Résumé de la journée du CNO Midi-Pyrénées du 23 Septembre 2006 à TOULOUSE sur le thème : Dérangements Temporo-Mandibulaires et troubles posturaux. présenté par le M. Philippe R. PEREZ-MIRLO, Chirurgien-Dentiste et ATMiste. Le Docteur PEREZ , spécialiste de l’ATM (articulation temporo-mandibulaire), nous a fait un exposé à la fois remarquable et complet sur les DTM (dérangements temporo-mandibulaires). Son expérience dans ce domaine repose sur plus de 20 ans de pratique et recherche au cours desquels il a pu réalisé plus de 2500 contrôles fonctionnels par axiographie et 800 contrôles IRM d’ATM pour observer les variations spatiales de la position du condyle et du disque, avant et après traitement, de ses patients. Une partie a d’ailleurs déjà été exploitée pour une parution (1). Dans une première partie, après de brefs rappels anatomiques, il nous a fait une revue de la littérature des connaissances fondamentales acquises à ce jour (2) concernant la réalité neuro-histologique de la zone rétrodiscale en particulier (attache postérieure du ménisque de l’ATM) (disque = ménisque). Ensuite, il a fait état des recherches faites sur la nature des remaniements tissulaires retrouvés lors de déplacements discaux dans les ATM. La zone rétrodiscale (ou zone bilaminaire) supporte alors des charges que le condyle lui fait subir (présence de protéoglycanes). Ce qui met en évidence une redistribution des charges au sein des tissus mous temporo-mandibulaires. Par ailleurs, celle-ci contient une concentration dominante de fibres de collagène de type III. Ceci signifie, d’un point de vue anatomo-pathologique, que cette zone rétrodiscale est en réparation permanente donc en « inflammation chronique ». Par la convergence de ces données fondamentales, il nous permet de comprendre une réalité, mal connue à ce jour, à savoir l’existence d’une pathologie temporo-mandibulaire inflammatoire chronique. Les études épidémiologiques ont montré que les DTM évolue à bas bruit pour une grande partie de la population et que les DTM en PIM (Position d’Intercuspidie Maximale) sont présents chez plus de ¾ de nos patients et ceci dès l’enfance ! Il s’agit donc d’un important problème de santé publique. Rappelons ici que l’occlusion dentaire est sollicitée 500 à 2000 fois par jour lors de la déglutition et met à chaque fois en jeu les ATM en plus des périodes de mastication et d’éventuel « clenching » (serrement des mâchoires). Cela aboutit aussi à la définition de nouveaux critères pour la définition de la PMR (Position Mandibulaire de Référence) qui de produit en OIM (Occlusion en Intercuspidie Maximale, c’est pareil que la PIM). Là où on se contentait de l’indolence et de la position inter-incisive pour définir la position physiologique des ATM, le Dr PEREZ met plutôt l’accent sur : - La reproductibilité de la PIM qui doit aboutir en classe I dentaire ce qui est classique. - La position physiologique du condyle dans les trois sens de l’espace en PIM. Sur ce dernier point dans un intérêt didactique, il évoque des « classes condyliennes » par analogie avec les classes dentaires d’Angle. Il définit la classe II condylienne (la plus fréquente) comme un condyle trop en arrière par rapport à la fosse mandibulaire. Ce qui entraîne le DD en avant (déplacement discal) et l’inflammation de la zone rétro-discale. Il définit la classe III condylienne (la moins fréquente) comme un condyle trop en avant par rapport à la fosse mandibulaire. Et enfin, la classe I condylienne correspond à l’orthoposition des condyles dans la fosse mandibulaire définissant ainsi la RC (relation centrée) de l’ATM. La deuxième partie de cet exposé fut consacrée à la présentation des rapports qui s’exercent des ATM pathologiques vers l’ensemble de la posture et inversement. L’accent est mis sur cette zone bilaminaire vascularisée et innervée par des terminaisons libres contrairement au disque luimême. L’analyse et la synthèse de ses recherches bibliographiques lui ont permis de proposer un modèle original « neurophysiopostural » dans lequel il considère que la formation réticulaire joue un rôle primordial comme « centre de la régulation des tonus musculaires et des mouvements » ( fig 1). Fig 1 :Schéma des réflexes posturaux cou, tronc et membres d’origine temporo-mandibulaire: voie trigémino-réticulo-spinomotrice. TPRO : Trouble postural du référentiel occlusal ; TPMR : Trouble de la position