FMC Tourcoing 10.02.04 Dr B. MESNARD I – INTRODUCTION

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CONDUITE A TENIR DEVANT UN ICTERE
A BILIRUBINE CONJUGUEE CHEZ L'ADULTE
FMC Tourcoing 10.02.04 Dr B. MESNARD
I INTRODUCTION
Devant un ictère à bilirubine conjuguée, tout le problème pour résumer est de savoir si cet ictère est
d'origine extra ou intra-hépatique. Au delà de l'interrogatoire et de l'examen clinique qui permet bien souvent
de suspecter le diagnostic étiologique, l'examen morphologique essentiel est l'échographie abdominale. Si
les voies biliaires sont dilatées, c'est qu'il y a un obstacle et deux diagnostics dominent : la lithiase de la voie
biliaire principale et le cancer du pancréas. Si les voies biliaires ne sont pas dilatées, l'origine de l'ictère est
intra-hépatique et c'est bien souvent la ponction biopsie hépatique qui orientera le diagnostic étiologique.
Si classiquement on a coutume de dire qu'une cytolyse à plus de 10 fois la normale est le reflet d'une
hépatite cytolytique (virale ou médicamenteuse pour l'essentiel), un tel niveau de cytolyse peut cependant se
rencontrer de façon très brève dans la lithiase cholédocienne.
En pratique, il faut retenir qu'un ictère à bilirubine conjuguée est extra-hépatique jusqu'à preuve du
contraire.
II ICTERE A BILIRUBINE CONJUGUEE D'ORIGINE EXTRA-HEPATIQUE
1)Lithiase du cholédoque
a) Lithiase biliaire, rappel
3 principaux calculs : les calculs cholestéroliques, pigmentaires et mixtes.
Facteurs de risques : âge supérieur à 50 ans, sexe féminin, obésité, régime hypercalorique et
riche en acides gras poly-insaturés, médicaments (hypercholestérolémiants, oestrogènes, ...),
maladie intestinale chronique type maladie de Crohn.
80 % des calculs vésiculaires sont asymptomatiques et il faut alors les respecter : pas de
chirurgie !
La lithiase de la voie biliaire principale est consécutive à la migration d'un ou plusieurs calculs à
partir de la vésicule le plus souvent. Lorsque les calculs flottent librement dans la voie biliaire
ils sont asymptomatiques. Ils ne provoquent des symptômes que lorsqu'ils se bloquent dans la
voie biliaire (ampoule de Vater).
b) Signes cliniques de la lithiase du cholédoque
Douleurs de type biliaire, liées à la distension aiguë des voies biliaires. Siègent au creux
épigastrique 2 fois sur 3, dans l'hypochondre droit 1 fois sur 3. Irradient vers l'omoplate ou
l'épaule droite. Souvent accompagnées de nausées et vomissements.
Angiocholite = infection bactérienne des voies biliaires secondaires à l'obstacle. Fièvre à 39-40°,
frissons. Des troubles neuro-psychiques associés peuvent exister chez les personnes âgées. Une
septicémie peut survenir avec collapsus cardio-vasculaire et/ou insuffisance rénale.
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L'ictère par obstruction est souvent précédé d'une douleur biliaire et de fièvre. L'ictère apparaît
dans la plupart des cas dans les 24 à 48 heures suivant le début de la douleur. Il faut savoir
cependant que dans 10 à 15 % des cas l'ictère est isolé et n'est pas précédé de douleurs ou de
fièvre.
Biologiquement, hyperleucocytose. Augmentation des phosphatases alcalines. Augmentation des
transaminases, habituellement cette élévation est modérée mais parfois très élevée pouvant
faire porter à tort le diagnostic d'hépatite virale.
