Psychologie clinique 1. La notion de psychologie Vient du grec « psyche » qui veut dire esprit ou âme et logos « étude » Étude de l'esprit ou de l'âme. Mais qu'est ce que l'âme ? Conception de l'homme: le domaine scientifique qui traite de l'humain. Autre façon de voir cela: la psychologie traite d'une forme d'organisation du vivant qui se situe entre deux niveaux: un niveau biologique (qui pousse) et un niveau sociologique (l'autre, ce niveau tire). Entre le biologique et le sociologique, il y a un niveau d'organisation du vivant qui est la psychologie. 1.1.Fondements historiques 1.1.1. Le long passé de la psychologie Différence passé - histoire ? Il y a un long passé de la psychologie mais pas sur ce dénominatif. La psychologie a un long passé mais une courte histoire 1) Platon et les pères de l'Église: séparation de l'âme et du corps Platon se situe au 5-4 ACN Platon propose le dualisme: c'est la séparation de l'âme immatérielle du corps matériel. Dans cette position, ce serait l'âme qui pilote le corps. Il représente un courant philosophique: l'idéalisme. C'est le fait que le réel (les choses matérielles) existe en dehors de l'esprit, il y a prééminence du monde des idées sur la réalité. C'est pour cette raison que l'âme pilote le corps. Cette idée de séparation est reprise par les pères de l'Église. Ce sera le début du protestantisme. 2) La métaphysique Aristote est connu pour son réalisme et sa métaphysique (approche réaliste). Métaphysique: qui parle de la physique, des choses matérielles. Aristote s'oppose à Platon: pour lui l'âme n'est pas le pilote du corps. Il se place dans une position « réaliste »: par rapport à Platon qui propose une séparation claire du matériel et immatériel, pour Aristote l'essence est dans les choses même du monde. Il est le précurseur d'une position moderne. « Comment les Idées, qui sont la substance des choses, seraient-elles séparées des choses ? » « L'âme est au corps comme la forme est à la matière, distincte et inséparable ». C'est paradoxal que ce soit cette pensée qui vaut et non le dualisme de Platon, qui a été repris par les Pères de L'Église, et à cette époque, l'Église est très influente. Galien: il devient la source principale des connaissances médicales dans les sphères d'influence juive, chrétienne et musulmane. Les cause de la maladie vont être recherchée parmi des causes naturelles: les quatre éléments combinés aux quatre qualités physiques influent sur les quatre humeurs (liquide du corps: sang, bile jaune, bile noire, flegme). C'est par l'anatomie que quelque chose va se passer dans notre domaine. « Pourquoi il y a t il des progrès remarquables en anatomie ? » Au 16ème siècle a eu lieu l'Inquisition: on tue et on torture pour ensuite laisser pourrir les cadavres. On les trouve facilement et il y a donc beaucoup de matière pour étudier l'anatomie. On met en carte le corps humain, alors qu'avant cela on se basait uniquement sur l'œuvre d'Aristote. Cela a donc amené une meilleure connaissance et un regard critique sur les textes (pourquoi se baser sur les textes si on peut observer soi-même? Regard critique sur les sources anciennes). On peut comprendre en observant. C'est une émancipation du savoir, on comprend mieux et on comprend qu'on peut comprendre. Une nouvelle science de l'homme nait: anthropologia. Elle va se diviser en anatomia (science du corps) et psychologia (science de l'âme). A partir de là, on retourne vers Platon et les pères de l'Église (avec la Réforme qui a lieu). Peut-être qu'Aristote avait laissé la pensée de croire qu'en ouvrant les corps, on pourrait retrouver les mécanismes d'idées. 1.1.2. XVIème: Premières utilisations et définitions du mot psychologia 1) XVI: premières utilisations du mot psychologia Les ouvrages où figurent les premières apparitions du mot « psychologia » sont des traités de philosophie naturelle ou de physica (Aristote). C'est grâce à une meilleure connaissance de la physiologie qu'est née la nécessité d'avoir une discipline telle que la psychologie. Aristote: dans l'organisation du vivant il y a le végétatif, l'animal et l'humain, et en ce qui concerne l'âme elle est présente en degré (plus d'âme chez l'humain que chez l'animal et le végétatif). Au 16ème siècle il y a eu des abus énormes de l'Église qui ne sont plus gérables. On pêchait violemment puis on se rachetait une âme auprès de l'Église. Il y a eu des protestations contre le pouvoir de l'Église car celle-ci n'est pas fidèle à ses propres principes. Mouvement fondamentaliste: revient au fondement : Platon. Vu de notre époque, ce qu'il se passe montre un retour vers une position dualiste, de manière paradoxale. 1) 2) 3) 4) Dualisme Réalisme Crise de l'Église Retour au dualisme Melanchton revient vers le dualisme de Platon, et s'oppose à Aristote une anthropologie dualiste qui divise l'homme en corps et âme. Ce dualisme de Melanchton est en accord avec les doctrines réformistes du 16ème siècle. Il va attribuer au corps des fonctions jusque là réservées à l'âme. Le cerveau devient l'organe principal des fonctions sensitives et supplante le cœur comme siège de la vie affective et de la pensée. Luther propose une distinction entre homme extérieur terrestre et corporel et l'homme intérieur et spirituel. L'homme extérieur est soumis à la servitude car il y a une partie de l'homme qui nous oblige à calmer sa faim, sa soif,... L'homme n'est donc pas libre car il est sommé d'obéir, de répondre à ses besoins. L'humain peut être aussi fort qu'il le veut spirituellement, mais vulnérable quand on le touche au corps. Pour Luther, la liberté est reçue du Christ. Calvin: le dualisme n'est pas conceptuel d'une réflexion générale mais est traité de manière théologique, à placer dans le cadre de la doctrine religieuse. Intelligence des choses célestes: intérieurement, la pensée donnée par dieu est retrouvée. Cette pensée est capitaine de l'âme. Il faut, par rapport à la raison donnée par les philosophes, avoir une prescription morale, religieuse: mieux vaut s'en remettre à la loi de dieu. C'est de la que vient cette idée très implicite: il y a un for intérieur qui détient une vérité. Il faut être fidèle à cette voix intérieure, retourner à soi (on parle de la psychologie comme ce qui va aller vers l'intériorité du sujet et va en dire sur sa vérité). 2) XVI: les premières définitions de la psychologia: une prise de position dualiste en contrepoint à Aristote et en conformité avec les dogmes chrétiens Melanchton créé un mot intentionnellement et lui donne un statut à part entière: c'est une prise de position dualiste qui fonde un nouveau champ de la connaissance. Homo duplex (homme double): du fait de cette distinction entre anatomie et psychologie. La psychologie a comme objet l'âme rationnelle et comme but de décrire les facultés. Cette définition est déjà assez moderne. Cette psychologia est dualiste: elle est la science de l'âme raisonnable unie à un corps lorsque ce corps animé est un être humain. L'anatomie est le modèle par excellence de toute science. Il y a un grand enthousiasme: la science peut procéder par découpage et par mise en carte de l'agencement (du plus simple au plus compliqué). Snellius « L'âme raisonnable de l'homme est la pensée qui, conjuguée au corps, parachève l'homme. Les choses physiques plus proches des corps naturels qui se meuvent naturellement, possèdent une étendue et à cause de cela occupe un lieu ». « La faculté de l'âme rationnelle est la pensée ou volonté. La pensée est la faculté de l'âme de discourir et de penser à propos des choses qui sont et ne sont pas ». Par ce texte, l'attribut de l'âme est la pensée, et le corps se définit par le lieu de l'espace qu'il occupe, sa grandeur ou extension. La psychologie est donc fille de la Réforme et de l'esprit critique qui s'installe et déconstruit lentement tous les domaines du savoir. La déconstruction principale porte sur l'œuvre d'Aristote. Son modèle de scientificité est emprunté à l'anatomie qui pose à l'avant-plan sa démarche résolutive-analytique. 3) XVII: la diffusion du mot psychologia L'emploi du mot « psychologia » reste plutôt confidentiel. C'est en 1653 qu'il fait son entrée dans un dictionnaire: « Anthropologia, l'anthropologie est la science naturelle de l'homme. Psychologia, la psychologie est la doctrine de l'âme ». A la fin du XVIIème siècle, cette façon de présenter l'anthropologie en deux partie, anatomie et psychologie, est très largement répandue. 