La Réunion de 1945 à nos jours

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LA REUNION DE 1945 A NOS JOURS
En 1945, la situation économique et sociale de la Réunion est alarmante ; alors que la métropole
tente de se reconstruire après 4 ans d’occupation, la Réunion, pour sortir de la colonisation et du sousdéveloppement, accède au statut de département français en 1946 ; cette forme originale de
décolonisation dans l’empire français entraîne de profondes mutations dans l’île ; celle-ci doit
désormais rattraper son retard par rapport à la France métropolitaine. Pour la Réunion, le XXème
siècle commence à partir de 1946 mais les véritables mutations s’accélèrent dans les années 1960.
→ Quelle est l’évolution du statut politique de la Réunion et quelles en sont les conséquences
économiques et sociales ?
I- De 1945 à 1963, un département qui tarde à se décoloniser
A- De la colonie au département
→ la Réunion en 1945 : une île sous-développée
Quelques indicateurs (1946)
- population : 241 000 habitants
- mortalité infantile : 180 %
- espérance de vie : 48 ans
- enfants par femme : 6.8
- nombre de médecins : 29
- nombre de professeurs : 100
- routes bitumées : 130 km
- nombre de passagers aériens : 6 650/ an
- logements équipés en électricité : 12%
- logements équipés en eau courante : 10%
- les conséquences de la Seconde guerre mondiale à la Réunion : situation de pénurie, les
tickets de rationnement sont maintenus comme en France, la production agricole diminue (de plus cyclones
dévastateurs), situation de sous-nutrition
- la situation sanitaire : elle est catastrophique avec un taux de mortalité infantile élevé, le
paludisme est la première cause de mortalité (1/3 des décès) , espérance de vie inférieure à 50 ans ; peu de
médecins et d’hôpitaux
- les infrastructures : elles sont insuffisantes, peu de route ; le Port n’a pas été modernisé,
on parle même de l’abandonner. Or les infrastructures sont essentielles pour le développement économique de l’île
- le logement : il est misérable pour beaucoup de réunionnais, les cases sont des paillotes,
bidonvilles, peu ont l’eau courante et l’électricité
- l’éducation :
analphabétisme important, trop peu d’école par rapport à la démographie
de l’île
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→ pour toutes ces raisons, les réunionnais souhaitent changer de statut : (doc 2 page 126)
- déjà, pendant l’entre-deux guerres, des réunionnais réclament à plusieurs reprises la
départementalisation, notamment des journalistes , des syndicats ouvriers mais le statut
n’est pas
modifié ; mais la situation est tellement catastrophique en 1945 que cela incite au
changement et en 1946, les députés de la Réunion, des Antilles et de Guyane proposent que leur
colonie deviennent des DOM
- c’est fait par la loi du 19 mars 1946 ; les députés réunionnais qui ont appuyé
cette
demande sont R.Vergès et L.Lepervanche
et
l’ancien gouverneur est remplacé par un
préfet, Paul Demange
B- Mais un département abandonné
→ l’explosion démographique et ses conséquences (doc 5 page 127 dans le manuel Réunion Lycée)
- décrivez et expliquez l’évolution de la population réunionnaise : la population augmente grâce à
une diminution nette de la mortalité (taux divisé par 2) mais la natalité reste élevée (plus de 6 enfants par femme)
ce qui explique un accroissement naturel très fort (plus de 3%) ; la Réunion entre dans la première phase de la
transition démographique
- les conséquences de cette explosion : il faut éduquer cette population de plus en plus nombreuse
et jeune ; pour faire face à une montée de l’analphabétisme, il va falloir créer des écoles. Par ailleurs, la métropole
encourage la mobilité pour déverser ce trop plein de population ; on envoie tout d’abord des réunionnais à la Sakay
(Madagascar, encore une colonie française) pour y cultiver les terres . Puis, au début des années 1960, la D.D.A.S.S
envoie des enfants en métropole dans le département de la Creuse notamment.
→ les conditions de vie s’améliorent mais timidement :
- en 1946 , le contexte économique de la France est celui de la reconstruction et elle ne peut
financer tout de suite ce qui a été promis aux réunionnais
- ainsi, les lois nationales auraient du s’appliquer dès 1946 mais c’est rarement le cas : le préfet
n’arrive qu’en juillet 1947 ; la CGSS n’est créée dans l’île qu’en 1948 et le montant des allocations est inférieur à
la métropole.
