change dans la nature même de ces relations, c'est que la Chine, ses élites semblent
tourner le dos aux humiliations passées avec la conscience aiguë que le centre de
gravité de l'économie mondiale a basculé vers l'Est.
Reste une interrogation majeure, pour laquelle 2012 pourrait apporter quelques
éléments de réponse : à quoi ressemblera la puissance chinoise dans les prochaines
années ? Officialisé à l'occasion du XVIIe congrès du PCC de 2007 (mais déjà
fortement suggéré dès 2002), le soft power chinois est une stratégie politique, mais
s'agit-il d'une réalité sur le long terme ? Tandis que 2012 pourrait voir éclore de
nouvelles orientations de politique étrangère et de stratégie d'influence, cette question
prend tout son sens, et tous les regards seront tournés vers la nouvelle équipe
dirigeante, et sur son attitude sur la scène internationale. Derrière le discours officiel,
la Chine se montre en effet de plus en plus active, voire parfois arrogante, sur la scène
diplomatique. De même, la montée en puissance militaire et les implications
politiques soutenues, propres à un régime autoritaire qui n'accepte pas qu'on le
critique, nous conduisent à penser que le soft power chinois est une stratégie louable
et qui fut marquée par des victoires éclatantes au cours des dernières années, mais qui
n'éclipse pas les réalités d'une Chine qui joue sur plusieurs tableaux à la fois pour
accélérer sa montée en puissance. Enfin, l'autre question majeure concerne la mise en
place d'un véritable modèle que Pékin chercherait à proposer à d'autres nations, les
pays en développement en tête. Pour l'heure, on voit que la tentation de la Chine de
proposer un « consensus de Pékin » qui se substituerait au « consensus de Washington
» reste peu présente dans la stratégie du soft power. Mais les choses pourraient
évoluer rapidement. Avec l'arrivée d'une nouvelle génération de dirigeants en 2012, et
forte d'une puissance économique et désormais culturelle qu'elle n'a jamais connu, la
Chine pourrait chercher à prendre la tête des pays en développement. Les positions de
Pékin exprimées lors du sommet de Copenhague sur le réchauffement climatique en
décembre 2009, et le soutien que la Chine a alors reçu de pays comme l'Inde, le Brésil
ou l'Afrique du Sud, sont des indicateurs qui vont dans ce sens.
L'avenir de la Chine pourrait ainsi s'écrire en grande partie en 2012, et s'affiner dans
les cinq années suivantes, jusqu'au XIXe Congrès du PCC de 2017, à l'occasion
duquel les changements amorcés dès à présent seront examinés et, dans l'hypothèse de
succès, érigés au rang de stratégie officielle. Ainsi s'opère la montée en puissance de
la Chine, tant en ce qui concerne la consolidation et les mutations de sa société que
l'affirmation de sa puissance sur la scène internationale. Un pragmatisme parfois
cynique, des réformes plutôt qu'une révolution, et des objectifs qui chaque jour
s'affirment un peu plus, et dessinent les contours d'un monde dans lequel Pékin jouera,
qu'elle le veuille ou non, le premier rôle.
L'objectif de ce colloque est de proposer des débats bilingues (français et anglais) sur
les orientations de la Chine, en faisant intervenir les meilleurs experts du sujet, et en
mettant l'accent sur trois angles :
Les défis intérieurs
La politique de voisinage de la Chine et les enjeux politico-stratégiques
La politique internationale de la Chine, dans ses aspects politiques,
stratégiques et économiques.