A10. Activité – Coefficient de partage et extraction par solvant Ce document donne des informations théoriques explicitant la technique d’extraction liquide-liquide (première partie). Il prend appui sur des activités expérimentales : - une manipulation déjà proposée dans l’enseignement de spécialité du programme de 1995 (accessible dans les ouvrages scolaires, chapitre arômes, colorants et conservateurs). L’objectif est maintenant de déterminer le coefficient de partage de l’acide benzoïque entre l’eau et l’éther diéthylique (solvant non miscible à l’eau). L’acide benzoïque est titré en solution aqueuse en présence d’un indicateur de fin de réaction ; - une manipulation (deuxième partie) : Détermination du coefficient de partage du diiode entre l’eau et un solvant organique non miscible à l’eau (manipulation introduite en classe de seconde par le TP2 - miscibilité, solubilité, densité, page 20 du document d’accompagnement). Les objectifs de cette manipulation sont larges puisqu’on se propose de déterminer le coefficient de partage du diiode entre l’eau et le cyclohexane et que l’on explicite le comportement du diiode, en solution aqueuse, en présence d’ions iodure. La constante de formation du complexe triiodure peut alors être déterminée Première partie : technique d’extraction liquide-liquide Objectifs Expliquer le principe de l’extraction liquide-liquide. Montrer que l’efficacité d’une extraction est accrue si l’on effectue deux extractions avec deux fois un volume donné plutôt qu’une seule extraction avec le même volume total. Présentation du coefficient de partage L’extraction liquide-liquide consiste à faire passer une espèce chimique d’un solvant duquel il est souvent difficile de l’extraire, à un autre, dont elle est facilement isolable (solvant volatil, appelé solvant d’extraction, éliminé par distillation ou par passage à l’évaporateur rotatif). Les deux solvants ne doivent pas être miscibles entre eux. Le solvant d’extraction est choisi de telle sorte que l’espèce à extraire y soit beaucoup plus soluble que dans le solvant initial. Cette extraction correspond à la transformation suivante : EI Espèce E : n0 Solvant 1, V1 Solvant 2, V2 Elle est modélisée par la réaction d’équation : EF Espèce E : n1 = n0 - x Solvant 1, V1 Espèce E : n2 = x Solvant 2, V2 Esolvant1 = Esolvant2 à laquelle est associée une constante d’équilibre, K, appelée coefficient de partage. [E]éq.solvant2 K= [E]éq.solvant1 Il s’agit de montrer que l’efficacité d’une extraction dépend de la constante d’équilibre, K, et du fractionnement des extractions (nombre d’extractions réalisées pour un même volume de solvant d’extraction). Le rendement d’extraction dépend du fractionnement Extraction d’une espèce contenue dans un volume V1 de solvant 1, à l’aide d’un volume V2 de solvant 2, en une seule opération État initial Au cours de la transformation État d’équilibre final Esolvant1 = n0 n0 - x n0 - xéq. Esolvant2 0 x xéq. xéq. À l’équilibre Qr,éq. = [E]éq.solvant2 [E]éq.solvant1 = V2 =K (n0 -xéq. ) V1 d’où xéq. (V1 + K.V2) = K.n0.V2 Rendement d’extraction Applications numériques xéq. = r= n0 .K .V2 V1 +K .V2 xéq. n0 K .V2 V1 K .V2 Premier cas K=2 V1 = 20 mL V2 = 20 mL r= 2 20 2 67% 20 2 20 3 r= 4 20 4 80% 20 4 20 5 Deuxième cas K=4 V1 = 20 mL V2 = 20 mL Conclusion D’après les applications numériques, plus la constante d’équilibre K est grande, meilleure est l’extraction. Un solvant d’extraction est un solvant dans lequel l’espèce chimique à extraire est bien soluble ce qui implique une constante d’équilibre (coefficient de partage) de valeur élevée. Extractions successives d’une espèce contenue dans un volume V1 de solvant 1 à l’aide de deux V volumes 2 de solvant 2 (fractionnement des extractions) 2 Première extraction K=2 n0 = 5.10-1 mol V1 = 20 mL V2 = 10 mL 2 État initial Au cours de la transformation État d’équilibre final À l’équilibre x1éq. Qr,éq. = 10 =2 5.10-1 -x1éq. 20 5.10 .2.10 x1éq. = 0,25 mol 20+2.10 n0 -x1éq. =5.101 0,25 0,25 mol 1 Esolvant1 = n0 = 5.10-1 mol n0 - x1 n0 - x1éq. Esolvant2 0 x1 x1éq. r1 = x1éq. n0 50% Deuxième extraction V2 = 10 mL 2 État initial Au cours de la transformation État d’équilibre final Esolvant1 = n0 - x1éq. = 0,25 mol n0-x1éq. - x2 n0-x1éq. - x2éq. Esolvant2 0 x2 x2éq. A l‘équilibre x2éq. 2.x2éq. 10 = =2 (n0 -x1éq. )-x2éq. (n0 -x1éq. )-x2éq. 20 x2éq. = 0,125 mol Qr,éq. = Rendement d’extraction xéq. x1éq. x2éq. 0,25 0,125 75% r= n0 n0 0,5 Conclusion Ainsi, pour un même volume