En France, l’Eglise s’exprime sur
le renouvellement de la loi de bioéthique
Père Olivier de Dinechin, s.j.
D’hier à demain, des lois adaptées
« De l’éthique au droit », ce titre d’un rapport du
Conseil d’Etat qui fut très lu vers 1989, donne le
ton de l’effort de plus de vingt ans réalisé en
France pour se donner des lois dans le domaine
de la « bioéthique ». Un domaine nouveau alors,
mais désormais largement entré dans la clinique,
et toujours ouvert à de nouvelles recherches. Si à
l’époque l’avant-projet de loi du Conseil d’Etat
ne parvint pas jusqu’au Parlement, ce dernier dota
cependant le pays des célèbres « lois de bio-
éthique », celles de 1994 – préparées par Jean
François Mattei – puis réajustées une première
fois en 2004. Elles devaient l’être à nouveau en
2009, et le seront vraisemblablement au prin-
temps 2010.
En vue de légiférer dans ce domaine, un des tout
premiers avis du Comité consultatif national
d’éthique (créé en 1983) préconisait une large
consultation nationale Elle ne fut pas réalisée,
sinon à travers des avis de ce Comité et d’autres
instances publiques au cours des années qui ont
suivi, et à travers des événements et débats
publiés dans des revues de bonne tenue, et dont la
presse fit écho : notamment sur la gestation pour
autrui, affaire « Patricia », sur le diagnostic
préimplantatoire ou le « bébé médicament », ou
encore sur le clonage reproductif lors de la
naissance de la brebis Dolly. L’opinion générale
est sensible à tout ce qui touche au début ou la fin
de la vie, elle l’est moins sur des domaines
comme les greffes d’organes, les neurosciences
ou l’expérimentation humaine, et elle est plus
souvent alertée que bien informée sur tous ces
domaines. D’où la difficulté, soulignée par des
observateurs, de sortir le débat du domaine des
spécialistes, scientifiques ou éthiciens, et d’en
faire un réel débat démocratique.
Les « points chauds » de la révision en cours
C’est principalement sur les interventions
médicales autour de la conception et du fœtus que
le débat a été relancé : la médecine procréation ,
devenue courante, est proposée aux couples dès
qu’ils trouvent trop longue l’attente d’une
naissance; quant à la médecine fœtale, elle
progresse peu sur les thérapies mais réguliè-
rement sur les diagnostics; le diagnostic prénatal
s’affine de plus en plus en extension et en
profondeur, et tend à devenir avec les analyses
chromosomiques ou génétiques, un réel dépistage
largement proposé aux femmes enceintes. Une
offre biomédicale accrue, une demande sociétale
activée, malgré les perplexités et les ignorances
pratiques. D’où quelques points chauds, sur
lesquels l’actuel projet de loi dessine ses
propositions, mais qui engagent déjà bien des
prises de position, et promettent des débats
animés.
Quelques points chauds de l’actualité
L’élargissement des conditions d’accès à
l’assistance médicale à la procréation : aux
couples « pacsés », et surtout aux couples homo-
sexuels qui souffrent – disent certains – d’une
« infertilité sociale ». La proposition de loi dit
non à l’accès des couples homosexuels, ce qui
fait réagir diverses associations.
La gestation pour autrui (GPA) dénomination
récente de la pratique dite des « mères porteuses
» qui, dans les années 80 avait fait l’objet de
nombreux débats, et que la loi de 1994 avait
soigneusement interdite. Les arguments en faveur
de la suppression de cet interdit sont vigoureu-
sement avancés par divers groupes de pression :
certaines femmes souffrent d’une infertilité que
l’on pourrait ainsi contourner, d’autres pays
voisins la tolèrent (Belgique, Pays Bas), voire
l’autorisent (Grande Bretagne, Grèce), et il serait
possible de l’encadrer pour éviter les abus et les
trafics. Les partisans du maintien de l’interdiction
soulignent la déshumanisation de telles pratiques,
l’exploitation des femmes, le manque de respect à
leur dignité etc. La proposition de loi maintient
l’interdiction.
La levée de l’anonymat dans le don de gamètes
ou la cession d’embryons. La France a fait de
l’anonymat dans les dons et échanges de