ERUDITION Taher - UMF Baie-des

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Projet d’érudition
Les statines augmentent-elles le risque de démence?
Par Taher Bennani
R1 médecine familiale
UMF Baie-des-Chaleurs
Travail supervisé par :
Dr Martin Potter
Présenté dans le cadre de
La Journée de l’Érudition et de la
Recherche
Université de Montréal
30 mai 2014
1
Introduction et mise en contexte
Avec le vieillissement de la population, on s’attend à ce que les maladies cardiovasculaires
deviennent de plus en plus prévalentes. Un des grands défis de la médecine du 21e siècle est de
trouver des moyens toujours plus efficaces pour prévenir l’apparition de ces maladies hautement
morbides et en contrôler les principaux facteurs de risque. Cependant, la balance entre les
bienfaits et les effets secondaires des médicaments utilisés à visée préventive est parfois difficile
à équilibrer.
Les inhibiteurs de la 3-hydroxy-3-méthyl-coenzyme A (HMG-CoA) réductase, plus connus
comme les statines (atorvastatine, la fluvastatine, la lovastatine, la pravastatine, la simvastatine)
sont les médicaments les plus souvent prescrits pour le traitement des dyslipidémies. Avec les
dernières lignes directrices (11), les statines seront de plus en plus prescrites. En effet, les
changements dans lesdites lignes publiées en novembre 2013 par American College of
Cardiolog/ American College of Cardiology (11) sont :

Le traitement de tous les patients atteints de maladie cardiovasculaire athérosclérotique
âgés de moins de 75 ans ainsi que les patients âgés de plus de 75 ans avec statine à haute
dose.
 L’identification de quatre groupes qui sont candidats pour le traitement avec des statines
à intensités différentes (faible, modérée et élevée) notamment les patients avec :
·
Maladie cardiovasculaire athérosclérotique
·
LDL-C ≥ 5 mmol/L
·
Les diabétiques, âgés de 40 à 75 ans, dont les LDL-C sont de 2 à 5 mmol/L et
sans évidence de maladie cardiovasculaire athérosclérotique
·
Aucune preuve de maladie cardiovasculaire ou de diabète, mais dont les CLDL sont de 2 à 5 mmol/L et dont le risque de maladie cardiovasculaire selon
l’échelle de Framingham est ≥ 7,5%
2
Ces changements augmenteraient par conséquent le nombre de patients admissibles à un
traitement par statine à près de 13 millions de personnes aux États-Unis (12).
Les statines sont bien tolérées et ont peu d'effets indésirables ; les plus communes étant les
myopathies, les effets sur les enzymes du foie, de la diarrhée, et rarement la rhabdomyolyse.
Cependant, une déclaration récente de la Food and Drug Administration a ajouté un effet
secondaire potentiel à ceux déjà connus, soit une possible augmentation des troubles cognitifs(1).
Cette décision a été basée sur 60 patients qui ont eu une perte de mémoire associée aux statines.
Quatorze des 25 patients ont eu une amélioration de leurs fonctions cognitives lorsque la statine
a été interrompue. Quatre ont eu une récurrence des troubles de mémoire à la reprise du
traitement. Les statines impliquées étaient la simvastatine (36 patients), l'atorvastatine (23
patients), et la pravastatine (1 patient).
Malgré cet avertissement concernant les troubles cognitifs, la relation entre les statines et les
fonctions cognitives reste inconnue.
En 2002, on estimait que 7,8% de la population canadienne, soit 2,4 millions de Canadiens,
prenaient une statine (10). Si, par exemple, l'incidence de la déficience cognitive associée était
seulement 0,1%, cela affecterait près de 2 500 personnes au Canada. Il est donc important de
mieux comprendre ce risque de manière adéquate pour mieux évaluer la pertinence des statines
pour chaque patient.
Mon projet tente donc d’explorer la relation entre les statines et la fonction cognitive.
