Des controverses christologiques passionnées se déclenchèrent suite à la mort de St. Maron,
divisèrent les chrétiens au Vème siècle. Ephèse ne mit pas fin au déchaînement, mais causa la
deuxième dislocation dans l’unité de l’église en produisant l’église nestorienne.
Celle-ci se développa en dehors des limes de l’Empire et rayonna dans tout l’Orient.
Chalcédoine accentua les scissions et engendra les églises-Nations : copte éthiopienne,
arménienne, syriaque. Cette dernière se scinda en 2 groupes : l’Eglise monophysite orthodoxe
et l’église maronite. Celle-ci se réclama de Maron dont 1"’école" ascétique survécut à la mort
du fondateur. C’est ainsi que Théodoret de Cyr s’exprime à propos de ce phénomène : "C’est
lui qui a planté pour Dieu le jardin qui fleurit aujourd’hui dans la région de Cyrrhus".
L"’école" ascétique se transforma en monastère, fondé en 452 très probablement par
l’empereur Maurice, mais organisé sous l’égide de Théodoret, qui infléchit l’ascèse dans le
sens de la modération, conformément aux décrets de Chalcédoine. C’était normal de redonner
la dignité à l’être humain et d’en revaloriser le corps, soumis auparavant à une austérité
"martyrisante", puisque l’essence de la définition de Chalcédoine énonce que le Christ est une
personne unique en deux natures : humaine et divine parfaites. "Nous enseignons tous d’une
seule voix, proclament les pères conciliaires, un seul et même Fils, NSJC, le même parfait en
divinité, le même parfait en humanité, le même Dieu vraiment et homme vraiment, fait d’une
âme raisonnable et d’un corps, consubstantiel au Père selon la divinité, consubstantiel à nous
selon l’humanité, semblable à nous en tout hors le péché, engendré du Père avant les siècles
quant à sa divinité... engendré de Marie, la Vierge, la Théotokos quant à son humanité, un
seul et même Christ, Fils, Seigneur, Fils unique, que nous reconnaissons être en deux natures,
sans confusion ni changement, sans division ni séparation ; la différence des natures n’est
nullement supprimée par l’union, mais, au contraire, les propriétés de chacune des deux
natures restent sauves et se rencontrent en une seule personne ou hypostase"2.
Cette définition constitue l’âme de l’être maronite : une foi inébranlable en Dieu qui requiert
une fidélité indéfectible au magistère de l’église. Ainsi le monastère de St. Maron, premier
foyer orthodoxe, se fixa un double but : défendre la doctrine de Chalcédoine et évangéliser les
contrées encore païennes. C’est autour de ce monastère, situé vraisemblablement en Syrie
Seconde, que se forma l’église maronite. Le site exact du monastère demeure inconnu.
L’ignorance de son adresse donna lieu aux multiples théories soigneusement rassemblées par
H. Suemann3. Les fouilles archéologiques et la concordance des sources écrites devraient
mener à délimiter la place du couvent. Pendant trois siècles, le monastère dirigea la lutte pour
la défense du chalcédonisme et sa suprématie fut reconnue universellement dans les
assemblées synodales et les débats dogmatiques organisés devant les maîtres de la Syrie, tour
à tour byzantins et arabes. Les discussions théologiques dégénérèrent en bataille surtout lors
de l’installation de Sévère au siège d’Antioche. En 517, tombent les premiers martyrs
maronites de Chalcédoine, victimes d’une embuscade tendue par les Monophysites aux
abords de Larissa, alors qu’ils se rendaient pour une réunion en vue d’une réconciliation4. La
fermentation théologique et intellectuelle manifestée vers 591, en 658-659, toujours frustrée,
devait se muer en une organisation institutionnelle. Les moines de Beth Maron ou de la
maison de Maron, ainsi appelés par les sources, et leurs évêques, attachés à la communion et à
la charité, auraient bien voulu rester là si des événements majeurs ne s’étaient pas déclenchés,
déterminant un cours inflexible.
La naissance de l’Eglise maronite