Université de Fribourg
Département des Sciences Sociales
Histoire de la sociologie et théorie sociologique II : L’individualisme méthodologique
Dr. phil.hist. Markus Zürcher
Introduction : les principes communs des représentants de
l’individualisme méthodologique
Terme introduit par l’économiste Joseph Schumpeter en 1932
Mise en cause du « sociologisme » ou du postulat holistique selon lequel l’individu
est le produit des structures sociales.
Les individus sont considérés comme les atomes de base de l’analyse du processus
social.
Le comportement d’un acteur est en principe toujours compréhensible.
Les comportements, les intérêts, les motivations, les intentions et les décisions des
individus doivent figurer au coeur de toute explication sociologique : en dernière
instance tous les phénomènes sociaux doivent être expliqués en terme d’actions
individuelles
Le collectif est le résultat des activités individuelles à travers des effets d’agrégation
et de composition : les phénomènes sociaux doivent être expliqués comme produits
d’actions individuelles agrégées.
Trois applications possibles des principes de l’individualisme
méthodologique :
Le modèle d’action universel de l’Homo Oeconomicus :
Toute action peut être modelée comme calcul des coûts et des bénéfices
SEU : Subjective expected utility
RREEM : Resourceful, restricted, expecting, evaluating, maximizing
Compréhension de l’ action individuel (Max Weber) :
« La sociologie compréhensive considère l’individu isolé et son activité comme l’unité de
base, je dirai son atome (...) ; sa tâche consiste à réduire des concepts comme ‘Etat’,
‘compagnonnage’, ‘féodalisme’ etc. à une activité compréhensible, ce qui veut dire, sans
exception aucune, à l’activité des individus isolés qui y participent. »
Agrégation des actions individuelles selon la formule de Raymond Boudon :
M = M(m[S(M')])
Tout phénomène social M est une fonction d'agrégation des actions individuelles m
dépendant de la structure de la situation S dans laquelle se trouvent les acteurs,
elle-même affectée par des données macrosociales M'.
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Cinq axes de la réflexion de l’individualisme méthodologique
axiomatique individualiste de type atomiste, rationnel et utilitariste (Thomas Hobbes,
Jeremy Bentham).
axiomatique individualiste de type institutionnel et non-utilitariste (Adam Smith)
axiomatique individualiste comme point de départ pour une sociologie
compréhensive (Max Weber)
axiomatique individualiste de type rationnel et maximisatrice de l'utilité, marqué par
la théorie économique néoclassique (George Caspar Homans, Gary Becker, Mancur
Olson, Anthony Downs, Gordon Tullock, James Buchanan, James Coleman,
Siegwart Lindenberg, Karl-Dieter Opp).
axiomatique individualiste de type institutionnel et rationalité limitée (Herbert A.
Simon, Albert Hirschmann, Michel Crozier, François Bourricaud, Raymond Boudon)
Les origines de l’individualisme méthodologique : Thomas Hobbes
(1588 1679) et l’idée du contrat social
L’importance pour la sociologie
Rupture avec la pensée grecque et médiévale (Aristote, Saint-Augustin)
Philosophie civile et sciences morales comme sciences exactes : une mathématique
de la vie sociale et politique
Exposition la plus radicale du problème de l’ordre : la contradiction entre la liberté et
l’ordre
Points de départ
Egalité de l’homme à l’égard de ses capacités physiques et intellectuelles
L’homme ne connaît aucun objectif ou raison d’être en dehors de lui même
A l’exception de deux pulsions fondamentales – la conservation de soi-même et la
maximisation du plaisir l’homme ne connaît pas de dispositions établies et fixes
Toutes les actions peuvent être analysée comme des conséquences de ces deux
pulsions fondamentales
En poursuivant les deux pulsions fondamentales, l’homme choisit ses moyens et ses
objectifs absolument librement
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L’homme est rationnel dans le sens qu’il sait calculer les conséquences de ses
actions
Non-satisfaction des besoins principaux
Raisonnement cartésien et géométrique: séparation entre res extensa et res
cogitans, la vie sociale et politique est régie par des lois qui se laissent formuler
mathématiquement (Descartes et Euclide)
L’objet des sciences morales est constitué des mouvements de l’esprit – désir,