Premier article :
Use of statins and incidence of dementia and cognitive impairment without
dementia in a cohort study
Journal
Type d’étude
Lieu d’étude
Durée d’étude
Nombre de participants
3
: Neurology 2008
: Étude de cohorte prospective
: Sacramento
: 5 ans de 1998 à 2003
: 1674
Méthode
Critères d’inclusion
·
60 ans ou plus
·
Américains d’origine mexicaine
Critères d’exclusion
·
Participants atteints de démence ou de trouble cognitif
Un total de 1 789 participants a été recruté dans l'étude. Chaque participant a répondu aux
questions sur le mode de vie, les symptômes dépressifs et certains diagnostics médicaux. Cent
quinze participants sont atteints de démence ou de trouble cognitif, donc sont exclus de l'analyse
des taux d'incidence.
L'utilisation de statines, notamment la dose, la durée, la fréquence et la source, a été notée. Elle
est par la suite mise à jour par un appel téléphonique semestriel et revue à chaque visite annuelle
par le biais de l'inspection directe de tous les médicaments sur ordonnance. L'utilisation de
statines a été définie comme l'utilisation d'un médicament de la classe des inhibiteurs de l'HMGCoA réductase, y compris l'atorvastatine, la cérivastatine, la fluvastatine, la lovastatine, la
pravastatine, la rosuvastatine et la simvastatine.
Mesure
Les tests et les évaluations cognitifs sont réalisés annuellement. La démence a été diagnostiquée
à l'aide du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux IV (DSM-IV) et d’autres
méthodes d’évaluation cognitive.
Les participants en dessous des valeurs admissibles spécifiées aux tests cognitifs ont ensuite été
évalués cliniquement pour confirmer les diagnostics de démence ou de déficit cognitif sans
démence.
4
Résultats
Dans l'ensemble, 452 des 1 674 participants (27%) ont pris des statines à tout moment au cours
de l'étude. Pendant la période de suivi de 5 ans, 130 participants ont développé une démence /
Déficit Cognitif Sans Démence. Parmi les participants qui ont utilisé des statines, 58% (n = 263)
les ont utilisés pendant deux ans ou plus par rapport à la durée de l'étude.
Figure 1: Flow diagram of participants at baseline
and at follow-up by statin use
Adjusted Risk Ratio: 0.56, CI 95 % (0.36-0.87)
Neurology journal, 2008
Conclusion
5
Cette étude conclut que les patients traités par statine sont moins susceptibles de développer une
démence / Déficience Cognitive Sans Démence au cours d'un suivi de 5 ans. Ces résultats
s'ajoutent aux preuves émergentes suggérant un effet protecteur des statines sur la fonction
cognitive.Commentaires
Points forts
·
Collecte prospective de données, y compris les données sur les médicaments constatés
par les mises à jour des appels téléphoniques semestriels et l'inspection visuelle annuelle
des médicaments
·
Prise en considération des covariantes (le statut de diabète, les antécédents d'AVC,
l'éducation, la nativité, le tabagisme et autres)
·
Utilisation d’une grande variété de tests neuropsychologiques pour le diagnostic de
démence ou / Déficit Cognitif Sans Démence
Points faibles
·
Validité externe : étude limitée aux Américains d’origine mexicaine
·
Manque de puissance pour évaluer les effets des statines sur les étiologies de démence
spécifiques (Alzheimer, démence vasculaire ischémique et autres)
Deuxième article :
Statins, risk of dementia, and cognitive function: secondary analysis of the Ginkgo
Evaluation of Memory Study
Journal
Type d’étude
Lieu d’étude
: Journal of Stroke and Cerebrovascular Disease, 2012
: Étude de Cohorte prospective
: Quatre centres médicaux universitaires (Universités de Pittsburgh,
Californie-Davis, Wake Forest et Johns Hopkins), États-Unis
Durée d’étude
: 6 ans
Nombre de participants : 3069
Méthode
6
Critères d’inclusion
·
75 ans ou plus
·
Les participants doivent être en mesure de signer un consentement clair
Critères d’exclusion
·
Les participants atteints de démence ou trouble cognitif ont été exclus
Tous les participants ont subi un examen physique, neurologique, et neuropsychiatrique détaillé
au début et à chaque 6 mois.