1.1.3. XVII XVIII L'apport de la philosophie 1) Descartes: dualisme et rationalisme Descartes est reconnu en tant que philosophe et non en psychologue (il aurait pu puisque le nom de psychologie avait déjà fait son apparition). La division de l'anthropologie est une source d'inspiration pour le dualisme de Descartes. Il distingue l'anima (vient de « bouger », corps animés) de la mens (caractérise l'être humain). A l'opposé des réformateurs (ou l'âme est unie au corps), Descartes précise bien la séparation (pas d'union possible âme-corps: ils relèvent d'une ontologie différente). Pour Descartes, les idées sont donc innées. C'est un dualisme très radical. L'âme et le corps ne peuvent se toucher. Position assez intenable: avec un peu de bon sens, on se dit que ce n'est pas possible. 2) L'empirisme Les empiristes s'opposent à Descartes. On reste dans la philosophie. 1) Pères fondateurs: dualisme de Platon 2) Réalisme d'Aristote (dure assez longtemps grâce aux textes qui perdurent) 3) Crise de l'Église accompagné d'une grande violence avec l'Inquisition (l'anatomie prend naissance, on découvre le corps). Pas d'idées, pas de souvenirs ni passion, il faut un autre domaine: la psychologie. 4) Réponse de la philosophie avec le dualisme de Descartes avec en réaction les empiristes et associationnistes. Les empiristes anglais rejettent l'idée de connaissances innées. Ils supposent que l'esprit de l'enfant est une table rase et que son contenu provient de l'expérience sensorielle du monde extérieur: ils posent ce que Descartes a rejeté. Par les sens, nous sommes touchés par le monde extérieur, des idées se forment et s'associent. Ils donnent le coup d'envoi à la théorie associationniste de l'apprentissage. Il n'y a pas d'hypothèses d'idées innées. Les images se regroupent selon leur ressemblance, leur contiguïté (fait qu'ils viennent ensemble) et donc des idées naissent d'autre idées, et ce par association. Par rapport à Descartes qui dit que l'esprit et le corps ne se touchent pas, les empiristes disent que les choses peuvent toucher le corps par les sens et laisse une impression, qui donnera lieu a des images mentales. Hobbes « Toute conception procède de l'action de la chose dont elle est la conception » Hobbes dit que les images mentales ne viennent pas vraiment du fait qu'on les voit, les sentent, mais qu'elle seraient construites par l'action que l'on a avec (il y a une bouteille, on la prend, on verse l'eau,...). La représentation mentale qu'on s'en fait se construit à partir de la motricité et non par la perception. (Motricité: ce qui sort du corps. Perception: ce qui entre dans le corps.) Hobbes est d'accord avec le côté perception mais rajoute cette notion de motricité. Les représentations s'activent en grande proportion sinon exclusivement avec la motricité, par la façon dont on interagit avec l'objet. Théorie de l'association: « ce soir je dois organiser un diner donc avant de rentrer je dois aller au magasin et acheter telles choses puis les préparer » c'est un raisonnement, c'est rationnel. A coté de cela il y a une autre forme de pensées: les choses irrationnelles. Cela va former des pensées, une chaine d'association, et ces pensées semblent incohérentes, décousues, car elles ne viennent que d'une chaine d'associations. Déjà chez Hobbes, on voit un mode de pensée par association et un autre par raisonnement. Ces modes de pensée seront ensuite repris par Freud. Locke Il réfute la thèse des idées innées. Pour Locke, elles nous viennent de l'expérience. L'esprit humain est une table rase remplie par l'expérience. Il pose les bases de la théorie associationniste. Les choses peuvent s'associer par opposition (blanc-noir), par contiguïté, par ressemblance. 1.1.4. XIX: Fondements de la psychologie scientifique. 1) Naissance de la psychophysiologie en Allemagne La psychologie, en tant que discipline scientifique autonome nait à la fin du 19ème siècle quand elle s'émancipe de la philosophie. « Dans quel contexte cela est-il possible ? » Les hypothèses transformistes (transformations graduelles et héritées) de Lamarck et la théorie de l'évolution de Darwin (peut-on expliquer la diversité des espèces par rapport à un mécanisme naturel ?). Darwin fait un contrepoint: les grandes questions de l'humanité auxquelles des réponses rationnelles sont possibles. « Où est l'importance pour la psychologie ? » Là où elle s'est établie en laissant tomber Aristote et en prenant le dualisme, les hypothèses transformistes de Lamarck et la théorie de l'évolution de Darwin vont démontrer que l'humain n'est qu'une évolution des espèces animales. Il y a donc une idée de degrés entre homme et animal, et non pas de catégorie. Ce sera un puissant appui pour les réfutations critiques d'une âme-substance, privilège de l'homme. Comme l'anatomie a été fondée sur l'observation et la mise en carte des corps, Darwin se fonde sur l'observation d'espèces biologiques. Cette observation a quelque chose d'empirique. Conséquences: en Allemagne, les scientifiques répudient les spéculations rationnelles en faveur de la matière, des faits, de la mesure et de l'expérience. La psychophysique va essayer de mettre en carte un phénomène physique (une bouteille) et un phénomène psychique (la perception que j'en ai) et va voir quelles sont les régularités, points commun entre ces phénomènes. Weber propose que l'on passe de la physiologie a la psychologie. Il mène des recherches sur les sensations tactiles et visuelles. Si la quantité d'excitation est augmentée peu à peu, la sensation première demeure d'abord inchangée. Pour que le sujet perçoive l'accroissement, il faut une augmentation d'une certaine importance. La loi de Weber: « Alors que l'excitation croit ou décroît d'une manière continue, la sensation change de manière discontinue ». Il s'est associé à Fechner qui déduit mathématiquement une loi plus précise: « La sensation croit comme le logarithme de l'excitation ». Ces recherches marquent l'introduction de la mesure en psychologie La psychophysiologie, fondée sur les rapports entre des états psychiques et des états physiologiques, détrône la psychophysique. Wundt étudie la perception sensorielle. Il s'intéresse aux temps de réactions qui seront pris comme paramètre. Il créé le premier laboratoire de psychologie qui va être fréquenté par des étudiants de divers pays et notamment par Hall qui va fonder un laboratoire mondialement connu. Son but: Élaborer une psychologie n'admettant que des « faits »: en contraste avec la philosophie qui n'a pas comme méthode l'empire. Recourant dans la mesure du possible à l'expérimentation et à la mesure Il publie un livre en 1874: son but est de définir un nouveau domaine de la science. Il veut également déterminer le rapport des phénomènes psychiques avec leur substrat organique, particulièrement cérébral. Il veut démontrer que la sensation et l'image sont le produit des passages de l'influx nerveux dans les neurones cérébraux. La psychophysiologie: rapport entre la stimulation et le substrat organique. 2) Les positivistes anglo-saxons: quand les philosophes commencent à revendiquer pour leur science le terme de psychologie Monde héritier des empiristes et associationnistes. Il y a une grande tradition philosophique héritée des prédécesseurs. Les positivistes revendiquent pour leur domaine le terme de psychologie. Le positivisme d'Auguste Comte: se positionner par rapport à la religion, l'esprit scientifique va remplacer les croyances théologiques ou les explications métaphysiques décrire à de bons côtés. Ici, il y a un mouvement de contrepoint. Mill a beaucoup influencé Freud. C'est un associationniste. La connaissance des processus nerveux est encore trop imparfaite pour qu'on puisse miser sur la physiologie C'est important car c'est un philosophe qui reconnait la discipline de la psychologie en tant que telle. Il la reconnait comme science en tant que telle et indépendante (c'est une science d'observation et d'expérimentation, qui a pour objet de dégager les lois selon lesquelles les phénomènes de l'esprit s'engendrent les uns les autres). C'est une prise de position très claire. On peut construire une science indépendante en travaillant avec des concepts psychologiques. On commence a bâtir un modèle de l'esprit humain sans recourir à des concepts physiologiques ou physiques. On recourt à un appareil conceptuel psychologique en tant que tel (représentations, affect, refoulement, défensivité,...). Avec cet appareillage, on peut commencer à construire, sans recourir aux philosophes, à la physiologie,... Spencer va attribuer à la psychologie une place à côté de la biologie. Le psychisme se constitue de rapports préétablis dans le système nerveux, nés de rapports réels dans le monde environnant à un certain moment de l'évolution. Il attribue donc un rôle essentiel