1998, p. 256), dans une scène de film
(Amsterdam, 18 déc. 1975, B.I.E., 1976, p. 214), comme titre d’un livre (Prés. Arr.
Amsterdam, 27 nov. 1996, B.I.E., 1987, p. 202 ; cette affaire peut être rapprochée de
l’affaire française relative à l’ouvrage « les 24 heures du Mans », Comm. Nanterre, 12
déc. 2002, cité par C. Caron, A propos de l’appropriation de l’événement sportif par le
droit de la propriété intellectuelle),...
c.
En droit belge, les mécanismes contractuels pourront également permettre de
prévenir et d’assurer la cessation de pratiques d’ambush marketing. Il n’entre pas dans
l’objet de notre étude d’opérer un relevé exhaustif des différents contrats qui peuvent
être conclus entre le détenteur des droits sur l’événement et les cocontractants
potentiels. Ces contrats sont multiples et varient en fonction de la personne du
cocontractant, laquelle peut être l’hôte de l’événement, les spectateurs, les participants,
les médias, les sponsors,…Ces mécanismes contractuels constituent le moyen le plus
efficace de contrôler les activités publicitaires et de marketing faites autour d’un
événement et dans l’enceinte où celui-ci se déroule. Il peut s’agir de licences de
marques concédées aux sponsors officiels, de règlements limitant l’usage de signes
distinctifs par des artistes, athlètes, fédérations nationales ou par des spectateurs, de
règlements interdisant la revente de billets ou leur utilisation à des fins commerciales,
de contrats avec des organismes de radiodiffusion prévoyant un droit de priorité au
profit des sponsors pour les programmes publicitaires diffusés pendant, avant ou après
la retransmission de l’événement,…
Question B: Ambush-marketing
Page 5
Nous nous bornerons simplement à relever que ces contrats ne pourront porter atteinte
aux dispositions impératives et d’ordre public applicables en droit belge. En matière
d’ambush marketing, celles-ci sont a priori très peu nombreuses. A cet égard, nous
citerons simplement les décrets flamands coordonnés du 4 mars 2005 relatifs à la
radiodiffusion et à la télévision. Ces décrets limitent la liberté contractuelle des
organisateurs d’événements en accordant aux organismes de radiodiffusion relevant de
la Communauté flamande le libre accès aux événements ayant lieu dans la région
linguistique néerlandophone, le droit de faire des enregistrements et le droit de diffuser
de brèves informations dans les journaux et les programmes d'actualités régulièrement
programmés.
Les mécanismes contractuels seront toutefois impuissants à régler l’ensemble des
pratiques d’ambush marketing susceptibles d’être commises – comme c’est souvent le
cas - autour du lieu de l’événement, en particulier lorsque l’organisateur de celui-ci ou
son cocontractant ne seront pas propriétaires ou locataires de l’endroit où les pratiques
incriminées sont commises.
d.
Il convient de mettre en parallèle avec les mécanismes propres au droit des
contrats la théorie dite de la tierce complicité à la violation d’une obligation
contractuelle. Dans certaines conditions, cette théorie pourra en effet permettre
d’assurer le respect par des tiers des droits contractuels consentis par l’organisateur de
l’événement ou par des sponsors officiels.
Cette théorie permet ainsi d’engager la responsabilité d’un tiers complice de la violation
des obligations contractuelles d’autrui. Elle constitue une exception au principe de la
relativité des conventions inscrit à l’article 1165 du Code civil, selon lequel « les
conventions n’ont d’effet qu’entre parties contractantes ; elles ne nuisent point aux tiers
(…) ».
Suivant une jurisprudence et une doctrine bien établie, cette théorie suppose, pour
pouvoir s’appliquer la réunion de plusieurs conditions :
-
une obligation contractuelle préexistante qui soit valable ;
-
cette obligation n’a pas été exécutée par son débiteur ;
-
le tiers a participé consciemment à la violation de cette obligation
contractuelle ;
Question B: Ambush-marketing
-
Page 6
le tiers complice a connaissance de cette obligation ou est supposé la
connaître (cf. notamment Cass., 22 avr. 1983, R.W., 1983-84, p. 427, note
Dirix ; R.C.J.B., 1984, p. 359, note Merchiers ; J.-L. Fagnart, « La tierce
complicité et les usages honnêtes en matière commerciale », R.D.C., 1989,
pp. 481-482 ; Y. Merchiers, « La tierce complicité de la violation d’une
obligation contractuelle. Fin d’une incertitude », R.C.J.B., 1984, p. 379).
Cette théorie est susceptible de trouver application dans de nombreux domaines. Les
condamnations prononcées par les tribunaux en reflètent la diversité : violation de
clauses de prix imposés, violation de conventions d’exclusivité de vente ou d’achat, de
système de distribution sélective,…
e.
Pour le surplus, il n’existe pas, en droit belge, de protection de l’événement
sportif par le biais du droit à l’image. En effet, on considère que le droit à l’image ne
porte que sur la représentation d’une personne physique reconnaissable et n’appartient
qu’à celle-ci ou à ses ayants droit. On ne reconnaît donc pas de protection, au bénéfice
de l’organisateur d’un événement, sur l’image de cet événement (P. Van den Bulck, M.
de Bellefroid, « Quel régime juridique pour l’ambush marketing », R.D.C., 2007, p.
221).
f.
Comme dans de nombreux pays, le droit de la propriété intellectuelle et les
mécanismes contractuels envisagés ci-dessus ne permettront pas de lutter contre
l’ensemble des formes d’ambush marketing. Souvent, la victime de formes plus
avancées d’ambush marketing devra recourir aux dispositions visant à lutter contre la
concurrence déloyale, qui sont prévues dans la loi du 14 juillet 1991 sur les pratiques du
commerce et l’information et la protection du consommateur (ci-après « LPCC »).
Ces dispositions sont principalement contenues aux articles 22 à 23 bis (publicité) et 93
LPCC (actes contraires aux usages honnêtes en matière commerciale).
g.
L’article 22 LPCC définit la publicité comme « toute communication ayant
comme but direct ou indirect de promouvoir la vente de produits ou de services, y
compris les biens immeubles, les droits et les obligations, quel que soit le lieu ou les
moyens de communication mis en œuvre ».
Cette définition est interprétée de manière large par la jurisprudence belge, qui
considère comme publicité des choses aussi diverses que des emballages de produit,
lettres adressées à des clients, communiqués de presse, interview donnée par le
responsable d’une entreprise,…(cf. K. Daele, « Vergelijkende reclame : overzicht van
rechtspraak (2002-2004), R.D.C., 2005/7, p. 746).
Question B: Ambush-marketing
Page 7
A cet égard, nous pouvons mentionner tout d’abord les articles 23, 1° à 4° LPCC, qui
sanctionnent des formes diverses de publicité trompeuse, à savoir respectivement celle :
« 1° qui comporte des affirmations, indications ou représentations susceptibles
d'induire en erreur sur l'identité, la nature, la composition, l'origine, la quantité, la
disponibilité, le mode et la date de fabrication ou les caractéristiques d'un produit ou
les effets sur l'environnement (…);
2° qui comporte des affirmations, indications ou représentations susceptibles d'induire
en erreur sur l'identité, la nature, la composition, la durée, la disponibilité, la date de
prestation ou les caractéristiques d'un service; par caractéristiques, il y a lieu
d'entendre les avantages d'un service, notamment au point de vue de ses propriétés, des
résultats qui peuvent être attendus de son utilisation (…) ;
3° qui comporte des affirmations, indications ou représentations susceptibles d'induire
en erreur sur l'identité ou les qualités du vendeur d'un produit ou service ;
4° par laquelle le vendeur omet des informations essentielles dans le but d'induire en
erreur sur les mêmes éléments que ceux visés aux 1°, 2° et 3° ».
Conformément à la directive 84/450 du 10 septembre 1984 en matière de publicité
trompeuse, telle que codifiée par la directive 2006/114/CE du 12 décembre 2006 en
matière de publicité trompeuse et de publicité comparative, et à la jurisprudence de la
Cour de Justice des Communautés Européennes, la jurisprudence belge tend à ne
considérer une publicité comme trompeuse que dans la mesure où elle est susceptible
d’influencer le comportement économique du consommateur (voir notamment CJCE,
13 déc. 1990, Pall. Dalhausen, C-238/89, Rec., I, p. 4827 ; CJCE, 16 janv. 1992, Juge
d’instruction auprès du tribunal de grande instance de Bergerac / X, C-310/90, Rec., p.