Mesure
Les tests et les évaluations cognitives sont réalisés chaque 6 mois. La démence a été
diagnostiquée à l'aide de l’Examen de Mini-Mental State modifié (3MSE), de l'échelle
d'évaluation de la démence clinique et de la sous-échelle cognitive de l'échelle d'évaluation AD
(ADAS-Cog). Si les scores de 2 sur trois évaluations ont été inférieurs aux valeurs admissibles
prédéfinies, ou lorsque la démence est soupçonnée par la famille ou par un médecin traitant, une
batterie complète de tests neuropsychologiques de base est répétée, suivie d'un examen
neurologique avec IRM cérébral. La classification du diagnostic final a été effectuée par un
groupe d'experts.
Résultats
Pour les participants sans déficience cognitive légère (DCL) initialement, il y a quelques preuves
sur la réduction du risque de démence toutes causes confondues chez les utilisateurs connus des
statines. De même, il y a une réduction du risque de la maladie d’Alzheimer (MA) et de toutes
les causes de démence chez les personnes pour qui l'utilisation des statines a été initiée au cours
de l'étude.
Il n'y a pas d'associations significatives entre l'utilisation des statines et la démence dans le
groupe connu avec DCL.
7
Tableau 1: Résultats par type de démence
Démence toutes
causes N=523
MA
N=353
HR (95% CI)
HR (95% CI)
N=2587
0.79 (0.65-0.96)
0.57 (0.39-0.85)
Statines initiée au cours de
l'étude N=1872
0.53 (0.37- 0.75)
0.46 (0.29-0.74)
N= 482
0.88 (0.64--1.21)
0.70 (0.47-1.04)
Statines initiée au cours de
l'étude N= 346
0.73 (0.45-1.20)
0.64 (0.35-1.15)
Pas DCL initialement
MCI initialement
Source : Journal of Stroke and Cerebrovascular Disease, 2012
Conclusion
Les statines peuvent ralentir le taux de déclin cognitif et retarder l'apparition de la MA et de la
démence de toutes les causes chez les personnes âgées non connues avec trouble cognitif, alors
que les individus avec DCL peuvent ne pas bénéficier de la protection cognitive de ces agents.
Commentaires
Points forts
Cette étude ajoute une nouvelle information à la littérature existante. Elle soulève en effet la
question intrigante si les statines peuvent avoir un effet protecteur pour la fonction cognitive
chez :
 les personnes âgées,
 Les sujets dont le traitement est commencé avant le développement de la déficience
cognitive d’origine vasculaire ou neurodégénérative.
8
Points faibles
·
Utilisation limitée à trois tests neuropsychologiques pour l’évaluation de la fonction
cognitive
Données de cette étude tirées d’un essai clinique testant la capacité de Ginkgo biloba pour
prévenir ou retarder le développement de la démence dans lequel l'utilisation des statines n'est
pas l’exposition médicamenteuse principale Troisième article :
Lipid lowering agents, cognitive decline, and dementia: the three-city study
Journal
Type d’étude
Lieu d’étude
Durée d’étude
Nombre de participants
: Journal of Alzheimer’s disease, 2012
: Étude de Cohorte prospective
: Trois villes françaises
: 7ans
: 6 830
Méthode
Critères d’inclusion
·
65 ans ou plus
Critères d’exclusion
· Sujets significativement plus âgés
· Niveaux d'éducation plus faibles
· Santé physique et mentale détériorée
· Scores cognitifs bas
Le but de cette étude de cohorte prospective est d'évaluer les effets des hypolipémiants sur la
fonction cognitive chez 6 830 personnes âgées vivant dans la communauté. La performance
cognitive (fonctionnement cognitif global, mémoire visuelle, fluidité verbale, vitesse
psychomotrice et fonction exécutive), le diagnostic clinique de la démence, l’utilisation de
fibrate et/ou de statines, ont été évalués au départ à 2 ans, à 4 ans et à 7 ans du début de
traitement.
