LA PERSONNE ATTEINTE D’UN TROUBLE PSYCHIQUE
INTRODUCTION
Selon Gérard Cornu, la responsabilité pénale est l’obligation de répondre des infractions
commises et de subir les peines prévues par le texte qui les répriment. La responsabilité
pénale suppose donc de l’auteur un acte intentionnel c’est- à -dire commis en conscience et
volonté, celui-ci devant être capable de comprendre et vouloir son acte. C’est seulement à
cette condition que pourra lui être imputée l’infraction. Si tel n’est pas le cas, la justice
décidera que l’auteur n’est pas punissable c’est-à-dire irresponsable. Ne pourra alors lui être
imputée aucune infraction.
Ce concept d’irresponsabilité découle d’un fondement morale du droit pénal selon lequel ce
n’est que sous couvert de discernement et de libre arbitre que des poursuites sont possibles.
Notre droit pénal connaît trois causes d’irresponsabilités, appelées aussi causes subjectives
d’irresponsabilité : le trouble psychique ou neuropsychique qui nous intéresse aujourd’hui, la
contrainte et l’erreur. Le trouble psychique se définit comme une altération des facultés
mentales qui atteint l’intelligence ou la volonté d’un individu.
Traditionnellement, notre droit considère l’individu atteint d’un trouble mental comme
irresponsable. En effet, privé de discernement et de libre arbitre au moment de l’acte, il
apparaîtrait alors injuste et inutile qu’il assume au plan pénal les conséquences de ses actes.
Injuste car il n’a pas eu conscience qu’il commettait une infraction, et inutile car incapable de
comprendre le caractère dissuasif de la sanction.
Le principe d’irresponsabilité pénale n’est pas à proprement parlé inscrit dans le code pénal. Il
découle de l’évidence des articles 122-1 et 122-2 de ce même code.
D’ailleurs, les malades mentaux n’ont pas toujours été considérés de la même manière par le
droit criminel. Ainsi, en droit romain, le fou reste impuni car il n’a pas eu d’intention et est
suffisamment sanctionné par sa maladie. Au contraire, le Moyen Age considérait les fous
comme possédés par le démon et donc soumis aux peines de droit commun. Le principe
d’irresponsabilité fut ensuite repris par le droit canonique puis par le droit laïc au 18ème siècle
grâce à différents travaux comme ceux de Pinel et d’Esquirol qui introduisirent une nouvelle
conception de la folie. Elle devint une maladie mentale dite « aliénante » de l’esprit qui prive
ceux qui en sont atteint de leur libre arbitre et donc de leur responsabilité pénale.
Le code pénal de 1810 a suivi cette nouvelle conception faisant échapper le dément à toute
répression par son article 64 selon lequel : « il n’y a ni crime, ni délit lorsque le prévenu était
en état de démence au temps de l’action. » Cependant, la formulation de l’article 64 s’est
révélée très rapidement inadaptée. En effet, grâce aux progrès de la psychiatrie, le terme
démence s’est vu donné un sens médical précis ne permettant plus de recouvrir toutes les
formes d’aliénation mentale. D’autre part, la formulation « ni crime, ni délit » n’englobait pas
les contraventions et laissait croire qu’aucune infraction n’avait été commise provoquant des
difficultés pour retenir la culpabilité d’éventuels complices de l’aliéné. Enfin, l’article 64 ne
prenait pas en compte le cas des personnes atteintes de troubles mentaux insuffisamment
graves pour être qualifiés d’état de démence mais de nature à influencer le comportement et
donc à altérer le libre arbitre. Ces personnes étaient alors déclarées responsable mais
bénéficiaient parfois de circonstances atténuantes. Cette pratique des magistrats était issue de
la circulaire Chaumier de 1905 qui invitait les juges à adapter la notion de démence aux
progrès de la psychiatrie, en prenant en compte des troubles mentaux qui restaient en dehors