mandibulaire de référence ; TPTM : Trouble postural temporo-mandibulaire ; GV : Ganglion sensitif du V ; CSV : Complexe sensitif du V ; SCV : Sous-noyau caudal sensitif du V ; ME : Moelle épinière ; MC : Muscles du cou ; MD : Muscles dorsaux ; MMS : Muscles des membres supérieurs ; ML : Muscles lombaires ; MMI : Muscles des membres inférieurs Le Dr PEREZ a fait clairement état de cas documentés et contrôlés pour lesquels le retour à la physiologie des ATM passe par un traitement oral local (développé ci-après) associé à un traitement postural global et réciproquement. Il prône donc, tout traitement postural segmentaire n’a de sens que dans une prise en charge posturale intégrale et pluridisciplinaire du patient (3). La dernière partie de l’exposé fut consacrée à la présentation du principe général utilisé dans les protocoles de traitements du Dr. PEREZ. Son objectif final est de d’orthopositionner les condyles dans leurs fosses (classe I condylienne), et de stabiliser cette situation par une nouvelle PIM thérapeutique si possible en classe I dentaire . Pour obtenir ce résultat, il pratique une orthopédie posturale mandibulaire au paravent sur gouttière et actuellement directement sur des composites au niveau des 6 et 7 inférieures (molaires mandibulaires) en augmentant préférentiellement la DVO (Dimension Verticale d’Occlusion) postérieure. L’effet de recentrage condylien (ou réduction condylienne) neutralisent les influx nociceptifs et donc les effets neuro-musculaires à distance. Ces orthèses occlusales molaires permettent d’obtenir une nouvelle position mandibulaire thérapeutique. Ces modifications spatiales font apparaître une béance occlusale postérieure encastrée entre la canine et la 7, support de l’orthèse. L’absence de contact au niveau des couples de 4, 5 et 6 induit leur éruption spontanée : elles migrent, dent et parodonte, progressivement jusqu’à retrouver des contacts avec leurs dents antagonistes. Lorsque les couples des 4, 5 et 6 sont en occlusion et contiennent la PIM thérapeutique, les orthèses sur des 7 peuvent être ôtées. Ainsi celles-ci réaliseront à leur tour leurs éruptions. Notons que dans le cas d’anciennes prothèses fixes ou amovibles en bouche, celles-ci serviront d’orthèses pour obtenir la nouvelle PIM. Des modifications ou des remplacements de prothèses seront nécessaires pour stabiliser l’occlusion thérapeutique. Le Dr PEREZ conseille donc, pour éviter ces désagréments en temps et économiques, d’envisager une orthopédie mandibulaire avant toute réhabilitation orale prothétique et/ou orthodontique. Le fait important est qu’aujourd’hui ce traitement est confortable, très court et peu onéreux ( plus de gouttière et de couronnes télescopiques (ou overlays). Chaque cas est particulier mais jugez par vous même : - Un enfant nécessite 2 à 4 séances au rythme d’une fois par semaine. - Un adulte nécessite 3 à 6 séances au rythme d’une fois par semaine. Autre particularité de ce traitement est que pour finir le patient retrouve ses dents naturelles , et que surtout il retrouve un fonctionnement physiologique non délétère et durable ! NDLR : Cette approche orientée vers l’orthopédie temporo-mandibulaire a une visée non seulement fonctionnelle locale (symptomatique) mais aussi posturologique. Elle est très novatrice dans le milieu dentaire, elle n’est donc pas encore très répandue. Elle permet maintenant aux dentistes à prendre conscience de l’impact que certains choix thérapeutiques peuvent avoir sur l’ATM, la posture orthostatique et l’oculomotricité. Elle nous engage tous à nous remettre en question et à nous préoccuper plus et autrement des ATM de nos patients. Il faut donc remercier l’initiative du CNO de Midi-pyrénées et notamment l’ouverture d’esprit à ce sujet du Dr André DARTHEZ et du Dr Bruno TREIL son président. Lionel GUERIN, TOULOUSE le 28/10/2006 [email protected] -(1) Perez P (1996). Apport de l’orthopédie mandibulaire dans le traitement des dérangements des ATM : indications et clinique. J Edgewise, 34 : 39-51. -(2) La première partie de cette intervention contenant les références bibliographiques est consultable sur : http://pmgagey.club.fr/TroublesPosturauxPerez.pdf -(3) Perez P, Pradier P, Daures JP, Bouges S (1997). Dépistage des précontraintes posturales sur les ATM : axiogrammes posturaux ; In Posture et environnement Lacour M, Gagey PM, Weber B, Sauramps médical, Montpellier, pp 87-101.