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Le programme MOST innove à plus d’un égard : c’est le premier programme intergouvernemental
pour la recherche en sciences sociales et la formulation de politiques créé au sein d’une institution
spécialisée des Nations Unies. Il a pour but de développer la recherche interdisciplinaire et
comparative sur des questions contemporaines d’une importance cruciale et s’est inscrit dès le
départ dans une perspective résolument internationale de par son orientation, son cadre conceptuel,
sa méthodologie et la composition de ses équipes. Enfin, il favorise l’articulation entre la recherche
en sciences sociales et la formulation des politiques ainsi que l’établissement de partenariats entre
les différents acteurs économiques et sociaux, notamment les ONG, les médias et le secteur privé.
Le programme intervient par le biais de vastes réseaux régionaux et internationaux associant
chercheurs et utilisateurs des sciences sociales (18 réseaux de ce genre ont été mis en place depuis
1995), ainsi que dans le cadre de projets opérationnels de développement auxquels il fournit une
expertise et un appui pour le renforcement des capacités. MOST privilégie la collaboration et le
partenariat, comme en témoignent les liens qu’il a noués avec les grandes universités, les ministères
de la recherche et les conseils nationaux de la recherche en sciences sociales, les organisations
régionales de sciences sociales telles que CODESRIA en Afrique, CLACSO et FLACSO en
Amérique latine et AASSREC en Asie ainsi que des organismes des Nations Unies tels que le
PNUD, le PNUCID et l’Université des Nations Unies.
La démarche de MOST est axée sur trois grands thèmes fondamentaux, que complète une large
gamme d’activités transversales. Ces thèmes renvoient à des mutations qui présentent aujourd'hui
un intérêt particulier pour les sciences sociales et la formulation des politiques :
la gestion démocratique des sociétés multiculturelles et multiethniques ;
la gouvernance urbaine et les stratégies d'aménagement urbain ;
les réponses locales et nationales à des problèmes économiques et environnementaux mondiaux.
Chacun de ces thèmes fait l’objet de projets conjuguant la production de connaissances théoriques
et la contribution au renforcement des capacités de prise de décision ainsi que, dans bien des cas, au
renforcement des capacités sociétales. Les autres activités ont une dimension institutionnelle plutôt
que thématique : projets visant à développer les capacités en sciences sociales, coordination des
activités de coopération au sein du système des Nations Unies et avec d’autres organes, acteurs et
manifestations à l’échelle internationale, activités de diffusion par le canal du Centre d'échange
d'information de MOST et travail analytique de caractère général visant à mieux cerner les relations
entre l’application du savoir et l'action publique.
Le savoir et son articulation avec l’action : telle est la problématique qui sous-tend les objectifs et
les activités du programme MOST. Savoir comment les choses évoluent et comment on peut
contribuer activement à les faire changer. Savoir comment le changement est appréhendé par les
individus qui y sont confrontés. Un savoir qui, en définitive, nous éclaire sur la nature et les limites
mêmes du savoir.
Qu’on puisse parvenir à un tel savoir est en soi une affirmation ambitieuse. Lorsque les sciences
sociales ont cherché à imiter les sciences naturelles, les résultats ont rarement été concluants. Elles
n’ont pas été en mesure de produire, sur le plan théorique, l’équivalent de la mécanique des fluides
ou de la génétique ni, sur le plan pratique, quoi que ce soit de comparable au moteur à réaction ou
aux transplantations cardiaques. On a en outre de bonnes raisons de penser qu'il leur est par
définition impossible de le faire. La connaissance en sciences sociales se situe sur un autre registre.
De surcroît, peut-on avoir la certitude que l’application du savoir à l’élaboration d’une société
meilleure est en soi un projet valable ? Certains courants récents de la théorie sociale ont répondu
par la négative et les décideurs, se méfiant du potentiel critique des sciences sociales, ont été