Jonas Kaufmann, le ténor chéri de la planète
lyrique
Jonas Kaufman s'est imposé pour devenir le ténor dramatique que toutes les
scènes du monde s'arrachent.
Si la mise en scène contemporaine du Letton Alvis Hermanis ne fait pas l'unanimité, le chanteur
d'opéra allemand parvient une nouvelle fois à tirer son épingle du jeu. A 46 ans, Jonas
Kaufmann est au sommet de son art.
Si seulement il se contentait de bien chanter, cela resterait raisonnable. Mais il a une voix d'or,
un physique de jeune premier et l'intelligence chevillée aux idées. Jonas Kaufmann est une
idole. Après Carmen de Bizet aux Chorégies d'Orange cet été et Ariane à Naxos de Strauss en
octobre dernier au Théâtre des Champs-Elysées, le ténor chéri de la planète lyrique revient sur
les planches de l'Opéra Bastille, où il a tant brillé naguère en Werther. L'occasion, pour lui, de
reprendre un autre grand rôle du répertoire français, Faust, dans une nouvelle production de La
Damnation de Faust de Berlioz.
Un homme libre
1969, naissance à Munich. Dès l'âge de 4
ans, Jonas Kaufmann aimerait jouer du
piano comme sa soeur aînée, mais ses
mains sont encore trop petites. Le garçon
intègre alors un choeur d'enfants. Là,
lorsque pour la première fois il chante à
l'unisson avec ses camarades, la puissance
de la musique s'empare de tout son être :
premier choc. Dans la galaxie Kaufmann, la
grand-mère maternelle chante, le grand-
père paternel, amoureux fou de Wagner, se
met au clavier le dimanche, la partition de
Parsifal ou de Siegfried devant lui, qu'il lit
jusqu'au bout, interprétant tous les rôles ! Le
ténor confie aujourd'hui que ces moments
où, assis près du patriarche, il écoutait
religieusement restent des souvenirs
merveilleux : «Même si ce n'était pas parfait,
qu'il ralentissait aux endroits difficiles, j'étais
fasciné !» A l'âge de 8 ans, le piano entre
dans sa vie pour ne plus le quitter, mais le
virus du chant est là. Ses parents, curieux,
cultivés et fidèles abonnés de salles de
concerts et de théâtre, finissent par
l'emmener à une représentation jeune public
d'un opéra de Puccini : second choc ! Le monde qu'il découvre, (musique, costumes, théâtre)
Jonas Kaufmann se dit qu'un jour il sera sien.
Au début des années 90, après quelques semestres de mathématiques à l'université, Jonas
Kaufmann entre à l'Ecole supérieure de musique et de théâtre de Munich. En boucle, il écoute
Fritz Wunderlich, dont il admire l'engagement émotionnel; Luciano Pavarotti, qui se cantonnera,
certes, au répertoire italien, mais avec un tel génie ; Jon Vickers, avec son timbre si particulier,
et bien d'autres qui, tous, prennent place dans son palais. A les repasser sur sa platine, le jeune
chanteur comprend que les copier serait une erreur. Les choses s'enchaînent : deux années de
troupe au Théâtre national de la Sarre ; quelques conseils de Hans Hotter, la grande basse ; et
la rencontre décisive, en 1995, avec le baryton américain Michael Rhodes, qui lui permettra de
trouver SA voix en revoyant de fond en comble toute sa technique. Une révélation autant
qu'une libération : Jonas Kaufmann a pris confiance en lui.