- à ces retards s’ajoute le fameux cyclone 1948 qui ravage l’île : 165 morts, beaucoup de sinistrés
- rattrapage de l’équipement : c’est la mission du FIDOM . Mais jusqu’aux années 1960, il y a peu
d’amélioration : pas assez de routes bitumées, faible trafic maritime, les conditions d’habitation sont toujours
déplorables, état de santé déplorable, pas assez de maîtres et de salles de classes. Le seul point positif est la
production agricole et l’industrie sucrière est un pôle de l’économie réunionnaise
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C- Cette déception entraîne des tensions politiques
Autonomistes
Qui ? Quel parti
politique ?
Pourquoi ?
Résultats aux
élections
Le PCR avec Paul Vergès
- contexte de décolonisation : 1960 est l’
année de l’indépendance de l’Afrique
noire, de Madagascar
Départementalistes
La droite avec l’ARDF (Association Réunion
Département Français)
- De Gaulle vient soutenir le statut de
département en 1959
- les réformes tardent à venir, la Réunion
est toujours dans un état misérable, trop
d’inégalités sociales entre grand
propriétaires et la majorité des
réunionnais (une situation sociale qui n’a
guère changé depuis 1848)
- contexte international de guerre froide, il faut
endiguer le communisme
- gauche progresse ce qui inquiète la
droite, celle-ci n’hésite pas à renvoyer en
métropole des fonctionnaires
communistes agitateurs)
- la droite l’emporte aux élections, celles-ci sont
par ailleurs truquées et se font dans un climat de
violence
→ Les élections législatives de 1963 marquent un tournant : la droite a fait appel à Michel Debré qui
remporte les élections législatives face à Paul Vergès
II- Le plan de rattrapage pour la Réunion et ses conséquences économiques et
sociales
A- Le plan de rattrapage de Michel Debré
→ le député Michel Debré (qui veut affaiblir le communisme) permet l’arrivée de transferts financiers
importants dans l’île : la métropole qui connaît la croissance éco des 30 Glorieuses et qui n’a plus de colonie
peut s’occuper des DOM
→ rattrapage sanitaire : plus de médecins, d’infirmières, d’hôpitaux
→ rattrapage scolaire : une priorité avec création de nombreuses écoles primaires, lycée Roland Garros
en 1965 puis l’université
→ rattrapage pour améliorer les conditions de vie , l’habitat :
- les bidonvilles sont remplacés par des logements HLM
- les ¾ des foyers sont équipés en électricité contre ¼ au début des années 60 ; même remarque
pour les branchements en eau.
→ rattrapage des infrastructures :
- la route en corniche est ouverte en 1963 et transformée en 4 voies en 1976. Le parc de voitures X
10 entre 1945 et 1965.
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- le port de la Pointe des Galets est modernisé ce qui permet d’importer des biens de consommation
de la métropole mais cela va aussi provoquer le défivit commercial de l’île.
- on allonge la piste de Gillot pour accueillir les Boeing ce qui va permettre de faire progresser le
tourisme
B- Les conséquences sociales (document annexe : sujet BAC 2003)
→ sur le plan démographique :
- population réunionnaise X 2.5 depuis 1954 grâce à la baisse de la mortalité(ce taux a été divisé
par 3) : le paludisme qui était une grande cause de mortalité est complètement éradiqué
- le taux de natalité a lui aussi diminué mais le nombre d’enfants par femme reste plus important
qu’en métropole.
- on peut dire que depuis 1961, la Réunion entre dans un comportement démographique moderne,
elle sort de la transition démographique.
→ sur le plan scolaire :
- le nombre d’enfant scolarisés a fortement augmenté (aujourd’hui, il correspond à ce qu’était la
population réunionnaise en 1945)
- les études sont plus longues car de plus en plus de jeunes vont jusqu’au BAC ; le nombre
d’étudiants a doublé
- il reste quand même un bon nombre de jeunes qui sont sans diplôme et qui auront du mal à
trouver du travail
C- Les mutations économiques
→ sur le plan économique : changement dans la répartition de la population active
- le nombre d’actif travaillant dans le secteur agricole ne cesse de diminuer du fait de la
mécanisation et parce que ce secteur attire moins de jeunes qu’auparavant
- l’industrialisation reste très modeste ; le nombre d’industries sucrières diminue, on concentre la
production dans 2 raffineries
- mais on assiste à une tertiarisation de l’économie : de ¼ des actifs, on passe à ¾ des actifs ; le
secteur qui emploie le plus d’actifs est le tourisme ; désormais il rapporte plus que la canne à sucre
- le chômage a un taux record, supérieur à 30%, c’est le plus fort taux de France
→ les réunionnais sont entrés dans une société de consommation grâce à la hausse du niveau de vie
mais aussi grâce aux allocations car pour beaucoup de ménages, celles-ci constituent plus du tiers de leur revenu ;
les grandes surfaces poussent comme des champignons dans les années 90 mais les prix restent plus élevés qu’en
métropole. Or pendant longtemps, le RMI et les allocations étaient inférieurs à ceux de métropole.