Un tableau identique peut être dû à un gros calcul vésiculaire qui vient comprimer la voie biliaire
principale : c'est le syndrome de Mirizzi.
c) Stratégie diagnostic
Échographie abdominale +++. Dans le meilleur des cas l'échographie va montrer une dilatation
des voies biliaires intra-hépatiques et de la voie biliaire principale, un calcul cholédocien (qui
n'est visualisé que dans 20 % des cas). Cependant, une échographie abdominale normale,
devant un contexte clinique évocateur, n'élimine pas le diagnostic.
Scanner abdominal en cas d'échec de l'échographie.
Cholangio-IRM, si disponible : sa sensibilité est de 70 à 100 %.
Écho-endoscopie : excellente performance +++. Sensibilité proche de 100 %.
S'il s'agit d'un sujet âgé ou ayant un risque opératoire qui contre-indique le traitement chirurgical,
la cholangiographie rétrograde endoscopique doit être réalisée d'emblée. Si elle confirme la
lithiase, celle-ci pourra être immédiatement traitée par sphinctérotomie et extraction du calcul.
Cette attitude peut également être adoptée en cas de cholécystectomie antérieure, le traitement
de choix dans ce cas étant la sphinctérotomie endoscopique.
d) Traitement de la lithiase cholédocienne
Les modalités de traitement de la lithiase de la voie biliaire principale sont encore très discutées.
La chirurgie classique par laparotomie est de moins en moins utilisée. Elle comprend la
cholécystectomie, l'opacification de la voie biliaire, l'incision du cholédoque et l'extraction des
calculs, la vérification de la vacuité de la voie biliaire par cholédocoscopie, le cholédoque est
ensuite refermé ou drainé par un drain de Kehr.
La chirurgie coelioscopique, théoriquement idéale, n'est pas disponible dans tous les centres. Elle
requiert une expertise importante. Le taux de succès varie selon les équipes de 60 à 100 % et le
taux de conversion de 2 à 30 %.
Le traitement combiné sphinctérotomie endoscopique puis cholécystectomie sous coelioscopie
est un compromis assez largement admis. Il ne faut cependant pas négliger les risques de la
sphinctérotomie endoscopique : pancréatite aiguë, hémorragie, perforation.
La sphinctérotomie seule est indiquée en cas de lithiase cholédocienne chez un patient
cholécystectomisé, chez le sujet âgé lorsque l'intervention chirurgicale est contre indiquée ou
comporte un risque élevé.
2) Cancer du pancréas
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a) Clinique
Pour les cancers de la tête du pancréas le symptôme le plus fréquent est la douleur, de siège
épigastrique à irradiations postérieures, permanente et intense, dite solaire, souvent la
traduction d'un envahissement tumoral du plexus caeliaque (et donc d'emblée inextirpable).
L'altération de l'état général est constante.
L'ictère est présent dans 80 % des cas, souvent associé à un prurit. Il peut être isolé fonçant
inexorablement jusqu'à une couleur vert bronze.
Un diabète peut être révélateur et il faut évoquer le cancer du pancréas chez les personnes âgées
dont le diabète est d'apparition récente.
L'élévation du CA19.9 est inconstante et, de plus, ce marqueur s'élève en cas de cholestase
quelle qu'un soit la cause. Ce marqueur n'est donc ni très sensible, ni très spécifique.
b) Examens morphologiques
Échographie : examen de première intention mais peu performant pour le diagnostic
d'adénocarcinome du pancréas.
Scanner : performant pour le diagnostic et l'inventaire d'extension loco-régionale et à distance. Il
permet de préciser le plus souvent le caractère potentiellement réséquable ou non de la lésion
pancréatique en précisant les rapports avec les vaisseaux mésentériques, l'existence ou non d'un
envahissement ganglionnaire qui est un élément pronostic essentiel, l'existence ou non de
métastases hépatiques ou péritonéales.
Echo-endoscopie : examen de deuxième intention car invasif. La sensibilité de l'écho-endoscopie
pour le diagnostic d'adénocarcinome est supérieure à 90 % et l'écho-endoscopie reste
performante dans le dépistage des tumeurs de moins de 2 cm. Elle permet enfin une ponction
de la masse pour une étude histologique ou cytologique. Il faut rappeler à ce sujet qu'une
preuve histologique de cancer est indispensable avant chimiothérapie ou radio-chimiothérapie.