Mesure
9
Une procédure en trois étapes est utilisée pour diagnostiquer les cas de démence. Tout d'abord,
le dépistage est fondé sur :
·
Un examen neuropsychologique approfondi par des psychologues qualifiés (utilisant des
tests neurocognitifs y compris le MMSE)
·
Les données sur les activités de la vie quotidienne et la gravité des troubles cognitifs
·
L’imagerie par résonance magnétique (IRM) et la Tomodensitométrie (TDM) cérébrales
en cas de besoin
·
Enfin, dans les trois centres, tous les cas probables de démence ont été analysés par un
comité indépendant commun de neurologues selon les critères du DSM-IV.
Résultats
Au cours des 7 années de suivi, 483 participants ont été diagnostiqués avec une démence de
toute cause dont 332 avaient la maladie d’Alzheimer.
Pour les deux sexes, aucune association significative n'a été trouvée entre les statines
(indépendamment de leur caractère lipophile) et l’incidence du déclin cognitif ou la démence.
Tableau 2: Baseline lipid lowering agent use and 7-year incidence of
dementiaa (Cox model with delayed entry)
HRb [95%CI]
Global p-value
WOMEN (n=4272)
All dementia
Fibrate 1.08 [0.77–1.52] 0.51
Statin 1.20 [0.88–1.64]
Alzheimer’s disease Fibrate 1.12 [0.75–1.66] 0.66
Statin 1.17 [0.80–1.70]
MEN (n=2784)
All dementia
Fibrate 0.85 [0.53–1.36] 0.53
Statin 0.81 [0.53–1.23]
Alzheimer’s disease Fibrate 1.04 [0.60–1.80] 0.94
Statin 1.09 [0.67–1.76
10
Source : Journal of Alzheimer’s disease, 2012
aThe
median [Interquartile range] follow-up was 6.7 [3.8–7.2] years. This analysis was undertaken on 7056 subjects without
missing data for baseline adjustment variables but with possibly missing repeated cognitive testing; 290 women and 193 men
were diagnosed with incident dementia, of whom 206 women and 126 men had incident Alzheimer’s disease. The 110 women
and 87 men with other types of dementia (of whom 21 men and 22 women with vascular dementia) were excluded from the
analysis of Alzheimer’s disease.
bAdjusted for age (time scale), centre, and education
Commentaires
Points forts
Cette grande étude prospective a réussi à prendre en considération les covariantes dont le sexe, la
vulnérabilité génétique et plusieurs facteurs concurrents associés au déclin cognitif.
Points faibles
Les patients perdus de vue et exclus de l’étude pourraient bien être parmi les patients qui ont eu
un déclin cognitif ou de démence.
L’exclusion des patients avec un âge avancé, un faible niveau d'éducation ou ayant une santé
physique et mentale détériorée,
peuvent entrainer une limitation de la généralisation des
résultats. Donc, le problème est au niveau de la validité externe.
L’observance du traitement n’a pas été prise en considération, d’où un biais de classification
possible.
Quatrième article :
Randomized Trial of the Effects of Simvastatin on Cognitive Functioning in
Hypercholesterolemic Adults
Journal
Type d’étude
Lieu d’étude
Durée d’étude
Nombre de participants
11
: The American Journal Of Medicine, 2004
: Étude randomisée en double-insu
: Allegheny County in southwestern Pennsylvania, États-Unis
: 6 mois
: 308
Méthode
Critères d’inclusion
·
Être âgés entre 35 et 70 ans
·
Hypercholestérolémie légère à modérée, définie comme LDL entre 4 et 5.5 mmol/L
Critères d’exclusion
·
Dyslipidémie secondaire
·
Hypertriglycéridémie sévère (taux de triglycérides à jeun> 9 mmol/L)
·
Maladie coronarienne, AVC, diabète, hypertension artérielle non traitée (pression
sanguine diastolique> 95 mm Hg), cancer, troubles neuropsychiatriques (par exemple, la
schizophrénie, la démence)
·
Utilisation
actuelle
d’un
hypolipémiant,
de
médicaments
psychotropes,
de
glucocorticoïdes, ou d’opiacés
Un total de 308 participants a complété les procédures de dépistage. Après stratification selon la
race (noire contre autres races), l'âge (≤ 50 vs > 50 ans) et le sexe, chaque participant a été
assigné au hasard à un traitement quotidien avec le placebo, 10 mg de simvastatine, ou 40 mg de
simvastatine.