1-157).
On peut également mentionner l’article 23,8° LPCC, qui interdit la publicité génératrice
de confusion, laquelle est définie comme toute publicité qui « comporte des éléments
susceptibles de créer la confusion avec un autre vendeur, ses produits, ses services ou
son activité ».
h.
Par ailleurs, il n’est pas inutile de relever les dispositions en matière de
publicité comparative, et en particulier l’article 23 bis § 1, 7° LPCC, qui prohibe tout
publicité comparative qui tire indûment profit de la notoriété à une marque, à un nom
commercial ou à d’autres signes distinctifs d’un concurrent ou de l’appellation d’origine
de produits concurrents.
Question B: Ambush-marketing
Page 8
Le recours à cette disposition n’est pas purement théorique en matière d’ambush
marketing, compte tenu de l’interprétation particulièrement large donnée à la notion de
publicité comparative par la Cour de Justice des Communautés Européennes.
En droit belge, la publicité comparative est définie comme « toute publicité qui,
explicitement ou implicitement, identifie un concurrent ou des produits ou services
offerts par un concurrent » (article 22 al. 2 LPCC).
Dans une affaire portée devant la Cour sur question préjudicielle de la Cour d’appel de
Bruxelles, la Cour de Justice des Communautés Européennes avait à se prononcer sur la
question de savoir si la définition de la publicité comparative couvre les messages
publicitaires dans lesquels l’annonceur fait uniquement référence à un type de produit,
et non à un produit particulier (cf. Bruxelles, 7 juil. 2005, P.C., 2005, p. 296).
Jusqu’alors, la jurisprudence était divisée quant à savoir si une telle publicité constituait
une publicité comparative (cf. notamment K. Daele, op. cit., p. 746 ; X. Vermandele,
« Publicité comparative : aperçu de la jurisprudence belge récente », DCCR, 2005, p.
34).
Dans l’arrêt du 19 avril 2007 que vient de prononcer la Cour, celle-ci met fin à cette
controverse, en décidant que « peut être considérée comme constituant une publicité
comparative la référence, dans un message publicitaire, à un type de produits et non à
une entreprise ou à un produit déterminés dès lors qu’il est possible d’identifier cette
entreprise ou les produits qu’elle offre comme étant concrètement visés par ledit
message. La circonstance que plusieurs concurrents de l’annonceur ou des biens ou des
services qu’ils offrent puissent être identifiés comme étant concrètement visés par le
message publicitaire est sans pertinence en vue de la reconnaissance du caractère
comparatif de la publicité » (CJCE, 19 avr. 2007, De Landstheer / Veuve Cliquot, C381/05, disponible sur www.curia.eu).
Cette décision est particulièrement intéressante puisqu’elle permettra éventuellement
aux victimes d’ambush marketing de s’opposer à la publicité d’un concurrent qui
identifie implicitement le sponsor officiel et tente ainsi de profiter de la renommée de ce
sponsor ou de ses signes distinctifs. On peut ainsi rapprocher ce genre de publicité de
celle faite par Pepsi au cours de Jeux Olympiques d’Atlanta, dont un des sponsors
officiels était Coca-Cola. Alors que l’athlète Marie-José Pérec avait un contrat avec la
société Pepsi, cette dernière tira profit de la victoire de l’athlète en utilisant le slogan
« Marie-José Pérec, représentante officielle d’une boisson non officielle à Atlanta ».
i.
Malgré les diverses règles énoncées ci-dessus, la victime d’ambush marketing
n’aura cependant bien souvent d’autre choix, compte tenu du caractère sophistiqué de la
Question B: Ambush-marketing
Page 9
technique d’ambush marketing utilisée, que de se rabattre sur la norme générale
réprimant les actes contraires aux usages honnêtes.
Cette norme générale est contenue à l’article 93 LPCC, qui interdit « tout acte contraire
aux usages honnêtes en matière commerciale par lequel un vendeur porte atteinte ou
peut porter atteinte aux intérêts professionnels d’un ou plusieurs autres vendeurs ».
Cette protection à l’encontre des actes de concurrence déloyale trouve son origine dans
l’article 10 bis de la Convention d’Union de Paris, qui fait obligation aux Etats membres
de prévoir dans leur droit national une telle protection.
La loi belge ne contient pas de définition de la notion d’ « usages honnêtes en matière
commerciale », laissant le soin à la jurisprudence de lui donner un contenu. Selon la
Cour de cassation, on entend par « usage » ce qui « revêt dans une région déterminée, le
caractère général d’une règle reconnue par tous comme applicable à défaut de
stipulation contraire, ou de convention de même nature » (Cass., 29 mai 1947, Pas.,
1947, p. 233, souligné par la concluante). Parfois également, l’usage pourra résulter de
la consécration, par une minorité agissante, de règles éthiques propres à une profession
ou une activité.
Cette notion revêt donc un caractère mouvant : l’usage pourra ainsi notamment résulter
de la loi, de règles déontologiques ou encore de codes éthiques en matière publicitaire.
Par ailleurs, il est de jurisprudence et doctrine constantes que la violation d’une norme
légale ou réglementaire constitue en soi une faute (cf. notamment Cass., 2 mai 1985,
Pas., 1985, I, p. 1081). Il est dès lors largement admis que la notion d’usage honnête en
matière commerciale constitue une application au commerce du régime classique de la
responsabilité civile inscrit aux articles 1382 et 1383 du Code civil, lequel oblige à
réparation l’auteur d’une faute ayant causé un dommage à autrui (cf. notamment I.
Ferrant, Les pratiques du commerce, Bruxelles, Kluwer, 2003, p. 30 ; A. Puttemans,
« Usages honnêtes, distribution sélective et vente hors réseau : mention impossible ? »,
R.C.J.B., 1999, p. 29 ; cf. également Comm. Bruxelles, 29 nov. 1993, R.D.C., 1995, p.
209).
La violation d’une norme légale ou réglementaire constituera dès lors un acte contraire
aux usages honnêtes en matière commerciale dès le moment où elle porte ou peut porter
atteinte aux intérêts commerciaux d’un ou plusieurs autres vendeurs.
En droit belge, l’article 93 LPCC sera donc fréquemment invoqué en cas de violation,
par un tiers, d’une disposition légale ou réglementaire particulière.
Les atteintes portées par la publicité faite par un annonceur pourront également être
sanctionnées sur pied de cet article si elles sont contraires aux usages honnêtes
applicables en la matière, outre les cas visés par les articles 23 et 23 bis LPCC et les cas
de violation d’une norme légale ou réglementaire.
Question B: Ambush-marketing
Page 10
A cet égard, on peut rapprocher certains cas d’ambush marketing de cas où la
jurisprudence belge a sanctionné des publicités créant un avantage concurrentiel
injustifié à l’annonceur, voire des publicités tapageuses. Ainsi ont pu être condamnés
par exemple, compte tenu des conditions particulières dans lesquelles ces publicités
intervenaient, l’octroi massif de réductions ou de cadeaux, ainsi que le racolage de
clientèle. Nous aurons l’occasion de voir au point 4 ci-dessous dans quelle mesure cette
jurisprudence peut s’appliquer aux exemples évoqués.
Enfin, il convient également de mentionner le recours dont peut disposer la victime
d’ambush marketing au titre de la protection contre la concurrence parasitaire. Cette
théorie constitue une application de la norme générale contenue à l’article 93 LPCC.
Elle permet de conférer une protection par le biais du droit commun en faveur des
prestations qui ne peuvent bénéficier d’une protection par un droit de propriété
intellectuelle.
Les conditions de cette protection, admise depuis un certain temps en jurisprudence et
doctrine, ont été récemment consacrées dans un arrêt de principe prononcé le 18
septembre 2003 par la cour d’appel de Bruxelles (Bruxelles, 18 sept. 2003, Auteurs &
Médias, 2005, p.121 ; cf. également G. Londers, « Onrechtmating imiteren, kopiëren en
aanhaken », Handespraktijken anno 1996, Kluwer, Anvers, p. 189).
Dans cet arrêt, la cour dispose qu’ « il y a concurrence parasitaire, en cas de copie par
un concurrent d’une prestation, d’un produit ou d’un service, si les conditions suivantes
sont réunies :
a)
la prestation, le produit ou le service qui est copié doit être le fruit d’efforts
créatifs et d’investissements relativement importants du point de vue financier
et quant au temps consacré. La prestation protégée doit être suffisamment
originale.
b)
la prestation, le produit ou le service copié doit avoir une valeur économique.
c)
celui qui copie ou imite doit tirer profit des efforts et investissements de l’autre
vendeur, quelle qu’en soit la forme (…)
d)
le copieur ne doit pas avoir consenti le moindre effort créatif pour distinguer
sa prestation, son produit ou son service de celui de l’autre vendeur ».