aversion, intérêt, amour, etc. et de leurs causes et effets
Rupture avec la pensée grecque et médiévale
Tradition grecque (Aristote ;
Saint-Thomas)
Raisonnement cartésien et géométrique
L’homme fait partie de la nature et de la
création divine
L’homme hors de la nature et de la création
divine
Inégalité fondamentale entre les hommes
Egalité fondamentale entre les hommes
L’homme a une fonction et une place
spécifique et prévue dans l’ordre divin
L’homme ne connaît pas de fonctions ou
d’objectifs en dehors de lui-même
Zoon politicon / Politeia
Purpose-seeking-animal / Individu
Ontologie de l’homme / essence et l’objectif
de l’homme
L’homme se crée lui-même ; analyse de la
‘res extensa’ (qualités primaires)
Statique
matter in motion
Théorique
Pratique
La nature est l’expression de l’ordre divin
La nature est une totalité de phénomènes
non définis et des mouvements ; la nature
est un champ à disposition de l’homme
dans son processus de création de
lui-même
La nature désigne le bien et le juste
La nature montre les conditions qui rendent
nécessaire de la quitter ou de la
transformer ; le bien et le juste se définit
selon les intérêts et les désirs
La nature prime sur l’art et la construction
L’art et la construction priment sur la nature
Argumentation téléologique (objectivf et
essence)
Argumentation mécanique et causale
(causes et effets)
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Les qualités primaires (res extensa) qui se laissent analyser selon les principes
de Descartes et d’Euclide (more geometrico) :
Masse
Volume/extension
Lieu
Mouvement
Le problème de l’ordre : contradiction entre liberté et ordre
Behemoth (état de nature)
viathan (l’ordre établit par une
souveraineté)
Droit de tous
Lois
Liberté
Obligations
Peur
Sécurité
Guerre de tous contre tous
Paix garantie par le pouvoir de la
souveraineté
Quelques sources de la guerre de tous contre tous
étroitesse des ressources
plusieurs personnes veulent en même temps la même chose
on désire quelques chose qui appartient à un autre
Ceux qui contribue au bien-être d’une personne et qui peut être nuisible pour une
autre personne
Non-satisfaction de certains biens (pouvoir, prestige, richesse, sécurité)
La philosophie politique de Hobbes
Souveraineté de l’homme sur soi-même, au nom de soi-même et légitimé par
soi-même
La souveraineté est le produit d’un calcul rationnel des individus et trouve sa seule
légitimation dans la capacité à protéger la vie des individus
La seule raison d’être de l’état est sa capacité de garantir la paix intérieure et
extérieure ; cette fonction limite l’autorité à l’état à la protection de la vie des citoyens
(L’état comme dieu mortel)
Auctoritas non veritas facit legem
L’état n’achère pas la guerre de tous contre tous, mais donne seulement à cette
guerre une forme rationnel.
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Exposé de la stratégie d’explication de type « choix rationnel » par Thomas
Hobbes
Argumentation strictement individualiste
Argumentation strictement matérialiste
Intérêts au centre de l’explication
Toute action peut être déduite par deux pulsions / besoins fondamentaux
Calcul
Institutions sont conçues comme des produits d’un acte de décision.
L’actualité de Thomas Hobbes
L’ensemble des lois et droits doivent être garantis en dernière instance par une force
de pouvoir
Marché et concurrence mettent «la guerre de tous contre tous » sous une forme
rationnelle, mais la subsistance ne peut pas être garantie par le marché.
L’intérêt comme principe d’un ordre social : Adam Smith (1723 1790)
Theory of moral sentiments (1759)
An Inquiry into the nature and the causes of the wealth of nations (1776)
Concepts clé
Sympathy : « Les esprits humains sont les miroirs les uns des autres » :
Capacité de prendre la position et la perspective d’autrui ;
Evaluation des pulsions, des besoins et des désirs sous la
perspective d’autrui ;
Réflexion sur les actions, les désirs et les besoins du point de vue
des autres ;
L’action est conçue comme un processus auto-réflectif qui permet
l’objectivation des jugements de valeur (morale).
Impartial spectator : L’autrui généralisé
Selfishness L’intérêt non réfléchi (égoïsme)
Self-interest L’intérêt réfléchi, socialement accepté
Invisible hand Harmonisation spontanée, grâce au marché, des intérêts
individuels ;
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