I.R.M. : également très performante mais problème de disponibilité.
c) Traitement
La chirurgie à visée curative est envisageable au mieux que chez 1 malade sur 5 sachant que les
survivants à long terme représentent 1 à 3 % des malades, opérés ou non, le bien fondé de la
résection reste discuté dans son rapport coût/efficacité. Il n'en reste pas moins vrai que la
résection curative est encore le traitement de référence du cancer du pancréas car elle seule
permet des survies à long terme même si celles-ci sont rares. Dans les cancers de la tête du
pancréas, les plus fréquents, le traitement chirurgical consiste en une duodéno-pancréatectomie
céphalique. Dans les cancers corporéo-codaux, il s'agit d'une spléno-pancréatectomie gauche.
En situation palliative, le traitement de l'obstruction biliaire ou digestive fait appel à des
techniques endoscopiques ou chirurgicales. Concernant la sténose biliaire, lorsque la survie
prévisible est inférieure à 3 mois (métastases hépatiques ou péritonéales), la mise en place
d'une prothèse plastique simple est préférable à une prothèse métallique pour des raisons de
coût. Au contraire, si elle est supérieure à 3 mois, on préférera utiliser une prothèse métallique
dont l'obstruction est statistiquement plus tardive. Les endo-prothèses biliaires améliorent le
confort de survie du patient en agissant sur l'ictère et le prurit qui le plus souvent régressent
rapidement. La chirurgie palliative de dérivation est préférable chez les patients qui ne sont pas
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en situation métastatique mais qui ont été récusés à visée curative en raison d'une extension
loco-régionale.
La chimiothérapie seule est indiquée en situation métastatique et fait appel à la gemcitabine
(gemzar). Son efficacité est modeste mais réelle, améliorant significativement la qualité de vie.
Dans certains protocoles, si l'état clinique du patient l'autorise, elle est associée au 6-platine.
La radio-chimiothérapie peut être indiquée en cas de cancer localement avancé non réséquable
mais non métastatique. L'association semble donner des résultats supérieurs à la chimiothérapie
seule.
III ICTERE A BILIRUBINE CONJUGUEE D'ORIGINE INTRA-HEPATIQUE
1) Hépatites virales
Le diagnostic est facile dans leur forme typique : sujets jeunes, notion de contage, phase pré-ictérique qui
a une grande valeur diagnostic (céphalées, arthralgie, myalgie, fièvre), ictère modéré avec décoloration
incomplète des selles, foie de volume normal mais splénomégalie fréquente, lymphocytose ou leuco-
neutropénie sanguine, forte et précoce augmentation des enzymes de cytolyse hépatique (10 à 20 fois la
normale). Les sérodiagnostics confirment le diagnostic.
Le problème pratique auquel on est en fait souvent confronté est d'évaluer, devant une hépatite aiguë que
celle-ci soit d'ailleurs virale ou non, le degré de gravité. C'est cet aspect qui sera développé.
a) Quelques définitions importantes
On parle d'hépatite aiguë sévère devant un taux de prothrombine inférieur à 50 % en l'absence
de signe clinique d'encéphalopathie hépatique.
On parle d'hépatite fulminante ou sub-fulminante quand le taux de prothrombine, inférieur à 50
% de la normale, est associé à une encéphalopathie hépatique clinique.
L'hépatite est dite fulminante quand le délai entre le début de l'ictère et celui de
l'encéphalopathie est inférieur à 2 semaines, et sub-fulminante quand ce délai est compris entre
2 semaines et 3 mois.