à l'hérédité des qualités acquises: c'est pas elle qu'il veut rendre compte des aptitudes individuelles transmises, enrichies, à la génération suivante. James est le père fondateur par excellence de la psychologie scientifique américaine. Il va s'efforcer de créer une psychologie scientifique. Il est beaucoup plus biologiste que Mill. Il crée à Harvard une salle destinée aux expériences et aux démonstrations psychologiques. Il a également écrit un best-seller « Principes de psychologie ». On sent que le domaine de la psychologie commence à prendre de l'ampleur, du contenu. Un concept absolument classique de la psychologie est la notion de flux de conscience, qui nous vient de James. Il s'agit à nouveau d'un point de vue positiviste car la psychologie est prise en tant que science naturelle (importante du cerveau) et on écarte tout ce qui se rattache à la métaphysique. La théorie James – Lange des émotions 1) Une situation à caractère émouvant se présente (un ours sauvage se présente soudainement à nous 2) Des modifications organiques suivent immédiatement la perception 3) C'est la conscience que nous en avons à mesure qu'elles se produisent qui constitue l'émotion comme fait psychique (suite à cette émotion nous mobilisons notre corps) Nous avons peur de l'ours parce que notre corps réagit et non pas parce qu'on perçoit l'ours et qu'il est dangereux. L'émotion se fait en aval de ce que l'ours a déjà engendré dans notre corps. C'est le fait de prendre conscience de la situation d'alarme qui mobiliserait nos viscères et la théorie de James – Lange montre le contraire. L'émotion traduit une réponse aux modifications physiologiques. Sans les états corporels, la perception n'engendrerait aucune charge émotionnelle. Cette théorie est partiellement correcte. 1.1.5. Quelques étapes de la « courte histoire » de la psychologie La psychologie définie comme science est donc double dans ses modèles si on compare le courant allemand de la psychologie des facultés au courant anglais empiriste et positiviste: ils partagent tout deux l'ambition de créer une psychologie comme science empirique. Ce sont ces deux écoles qui font de cette discipline la psychologie moderne. La méthode résolutive-recompositive vise le même objectif que celui que poursuivaient tout au long du XVIème siècle les anatomistes, à savoir expliquer, déployer l'être humain dans ses éléments constitutifs et dans sa double dimension corporelle et mentale: fondamentalement, il s'agit de couper un « petit bout », de voir les éléments constitutifs de base puis de les remettre ensemble. C'est important car les mouvements initiateurs sont ceux sur lequel les générations suivantes vont se baser. Cette méthode est analysante, regardant l'homme dans ses constituants. A la fin du 19ème siècle, la psychologie prend un essor. 1) Études de l'apprentissage L'expérience du médecin Pavlov C'est à la fin du 19ème siècle que Pavlov va chercher à élucider une caractéristique particulière d'apprentissage qui est connue depuis l'Antiquité. Son objectif est de développer un modèle animal d'apprentissage par association qui pourrait être étudié rigoureusement en laboratoire. 1) Situation avant le conditionnement avec un stimulus inconditionnel (dans l'exemple, la nourriture). On dit inconditionnel car il n'y a pas d'apprentissage préalable: il y a une réponse (ici, salivation) qui est dite « innée ». Le conditionnement pavlovien part toujours d'un comportement inné (le chien salive à la vue de nourriture). 2) L'étape cruciale est le conditionnement. Avant celui-ci, si on fait entendre au chien une sonnette (toujours dans l'exemple donné), elle ne provoquera pas de réponse spécifique (la salivation). On parle de stimulus neutre. Lors du conditionnement, on va combiner le stimulus inconditionnel (la nourriture) avec le stimulus neutre (la sonnette), qui est alors appelé le stimulus conditionnel. A ce moment-là, la réponse est toujours due au stimulus inconditionnel (le chien salive à la vue de la nourriture). 3) Le changement se fait après conditionnement: le stimulus neutre devient le stimulus conditionnel. Sans le stimulus inconditionnel, il provoquera la même réponse (la salivation). Une nouvelle association réflexe est née entre le centre auditif ou visuel et le centre salivaire: cette nouvelle association est alors le réflexe « conditionné ». En résumé Le conditionnement classique pavlovien se fait sur des comportements involontaires (des réflexes). A un réflexe ( S -----> R) existant est associé par apprentissage, le R à un nouveau S' (S' ------> R) Pourquoi Pavlov reçoit-il le Prix Nobel pour quelque chose qui est connu depuis l'Antiquité ? Simplement car il a étudié rigoureusement ce phénomène: il a fait des expérimentations, pris des mesures,... C'est avec Pavlov qu'est établie une nouvelle discipline: la réflexologie. La réflexologie permet de mieux comprendre comment certains états d'âme, apparemment mystérieux, peuvent s'installer par les souvenirs associés à certains stimuli qui jouent le rôle de déclic. 2) Le behaviorisme ou comportementalisme La psychologie: l'étude des interactions de l'individu avec le milieu qui se concentre sur l'étude du comportement observable et du rôle de l'environnement: dans cette définition, on ne parle plus de science du mental, des états mentaux, mais on parle d'interactions de l'individu avec son environnement. On ne parle pas d'états internes mais de l'environnement. Le comportement: ce que l'organisme fait L'apprentissage: une modification du comportement observable résultant de la conséquence d'une réponse à des stimuli extérieurs ou intérieurs: en règle générale, quand il y a un stimulus dans l'environnement, ça va influencer le comportement (parfois observable) de l'individu. Le behaviorisme considère l'esprit humain comme une boite noire dont les réponses (le comportement) sont analysées comme une fonction des entrées (les input sensoriels) sans qu'il soit nécessaire de faire des hypothèses supplémentaires sur les mécanismes impliqués (ce qu'il se passe dans la boite noire): On a une boite noire (états mentaux) et on sait juste ce qui y rentre et ce qui en sort. On va essayer de mettre en relation les comportements avec l'environnement, comme si il n'y avait rien de bien important au milieu. Exemple: la psychologie sociale regarde ce qui ressort de l'environnement pour influencer le comportement. Les individus ne vont pas tous donner la même réponse aux stimuli. Quand on regarde ce qu'il y a au milieu, on voit que les états mentaux sont des médiateurs importants entre l'un et l'autre. Cette boite noire est l'icône du comportementalisme. Watson Le behaviorisme est fondé par Watson, qui s'appuie sur la découverte des réflexes conditionnés. La psychologie se construit sur les modèles de l'apprentissage (effervescence due aux lois de l'apprentissage de Pavlov): à partir de quelques réactions primitives, tout le comportement humain peut être expliqué par un jeu de conditionnement. Pour le comportementalisme, cette définition est percutante (c'est la science du couple stimulus-réponse). Il va mener des expériences dans des pouponnières expérimentales. La plus connue est celle du Petit Albert. 1) Un bébé ou un enfant n'éprouve pas de peur à la vue d'un certain objet ou animal. 2) Ces objets ou animaux peuvent vite devenir des stimuli conditionnés de peur, en les associant à certains stimuli primaires (des bruits violents,...). On va présenter un objet (un ours en fourrure blanche) en même temps qu'un stimulus naturellement anxiogène (un bruit pénible et soudain). L'enfant (le Petit Albert) va associer la vue de l'objet à ce stimulus anxiogène, et va développer une phobie. La peur du Petit Albert va se généraliser à tous les objets plus ou moins proches de l'ours en peluche. 