Cette théorie résulte d’une mise en balance entre divers intérêts.
D’une part, la liberté du commerce et de l’industrie, qui est garantie par un décret de
1791 dit décret d’Allarde. Ce décret est toujours d’application aujourd’hui et la liberté
du commerce et de l’industrie a valeur de droit subjectif. Il implique la liberté de
principe de copie des prestations qui ne bénéficient pas de la protection d’un droit de
propriété intellectuelle. D’autre part, il convient de concilier ce principes avec les règles
de loyauté qui doivent être assurées afin d’assurer un fonctionnement normal du
marché.
Question B: Ambush-marketing
Page 11
C’est dans cette mesure que la victime de copie devra faire la preuve de la réunion des
circonstances particulières qui rendent la copie contraire aux usages honnêtes en matière
commerciale. Ces circonstances devront dès lors être distinguées de la copie en tant que
telle.
Il est toutefois à noter qu’en matière d’ambush marketing, cette théorie ne présentera
qu’un intérêt relatif, dans la mesure où elle exige la copie d’une prestation particulière,
qu’elle soit matérielle (p.ex. objets publicitaires) ou immatérielle (marques, noms
commerciaux,…), à condition qu’elle soit coulée dans une certaine forme (G. Londers,
op. cit., p. 207). Le simple fait de copier une idée, ou de tirer profit du goodwill d’une
entreprise ne saurait suffire pour bénéficier d’une protection contre la concurrence
parasitaire. La solution belge se rapproche à cet égard de celle retenue aux Pays-Bas (cf.
notamment D. Van Engelen, S. Kaak, op. cit., p. 62). Or, souvent, l’ambush marketing
se caractérisera par une prestation propre, distincte de l’éventuelle prestation des
victimes. Selon nous, ce n’est dès lors que dans certains cas précis que cette théorie sera
susceptible de s’appliquer. Nous y reviendrons au point 4.8 ci-dessous.
What are the available remedies and to whom?
Sur ce point, nous limiterons notre examen des actions ouvertes aux victimes d’ambush
marketing aux actes de concurrence déloyale sanctionnés par la LPCC.
La LPCC prévoit une procédure rapide et efficace permettant d’obtenir la cessation de
pratiques contraires aux dispositions de la LPCC. Une telle procédure est qualifiée de
procédure « comme en référé » en ce sens qu’elle permet d’obtenir à bref délai (le plus
souvent entre 2 et 12 semaines) une décision au fond. Cette procédure est prévue à
l’article 95 LPCC. Cette action doit être portée, au choix du demandeur, devant le
président du tribunal de commerce du lieu du domicile du défendeur ou du lieu où les
actes incriminés ont été posés. Si le président constate l’existence d’une infraction à une
ou plusieurs des dispositions de la LPCC, il en ordonne la cessation.
Cette action est principalement ouverte à tout intéressé, au Ministre des affaires
économiques et aux associations de défense des intérêts des consommateurs. Le plus
souvent, les « intéressés » au sens de la LPCC seront constitués par les concurrents de
l'auteur de l’acte incriminé,
En fonction du secteur concerné, de la gravité et de la durée de la pratique contestée, les
concurrents seront naturellement plus ou moins attentifs à entreprendre de telles
démarches.
Des actions en cessation introduites par le Ministère des affaires économiques ou par
des consommateurs se présentent beaucoup moins souvent.
Question B: Ambush-marketing
Page 12
Par ailleurs, il est à noter qu'en cas d'action d'une durée limitée, une éventuelle action en
cessation est le plus souvent peu efficace, en raison du fait que l’action sera souvent
déjà terminée avant que le magistrat n'ait rendu son jugement.
Un jugement constatant une contravention aux dispositions de la LPCC peut être
accompagné d'une autorisation de publier le jugement, ce qui peut s'avérer relativement
dommageable sur le plan commercial pour une société (article 99 LPCC).
Indépendamment de l'action en cessation, la victime d’une infraction à une disposition
de la LPCC a également la possibilité d'agir en dommages et intérêts devant le tribunal
de commerce afin d’obtenir la réparation du dommage qu’elle a subi. Néanmoins, la
preuve d'un dommage réellement subi par le concurrent en raison de l'action menée sera
particulièrement difficile en la matière. Pour cette raison, de telles actions ne se
rencontrent que rarement devant les juridictions belges.
La cessation d’un acte contraire aux dispositions de la LPCC ou violant une obligation
contractuelle peut également être obtenue dans le cadre d’une procédure dite de référé.
Cette procédure sera souvent utilisée afin d’obtenir la cessation d’une violation
contractuelle dans la mesure où celle-ci est en principe soustraite à l’action en cessation
ordinaire. Le recours à cette procédure suppose cependant que l’affaire soit urgente au
sens de l’article 584 du Code judiciaire. Par ailleurs, la décision sera rendue au
provisoire, c’est-à-dire sans préjudice de la décision sur le fond de l’affaire. A cet égard,
cette procédure se distingue de l’action en cessation examinée plus haut, qui débouche
quant à elle sur une décision au fond et qui ne requiert pas la condition d’urgence.
Enfin, dans les cas d’absolue nécessité, le président du tribunal de commerce peut être
saisi sur requête unilatérale par une partie. Ces conditions sont appréciées de manière
particulièrement rigoureuses par la jurisprudence, dans la mesure où cette procédure
déroge au principe fondamental du contradictoire. L’absolue nécessité sera présente
dans trois hypothèses : s’il est nécessaire de provoquer un effet de surprise (afin
d’éviter, par exemple, la disparition d’éléments de preuve ou de produits
contrefaisants), lorsqu’il n’est pas possible d’identifier de manière certaine et précise les
personnes à charge desquelles les mesures doivent être exécutées et en cas d’extrême
urgence, c’est-à-dire lorsque le recours à la procédure ordinaire serait de toute façon
impuissant à régler la situation en temps utile. Cette procédure permet d’obtenir, le plus
souvent le jour même du dépôt de la requête, des mesures telles qu’un ordre de
cessation ou une interdiction de dessaisissement de produits.
Il est à noter que l’action au fond devant le tribunal de commerce, l’action en référé
ainsi que l’action sur requête unilatérale exigent, dans le chef de celui qui introduit une
telle action, un intérêt légitime, né, actuel, direct et personnel au sens des articles 17 et
18 du Code judiciaire.
Question B: Ambush-marketing
Page 13
Are there sanctions applicable (administrative or civil) and what are the
authorities entrusted with enforcement authority ?
A côté de ces procédures civiles et des diverses mesures (cessation, publication,
dommages et intérêts,…) sur lesquelles elles sont susceptibles de déboucher, les
violations de la loi sur les pratiques du commerce peuvent être sanctionnées par des
sanctions pénales, tout particulièrement lorsque ces violations sont commises de
mauvaise foi. Dans la pratique, il est cependant rare que de telles sanctions soient
appliquées.
Par ailleurs, il convient de noter que le Ministère des affaires économiques est chargé de
veiller au respect des dispositions de la LPCC. Il peut, le cas échéant, donner un
avertissement au contrevenant (article 101 LPCC). Ce dernier dispose dans ce cas d’un
certain délai pour mettre fin à l’atteinte et obtenir une transaction avec l’administration.
Le Ministère peut agir d’initiative, mais également sur plainte de tout intéressé. S’il
n’est pas donné suite à l’avertissement, le Ministère peut agir en cessation devant le
Président du tribunal de commerce compétent ou informer le Procureur du Roi des
infractions constatées.
Examples
4.
Could you give us a list of behaviours that have been or would be considered as
prohibited ambush-marketing in your country?
Is any reference made to the event within a certain radius, not necessarily using the
official name or logo of the event/organizers/sponsors, considered as prohibited
ambush-marketing? Would that be applicable to any type of business or only to
competitors of the official sponsors?
On ne saurait poser comme règle générale que toute référence faite à l’événement dans
un certain rayon doive être considérée comme illicite.
Plusieurs hypothèses doivent être distinguées.
Sur un plan contractuel, le propriétaire ou le locataire des lieux où l’événement se
déroule peut conditionner l’accès à ceux-ci à des conditions déterminées, en ce compris
l’interdiction de publicité faisant référence, de manière directe ou indirecte, à
l’événement visé.