de solvant d’extraction (V2 = 20 mL), il est préférable de fractionner les extractions et donc de réaliser deux extractions successives avec chaque fois 10 mL de solvant. Le rendement passe alors de 67 % à 75 % pour une réaction dont la constante d’équilibre est K = 2. Deuxième partie : détermination du coefficient de partage du diiode entre l’eau et le cyclohexane (activité expérimentale) Objectifs Déterminer le coefficient de partage du diiode entre deux solvants non miscibles, l’eau et le cyclohexane. En déduire la constante de formation du complexe triiodure, I 3 . Cette manipulation suppose que la notion d’équilibre chimique a été étudiée. Présentation de la démarche Le diiode, espèce chimique colorée, est peu soluble dans l’eau. C’est pourquoi on utilise souvent des solutions de diiode dans l’iodure de potassium ; le diiode s’y dissout en plus grande quantité que dans l’eau en raison de la formation du complexe triiodure, I 3 , suivant la réaction : I2(aq) + I-(aq) = I3 (aq). Le diode, I2, et l’ion triodure, I3 ,se titrent de la même façon par les ions thiosulfate S2O32- , les couples oxydant/réducteur mis en jeu sont : I3 (aq)/I-(aq) S4 O62- (aq)/ S2O32- (aq) I2(aq)/I-(aq) Pour déterminer la concentration molaire du diiode en solution dans l’eau, [I 2], la démarche proposée consiste à passer par l’intermédiaire du coefficient de partage du diiode entre deux solvants, l’eau d’une part et un solvant organique non miscible à l’eau d’autre part, le cyclohexane noté S. Le I2 S,éq. coefficient de partage est la constante d’équilibre associée à la réaction : I2(aq) = I2(S) K = . I2 H O,éq. 2 Comme toute constante d’équilibre K n’est fonction que de la température et ne dépend pas en particulier de la présence d’autres formes de diiode (complexe par exemple) dans l’une ou l’autre phase. Les différentes étapes : - Préparer une solution de diiode dans le cyclohexane de concentration molaire connue, ajouter de l’eau en quantité connue, agiter. Une partie du diode passe de la phase organique dans la phase aqueuse. Déterminer par étalonnage la quantité de diiode dissous dans le solvant organique et par titrage la quantité de diiode dissous dans l’eau. - Recommencer la même manipulation en remplaçant l’eau par une solution aqueuse d’iodure de potassium. On dose la quantité de diiode dans le cyclohexane comme précédemment ; le coefficient de partage permet d’en déduire la concentration molaire de diiode, [I2] dans la phase aqueuse. Déterminer ensuite, par titrage de la phase aqueuse, la somme des concentrations en diiode et en ion triiodure. Connaissant la concentration molaire apportée [I-]0 de l’iodure de potassium, calculer la concentration molaire en ions iodure [I-], puis la constante d’équilibre de la réaction de formation du complexe triiodure. Protocole Matériel et produits Ampoule à décanter 250 mL Pipettes de 1 mL, 10 mL, 20 mL, 50 mL Pipette graduée de 5 mL Fioles jaugées de 50 mL, 200mL Bechers de 100 mL, 200 mL Agitateur magnétique et turbulent Eau distillée Empois d’amidon ou thiodène Cyclohexane Alcool à brûler Solution de diode dans le cyclohexane de concentration molaire 4,00.10 -2 mol.L-1 Iodure de potassium solide Solution d’iodure de potassium de concentration molaire 1,00.10-1 mol.L-1 Solution de thiosulfate de sodium de concentration molaire 5,00.10-3 mol.L-1 Mode opératoire 1. Expériences préliminaires qualitatives - Mise en évidence de la solubilisation du diiode dans l’eau en présence d’ions iodure par formation du complexe triiodure, I 3 , réalisée par l’enseignant1 : Un cristal de diode est placé dans un becher, ajouter de l’eau distillée et observer. Ajouter alors une spatulée d’iodure de potassium, agiter et observer. L’enseignant conclut et introduit la réaction de formation de l’ion triiodure : I2(aq) + I-(aq) = I3 (aq) et la constante d’équilibre associée à la réaction, nommée constante de formation du complexe triiodure : [I3- ]éq. . Kf = I2 éq. [I- ]éq. La solution ainsi préparée est utilisée dans les deux expériences suivantes réalisées par les élèves. - 1 Détection de l’équivalence du titrage par les ions thiosulfate : Dans un tube à essai contenant une solution d’iodure de potassium2, ajouter quelques gouttes d’empois d’amidon3, observer. Faire de même avec une solution de diiode puis avec la solution d’ions triiodure. Le diiode est un produit onéreux. Il faut disposer d’une solution fraîche d’iodure de potassium car les ions iodure s’oxydent à l’air en diiode. 