3) Selon Watson, on pourrait déconditionner ces réactions acquises de peur en leur substituant une réaction positive. Cependant, rien n'a pu libérer le Petit Albert de sa phobie. Les béhavioristes excluent du domaine de la psychologie la conscience, et donc tout recours à l'introspection. Ils éliminent la subjectivité. Ils n'admettent que le comportement objectif. Le béhaviorisme de Watson s'en tient exclusivement à l'observable, au contrôlable et au mesurable. Skinner Il est le fondateur du comportementalisme radical. Du conditionnement classique pavlovien, il distingue le concept de conditionnement opérant. La différence tient au fait qu'au lieu de se baser sur des réflexes, le conditionnement opérant se base sur des comportements volontaires. Le sujet émet de lui-même une réponse (R) et par la suite, il y a un stimulus (S) : R ----> S Si S= une récompense, R augmentera. Si S= une punition, R diminuera. Une action est conditionnée de manière opérante quand sa fréquence augmente. Résultat: les comportements sont sélectionnés par leur conséquences sur l'environnement. Béhaviorisme radical: Skinner étend cette théorie du comportement à l'espèce humaine: les stimuli ne sont que plus complexes, et forment alors une « situation ». Il met au point la Boite de Skinner: c'est un dispositif de laboratoire, où il y a des rats et plusieurs modalités (un plancher électrifié pour donner de légères décharges électriques afin de mettre l'animal en situation d'anxiété, un distributeur de nourriture afin de récompenser l'animal, des lumières qui peuvent servir comme stimuli de l'environnement, un bouton poussoir par lequel le rat peut avoir activement un comportement dans le box). Par ce dispositif, l'expérimentateur peut faire en sorte que la nourriture soit délivrée lorsque l'animal a appuyé un certain nombre de fois sur le levier, mais uniquement lorsqu'un son aigu a été précédé d'une lumière verte. Bandura Il a proposé une théorie de l'apprentissage social: l'individu est au cœur d'une triade d'interactions entre facteurs cognitifs, comportementaux et contextuels. Les sujets sociaux sont à la fois producteurs (ils engendrent des stimuli dans l'environnement) et produits (leur comportement est influencé par les stimuli de l'environnement) de leur environnement. La notion d'auto-efficacité devient centrale dans cette conception. L'auto-efficacité représente les croyances qu'un individu a dans ses propres capacités d'action, quelles que soient ses aptitudes objectives. Cela veut simplement dire qu'à capacités égales, on est plus efficace lorsqu'on est convaincu de son efficacité. Il a mené l'expérience « Bobo Doll » 1) Des enfants visionnent un film dans lequel un adulte frappe violemment une poupée gonflable. 2) Après visionnement, on met les enfants dans les mêmes conditions que ce qu'ils ont vu dans le film. Mais d'abord, ils n'ont pas le droit de toucher à la poupée. On crée de la frustration, de la colère. 3) Lorsqu'ils peuvent y toucher, on remarque que 88% des enfants imitent le comportement agressif. Après 8 mois, 40% des mêmes enfants reproduisent encore le comportement violent qu'ils avaient observé dans le film. Comment se fait-il que 12% des enfants ne reproduisent pas ce comportement ? Comment cela évolue-t-il ? 3) Le cognitivisme On prend la pensée comme un processus de traitement de l'information. Avant cela, la pensée était innée, dérivée des sens, de la motricité. Le cognitivisme se situe dans l'après-guerre, avec les ordinateurs qui vont révolutionner notre façon de penser. Le cognitivisme va étudier l'ensemble des fonctions cognitives. Le rôle central de la cognition s'oppose au comportementalisme: il cherche à caractériser le lien entre stimulus-réponse observable, mais également l'organisation des processus internes impliqués. Ici, on va s'intéresser à ce qui se passe dans la boite noire. La métaphore du cognitivisme est celle du cerveau-ordinateur: l'information fait l'objet d'un traitement séquentiel ou parallèle (en même temps que le stimulus est traité dans des voies différentes) en circulant entre les différents processus qui constituent l'esprit humain selon la structure schématique: Entrée (perception) – traitement cognitif – sorties (comportements) On remplace la boite noire (comportementalisme) par la notion de traitement cognitif. Ces processus mentaux ont reçu le nom de modules, qui sont des mécanismes relativement indépendants les uns des autres. 4) Les neurosciences cognitives Penfield Il va traiter des patients épileptiques en détruisant les neurones du cerveau où les accès épileptiques trouvent leur origine. Ces opérations ne doivent pas se faire sous anesthésie générale car on n'a pas de douleur lorsqu'on ouvre le cerveau. La stimulation électrique du cerveau va permettre d'identifier les parties du cortex consacrée à la sensation et à la motricité: on remarque que les souvenirs sont conservés dans des endroits spécifiques du cerveau (lobe temporal). Delgado Il montre combien l'activité du substrat neurophysiologique contribue au comportement. C'est lui qui a le plus utilisé les électrodes. A partir des années 1970, l'EEG permet de mesurer des potentiels électriques depuis la surface du scalp qui reflètent la dynamique de l'activité globale des neurones L'analyse de cette dynamique ouvre une voie d'accès à la séquence temporelle des activités nerveuses identifiée à la séquence d'opérations mentales. Durant les années 80 PET (tomographie par émission de positons) puis IRM f (imagerie par résonance magnétique fonctionnelle). 1.2.Définitions actuelles Nous sommes partis de cette définition de la psychologie en tant que « conception de l’homme ». Les définitions, que nous avons rencontrés dans l’histoire de la psychologie, ont souvent étés, implicitement, des réponses ou des prises de positions par rapport à des questions fondamentales à propos de l’humain. 1.2.2. Scientificité On considère la psychologie comme une science parce qu'elle se base sur la méthode scientifique pour élaborer un corpus de connaissances systématiques dont l'objet est la description et l'explication de l'humain. La méthode scientifique implique un refus des dogmes et un examen raisonné et méthodique du monde et de ses nécessités. Elle vise à produire des connaissances résistant aux critiques rationnelles, à l'observation (sciences empiriques) et à l'expérimentation (sciences expérimentales), ainsi qu'à améliorer nos moyens d'action sur le monde en mobilisant ces connaissances. La discipline scientifique de la psychologie est née de la philosophie et s'en est émancipée par et grâce à ses méthodologies, descriptives et expérimentales d'abord, puis également clinique. Par la suite, elle s'est émancipée également tant des sciences biologiques que des sciences sociales par la spécificité de son objet: dans l'organisation du vivant, l'objet de la psychologie se situe entre le biologique et le social. 2. La notion de psychologie clinique Étymologiquement, clinique renvoie au grec « klinê », qui signifie « lit ». Dès qu'on énonce le nom patient, on est en psychologie clinique. Les autres disciplines de la psychologie vont parler de participants, élèves, employés,... En plus de parler de patient, on parle de souffrance (le patient va adresser sa souffrance au psychologue clinicien). La psychologie clinique s'efforce de comprendre le sujet dans sa singularité, elle s'adresse à autrui. En opposition à la psychologie clinique, on a la psychologie introspective. L'APA est l'American Psychological Association: elle regroupe tous les psychologues aux ÉtatsUnis, et a une section clinique. La définition de la psychologie clinique qu'elle donne est: l'étude scientifique et l'application de la psychologie dans le but de comprendre, de prévenir et de soulager les détresses et dysfonctionnements d'ordre psychologiques et de promouvoir le bien être subjectif et le développement personnel. Au centre de la pratique du psychologue clinicien, il y a le diagnostic psychologique et la psychothérapie Dans cette définition, on retrouve une prise de position. La définition proposée par Bazan est différente de l'APA, car elle prend en compte la rencontre: la rencontre part d'un nombre de concepts qui sont communs à tous les humains. Dans la rencontre, il y a toujours un moment où nous sommes dépouillés (conversation: humain face à un autre). Nous sommes tous dans la condition humaine, et dans la rencontre clinique, inviter l'autre, lui offrir la parole, ce sont des moments de rencontre, ou nous sommes humain en face d'humain. Conceptualiser cela, c'est une autre position. Il y a autre chose à souligner dans cette définition de l'APA, qui diffère d'autres positions: dans cette définition, on énonce en tant que tel « dans le but de prévenir ». Depuis quelques décennies, on est face à une véritable rage préventive. Il y a beaucoup de moyens mis à la disposition des experts pour établir une anticipation de la maladie mentale. Il faut faire très attention à ce statut d'anticipation en psychologie Faire de la prévention, c'est faire de large screening (les screening ont commencé avec le TDAH et la psychopathie dans les écoles maternelles, pour repérer les enfants qui sont susceptibles de développer ces pathologie sur un plan pré-symptomatique, c'est-à-dire avant qu'ils ne développent leurs symptômes). La prévention est une position délicate, puisqu'avant même les symptômes, on établit un diagnostic. Ce diagnostic est d'ailleurs plus social que psychique. Prendre cette position, c'est se donner cette autorité d'établir un diagnostic pré-symptomatique. La seule réponse donnée ensuite à toutes ces maladies, c'est la médication, et actuellement il n'y a jamais eu autant de médication de la petite enfance et de l'adolescence. Mais il faut faire attention à cela, les psychologues ont une responsabilité (par exemple, des adultes devenus accros à la ridatine). En paradoxe à tout cela, les moyens accrus qui ont été mis en place dans le domaine de la psychologie mentale ont mené à l'implosion de la maladie mentale. Les résultats sont contreproductifs. C'est l'ironie dans ce domaine. Quelle est la relation entre le psychologue clinicien et le psychiatre ? Le premier ne peut pas prescrire de médicaments, il est plutôt placé dans l'étape de screening et de diagnostic. La réponse médicale est plutôt donnée par le psychiatre, qui font évidemment des diagnostics eux aussi. Les psychiatres travaillent de façon autonome, et si ils travaillent avec des psychologues cliniciens, c'est parce qu'ils voulu. 