Hormis cette hypothèse particulière, la question devra être envisagée sous l’angle de la
concurrence déloyale, et notamment de la norme générale d’ « acte contraire aux usages
honnêtes » contenue à l’article 93 LPCC.
Question B: Ambush-marketing
Page 14
A cet égard, relevons tout d’abord que la plupart des communes belges ont édicté des
règlements communaux relatifs à la publicité menée sur la voie publique (conditions de
forme des affiches, autorisation préalable,…). Le défaut de respecter de tels règlements
pourra dès lors être sanctionné par le biais du recours à l’article 93, comme il a été vu au
point 3.1.i. ci-dessus. Pour autant que la violation de telles dispositions réglementaires
soit de nature à porter atteinte aux intérêts de l’organisateur ou d’un sponsor, même non
concurrent de l’annonceur, ceux-ci pourront s’y opposer.
Dans les autres cas, à défaut d’actes générateurs de confusion, la jurisprudence refusera
en principe de sanctionner la publicité menée au même endroit et en même temps que
celle d’un autre annonceur. La doctrine va dans le même sens. Cette tendance se justifie
par le fait notamment que l’entrave aux activités d’un concurrent est une conséquence
normale de toute concurrence et que l’activité économique demeure libre (cf.
notamment M. Gotzen, Vrijheid van beroep, 1962, p. 317 ; J. Stuyck, Handels- en
economisch recht, 2004, p. 175 ; D. Dessard, Les usages honnêtes, 2007, p. 203).
La seule limite à ce principe nous semble résider dans la publicité qui serait menée de
manière telle qu’elle aurait pour conséquence une déstabilisation de l’entreprise qui en
est victime (cf. également à cet égard le point 4.4 ci-dessous). Une telle hypothèse est
toutefois relativement théorique en matière d’ambush marketing, compte tenu de ce que
bien souvent, l’organisateur ou le sponsor officiel qui seront victime d’une telle
publicité ont une taille et une importance telles que la publicité incriminée n’est pas de
nature à réellement les déstabiliser.
Are marketing events or advertisements using athletes, referring to the sport
practiced during the event also considered as prohibited ambush-marketing?
Il va de soi, en premier lieu que l’utilisation de l’image d’un athlète ne pourra être
utilisée à des fins commerciales que moyennant son consentement.
Par ailleurs, à moins que l’organisateur de l’événement n’interdise par règlement à un
athlète participant à l’événement de donner à un tiers l’autorisation d’utiliser son image
pendant celui-ci, la question doit être davantage envisagée du point de vue de la
concurrence déloyale.
A cet égard, la jurisprudence étrangère ne révèle pas, à notre connaissance, de cas dans
lesquels une telle pratique aurait été sanctionnée sur base du droit de la concurrence
déloyale.
Question B: Ambush-marketing
Page 15
En Belgique, les événements sportifs de dimension internationale donnent fréquemment
lieu à des publicités utilisant des athlètes et faisant référence au sport pratiqué durant
l’événement.
A titre d’exemple, on peut renvoyer à la publicité télévisée faite en Belgique durant la
Coupe du monde de football 2006 pour la marque Bertolli. Dans cette publicité, on
pouvait voir des personnes âgées s’affronter au cours d’un match de football. La
publicité se terminait par le message suivant: “Si l’Italie bat le Ghana le 12 juin
prochain, Bertolli vous rembourse vos achats de ce jour”.
Cet exemple montre les limites du droit de la concurrence déloyale à sanctionner une
pratique utilisant un athlète et faisant référence au sport pratiqué durant un événement.
Une telle pratique, plutôt que de mettre en péril le fonctionnement du marché, est
davantage de nature à ne porter atteinte qu’aux intérêts patrimoniaux de l’organisateur
de l’événement, voire de ses sponsors officiels (G. Londers, op. cit., p. 190). Pour cette
raison, elle sera difficilement répréhensible au regard du droit belge.
Are marketing event or advertisements indirectly referring to the event during the
event, or directly referring to the event before or after the event, also considered
as prohibited ambush-marketing?
Cette question recouvre de nombreuses pratiques. En Belgique, deux types de pratiques
couvertes par cette question se rencontrent fréquemment et méritent d’être examinées.
La première pratique consiste, pour un annonceur n’ayant pas la qualité de sponsor
officiel de l’événement, à organiser un concours permettant aux vainqueurs d’obtenir un
prix sous forme de tickets lui permettant d’assister à l’événement.
Une telle opération sera le plus souvent contraire aux dispositions contractuelles fixées
par l’organisateur de l’événement quant à la vente des tickets. La majorité des
événements sportifs de dimension internationale prévoient en effet, à charge de
l’acheteur des tickets, que ceux-ci ne peuvent être transférés ni utilisés à des fins
commerciales telles que la promotion ou la publicité, sans l’accord de l’organisateur.
Question B: Ambush-marketing
Page 16
Dans l’hypothèse où l’annonceur ne serait pas lui-même l’acheteur des tickets, sa
responsabilité pourra éventuellement, en droit belge, être recherchée sur base de la
théorie de la tierce complicité à la violation d’une obligation contractuelle. A cet égard,
le fait qu’une interdiction de revente ou d’utilisation à des fins commerciales ou
promotionnelles soit notoire, ainsi que le fait que les tickets contiennent un renvoi
exprès aux dispositions contractuelles permettent de rapporter la preuve de la
connaissance, dans le chef du tiers, de l’existence d’une telle interdiction et partant, sa
responsabilité.
Même à défaut de tierce complicité dans le chef de l’organisateur du concours, sa
responsabilité pourra le cas échéant être engagée sur pied des articles de la LPCC
relatifs aux offres conjointes.
Le droit belge interdit en effet, sous réserve de certaines exceptions légalement
énumérées, de lier l’acquisition de produits, services et autres avantages à l’acquisition
d'autres produits ou services (articles 54 et suivants LPCC). Il y aura dès lors offre
conjointe lorsque le droit de participer à un concours ou une loterie sera conditionné par
l’acquisition préalable d’un produit ou service. Or, de nombreuses promotions
organisées en Belgique tombent dans cette catégorie, sans pouvoir bénéficier d’une des
exceptions légales. De telles opérations pourront dès lors être interdites sur base de ces
articles.
Une autre pratique à laquelle on assiste régulièrement consiste, pour l’annonceur, à
développer un slogan consistant en un jeu de mots faisant référence à une marque dont
est titulaire l’organisateur ou un sponsor officiel.
A titre d’exemple, on peut citer le slogan publicitaire développé par American Express
lors des Jeux olympiques d’hiver de Lillehamer en 1994. Alors que son concurrent Visa
était un sponsor officiel des Jeux, American Express utilisa le slogan suivant : "If you
are travelling to Lillehammer, you'll need a passport, but you don't need a visa". Dans
le Benelux, on peut également renvoyer au slogan utilisé par Daewoo lors du
championnat d’Europe de football Euro 2000. Afin de promouvoir une action par
laquelle elle accordait 2000 euros de ristourne à l’achat d’une voiture neuve, Daewoo
développa le slogan “Daewoo sponsort 2000 euro”.
Il convient d’examiner la légalité de ce type de pratiques sur base de la législation en
matière de marques. Les usages tels que ceux visés ci-dessus seront, en droit belge, le
plus souvent perçus comme un usage “autrement que pour distinguer des produits”, et
non comme un usage à titre de marque, dans la mesure où la marque est utilisée dans un
sens purement descriptif.
Question B: Ambush-marketing
Page 17
La CBPI offre toutefois une protection renforcée au titulaire d’une marque enregistrée
dans le Benelux, contrairement au règlement 40/94 sur la marque communautaire.
L’article 2.20.1.d) de la CBPI permet en effet à celui-ci de s’opposer à l’usage d’un
signe à des fins autres que celles de distinguer des produits ou des services, lorsque
l’usage de ce signe sans juste motif tire indûment profit du caractère distinctif ou de la
renommée de la marque ou leur porte préjudice.
Dans ce genre de cas, il conviendra d’examiner principalement si l’usage, par
l’annonceur, de la marque enregistrée ou d’un signe similaire est fait avec un “juste
motif” au sens de la CBPI.