Devant une hépatite aiguë, 2 facteurs pronostics sont essentiels : le T.P inférieur ou supérieur à
50 % (mieux encore le facteur V s'il est disponible), l'existence ou non d'une encéphalopathie
hépatique. L'intensité de la cytolyse hépatique n'est en aucun cas un facteur pronostic. Par contre,
l'augmentation de la bilirubine au delà de 87 mg/l est également un facteur pronostic péjoratif.
b) Quelques données cliniques
Au départ, tableau d'une hépatite virale aiguë commune.
Des médicaments (antalgiques, antiémétiques, sédatifs) peuvent avoir été consommés. Ils sont
délétères et doivent être impérativement évités. Certains hépatologues affirment même que les
hépatites virales fulminantes ne surviennent que chez les patients qui, au début de leur histoire
clinique, ont pris ce type de médicaments, lesquels sont venus précipiter l'encéphalopathie
hépatique.
L'encéphalopathie hépatique se divise en 3 stades : stade 1, astérixis et inversion du rythme
nycthéméral ; stade 2, syndrome confusionnel ; stade 3, coma. Au stade de coma un oedème
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cérébral est constant et son aggravation est cause d'hypertension intra-crânienne. Celle-ci est la
principale cause de décès.
Cliniquement, outres les signes d'encéphalopathie hépatique, doivent inquiéter la survenue d'une
atrophie hépatique, la constitution d'une ascite, des douleurs abdominales persistantes
(inhabituelles dans les hépatites virales simples), des ecchymoses témoins d'anomalies de
l'hémostase, ...
c) Conduite à tenir ?
Devant une hépatite sévère (T.P inférieur à 50 %) : avis spécialisé urgent.
Devant une hépatite fulminante : l'hospitalisation en secteur médico-chirurgical de greffe
s'impose.
Dans tous les cas, stopper (ou ne pas donner) tout médicament, en particulier ceux ayant une
action sédative directe ou indirecte (antiémétiques).
d) Pronostic des hépatites fulminantes
En l'absence de transplantation hépatique, quelque soit la cause, plus de 90 % de décès.
Avec transplantation hépatique : environ 70 % de survie à distance.
Les indications de la transplantation hépatique sont : avant 30 ans, encéphalopathie hépatique et
facteurs V inférieurs à 20 % ; après 30 ans, encéphalopathie hépatique et facteurs V inférieurs
à 30 %.
e) Causes des hépatites aiguës graves
Les hépatites virales représentent environ 60 % des hépatites fulminantes ou sub-fulminantes en
France. Parmi elles, l'hépatite virale B est de loin la plus fréquente. Les autres causes
d'hépatite virale aiguë grave sont l'hépatite A, Delta, E (dernier trimestre de la grossesse), très
exceptionnellement d'autres virus ont pu être incriminés (herpès, CMV, EBV). L'hépatite C
fulminante, pour résumer, n'existe pas.
Hépatites médicamenteuses et toxiques : le Paracétamol est le plus régulièrement incriminé.
C'est la cause la plus fréquente d'hépatite aiguë grave en Angleterre. Le plus souvent, l'hépatite
au Paracétamol est le fait d'un surdosage massif dans un but suicidaire. Le Paracétamol peut
cependant être toxique à dose thérapeutique en cas d'hépatopathie pré-existante notamment.
Un traitement spécifique existe, la N acétylcystéine (MUCOMYST ou FLUOMYCIL) d'autant
plus efficace qu'elle est administrée tôt. D'autres médicaments peuvent être responsables
d'hépatites graves voire fulminantes : les anti-inflammatoires non stéroïdiens, les
antidépresseurs, les antituberculeux, ...
Autres causes : infiltration maligne diffuse du foie, hépatite chronique révélée sur un mode aigu
(Budd Chiari, hépatite auto-immune, maladie de Wilson).
2)Autres causes
Hépatite alcoolique aig: contexte d'intoxication, fièvre, hyperleucocytose, TGO supérieurs à
TGP, foie hyperéchogène en échographie.
Hépatite médicamenteuse : rechercher des manifestations d'intolérance (rash cutané, urticaire,
fièvre, éosinophilie), échographie abdominale normale. De très nombreux médicaments
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