2.1.Fondements historiques C'est avec Freud qu'est née la psychologie clinique moderne: toutes les cadres psychologiques modernes sont des formes qui au départ, ont pris d'une façon ou d'une autre la cure psychanalytique comme référence, et puis qui s'en sont démarqués. Il y a trois temps dans la clinique 1) Une clinique du regard, car elle est très calquée sur la clinique somatique (de la médecine). 2) Un basculement épistémologique qui s'est fait avec Freud, et qui a fait naitre la psychologie clinique. 3) Ensuite, une clinique de la voix, car elle prend en considération la parole du patient. 2.1.1. Avant Freud: une clinique du regard 1) Magnétisme, hypnose et phrénologie Au 19ème siècle, les recherches sont pris dans la fascination des progrès scientifiques du 18ème siècle et par le « merveilleux scientifique ». La science étonne, elle a un côté moderne, de popularité. En 1774: Mesmer Magnétisme animal ou mesmérisme: il fait état de la première guérison réussie à l'aide de ce phénomène. Il y a un effet bénéfique sur la santé. Il y a un fluide magnétique qui active l'organisme par le canal des nerfs: il peut se transmettre chez l'homme par passes et attouchements, ou à l'aide d'une baguette de fer. Par ces moyens, on peut guérir les maladies ainsi que les maladies nerveuses. En 1775: Lavater La physiognomonie: étude des caractères. Lavater va établir un système de signes morphologiques qui permet de connaitre le caractère d'un individu en étudiant et en observant les traits de son visage. On se retrouve face à une fascination du regard par rapport au visage. Gall La phrénologie est sa théorie concernant la localisation des fonctions cérébrales dans des régions précises du cerveau, repérables au niveau du crâne. Par rapport à cette anatomie du paysage, on va dire quelque chose du caractère (bosse des maths par exemple). La phrénologie est une erreur, mais elle va ouvrir la voie à la psychiatrie moderne. 2) le traitement moral des aliénistes dans les asiles du 17ème au 19ème siècle Avec l'urbanisation de l'Europe se crée une marginalité où se confondent les gens perdus, en détresse psychologique, les fous, et les criminels. Plutôt que de s'orienter vers la charité, on va mettre en place des villes où ces tranches de population seront enfermées. On ne va faire aucune différence entre un fou ou un criminel. C'est le « Grand Enfermement ». D'un point de vue de la thérapie, on va faire appel au magique et au religieux: par exemple, on jette les gens d'un wagon qui ne fonctionne pas pour que ce balancement donne l'impression d'un pèlerinage, et ainsi avoir un effet thérapeutique. L'asile est de l'ordre du zoo: on peut y pratiquer une certaine forme de voyeurisme. . Sydenham Avant, on pensait que l'hystérie était causée par le fait que l'utérus se détache de son endroit d'origine pour aller causer des lésions dans le reste du corps. Dans la croyance populaire, il y a un lien entre l'anatomie et l'hystérie. Sydenham va marquer son désaccord avec cette théorie utérine de l'hystérie et cette croyance populaire: l'hystérie est une maladie de l'esprit, donc l'homme est aussi susceptible d'hystérie. Cullen Il propose une définition de la névrose: ensemble d'affections du sentiment et du mouvement, sans fièvre ni lésion décelable, due à une altération du système nerveux et non pas due à l'atteinte d'un organe du corps. La névrose est une maladie dont on ne peut trouver une cause organique. On parle de maladie car il y a affection du sentiment et du mouvement due à une altération du système nerveux. Tuke Il fut considéré comme clinicien, alors qu'à ses débuts il n'a rien à voir avec la psychologie: il était un commercial. Il fait partie d'un mouvement religieux issu du protestantisme, assez orthodoxe, qu'on appelle la secte des Quakers. Il est le fondateur de la psychiatrie en Angleterre, et va contribuer à l'humanisation de la condition des malades mentaux en créant un établissement « la Retreat »: il révolutionne la pensée de l'époque en instituant le « traitement moral » qui est un ensemble de contraintes morales et religieuses (réflexion qui motive cette démarche) incarnant les valeurs puritaines et bourgeoises dans le cadre d'une structure familiale (humanisation) où le malade était considéré comme un enfant. C'est un vrai progrès pour l'époque, mais actuellement, on pourrait le contester. Il y a une conceptualisation de comment il faut s'y prendre avec les aliénés qui ne sont plus considérés comme des malades mentaux mais comme des personnes à comportement social déviant et qui menacent la cohésion de la société. Pussin Pour lui, il y toujours des traces de raison chez un aliéné qui permettent d'envisager une thérapie. Pinel Il va procéder à l'abolition des chaines qui lient les malades mentaux dans les asiles pendant la Révolution française et va contribuer à l'humanisation de leur traitement. Par cela, il montre une volonté d'interprétation, de compréhension et d'intervention proches du malade, qui ne sera plus considéré comme un aliéné, mais comme un malade que l'on peut aider. Pinel est un nosographe (noso= maladie, graphe= écrire, littéralement: quelqu'un qui décrit les maladies): il tâche de comprendre les maladies, et va les décrire moins par leurs symptômes que par les organes lésés. Il applique aux troubles mentaux la méthode analytique: chaque symptôme anormal doit conduire à la découverte d'une cause organique ou fonctionnelle, c'est-à-dire qu'il veut classer les maladies en fonction de leurs causes organiques. Il s'inspire des idées de Pussin pour instituer son « traitement moral »: il s'agit de conditionner les malades par un système de punitions et de récompenses. Pinel opère alors une véritable révolution dans le traitement des aliénés, en substituant aux chaines et aux brutalités un régime de douceur et d'humanité. Contrairement à Tuke, il adhère à un idéal républicain et laïc. Esquirol Il va approfondir la nosographie de Pinel et va être le premier à faire une distinction entre Hallucinations: perceptions sans objet externe, produites et construites par l'esprit. C'est une construction de l'esprit qui se détache totalement de la réalité, il n'y a pas de repaires concrets pour voir certains objets. Les hallucinations vont devenir les symptômes qui caractérisent les psychoses. Et illusions: erreurs de perception, mauvaise interprétation des stimuli réels. Contrairement aux hallucinations, tout le monde peut être sujet à des illusions. Bayle Il décrit un état de démence avec paralysie générale incomplète (c'est un stade avancé de la syphilis). Il veut prouver que l'aliénation mentale est quelquefois le symptôme d'une inflammation chronique de l'arachnoïde. La cause physiologique serait donc cette inflammation de l'arachnoïde (membrane crânienne). Le modèle anatomo-clinique de Bayle devient l'idéal et les aliénistes vont chercher à l'appliquer à la pathologie mentale. Dans une perspective organiciste, la psychiatrie lie son sort à la neurologie, à la poursuite des lésions du système nerveux. Fournier Il montre que cette inflammation a une cause précise et repérable: la syphilis. Morel La théorie de la dégénérescence: l'origine des maladies mentales est héréditaire, traduisant la transmission d'un terrain « taré » d'une génération à l'autre, avec aggravation de génération en génération. On fait un parallèle avec la théorie de l'évolution: la tare est acquise à une génération, et est transmise à la suivante. 