Sur ce point, la jurisprudence au sein du Benelux a tendance à interpréter cette notion de
manière assez restrictive, suivant en cela la jurisprudence de la Cour de Justice Benelux
(C.J.Ben., 1er mars 1975, C.J.Ben.-Jurisp., 1975, p. 1). Pour la Cour, il n’y aura juste
motif à utiliser un signe que s’il y a nécessité pour l’usager à utiliser celui-ci. Selon les
conclusions de l’Avocat général précédant l’arrêt mentionné, il ne saurait être question
de juste motif que dans les cas où la participation à la vie des affaires serait exclue à
défaut de pouvoir utiliser le signe incriminé (conclusions de l’Avocat général Berger
dans l’affaire Klareyn, Ing.-Cons., 1974, p. 94).
En application de cette interprétation, le tribunal de commerce de Nivelles condamna
une entreprise utilisant un slogan par lequel elle annonçait la vente de “501 jeans à 501
francs” pour atteinte à la marque “501” de Levi Strauss. Dans ce jugement, le tribunal
estima que l’entreprise ne pouvait justifier d’une nécessité telle à faire usage du signe
501 qu’on ne saurait raisonnablement lui empêcher un tel usage (Comm. Nivelles, 29
mai 1998, Ing.-Cons., 1998, p. 256).
En sens contraire, dans un récent jugement inédit prononcé le 24 novembre 2006 par le
tribunal de commerce de Liège, le tribunal considéra qu’il y avait juste motif, pour une
société organisant des paris en ligne, à faire usage des noms des clubs de football sur
lesquels portaient les paris. Pour le tribunal, un tel usage constituait un juste motif au
sens de l’article 2.20.1.d) CBPI.
Dans l’affaire “Daewoo sponsort 2000 euro” mentionnée ci-dessus, le président du
tribunal d’Amsterdam refusa également de retenir l’atteinte à la marque verbale “Euro
2000”. A la lecture du jugement, il semble toutefois que ce soit surtout le faible pouvoir
distinctif et la différence entre les signes en litige qui ait emporté la conviction du juge
(Prés. Rb. Amsterdam, 26 juin 2000, IER, 2000, p. 275).
Question B: Ambush-marketing
Page 18
Un autre argument pouvant être soulevé par le tiers usage d’un signe réside dans
l’article 2.23, 1, b) CBPI (il est à noter que l’article 12.b) du règlement 40/94 sur la
marque communautaire est libellé en des termes similaires). Cet article contient une
exception aux droits exclusifs du titulaire de marque, qui permet au tiers usager d’un
signe d’utiliser une marque afin d’informer le public des caractéristiques des produits
ou services qu’elle offre. Il dispose ce qui suit : « le droit exclusif n’implique pas le
droit de s’opposer à l’usage par un tiers dans la vie des affaires :
b) d’indications relatives à l’espèce, à la qualité, à la quantité, à la destination, à la
valeur, à la provenance géographique, à l’époque de production du produit ou de la
prestation du service ou à d’autres caractéristiques de ceux-ci ».
Cet article exige cependant que « cet usage soit fait conformément aux usages honnêtes
en matière industrielle ou commerciale ». Dans son arrêt The Gilette Company, la Cour
de Justice des Communautés Européennes a précisé que la condition d’usages honnête,
au sens de la disposition précitée, constitue en substance l’expression d’une obligation
de loyauté à l’égard des intérêts légitimes du titulaire de la marque et que l’usage de la
marque n’est pas conforme aux usages honnêtes en matière industrielle ou commerciale,
lorsque notamment :
-
il est fait d’une manière telle qu’il peut donner à penser qu’il existe un lien
commercial entre le tiers et le titulaire de la marque, notamment que le tiers
appartient au réseau de distribution du titulaire de la marque ou qu’il existe une
relation spéciale entre les deux entreprises ; ou
-
il affecte la valeur de la marque en tirant indûment profit de son caractère distinctif
ou de sa renommée (C.J.C.E., 17 mars 2005, Ing.-Cons., 2005, p.3).
La Cour indique qu’à cet égard, « il importe de prendre en considération la
présentation globale du produit commercialisé par le tiers, notamment les conditions
dans lesquelles la marque dont le tiers n’est pas titulaire est mise en évidence dans cette
présentation, les conditions dans lesquelles est faite la différence entre cette marque et
la marque ou le signe du tiers ainsi que l’effort fait par ce tiers pour s’assurer que les
consommateurs distinguent ses produits de ceux dont il n’est pas titulaire de la
marque ».
Is the preparation and sales of products, such as pastries, food products, etc.
reproducing the logo or other images of the event, constituting ambushmarketing?
Indépendamment de la question d’une éventuelle atteinte aux droits d’auteur sur le logo
ou sur des images de l’événement ainsi qu’aux droits voisins du droit d’auteur sur les
images de l’événement, la question doit être examinée sous trois aspects distincts.
Sur le plan du droit des marques, tout d’abord. Sur ce point, une partie de la doctrine
considère que comme c’est souvent le cas lors d’événements sportifs, une marque
enregistrée pour un nombre très important de produits et services à des fins de
Question B: Ambush-marketing
Page 19
merchandising, c’est-à-dire afin d’être donnée en licence à un grand nombre
d’entreprises n’est pas apte à remplir sa fonction de marque. Thierry van Innis écrit à
cet égard ce qui suit : « Ce n’est pas, en effet, parce que la marque Coca-Cola se trouve
apposée sur un T-shirt qu’elle devient marque de vêtements, pas plus qu’elle ne devient
marque pour des panneaux publicitaires lorsqu’elle s’y trouve reproduite (…) Quant au
merchandising relatif à des personnages (…), il ne relève pas du droit de marque, mais
du droit d’auteur, même si, à tort, ces personnages font l’objet de dépôts pour une série
invraisemblable de produits et services » (T. van Innis, Les signes distinctifs, Bruxelles,
Larcier, 1997, p. 171 ; dans la jurisprudence, cf. Rb. ‘s-Gravenhage, 2 août 2000, IER,
2000, p. 298). Cette opinion n’est toutefois pas partagée par la majorité de la doctrine et
de la jurisprudence (cf. A. Strowel, « La protection des personnages par le droit d’auteur
et le droit des marques », Droit d’auteur et bande dessinée, Bruxelles, Bruylant, 1997,
p. 37 et sv.).
Sans préjudice des règles applicables en matière d’usage d’une marque dans un sens
descriptif, le tiers usager d’un signe identique ou similaire à une marque protégée,
lequel est utilisé pour distinguer des produits divers pourra se voir sanctionner sur pied
de la législation applicable en matière de marques (cf. notamment le jugement rendu
dans l’affaire UEFA / European Tickets 2000, Rb. ‘s-Gravenhage, 12 mai 2000, IER,
2000, p. 216).
S’agissant ensuite du droit à l’image, il est admis en droit belge que l’utilisation de
l’image d’un sportif à des fins promotionnelles viole un tel droit lorsque l’image du
sportif est utilisée comme produit commercial en lui-même ou en impression sur un
produit commercial ou pour une publicité destinée à promouvoir un produit commercial
ou une entreprise (cf. Civ. Hasselt, 19 déc. 2003, Auteurs & Médias, 2004, p. 388 ; civ.
Gand, 19 nov. 2003, Auteurs & Médias, 2004, p. 384).
Enfin, la vente ou la distribution gratuite de produits sur la voie publique pourra le cas
échéant être sanctionnée sur pied de l’article 93 LPCC dans l’hypothèse où elle
intervient en violation d’une disposition légale ou réglementaire particulière. Tel pourra
notamment être le cas si la vente, l’offre en vente ou l’exposition en vue de la vente de
produits ou services constitue une activité ambulante qui ne bénéficie pas de
l’autorisation prévue au sens de l’arrêté royal du 24 septembre 2006 relatif à l’exercice
et à l’organisation des activités ambulantes. Par ailleurs, il convient de relever que la
vente ou la distribution gratuites de produits pourra le cas échéant contrevenir à un
éventuel règlement communal qui conditionne la publicité sur la voie publique à une
autorisation préalable des autorités communales.
Pour le surplus, il convient de noter que l’offre gratuite de produits est, en règle, licite
en droit belge. Elle pourra cependant avoir un caractère contraire aux usages honnêtes
ou illégal dans les cas où elle consiste à offrir ce qui est interdit (ex. : tombola ou
loterie), consiste à offrir une réduction de prix aboutissant à vendre à perte ou est
l’instrument d’une concurrence déloyale.