Un schéma pour résumer les liens entre ces différentes évolutions
Croissance démographique
+ d’enfants à scolariser
jeunes qui vont
beaucoup sont
prolonger
leurs études
sans qualification
+ de jeunes sur le
marché du travail
hausse du chômage
tertiarisation de
l’économie
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III- Mais le débat politique continue
A- Débats sur le statut de l’île
→ le débat sur l’autonomie continue jusqu’en 1981 :
- en 1971, une rencontre se tient à Morne Rouge en Martinique où sont réunis les représentants des
différents DOM ; après cette réunion, on revendique le droit des DOM-TOM à l’autodétermination
- les élections présidentielles de 1981 vont être un test pour savoir si les réunionnais sont pour ou
contre l’autonomie ; en effet, on a tendance à interpréter ce vote de la façon suivante : ceux qui votent pour
MITTERRAND sont autonomistes / ceux qui votent pour GISCARD sont au contraire départementalistes. A la
Réunion, une majorité de la population à voter pour Giscard. En fait les réunionnais font l’amalgame entre
indépendance et autonomie, ils craignent le « largage » de l’île par la métropole
→ après 1981, plusieurs évolutions sont proposées pour la Réunion mais elles n’aboutissent pas toutes
- un projet d’Assemblée unique mais il est rejeté
- en 1982, la Réunion devient avec la décentralisation une région monodépartementale ; elle
dispose de deux assemblées : un Conseil général et Conseil régional
- en 2000, c’est la bidépartementalisation qui est refusée par les réunionnais
- la Réunion est aussi une région ultrapériphérique dans le cadre de l’UE et reçoit à ce titre des
subventions
B- L’alternance et le poids de l’opinion
→ le rôle de l’opinion public dans la vie politique :
- lors des évènements du Chaudron en 1991 : Télé Freedom créée en 1986 mais le CSA
(conseil supérieur de l’audiovisuel) lui interdit de diffuser , elle passe outre et reprend ses
émissions et fin février 1991 manif de soutien ; les émetteurs de freedom sont mis sous
scellés ; cela entraîne émeutes pendant un mois, pillage de magasins, violences…
-
lors du débat sur la bidep : le PCR s’y oppose prétextant que ce n’est pas urgent, qu’il
vaut mieux se préoccuper de questions eco et sociales ; la majorité des réunionnais selon
des sondages d’opinion, sont contre ; le 15 mars 2000, plus de 15 000 personnes défilent
à St Denis et le projet est retiré
→ l’alternance remplace l’affrontement bipolaire :
- le PCR a abandonné son projet d’autonomie et en 1988, Mitterrand obtient plus de voix à
la Réunion que Chirac
- en 1997, la gauche domine la politique locale : elle contrôle le conseil général, 11
maires sur 24 sont de gauche, quatre des cinq députés et deux des trois sénateurs
- mais en 2002 le paysage politique s’inverse de nouveau : la droite domine la scène
politique (18 mairies sur 24, majorité au conseil général, trois députés et deux sénateurs)
- cependant aux régionales de 2004, retour en force de la gauche, Paul Vergès président
du Conseil régional
Conclusion :
Le statut de département français a incontestablement permis à la Réunion de rattraper son retard dans le domaines
économique et social, même si les transformations ont été lentes après la guerre ;l’apport massif de capitaux de la
métropole puis de l’Europe a transformé la Réunion en vaste chantier ; le visage de la Réunion n’est plus le même
aujourd’hui, les réunionnais sont passés dans l’ère de la société de consommation moderne, l’île s’urbanise.
Cependant, malgré les immenses progrès matériels réalisés, des problèmes demeurent : une dépendance extérieure
de plus en plus importante, un taux de chômage encore énorme et l’aggravation des inégalités créées par ces
difficultés
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