3) La psychiatrie (française) à la fin du 19ème siècle- début 20ème Le neurologue Jean-Martin Charcot est un fondateur de la neurologie moderne et un précurseur de la psychopathologie. La psychopathologie est l'étude des troubles mentaux ou psychologiques. Elle considère les maladies, les entités, les structures,... Elle est très spécifique. La psychologie clinique s'adresse à autrui, elle est plus large car il s'agit de souffrances en général. Il devient chef de service à la Salpetrière. On y effectue différents traitements: Traitements classiques (douches froides, électrisations, bains de souffre, repos): faire cesser les symptômes (il y a une idée derrière ces traitements). Traitements psychiques (le traitement moral (ce qui est bien ou pas), traitement autoritaire (tu arrêtes de...) et hypnose (à la suite du mesmérisme de Mesmer): adresser le problème sous-jacent). L'hystérie à cette époque Cullen propose une définition de l'hystérie: les symptômes de l'hystérie simulent une pathologie organique pour laquelle aucune anomalie neurologique n'existe (il n'y a aucune cause organique sous-jacente). A cette époque, les symptômes sont la paralysie, les troubles de la parole (aphasie) ou de la sensibilité (on se sent plus rien tout d'un coup, on a des picotements comme si le membre était endormi,...), des crises pseudo-épileptiques, des comas psychogènes (comas générés par quelque chose de psychologique). Ces symptômes sont valables pour cette époque là, pas actuellement. En ayant recours à l'hypnose, Charcot distingue l'hystérie de la simulation: il fabrique expérimentalement des symptômes hystériques pour aussitôt les faire disparaitre, ce qui prouve que les hystériques ne simulent pas. Il démontre que la catatonie, qu'il peut évoquer sous hypnose, est de la même nature que la catatonie organique, qui est une raideur sans tremblements. La catalepsie est l'inverse de la catatonie, et est caractérisée par une grande plasticité. Il réhabilite donc l'hypnose comme un fait somatique propre à l'hystérie, et l'utilise comme traitement: on peut suggérer des symptômes sous hypnose, on peut donc également les « décommander ». Après hypnose, le sujet fait preuve d'amnésie. Les membres de l'École de Nancy, dont a fait partie Bernheim, considèrent que ces découvertes sont le fruit de la suggestion de l'hypnotiseur (la suggestion est centrale dans l'hypnose et tout le monde peut être hypnotisé, c'est-à-dire que l'on peut provoquer ces symptômes même chez des patients non hystériques). Ils considèrent également que l'amnésie n'est pas obligatoire, elle est également la suggestion de l'hypnotiseur. Suite à Sydenheim, Charcot démontre l'existence de l'hystérie masculine: il ouvre une clinique ambulatoire pour hommes, qui veulent venir en consultation sans être pris en charge résidentielle. 1) Le cas du forgeron: il n'a aucun antécédent pour l'hystérie, la seule indication est un trauma, une brulure relativement circonscrite qui mis 6semaines à guérir. C'est après cela que les symptômes hystériques commencèrent à apparaitre. 2) Le cas de Le Log: ce jeune homme se heurta à un char, et bien qu'il ne fut pas écraser par celui-ci, il développe une symptomatologie à partir de la taille ainsi qu'un mutisme. Cela correspond à un symptôme suggéré par hypnose. Charcot fait alors l'hypothèse d'une hystérie. A deux reprises, il trouve une cause identique: un trauma psychique. Comme deuxième élément, il retrouve à chaque fois une période de latence, où rien ne se passe (il est parfois difficile de trouver une étiologie car il n'y a pas de relation de cause à effet). La maladie peut se déclarer suite à un autre événement, souvent moins grave que le premier. Par rapport au symptôme de Le Log, la paralysie qu'il présente est une paralysie des membres inférieurs à partir de la taille: il a eu peur que le char lui roule dessus, et qu'il aie les membres brisés. Il se représente donc la paralysie, et donc elle suit les représentations qu'il se fait de l'anatomie. Une vraie paralysie suit les régularités anatomiques, et ne se délimite pas directement. Sa paralysie est donc de nature hystérique, car elle se délimite parfaitement. Il y a également une différence entre le mutisme organique (causé par une lésion du cerveau) et le mutisme hystérique (qui passe par la représentation que l'on s'en fait, et donc on ne sait plus rien dire). Les symptômes de l'hystérie prennent donc la forme des symptômes des autres maladies, mais de façon plus parfaite puisqu'ils passent par les représentations qu'on en a. Charcot en conclut que l'hypnose et la névrose traumatique sont équivalentes. Charcot pose les bases de la théorie « traumatico-dissociative » des névroses. Charcot a un modèle étiologique pour l'hystérie, avec les hommes, c'est assez clair. Chez les femmes, il n'est pas rare de trouver des trauma d'ordre sexuel: une sexualité insatisfaite, des maltraitances sexuelles,... Pour les femmes, l'hystérie n'avait pas posée de questions, car elle avait été conceptualisée depuis la nuit des temps. On ne se demande pas pourquoi elles développent ce genre de symptôme. Charcot est capable de trouver une logique assez simple aux symptômes. Grâce à cette clinique des hommes, Charcot reçoit une réponse qui lui permet de formuler une question « Pourquoi ces symptômes se développent ? ». Ils font suite à un trauma, et il y a toute une dynamique: 1) Cause 2) Trauma 3) Incident qui donne lieu à cette symptomatologie 1882 : Les leçons sur les maladies du système nerveux. Charcot devient une figure mondaine et va donner des démonstrations d'hystérie avec ses hystériques préférées. 1) Première illustration: Charchot et son hystérique préférée, Blanche Whitman. On la voit faire une courbe hystérique, qui est une figure type de Charcot. 2) Deuxième illustration: un célèbre tableau d'une leçon à la Salpetrière. Ce qui est important dans ce tableau, c'est la monstration: les hystériques sont mises en spectacle. Elles répondent à Charcot en lui donnant les symptômes hystériques qu'il leur commande quand il le veut. Cette courbe hystérique est connue de manière anecdotique, car actuellement, on ne voit pas cela. Ce qu'il y a d'ironique, c'est que Charcot montre quelque chose qui semble marcher, cette courbe est un symptôme objectivable, d'acquis, d'universel, et il en est tellement sur qu'il le montre. 3) Ce qu'on ne voit pas sur ce tableau, c'est une pancarte qui représente elle aussi une courbe hystérique. Ce qu'il y a de spécial, c'est qu'elle est en miroir. C'est-à-dire que bien loin que d'être universelle, c'est courbe est une imitation, elle est apprise, elle est un modèle sur lequel les patients se calquent. Dans ce tableau à la gloire de Charcot, il y a de l'ironie. Est ce que le peintre l'a fait en connaissance de cause ? 4) A la Salpetrière, il y a un atelier de photographie où Charcot photographiait ses patientes et leurs symptômes hystériques. C'est une clinique du regard: Charcot pensait qu'en prenant en photo tous les stades de l'hystérie, il reconstruirait une attaque typique, avec tous ces moments objectivables. Mais jamais aucune hystérique ne reproduira entièrement cette attaque typique. Il est une figure rassurante, paternelle, et cette attaque typique n'est qu'une construction. Cette pathologie se fait dans le transfert. Une clinique du regard: en résumé Héritière de la « fascination du merveilleux scientifique » du 19ème siècle, avec la magie du mesmérisme, de la physiognomonie et de la phrénologie. Enthousiaste à la nouvelle invention de la photographie. Le clinicien, pour son diagnostic, demande au patient de se montrer. L'instrument diagnostic est le regard, les prolongements ou perfectionnements du regard (la photographie). Le modèle est la clinique médicale anatomo-pathologique. La clinique du regard résiste à l'impossibilité d'une nosographie par l'image. La symptomatologie hystérique ne suit pas les délimitations neuro-anatomiques du corps mais les systématicités psychologiques, c'est-à-dire ceux de la représentation du corps et du symptôme. Ces points d'achoppement sont une incitation à: 1) Une conception psychologique de l'hystérie 2) Une clinique de la voix (Bernheim, Freud). La nosographie de Charchot ambitionne de trouver pour chaque pathologie une cause organique dans le cerveau (toujours dans le modèle de la lésion qui serait l'étiologie). Pour l'hystérie, ce serait une dégénérescence d'origine héréditaire du système nerveux, mais aucune lésion ne peut être trouvée: Charcot réalise des autopsies mais ne trouve aucune lésion. Il propose alors l'existence d'une lésion fonctionnelle ou dynamique: ce n'est pas la structure qui est lésée, mais la fonction. Lésion dynamique: 1) Les symptômes hystériques