Question B: Ambush-marketing
Page 20
Cette dernière hypothèse se rencontrera notamment lorsque la distribution gratuite de
produits rend difficile ou malaisée l’exploitation normale du commerce d’entreprises
concurrentes (exemple : une entreprise de location de vélos, qui distribue en grand
nombre des boissons gratuites à la côte en haute saison près d’une friterie tirant ellemême une partie important de ses revenus de la vente de boissons (Prés. Comm. Bruges,
12 sept. 1995, P.C., 1995, p. 407). La jurisprudence semble constante sur ce point (Prés.
Comm. Gand, 21 mai 2001, P.C., 2001, p. 610 ; Prés. Comm. Bruges, 11 févr. 1994,
P.C., 1994, p. 312 ; Gand, 15 janv. 1998, P.C., 1998, p. 434 ; Prés. Comm. Bruxelles, 3
janv. 1992, P.C., 1992, p. 276 ; cf. également P. De Vroede, « Het gratis schenken van
producten is niet steeds een handeling strijdig met de eerlijke handelsgebruiken, A.J.T.,
2001-01, p. 798).
De la même manière, la jurisprudence tend à condamner les pratiques de racolage par
lesquelles un concurrent invite de manière pressante les passants, en leur remettant ou
non des produits ou brochures, à entrer dans son magasin (Prés. Comm. Bruxelles, 30
déc. 1991, P.C., 1991, p. 522 ; Anvers, 24 déc. 1990, P.C., 1990, p. 288 ; Prés. Comm.
Bruxelles, 14 nov. 1994, P.C., 1994, p. 406).
En matière d’ambush marketing, les cas d’application de la jurisprudence mentionnée
ci-dessus seront sans doute assez rares s’agissant d’événements de portée internationale,
dont les sponsors officiels sont des entreprises d’importance. De tels actes pourront sans
doute être sanctionnés plus facilement dans le cadre d’événements de portée moindre,
où un sponsor officiel pourra plus facilement voir son activité commerciale entravée par
de tels comportements de la part de concurrents.
Are disclaimers sufficient to prevent a qualification of a campaign as prohibited
ambush-marketing?
On ne saurait poser comme règle générale qu’une mention par laquelle l’annonceur
indique qu’il n’est pas un sponsor officiel de l’événement ou ne dispose pas d’une
autorisation de celui-ci ou d’un de ses licenciés suffise pour éviter toute critique au
regard du droit belge.
La réponse à cette question dépendra en tout état de cause de la technique utilisée par
l’annonceur et de la nature de l’atteinte invoquée.
Nous examinerons ci-dessous les cas dans lesquels la question de l’utilisation d’une
telle mention est pertinente.
Question B: Ambush-marketing
Page 21
Sur le plan du droit des marques, on considère généralement qu’une telle mention n’est
pas de nature à éviter la constatation d’une atteinte. Cette règle a été dégagée par la
Cour de Justice des Communautés Européennes dans son arrêt Arsenal du 12 novembre
2002 (C.J.C.E., 12 nov. 2002, Ing.-Cons., 2002, p. 496). Dans cette affaire, le titulaire
de la marque Arsenal reprochait à Monsieur Reed de vendre dans son échoppe située
aux abords du stade des écharpes revêtues de la marque Arsenal. Monsieur Reed faisait
valoir que tout risque de confusion était exclu, dans la mesure où figurait sur son
échoppe la mention selon laquelle il ne disposait d’aucune licence du titulaire de la
marque l’autorisant à vendre ces écharpes. Dans son arrêt, la Cour considère que cette
circonstance n’est pas de nature à éviter tout risque de confusion, puisque « force est de
constater que certains consommateurs, notamment si les produits leur ont été présentés
après qu’ils ont été vendus par Mr Reed et ont été emportés hors de l’échoppe où
figurait l’avertissement, interprètent le signe comme désignant Arsenal FC en tant
qu’entreprise de provenance des produits » (par.57). Cette solution est majoritairement
suivie en droit belge. On peut relever à cet égard le jugement récent prononcé le 7 mars
2007 par le tribunal de commerce de Bruxelles. Dans son jugement, le tribunal va
décider que la mention « Copia non conforme all originale », sur des articles de sport
représentant un signe similaire à la marque aux trois bandes d’Adidas n’est pas de
nature à écarter le risque de confusion entre le signe incriminé et la marque dont la
protection est invoquée (Comm. Bruxelles, 7 mars 2007, inédit, R.G.01030/2006).
La solution n’est pas différente en droit d’auteur. En la matière, la jurisprudence belge
considère en effet de longue date que le risque de confusion entre deux œuvres n’est pas
le critère pertinent pour juger de la contrefaçon. La jurisprudence estime en effet qu’il y
aura contrefaçon d’une œuvre protégée par le droit d’auteur dès que l’œuvre seconde
emprunte à l’œuvre première des éléments ou même l’un des éléments qui constituent
l’originalité de l’œuvre première, même en l’absence de risque de confusion entre les
deux œuvres (Bruxelles, 7 déc. 1999, I.R.D.I., 2000, p. 38 ; Bruxelles, 11 avr. 1989,
Ing.-Cons., 1989, p. 43 ; Anvers, 12 janv. 1983 ; F. Gotzen, G. Van Hecke, « Overzicht
van rechtspraak industriële eigendom, Auteursrecht 1975-1990, T.P.R., 1990, p. 1810 et
la jurisprudence citée). Une mention apposée sur un produit violant des droits d’auteur,
par laquelle l’annonceur indique qu’il n’est pas un sponsor officiel de l’événement, ne
permettra dès lors pas d’éluder le grief de contrefaçon.
S’agissant de la publicité génératrice d’erreur sur l’identité ou les qualités de
l’annonceur (article 23, 3° LPCC) ou de confusion avec un autre vendeur (article 23, 8°
LPCC), l’appréciation de l’atteinte dépendra des circonstances particulières dans
lesquelles cette mention est utilisée. A cet égard, il convient de tenir compte de la
perception du consommateur moyen, et non de celle du sponsor officiel, concurrent ou
non de l’annonceur, ou de l’organisateur de l’événement.
Question B: Ambush-marketing
Page 22
La jurisprudence belge suit en cela la jurisprudence de la Cour de Justice des
Communautés Européennes. On peut à cet égard mentionner l’arrêt du 25 septembre
1998, qui décida que “pour établir si un consommateur moyen est trompé au sens de
l’article 23 LPCC, on doit tenir compte du consommateur disposant d’un minimum
d’intelligence et de sens critique, et non du consommateur le moins intelligent”
(Bruxelles, 25 sept. 1998, P.C., 1998, p. 85, traduction libre; cf également K. Daele,
“Vergelijkende reclame in de automobielsector: een kritische analyse”, R.D.C., 2003, p.
611). En d’autres termes, l’utilisation d’une telle mention pourra donc exclure
l’existence d’une atteinte sur pied des articles 23, 3° ou 23, 8° LPCC pour autant que
compte tenu des circonstances concrètes dans lesquelles elle est utilisée (place, durée,
taille de la mention,…), le consommateur moyen en perçoive clairement le sens et la
portée.
During the event, the sponsor of a team/athlete, congratulate the said team/athlete
for its performance during the event. Could this be or has this been considered
as prohibited ambush-marketing?
A ce jour, une telle pratique n’a donné lieu à aucune jurisprudence en Belgique.
Un tel acte pourra éventuellement entraîner la responsabilité contractuelle du sponsor
ainsi que du/des athlète(s) congratulés dans la mesure où ces félicitations revêtent un
caractère publicitaire ou s’accompagnent de l’utilisation de matériel promotionnel. Dans
le chef du sponsor, il est en effet possible que les conditions contractuelles liées à
l’achat du ticket lui interdisent, en tant que spectateur, d’utiliser un quelconque matériel
promotionnel dans les lieux auxquels donne accès l’achat du ticket. S’agissant des
athlètes, les règlements auxquels ils sont le cas échéant tenus d’adhérer en participant à
l’événement pourront éventuellement prohiber toute utilisation de leur personne ou de
leur image à des fins publicitaires pendant l’événement.
Hormis les cas visés ci-dessus, la responsabilité du sponsor de l’équipe ou de l’athlète
pourra éventuellement être recherchée sur base de la théorie de la tierce complicité.
Cependant, la condition relative à la connaissance que le tiers « a ou doit avoir » de la
situation, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, risque de poser
problème dans l’hypothèse visée par la question envisagée.