Deux cent quatre-vingt-trois participants randomisés (92%) ont terminé l'essai clinique.
L’observance a été contrôlée par nombre de comprimés à chaque rendez-vous de suivi (semaines
8 et 16) et à la dernière visite (mois 6).
Mesure
Une large batterie de tests neuropsychologiques a été administrée incluant les tests sensitifs et
non sensitifs à la statine, et les autres tests cognitifs comme Miroir Tracer et les tests de mémoire
4-Word à court terme, choisis en raison de leur sensibilité à de petites différences dans la
performance cognitive chez les personnes à haut fonctionnement.
Résultats
12
Une performance améliorée est perçue sur les mots récurrents et sur des tests Elithorn Mazes
chez les sujets du groupe placebo, mais pas chez les sujets simvastatine. Sur les deux nouveaux
tests, il y’a une diminution de performance chez les sujets simvastatine atteignant une
signification statistique sur le test de la mémoire 4-Word (P = 0,05), mais pas sur le test de
traçage Miroir (P = 0,09). Encore une fois, il y a eu une amélioration chez les sujets recevant le
placebo mais pas chez les sujets recevant de la simvastatine.
Tableau 3: Performance on Individual Tests of Cognitive Function at Baseline
and after 6 Months of Treatment
Test
Placebo Group (n =
94)
Baseline
Simvastatin
Group (n = 189)
Post-Treatment
Baseline
PostTreatment
Mean (95%
Confidence Interval)
Statin-sensitive tests
Digit Vigilance (errors)†
Recurrent Words (% correct)
Elithorn Mazes (seconds)†
Grooved Pegboard (seconds)†
New tests
6.2(4.7–7.6)
80(76–83)
5.7(4.4–7.0)
83(80–86)
6.9(6.0–7.9)
84(82–86)
6.2(5.1–7.3)
85(83–86)
172(160–184)
144(133–155)
162(154–170)
160(152–168)
144(139–149)
144(138–150)
147(142–152)
150(145–154)
40(32–48)
20.8(19.1–22.4)
43(38–48)
41(35–46)
19.4(18.3–20.4) 20.0(18.9–21.1)
Mirror Tracing (errors)†
48(40–56)
4-Word Memory (no. correct)
18.9(17.4–20.4)
*
†Higher
scores indicate worse performance
Source : The American Journal Of Medicine, 2004
Conclusion
Cette étude montre des signes de détérioration mineure de la fonction cognitive mesurée par les
tests neuropsychologiques. Cette détérioration n’est pas manifestée par une baisse absolue de la
performance, mais plutôt par un manque d'amélioration entre les évaluations de base et de posttraitement.