résultent d'une (auto)suggestion quand le sujet se trouve dans les conditions d'une dissociation du moi 2) Une idée ou un groupe d'idées associées vont s'autonomiser et acquérir une grande force à la réalisation: le raisonnement ne peut atteindre une idée isolée. Le symptôme hystérique est la réalisation d'une idée inconsciente ou refoulée. Le modèle de la dissociation de l'esprit est pris comme modèle de refoulement. Il est très important d'essayer de décoder le symptôme hystérique qui permettra de retracer ce que l'on a refoulé ou l'idée qu'on s'est faite au moment du trauma. A l'époque, deux choses sont à la mode: 1) Le railway spine (qui n'existe plus actuellement): littéralement « la moelle épinière, chemin de fer). C'est une maladie qui avait lieu à la fin du 19ème siècle. C'est une lésion supposée à la colonne vertébrale et/ou à la moelle épinière sans lésion mécanique apparente causée par les tremblements des chemins de fer. 2) Le whiplash: c'est le coup du lapin. C'est une lésion aux séquelles supposées après une collision à basse vitesse en voiture, due au mouvement brusque de la tête. Après un accident de circulation il arrive parfois que les victimes, bien qu'il n'y ait pas eu de trauma physique, présentent, après un certain délai, des problèmes psychiques. La notion de trauma est essentielle dans l'étiologie de la souffrance psychique. Comme conséquence pour le champ de la psychologie clinique, c'est qu'il y a d'autres possibilités de maladies: il y a une floraison de maladies psychiques ces derniers temps. Bernheim Il est membre de l'École de Nancy, ou école de la suggestion. Il définit l'hypnose comme un simple sommeil produit par la suggestion et susceptible d'applications thérapeutiques: tout le monde est hypnotisable. La suggestion est une influence provoquée par une idée suggérée et acceptée par le cerveau. « Toute idée suggérée tend à se faire acte »: une idée suggérée dans l'esprit va se réaliser. Il va abandonner l'hypnose au profit de la psychothérapie. C'est en abandonnant l'hypnose et en pratiquant la suggestion à l'état de veille que prend naissance le mot « psychothérapie ». C'est avec Bernheim qu'il y a une évolution d'une clinique du regard à une clinique de la voix. Kraepelin La nosographie est une classification des maladies mentales fondée sur des critères cliniques objectifs. Il va étudier l'évolution des maladies dans le temps, et prend cela comme appui pour sa classification. Il va caractériser la psychose: état psychique caractérisé par une altération profonde de la conscience du sujet et de son rapport à la réalité. C'est un trouble grave de l'identité, et c'est très iconique. Dans la psychose, il y a une altération profonde de l'idée de qui on est, mais également du monde qui nous entoure (rapport à la réalité). L'intelligence est normale.. Il définit aussi la démence précoce: une psychose chronique survenant jeune, caractérisée par de graves troubles intellectuels et affectifs avec une évolution progressive vers un effondrement psychique. Kraepelin permet de montrer une évolution dans le temps. Il y a probablement une possibilité de reconstruire des « béquilles psychiques » pour le patient. Deux groupes de symptômes typiques: 1) Catatonie: raideur sans tremblements 2) Catalepsie: grande plasticité, flexibilité plastique inhabituelle A présent, cela n'existe plus car il y a les neuroleptiques. Séglas Il caractérise les hallucinations psycho-motrices: dans la psychose, un des symptômes les plus caractéristiques, ce sont les voix. La conviction courante, c'est qu'ils se persuadent d'entendre des voix. Or, Séglas montre quelque chose d'important: au moment où les sujets disent entendre des voix, il observe des ébauches de mouvements articulatoires, ou des paroles prononcées à haute voix. Il y a une activité articulatoire. Après Séglas, toute une série d'observations modernes ont confirmé ce résultat très précoce. Bleuler Il introduit le terme de schizophrénie en parlant d'une fragmentation de l'esprit. La schizophrénie n'est pas une personnalité multiple, c'est un groupe de psychoses dont l'évolution ne permet pas une rémission complète et intégrale. Le symptôme fondamental c'est le désordre du processus d'association ou encore le relâchement des associations. La schizophrénie est connue pour les voix, délires, ... mais ce ne sont pas de ces symptômes visibles dont Bleuler fait le premier symptôme. Le relâchement des associations: chez les schizophrènes, la pensée fait des envolées, elle va de l'une à l'autre sans arrêt. Le schizophrène souffre de cela. Les signes secondaires, c'est tout ce qu'on considère comme primaire en temps normal. Ce sont des stratégies de lutte contre cette associativité. Le sujet va déployer des stratégies et mettre en place un déni qui va servir de rempart. Ça rejoint l'idée de délires comme tentative de guérison. Association de 3grands troubles dans la schizophrénie La dissociation: une scission dans la conscience et la personnalité. Le délire paranoïde: le psychotique donne des réponses délirantes aux questions existentielles. L'autisme: l'atteinte du rapport avec la réalité. 2.1.2. Freud: le basculement épistémologique 1) Anna O. La patiente de Breuer Breuer prend en charge Anna. O. qui est en proie à des symptômes hystériques, dont des hallucinations, des paralysies, des troubles de la vision. A ce moment là, on établit le diagnostic d'hystérie, car les neuroleptiques n'existaient pas encore. Anna O. fut ensuite connue non pas pour cette période de sa vie, mais pour avoir œuvré dans le social. C'est avec cette patiente que Breuer développa la méthode cathartique: un matin, Anna se trouvait dans un état de dissociation, et parla. Lorsqu'elle fut dans son état normal, Breuer lui rappela ce qu'elle avait dit, et par association, elle re-raconta toutes les situations où elle n'avait pas pris la parole, jusqu'à la première. C'est de là que Breuer fit le lien avec l'hypnose: la méthode cathartique consiste à hypnotiser le malade et lui poser des questions pour qu'il puisse se rappeler de certains évènements. L'hypnotiseur somme alors son patient de se souvenir de cela à son réveil. Ainsi, les symptômes hystériques disparaissent. C'est également Anna qui introduit le terme de « talking cure » qui signifie ramonage de cheminée: on remonte les souvenirs un à un jusqu'au premier. Breuer mis fin à la thérapie lorsque les symptômes hystériques eurent disparus, convaincu de l'avoir soignée. Ce qu'il se passe alors est paradoxal: Anna refait apparaitre inconsciemment ses anciens symptômes, comme pour rappeler son médecin. Ce n'est pas seulement la méthode cathartique et le talking cure qui étaient thérapeutiques, mais également la présence et l'attention du médecin. Dès lors que le médecin n'est plus présent, les bénéfices de la thérapie s'estompent eux aussi. 2) Les enseignements de Charcot et de Bernheim Freud, jeune médecin, obtient une bourse d'étude pour partir étudier un semestre. Il choisit d'aller à Paris pour suivre les enseignements de Charcot. Il apprend chez Charcot que l'hystérie peut également être masculine. (Pour rappel, Charcot avait installé une clinique ambulatoire, et avait rapporter que l'hystérie n'était pas uniquement le fait des femmes.) De retour à Vienne, Freud fait part de ce qu'il a appris, mais on se moque de lui. Ses théories sont contestées, et il ne parvient pas à rentrer dans l'Académie. En tant que médecin, il va ouvrir une pratique à Vienne, et va utiliser l'hypnose comme méthode suggestive: il demande à ses patients de supprimer leurs symptômes. Il l'utilise également d'une manière plus sophistiquée: il utilise l'hypnose comme procédé anamnestique (vient d'anamnèse: biographie, histoire du malade et de la maladie) afin de collecter des renseignements sur l'histoire et la genèse des symptômes de ses patients. Malgré que ses théories soient contestées à Vienne, Freud est réconforté par l'écrit de Breuer sur le cas d'Anna O., car il rejoint ses pensées: tenter de faire disparaitre la tension traumatique sous hypnose. Malheureusement, l'hypnose ne fonctionne pas. Freud se dit qu'il n'a pas la technique pour produire un bon degré d'hypnose, et que c'est pour cela que ses patients rechutent. Il décide alors d'aller voir Bernheim (il avait connaissance de la clinique de Nancy) avec une de ses patientes les plus difficiles à hypnotiser: Frau Cäcilie. Mais arrivé en France, même Bernheim ne parvient pas à hypnotiser la patiente de Freud. Bernheim avoue à Freud qu'il n'arrive à l'hypnose que dans sa pratique hospitalière, c'est-à-dire en groupe, mais pas avec ses patients privés. On peut faire