
continuerions la lutte comme un seul peuple. Rien ne serait comme avant! A partir de ce moment-là 
les Américains pourraient même être tentés de venir à notre secours. 
PAUL REYNAUD - Cela est généreux, surtout dans l'état où notre défaite militaire vient de nous 
mettre… (il est de plus en plus perturbé) Cela est très généreux… Cela est très généreux… Mais vous 
n'y pensez pas, vous n'y pensez pas, ce serait beaucoup trop compliqué… Quant aux Américains, je n'y 
crois guère… D'ailleurs tout est trop compliqué… Et puis les Allemands sont trop forts… Et puis, et 
puis… Non, je suis à bout de forces…  Je préfère donner ma démission. Je ne veux pas être celui qui 
aurait accepté de reconnaître que la France doit cesser le combat. Le maréchal Pétain y pourvoira 
parfaitement. Il n'attend que ça. 
PETAIN  -  Vous  avez  raison,  je  suis  prêt  à  tous  les  sacrifices.  Français,  écoutez-moi:  "Moi,  le 
maréchal Pétain, le vainqueur de Verdun, je fais à la France le don de ma personne pour atténuer son 
malheur. Il faut cesser le combat. Je me suis cette nuit adressé à l'adversaire…" 
CHURCHILL - Ça suffit, je n'ai pas envie d'en entendre davantage. Général de Gaulle, si vous avez 
envie de me rejoindre à Londres, je mets un avion à votre disposition. 
DE GAULLE - Je vous remercie. Je refuse de me rendre, je vous rejoins…  
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DE  GAULLE  -  Maintenant  je  suis  à  Londres,  mais  je  suis  seul  et  démuni  de  tout,  comme  un 
naufragé de la désolation, comme un homme au bord d'un océan qu'il prétendrait franchir à la nage… 
CHURCHILL  -  Général  de  Gaulle,  vous  n'êtes  pas  seul.  Laissez-moi  vous  assurer  que  les 
événements  de  France  ne  changent  rien  à  la  résolution  de  l'Angleterre.  Puisque  nous  sommes 
désormais les seuls champions en armes de la cause du Monde Libre, nous ferons de notre mieux pour 
être  dignes de  cet insigne honneur.  Nous  défendrons notre  île  et,  entourés de  notre Empire,  nous 
poursuivrons la lutte jusqu'à ce que le fléau de Hitler n'accable plus les hommes. Général de Gaulle, 
moi, Churchill, moi, l'Angleterre, nous sommes à vos côtés.  
DE GAULLE - Merci, monsieur le Premier Ministre… Mais  plus j'y songe et plus cela me paraît 
évident: la première chose que je dois faire est de m'adresser aux Français pour leur demander de venir 
me rejoindre. Depuis l'Angleterre, la France ainsi continuerait le combat. 
CHURCHILL - Excellente idée! Je mets la radiodiffusion anglaise, notre fameuse B.B.C., à votre 
disposition. Nous sommes le 17 juin: si vous le voulez, demain, le 18 juin à 18 heures, vous aurez 
l'antenne et vous pourrez lancer votre appel. 
DE GAULLE - Monsieur le Premier Ministre, je vous remercie. J'ai soigneusement préparé mon 
texte: "Françaises, Français, cette guerre n'est pas tranchée par la bataille de France. Cette guerre est 
une  guerre  mondiale.  Foudroyés  aujourd'hui  par  la  force  mécanique,  nous  pourrons  vaincre  dans 
l'avenir  par  une  force  mécanique  supérieure!  Devant  la  confusion  des  âmes  françaises,  devant  la 
liquéfaction d'un gouvernement tombé sous la servitude ennemie, moi, général de Gaulle, réfugié à 
Londres, j'ai conscience de parler au nom de la France et j'invite les officiers et les soldats français qui 
se trouvent en territoire britannique, avec leurs armes ou sans leurs armes, à se mettre en rapport avec 
moi pour y reprendre le combat." 
CHURCHILL - Général de Gaulle, je vous renouvelle toute ma confiance, je soutiendrai toutes vos 
initiatives. 
DE GAULLE - Monsieur le Premier Ministre, je vous remercie. Pensez-vous que j'ai été entendu? 
CHURCHILL - De toute façon, votre message sera relayé par les journaux du monde entier… 
DE GAULLE - Je l'espère… Mais j'ai le sentiment de n'avoir pas tout dit. Je ne dois pas m'adresser 
seulement aux  Français qui se trouvent en Angleterre, il  faut  aussi que je retienne sur le bord du 
gouffre  l'Empire  français,  nos  colonies  et  notre  flotte…  Laissez-moi ajouter quelque chose  à mon 
premier message. 
CHURCHILL - Vous n'insisterez jamais assez. Allez-y! 
DE GAULLE - "Moi, général de Gaulle, qui vous parle de Londres, je renouvelle mon appel: tout 
Français qui porte encore les armes, où que ce soit dans le monde, a le droit absolu de continuer la 
résistance. Partout, et en particulier dans l'Afrique française du Nord, encore intacte, tout ce qui a de 
l'honneur a le strict devoir de refuser l'exécution des conditions ennemies. Moi, général de Gaulle, 
j'entreprends aujourd'hui cette tache nationale de continuer la  lutte et j'invite tous les Français qui 
veulent rester libres à m'écouter et à me suivre. Vive la France libre!"