3 Ou du thiodène. 2 L’enseignant conclut sur la formation d’un complexe bleu entre les ions triiodure et l’empois d’amidon. Enfin dans un dernier tube à essai contenant un peu de solution d’ion triiodure ajouter la solution de thiosulfate de sodium goutte à goutte, observer et quand la solution est jaune pâle ajouter quelques gouttes d’empois d’amidon, observer et continuer à ajouter la solution de thiosulfate de sodium. Conclure. 2. Détermination du coefficient de partage Décantation Dans une ampoule à décanter, agiter vigoureusement 20,00 mL d’une solution de diiode dans du cyclohexane de concentration molaire 4,00.10-2 mol.L-1, avec 200,0 mL d’eau prélevée à la fiole jaugée4. Laisser décanter. Repérer la phase aqueuse et la phase organique (densité du cyclohexane à 20 °C : 0,7781). Séparer les deux phases en prélevant chacune d’elles dans un récipient propre et sec. Titrage de la phase aqueuse Prélever à la pipette 50,00 mL de la solution aqueuse dans un becher 5. Titrer par la solution de thiosulfate de sodium de concentration molaire 5,00.10-3 mol.L-1 en agitant. Juste avant l’équivalence (coloration jaune très pâle), ajouter quelques gouttes d’empois d’amidon. Dosage par étalonnage de la phase organique Prélever à la pipette 1,00 mL de la phase organique, les diluer à 50,00 mL dans une fiole jaugée avec du cyclohexane. Mesurer l’absorbance de la solution à = 520 nm et déterminer la concentration molaire en diiode à l’aide de la courbe d’étalonnage qui est donnée (elle est établie pour des concentrations molaires en diiode dans le cyclohexane comprise entre 1,00.10 -4 mol.L-1 et 1,00.10-3 mol.L-1). 3. Détermination de la constante de formation du complexe triiodure Recommencer en remplaçant les 200,0 mL d’eau par 200,0 mL de solution d’iodure de potassium de concentration molaire 1,00.10-1 mol.L-1 (rincer l’ampoule préalablement avec quelques mL d’alcool à brûler puis avec de l’eau). Prélever à la pipette 10,00 mL de la solution aqueuse dans un becher. Titrer par la solution de thiosulfate de sodium de concentration molaire 5,00.10 -3 mol.L-1 en agitant. Prélever à la pipette graduée 2,50 mL de la phase organique, les diluer à 50,00 mL dans une fiole jaugée avec du cyclohexane. Mesurer l’absorbance de la solution à = 520 nm et déterminer la concentration molaire en diiode à l’aide de la courbe d’étalonnage. Exemples de questions 1. Détermination du coefficient de partage Quelles sont les espèces présentes dans la phase aqueuse ? Dans la phase organique ? Ecrire l’équation de la (ou des) réaction(s) d’oxydoréduction mise(s) en jeu dans le titrage de la phase aqueuse. Déterminer la concentration molaire en diiode dans chacune des phases. Etait-il nécessaire de doser la quantité de diiode dans les deux phases ? En déduire le coefficient de partage, constante d’équilibre associée à la réaction : I2 S,éq. K= I2(aq) = I2(S) . I2 H O,éq. 2 2. Détermination de la constante de formation du complexe triiodure Déterminer la concentration molaire en diiode dans la phase organique. En déduire la concentration molaire en diiode dans la phase aqueuse. Quelles sont les espèces présentes dans la phase aqueuse ? Lors du titrage de cette phase aqueuse quelles sont les espèces titrées ? Déterminer la concentration molaire du diiode sous toutes ses formes dans la phase aqueuse. En déduire celle des ions triiodure. 4 La fiole jaugée a été choisie car même si la fiole jaugée porte la mention « in » (la verrerie est jaugée au contenu), la précision sera meilleure que si une éprouvette graduée est utilisée. 5 Il est également possible d’utiliser une fiole jaugée de 50 mL à condition de la rincer et de joindre les eaux de rinçage au contenu du becher qui va être titré. A l’aide du tableau descriptif de l’évolution du système constitué par la phase aqueuse en déduire la concentration molaire en ions iodure dans la solution aqueuse. [I3- ]éq. En déduire la constante de formation du complexe triiodure K f = . I2 éq. [I- ]éq. Remarque Récupération du cyclohexane Pour chaque expérience, les phases organiques sont rassemblés dans un flacon étiqueté. Recyclage du cyclohexane La phase organique est traitée par une solution de thiosulfate de sodium pour réduire le diiode qui passe alors dans la phase aqueuse. Après décantation, le cyclohexane est lavé plusieurs fois, séché, par exemple sur sulfate de magnésium, et réutilisé pour une autre séance de TP (pour une autre utilisation il est préférable de le distiller).