Question B: Ambush-marketing
Page 23
Cette dernière condition tend effet à être interprétée de manière stricte par la
jurisprudence. Ainsi, la bonne foi du tiers prétendument complice est présumée en la
matière et la charge de la preuve de la faute repose sur les épaules du demandeur. Sans
doute y aura-t-il faute à ne pas savoir ce que tout le monde sait, mais on considère
généralement que la connaissance que le tiers a ou est supposé avoir vise les cas où,
sans examen particulier, il aurait dû arriver à la conclusion que l’acte qu’il se préparait à
poser violait les obligations contractuelles d’autrui. Dès lors, la jurisprudence se refuse
généralement à exiger du tiers « complice » qu’il procède à un examen approfondi du
contrat et de son contenu avant d’accomplir l’acte incriminé (Bruxelles, 21 février 1996,
disponible sur www.moniteur.be ; J.L. Fagnart, « La tierce complicité et les usages
honnêtes en matière commerciale », R.D.C., 1989, p. 469).
A priori, il semble dès lors difficile de pouvoir conclure à une faute extra-contractuelle
sur cette base juridique de la part du sponsor d’un athlète ou d’une équipe qui ne fait pas
partie des sponsors officiels d’un événement.
Assuming that there are no contractual or other provisions preventing or
prohibiting display of sponsors specific to an athlete/team, can the official
sponsor reward the athletes who do not show/display the logo, the name or else
of their own sponsor?
En l’absence de dispositions contractuelles faisant interdiction à un athlète d’arborer un
signe distinctif de son propre sponsor, le sponsor officiel d’un événement pourra voir sa
responsabilité engagée dans l’hypothèse où il incite cet athlète à ne pas arborer un tel
signe.
La responsabilité du sponsor officiel pourra tout d’abord être recherchée sur base de la
théorie de la tierce complicité, à supposer que le fait d’arborer un signe distinctif de son
sponsor constitue, pour l’athlète, une obligation contractuelle.
Sans doute la charge de la preuve de la connaissance que le sponsor officiel a ou doit
avoir de l’obligation contractuelle de l’athlète sera-t-elle, dans ce cas de figure, moins
lourde que dans le cas visé au point 4.6, puisque l’obligation pour un athlète d’arborer le
signe distinctif de son propre sponsor est largement répandue et notoire en matière
sportive.
Question B: Ambush-marketing
Page 24
Indépendamment des questions de tierce complicité, il est également permis de se
demander si de tels agissements ne seraient pas constitutifs d’un acte contraire aux
usages honnêtes compte tenu de l’incitation provenant du sponsor officiel de
l’événement. Dans des cas analogues, la jurisprudence belge a ainsi eu l’occasion de
condamner sur pied de l’article 93 LPCC l’acte posé par un tiers qui tend à rompre la
relation d’affaires, ou l’incitation à la rupture d’un contrat accompagnée de la promesse
d’avantages gratuits (Comm. Liège, 27 sept. 1955, Jur. Liège, 1955-56, p. 32; Comm.
Malines, 23 mai 1991, P.C., 1991, p. 364).
Is the organisation of a parallel event in the same town, region or country, or
covering the same type of activity, possibly falling into anti ambush-marketing
provisions?
A notre connaissance, la jurisprudence belge n’a pas eu, à ce jour, à connaître d’une
telle situation.
En soi, on ne saurait cependant considérer une telle hypothèse illicite dans la mesure où
le fait d’entraver les activités de l’organisateur d’un autre événement est inhérent à la
libre concurrence (dans ce sens, cf. J. Stuyck, op.cit., p. 175).
Ceci étant dit, la publicité entourant l’organisation d’un événement parallèle dans la
même ville, région ou pays, ou couvrant la même activité pourra naturellement être
réprimée si elle comporte des éléments « susceptibles d’induire en erreur sur l’identité
ou les qualités » de l’organisateur concurrent ou si elle est génératrice de confusion
avec les activités de celui-ci.
En France, de telles pratiques ont déjà fait l’objet de condamnations en application de la
théorie de la concurrence parasitaire. Ainsi, la société « Tour féminin organisation » a
été sanctionnée pour avoir repris la carte de la société du Tour de France et pour avoir
mis en place une caravane publicitaire, un journal du Tour et un village du Tour (TGI
Paris, 10 sept. 1997, PIBD, 1997, 642, III, p. 586).
En droit belge également, une telle pratique pourra le cas échéant être condamnée sur
base de cette théorie. A cet égard, il convient cependant de rappeler que la prestation
copiée devra être suffisamment originale pour pouvoir bénéficier d’une protection.
Ainsi, la jurisprudence rappelle fréquemment que la notion de concurrence parasitaire
ne peut créer de monopole nouveau, et que la simple idée ne saurait être protégée à ce
titre (cf. Bruxelles, 25 nov. 1994, P.C., 1995, p. 288 ; Bruxelles, 3 déc. 1998, P.C.,
1998, p. 520). Partant, l’événement organisé parallèlement devra copier des éléments
suffisamment originaux de l’événement premier pour pouvoir être sanctionnés sur base
de la concurrence parasitaire.
Question B: Ambush-marketing
Page 25
Is the purchase of TV slots for advertisements around the broadcasting of the event
possibly considered as ambush-marketing and therefore prohibited?
Tout comme l’achat de billets pour un événement quelconque par une entreprise en vue
de les offrir à ses meilleurs clients, l’achat de cases publicitaires en vue de leur diffusion
avant, pendant ou après un événement, par une entreprise qui n’est pas l’un des
sponsors officiels n’est pas illicite en soi.
En effet, le simple fait, pour une entreprise, d’associer son nom à un événement
particulier et / ou de bénéficier du goodwill qui lui est lié n’est pas répréhensible
comme tel (P. Van den Bulck, M. de Bellefroid, op.cit., p. 223).
Hormis le cas de publicité trompeuse ou créant un risque de confusion, la responsabilité
d’une entreprise achetant de telles cases publicitaires nous semble difficilement
envisageable sur base du droit de la concurrence déloyale.
Is the sponsoring of another broadcast such as an historic, news or talk-show,
regarding the event, possibly considered as ambush-marketing and therefore
prohibited?
Nous renvoyons le lecteur sur ce point à ce qui a été dit au point 4.9.
Nous signalons également que les décrets flamands coordonnés du 4 mars 2005 relatifs
à la radiodiffusion et à la télévision ainsi que le décret de la Communauté française du
27 février 2003 sur la radiodiffusion prévoient un certain nombre de règles relatives au
sponsoring de programmes diffusés par les organismes de radiodiffusion relevant de
l’une ou l’autre communauté. Ces règles ont trait à la fréquence d’apparition des signes
distinctifs du sponsor, le moment, la durée d’apparition…
Le cas échéant, l’absence de respect de ces conditions pourra engager la responsabilité
du sponsor d’un tel programme sur pied de l’article 93 LPCC.
Fundamental questions
5.1
In retrospect, have the specific anti ambush-marketing provisions enacted in
your country been efficient to fight ambush-marketing? Couldn't general
principles of unfair competition law or other applicable legislations be sufficient
to prevent the most egregious ambush-marketing practices?
Ainsi qu’il a été exposé au point 1 ci-dessus, le droit belge ne contient pas de loi
destinée à lutter contre l’ambush marketing.
Question B: Ambush-marketing
Page 26
A notre estime, le droit des marques et le droit d’auteur permettent de lutter contre les
formes les plus sommaires d’ambush marketing. Les droits exclusifs portant sur les
logos, slogans, dessins et autres mascottes permettent en premier lieu à leurs titulaires
d’éviter les effets particulièrement dommageables résultant de la distribution de
produits mis sur le marché sans le consentement des titulaires de droits.
De nombreuses formes plus subtiles d’ambush marketing peuvent par ailleurs être
prévenues ou sanctionnées grâce aux mécanismes contractuels mis principalement sur
pied entre l’organisateur de l’événement et ses partenaires contractuels tels que
fédérations, athlètes, sponsors, spectateurs, organismes de radiodiffusion,…Une
politique contractuelle rigoureuse permettra en effet d’éviter un nombre extrêmement
important de pratiques qui peuvent porter atteinte aux investissements de l’organisateur
ou de ses sponsors : interdiction pour les spectateurs, athlètes et fédérations d’utiliser
des objets et matériels promotionnels, interdiction pour les athlètes de laisser utiliser
leur image, nom ou performances sportives pendant l’événement par des sponsors non
officiels, interdiction pour les acheteurs de tickets de revendre ceux-ci à des fins
promotionnelles, interdiction aux organismes de radiodiffusion d’attribuer une case
publicitaire à un sponsor non officiel,…
Pour le surplus, le droit de la concurrence déloyale, même s’il ne permet pas de
s’opposer à l’ensemble des pratiques d’ambush marketing, constitue toutefois un outil
efficace contre les pratiques résiduaires les plus dommageables qui se situent dans le
domaine extracontractuel : protection contre la publicité génératrice de tromperie, de
confusion, protection de prestations suffisamment originales contre la concurrence
parasitaire,...