l'hypothèse que dans l'hypnose, il y a quelque chose de collectif. L'hypnose a attrait à la psychologie des masses. Dans un groupe, induire quelque chose est amplifié du fait qu'il y a plus de personnes. La suggestion a plus de possibilités de fonctionner dans un groupe car il y a alors contagion, et le phénomène se renforce. On parle d'identification du groupe. Il faut également penser que lorsque des personnes se rassemblent, il y a une diminution du niveau intellectuel, une disparition totale de la fonction critique, et une acceptation. L'hypnose est une forme d'identification. C'est cela qui a donné l'inspiration à Freud pour sa théorie de la psychologie des masses: l'identification n'est donc autre qu'une forme d'hypnose. C'est un passage historique, où il annonce qu'il abandonne l'hypnose, non sans avoir acquis une technique, une autre façon de faire. L'hypnose a rendu de grands services, notamment grâce à la méthode cathartique, mais Freud en a atteint les limites. Il s'est rendu compte que Bernheim fait quelque chose d'intéressant et d'étonnant: lorsque le patient s'éveille de l'état d'hypnose, il a une forme d'amnésie qui a été suggérée par l'hypnotiseur. Mais en réalité, ils n'ont pas perdu le souvenir, ils savent tout intérieurement. Pour faire revenir le souvenir, Bernheim pose sa main sur le front du patient, et dit « Lorsque j'enlèverai ma main, vous vous rappellerez de tout ». Effectivement ça fonctionne. Freud ne retiendra de l'hypnose que la position couchée. C'est la naissance de la psychanalyse. 3) Lucy: la naissance de la psychanalyse Lucy se trouve dans un état de dissociation, le ça est dissocié du « je » qui parle. C'est la dynamique de l'hystérie selon la psychanalyse. Lucy marque la transition tant théorique que clinique. Il s'agit d'une transition épistémologique (épistémologie: attrait au statut du savoir, étude du savoir, en particulier si tel domaine du savoir est scientifique) car on passe d'une clinique du corps à une clinique de l'âme. On passe du soma à la psyché (l'âme). Freud ne cible pas en tant que tel le symptôme: c'est la caractéristique principale de cette clinique, elle ne cible pas, elle accueille. Lucy raconte son histoire, tout a fait banale, une histoire d'un espoir amoureux déçu. C'est banal mais pénible pour elle. Elle a donc refoulé ce savoir et du fait qu'elle n'y a plus accès, elle ne sait plus qu'elle a ce savoir. Freud joue celui qui donne accès à ce savoir, mais ne joue pas celui qui sait. C'est un passeur, il donne accès. Il entreprend un travail analytique alors qu'elle se trouve dans un état guère différent de l'état normal. Pour nous c'est normal, mais pour Freud c'est remarquable car avant il travaillait avec des patients en état d'hypnose. Il place ses mains sur la tête de la patiente: la pression des mains donne l'impression d'un alibi pour récupérer son savoir. De fil en aiguille, la vraie méthode analytique est devenue l'association libre: le patient ne doit pas se concentrer, il doit juste dire ce qui lui vient à l'esprit. D'un niveau technique, ce n'est pas facile à exécuter, car premièrement, beaucoup de choses viennent à l'esprit en même temps, et ne donnent pas l'impression d'avoir des connexions entre elles. En réalité, ces connexions sont inconscientes. Deuxièmement, on est toujours tenté de faire des phrases grammaticales: on a du mal à se laisser aller, à dire les choses comme elles nous viennent. Et troisièmement, les choses qui nous viennent à l'esprit paraissent souvent saugrenues, et scabreuses. Pourtant, se laisser aller, dire ce qui nous passe par la tête, sans faire attention au fait qu'il n'y a pas de logique apparente, c'est la vraie association libre. Cette technique est par contre simple pour accéder par un détour associatif au recouvrement inconscient du souvenir refoulé. On en vient au concept central dans la pensée de Freud: le refoulement. Il annonce à Lucy qu'il pense qu'elle est amoureuse de son patron, ce à quoi elle répond positivement. Freud est étonné, et lui demande pourquoi elle ne l'a pas dit, si elle le savait: c'est le principe du refoulement. Ce sentiment amoureux la rendait mal, et elle a mis dans une partie de son esprit cette représentation inconciliable. De manière métaphorique, cette partie n'est alors plus accessible. Le refoulement exerce un pouvoir (il fait un travail): le thérapeute devra donc faire un contretravail, un effort. Le travail du thérapeute vient en contre poids de la défense du refoulement. Le thérapeute fait quelque chose de différent qu'un médecin somatique: dans le travail qui se fait, il laisse le temps et l'espace au patient pour faire un deuil psychique par rapport au moment traumatique. Le deuil psychique est souvent difficile à faire, car on pense que la vie nous doit réparation. Il faut se faire à l'idée que l'on obtiendra jamais cette réparation. En cristallisant le moment traumatique, on continue à en souffrir. Dans ce travail de deuil psychique, il y a deux temps: 1) En premier lieu, pour reconnaitre son propre désir. 2) En second lieu, pour dire sa blessure: ce travail de deuil nécessite de parler du traumatisme, encore et encore. En thérapie, la parole a fonction d'acte adéquat: on parle parce qu'on souffre, et grâce à la parole, il y a un certain soulagement de cette souffrance. En thérapie, rien ne va linéairement: il faut à chaque recommencer le travail, car la guérison se fait soudainement. Avec Lucy, Freud marque une véritable rupture épistémologique dans le traitement du psychisme humain: on passe d'une clinique médicale à une clinique véritablement psychique. 4) La théorie de l'inconscient Freud établit sa théorie de l'inconscient: il pense qu'il y a un mobile profond à l'oubli de certains souvenirs et que la sexualité joue un rôle important. Il tient cela de Charcot, qui dit à la Salpetrière « A l'origine de l'hystérie, il y a toujours quelque chose de sexuel ». Mais Vienne, très prude, refuse ses idées. Ce moment marque sa rupture avec Breuer, qui au contraire attribue l'inconscience de certains souvenir à un état mental particulier et fortuit. Dans l'interprétation des rêves, il y a la notion d'inconscient et du psychosexuel. Travail du rêve: l'accomplissement de désir Complexe d'œdipe La première topique 5) Le basculement épistémologique de la clinique avec Freud Vers 1900, beaucoup de choses basculent: 1) Avant Freud, l'accent est mis sur l'image: on veut mettre en carte l'image clinique car on s'inspire de la médecine somatique. Charcot est le point culminant de cette clinique du regard. Avec Freud, on passe à une clinique de la voix: les sujets ne peuvent se réduire à leurs symptômes. Ce qui forme le « corps » du traitement, c'est l'histoire du sujet. 2) Le clinicien bascule de la position de maitre qui regarde et qui juge (inégalité entre le « maitre » et ses patients) à la position de l'analyste qui écoute (l'analyste passe en retrait, la relation reste non-symétrique, mais l'écart est moins grand). 3) Il y a également un renversement du rapport généralement admis entre le normal et l'anormal: la théorie change. 4) La relation entre le sujet et le clinicien, le transfert, devient un principe opératoire de la situation clinique: le transfert est l'instrument grâce auquel la clinique fonctionne. 2.1.3. Après Freud: une clinique de la voix Cadres thérapeutiques Les approches humanistes et centrée sur le sujet L'approche systémique L'approche cognitivo-comportementale L'approche psychanalytique. 2.2.1. Définitions La psychologie clinique Le clinicien s'engage à entendre les sujets dans leur singularité Le travail clinique repose sur l'échange linguistique dans le respect de la complexité de ce langage: on ne travaille pas avec le corps mais avec le langage, dans le respect de sa complexité. Le clinicien est ouvert à ce que dit le patient. Le clinicien s'engage dans un rapport interpersonnel avec le sujet dont le but est de faciliter le dire du sujet: ce type de travail clinique a en soi un effet thérapeutique bénéfique. C'est parce que la parole est soutenue qu'il y a un effet thérapeutique. Pas spécifique au cadre, c'est toujours la même chose qu'on soit en systémique, en cognitivo-comportementale,... 2.2.2. Scientificité Paradoxe: la psychologie clinique a le sujet comme objet. Quand toutes les autres sciences ont des objets qui ne sont pas les sujets, la psychologie a le sujet comme objet. Elle a donc un statut particulier dans le champ des sciences. La démarche objective tend à décrire et à saisir l'universel: elle veut universaliser La démarche subjective tend à décrire et à saisir la singulier: elle veut singulariser