13
Commentaires
Points forts
·
Étude randomisée en double-insu
·
Utilisation des tests d’évaluation cognitive sensitifs pour statine
Points faibles
·
Petit échantillon dans une durée d’étude courte
·
Liste de critères d’exclusion très longue éliminant les covariantes les plus importantes
Cinquième article :
Randomized controlled trial of atorvastatin in mild to moderate Alzheimer disease:
LEADe Study
Journal
Type d’étude
Lieu d’étude
: Neurology 2010
: Étude internationale, multicentrique, en double aveugle, randomisée
: Pays et 87 sites inscrits : États-Unis (39), Allemagne (9), Canada (9),
Royaume-Uni (8), Australie (7), Espagne (7), Afrique du Sud (5),
Suède (5), Autriche (4), Danemark (4)
Durée d’étude
: 72 semaines
Nombre de participants : 640
Méthode
Critères d’inclusion
·
Sujets connus avec la maladie de l’Alzheimer légère à modérée (MMSE score de 13-25)
sous donépézil 10 mg par jour pendant au moins 3 mois avant le dépistage
·
LDL-C entre 2.5 et 5.0 mmol/L
Critères d’exclusion
·
Sujets avec une condition médicale cliniquement significative ou instable
·
Personnes ayant une cause de démence autre que MA, le délire, la dépression, ou d'un
autre diagnostic qui pourrait interférer avec leur participation à l'étude
14
Mesure
·
Mesures d’issue primaire : période de randomisation à chaque 3 mois jusqu’à 18 mois ;
Alzheimer's Disease Assessment Scale-cognitive subscale (ADAS-cog 11-item, 70-point
scale), the Alzheimer's Disease Cooperative Study Clinical Global Impression of Change
(ADCS-CGIC)
·
Mesures d’issue secondaire : période de randomisation à chaque 6 mois jusqu’à 18 mois ;
The Neuropsychiatric Inventory (NPI), Modified ADAS-cog (13-item, 85-point) scale,
MMSE, Clinical Dementia Rating-Sum of Boxes (CDR-SB), Alzheimer's Disease
Functional Assessment and Change Scale (ADFACS)
Résultats
Pendant la période visée du traitement de 72 semaines, il n’y avait pas de différences
significatives entre le placebo et l’atorvastatine selon les mesures d’issue primaire ou secondaire.
Figure 2: ADAS-cog and ADCS-CGIC results
.
15
Source : Neurology Journal, 2010
Conclusion
Pour le traitement de formes légères à modérées de la maladie d'Alzheimer, cette étude a montré
que l'atorvastatine n'a pas été associée à un bénéfice clinique significatif sur 72 semaines.
Commentaires
16
Points Forts
Cette étude est considérée l’une des plus grandes et longues études randomisées testant à la fois
l’efficacité et la sécurité des statines dans le traitement de la maladie Alzheimer.
Il y a eu utilisation d’une grande variété de tests pour évaluer les changements cognitifs chez les
participants au cours de l’étude.
Points faibles
Il aurait pu être intéressant de savoir si l'atorvastatine aurait pu bénéficier aux patients atteints de
la MA avec une maladie cardiaque significative, cérébrovasculaire ou une maladie vasculaire
périphérique.
Discussion
En 2012, la FDA a élaboré une mise en garde à l’effet que les statines puissent être associées à la
perte de mémoire ou de confusion (1). Cette décision est basée sur l'analyse de 60 études de cas.
Cependant, jusqu’aujourd’hui, il n’y a pas de preuves suffisantes pour conclure avec certitude
que les statines puissent causer ou contribuer à un déficit cognitif cliniquement significatif.
En effet, les troubles cognitifs associés à l'utilisation de statines peuvent être expliqués par la
théorie largement acceptée qui est basée sur la relation entre le cholestérol et la myéline (2).
Le cerveau contient des concentrations élevées de cholestérol, contrairement à d'autres zones du
corps. Le cholestérol dans le cerveau est produit par le processus de synthèse de novo du
cholestérol, une composante clé de la myéline. Celui-ci est important dans la régulation de la
myéline assurant la perméabilité de la membrane et de la fluidité. Le traitement par statine peut
ainsi réduire la synthèse de novo du cholestérol, et interférer avec la formation et la fonction de
la myéline (3).
Les deux premières études analysées dans ce travail ont pu démontrer,
 D’une part que les patients traités par statine étaient moins susceptibles de développer
une démence / Déficience Cognitive Sans Démence.
17
 D’autre part, les statines peuvent retarder l'apparition de la MA et de la démence de
toutes causes chez les personnes âgées non connues avec trouble cognitif (4,5).
Dans les autres études analysées (6, 7, 8), les statines ont prouvé avoir un effet neutre ou
légèrement positif sur la performance cognitive. Cela suggère donc qu’elles n'ont pas d'effet
cliniquement significatif sur la cognition, surtout chez les sujets en fin de vie et chez les patients
ayant DCL ou MA.