5.2
Could enforcement by sponsors of their exclusive rights, under the applicable
specific or non-specific anti ambush-marketing provisions, be considered as
constituting
antitrust
infringement
(abuse
of
dominant
position/monopolisation)?
Il n’existe pas à notre connaissance de jurisprudence belge ayant constaté l’existence
d’un abus de position dominante suite à l’exercice d’un droit de marque ou d’un droit
d’auteur par le titulaire de cette marque ou de ce droit d’auteur qui serait une personne
morale autre qu’une société de gestion collective de droits d’auteur.
Cette absence de jurisprudence tient selon nous à la circonstance que le droit d’auteur
s’attache en principe à une création de forme et le droit des marques à un signe distinctif
et que, dans la plupart des cas, un produit peut revêtir une multiplicité de formes
possibles ou être pourvu de nombreux autres signes différents. De la sorte, le droit
d’auteur attaché à une forme spécifique et le droit de marque, portant sur un signe
Question B: Ambush-marketing
Page 27
déterminé, ne font la plupart du temps pas naître une position dominante dans le chef de
son titulaire sur un marché défini. Les concurrents peuvent en effet souvent utiliser des
formes ou signes différents pour la présentation de leurs produits ou services.
Il y a ainsi lieu de noter que la situation en Belgique comme celles d’autres Etats
continentaux se distinguent de celle dont avait eu à connaître la Cour de justice dans
l’affaire “Magill” (voy. C.J.C.E., 6 avril 1995, aff. C-241/91 et C-242/91, Rec., 1995, I.,
808 et suiv.) : si dans l’affaire “Magill”, la législation irlandaise ainsi que la législation
du Royaume-Uni admettaient la protection du droit d’auteur sur des grilles de
programmes hebdomadaires de télévision et permettaient à son titulaire de s’opposer à
leur reproduction par des tiers, une telle solution n’aurait pas été retenue en droit belge,
la protection du droit d’auteur ne s’attachant qu’à la présentation particulière que
pourrait connaître le cas échéant une grille de télévision mais non au contenu de celleci.
La définition du marché sera évidemment essentielle pour que l’on puisse conclure à
l’existence d’une position dominante. A cet égard, pour qu’un type de produit puisse en
tant que tel constituer un marché, il doit pouvoir être individualisé par ses
caractéristiques particulières le différenciant des autres produits au point qu’il soit peu
interchangeable avec eux ou qu’il ne subisse leur concurrence que d’une manière peu
sensible (voy. C.J.C.E., 14 février 1978, “United Brands”, aff. 26/76, Rec., 1978-II.,
207, point 22). Il semble dès lors très rare que le titulaire d’un droit d’auteur ou d’un
droit de marque se trouve dans un marché aussi restreint que celui couvert par son droit.
Le cas échéant, les problèmes liés à l’enregistrement comme marques de signes banals,
risquant d’être monopolisés par leur titulaire au préjudice de tiers devront davantage se
résoudre du point de vue de la validité de la marque et de son aptitude à être perçue
comme un signe permettant de distinguer des produits et services comme provenant
d’une entreprise déterminée, plutôt que sur le terrain du droit de la concurrence en
général, et de l’abus de position dominante en particulier.
5.3
Aren't the anti ambush-marketing provisions enacted (envisaged/possibly
envisaged) in your country, creating exclusive rights not foreseen by intellectual
property law or other specific legislation aimed at creating such exclusive
rights? To which extent is this contradicting the often recognised principle that
unfair competition should not create exclusive rights not foreseen by
intellectual property or other specific legislation?
La jurisprudence belge rappelle régulièrement la règle selon laquelle la protection
contre la concurrence déloyale ne peut avoir pour effet de créer, au profit de la victime,
de monopole (Bruxelles, 25 nov. 1994, P.C., 1995, p. 288 ; Bruxelles, 3 déc. 1998, P.C.,
1998, p. 520).
Question B: Ambush-marketing
Page 28
Par ailleurs, il est constant que les organisateurs et sponsors officiels d’un événement
cherchent à obtenir une protection exclusive de l’événement et du goodwill qui lui est
attaché, afin notamment d’assurer la rentabilité des investissements exposés et d’éviter
la déstabilisation de leur politique commerciale.
Dans cette mesure, il est évident que la consécration légale de droits exclusifs non
prévus par la législation en matière de propriété intellectuelle placerait de tels droits sur
un plan radicalement différent de la protection offerte par le droit de la concurrence
déloyale, puisque celle-ci vise non pas à protéger les droits ou intérêts patrimoniaux
particuliers, mais plutôt à assurer le fonctionnement normal du marché en assurant la
loyauté des relations entre entreprises.
5.4
To your view, is it economically efficient to allow the sponsor, and to some
extent the organiser, to internalise all positive externalities created by the
organisation of the sponsored event? Shouldn't the economic benefit expected
from such an event, spill over the whole economy of the country/city/region
organising the event and wouldn't that economy be better off if third parties
could also take advantage of the event, thereby multiplying and extending its
reach and consequently the returns to the sponsor/organiser?
Nous ne pensons pas qu’il soit efficace, d’un point de vue économique, de permettre
aux sponsors officiels d’un événement et, le cas échéant, à l’organisateur de celui-ci, de
monopoliser toutes les potentialités liées à l’organisation de l’événement.
Il convient en effet de rappeler qu’initialement, l’ambush marketing est né en réaction à
la mauvaise organisation, par les sponsors officiels, de leur programme de sponsoring.
Si à l’heure actuelle, l’organisation de tels programmes s’est considérablement
professionnalisée et complexifiée, il va de soi que des événements de dimension
internationale peuvent constituer une source de retombées commerciales qui dépassent
inévitablement dans une large mesure le sponsor officiel.
Dans la mesure où l’arsenal juridique disponible permet de lutter contre les formes les
plus dommageables d’ambush marketing, nous estimons que la protection juridique
actuelle a un impact économique positif puisque d’une part, elle permet aux sponsors
officiels d’assurer efficacement la rentabilité de leurs investissements et, d’autre part,
elle permet aux acteurs souhaitant profiter des retombées économiques de l’événement,
d’en bénéficier tout en respectant certaines limites.
5.5
To your view, is the interest of the sponsor to obtain exclusivity over the event or
to maximise its visibility? Considering that question, is your anti ambushmarketing legislation efficient?
Question B: Ambush-marketing
Page 29
Selon nous, l’intérêt du sponsor résidera davantage dans l’exclusivité dont il pourrait
bénéficier sur l’événement que dans le fait de pouvoir disposer d’une visibilité
maximale.
En effet, il nous semble que le sponsor aura davantage intérêt à éviter l’intervention de
concurrents et à être ainsi le seul bénéficiaire de la visibilité liée à un événement que de
se voir assurer la plus grande visibilité, contrairement à ses concurrents. Ceci est
d’autant plus vrai que le sponsor officiel sera de toute façon impuissant à développer
par lui-même une visibilité à ce point importante qu’elle exclut radicalement celle de
tout autre concurrent.
De ce point de vue, les régimes de protection efficaces qu’offrent le droit des marques,
le droit d’auteur et les mécanismes contractuels sont de nature à lui permettre
d’atteindre ce but, puisqu’ils ont pour effet de permettre au sponsor ou à l’organisateur
de s’opposer aux actes d’ambush marketing qui portent atteinte à cette exclusivité.
5.6
Are there efficient non-legal answers to fence off ambush-marketing (creation
of an anti ambush-marketing commission publicly stigmatising the ambushmarketing behaviour/multiplication of sponsors vs exclusivity, else)?
A côté de l’arsenal juridique applicable, plusieurs mesures non-juridiques sont
susceptibles, selon nous, de jouer un rôle efficace dans la prévention de l’ambush
marketing: conférences visant à stigmatiser les méfaits de telles pratiques et leurs
risques sur la survie des événements, publicité organisée par l’organisateur sur l’identité
de ses sponsors officiels, les chartes ou guides à destination des personnes souhaitant
participer à l’événement, que ce soit comme athlète ou comme spectateur, et détaillant
les méfaits et les risques juridiques liés à de telles pratiques,…
Téléchargement