En somme, la revue de la littérature m’a permis de constater que les données publiées ne
prouvent pas que les statines ont un effet négatif sur la fonction cognitive.
Finalement, une revue systématique récente publiée en 2013 (9) conclut que parmi les
utilisateurs de statine :
·
Les preuves de faible qualité ne proposent aucune augmentation de l'incidence de la
maladie d'Alzheimer ni de différence dans la performance cognitive.
·
Les preuves de qualité moyenne ne proposent aucune augmentation de l'incidence de la
démence ou de déficience cognitive légère, ni de changement dans les performances
cognitives liées aux scores globaux de performance cognitive, de fonction exécutive, de
mémoire déclarative, de vitesse de traitement de l’information, ou de visuoperception.
Conclusion
Après lecture et analyse des cinq articles sélectionnés, le conflit de littérature concernant les
statines et la fonction cognitive demeure toujours présent. De même, étant donné les nouvelles
recommandations de dyslipidémie qui encouragent davantage la prescription des statines et le
vieillissement de la population, je conclus que des études plus grandes et mieux conçues sont
nécessaires pour aboutir à des résultats plus précis concernant l'effet des statines sur la cognition.
Les avantages cardiovasculaires et les avantages cognitifs quoique minimes et douteux
l’emportent sur le risque du trouble cognitif associé à l'utilisation des statines. Par conséquent,
les données actuelles ne modifient pas ma pratique en ce qui concerne l'utilisation des statines.
18
Tableau récapitulatif des articles sélectionnés
Articles
Type d’étude
1 Cramer
2 Bettermann
Étude de
Cohorte
prospective
3 Ancelin
Patients
Durée
N=1674
5 ans
N= 3069
6 ans
N=6830
7 ans
6 mois
4 Muldoon
Étude randomisée en
double aveugle
N=308
5 Feldman
Étude internationale,
multicentrique, en
double aveugle,
randomisé
N= 640
Tests d’évaluation
cognitive
Résultats
les patients traités par
statine étaient moins
3MSE, SEVLT,
susceptibles de
SENAS, IQCODE
développer une démence /
déficience cognitive sans
démence
Les statines peuvent
ralentir le taux de déclin
cognitif et de retarder
3MSE, CDR, ADAS- l'apparition de la MA et
co
de la démence toutes
causes chez les personnes
âgées non connues avec
trouble cognitive
Aucune preuve que les
statines données en fin de
Neurocognitive tests
vie réduisent le risque du
dont
déclin cognitif et de
MMSE
démence
Digit Vigilance,
Elithom Masez,recuring
words,Grooved big
board,Digit symbol,
Détérioration mineure de
stroop interference,Trail la fonction cognitive
making B,Digit
span,Mirror tracing,4wordshort-termMemory
ADAS-cog 11-item, 70- il n’y a pas de différences
72
point scale, ADCSsignificatives entre
semaines
CGIC
Placebo et Atorvastatine
Liste des illustrations
Figure 1 : Flow diagram of participants at baseline and at follow-up by statin use
Figure 2 : ADAS-cog and ADCS-CGIC results, Neurology Journal 2010
Tableau 1 : Results by dementia type
19
p. 6
p. 18
p. 9
Tableau 2 : Baseline lipid lowering agent use and 7-year incidence of dementia
p. 12
Tableau 3 : Performance on Individual Tests of Cognitive Function at Baseline
and after 6 Months of Treatment
p. 15
Tableau récapitulatif des articles sélectionnés
p. 22
Références
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analysis of 60 case reports and review of the literature. Pharmaco- therapy. 2003;23:871-80.
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2. Golomb BA, Criqui MH, White H, Dimsdale JE. Conceptual founda- tions of the UCSD statin
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DOI 10.1007/978-90-481-8622-8
20
4. Cramer C, Haan MN, Galea S, Langa KM, Kalbfleisch JD. Use of statins and incidence of
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