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Stage d’économie approfondie animé par Alain Beitone
Vendredi 5 Octobre 2012, IUM d’Aix
Compte-rendu rédigé par Lucile Auffant
Préambule en 3 points:
1 / la cohérence interne du programme : les mêmes questions sont reprises le long du cycle
1ère/terminale pour favoriser l’appropriation de savoirs par les élèves.
Exemple : le marché 1ère et Terminale, en spécialité EA : marché des capitaux ; les
défaillances du marché : 1ère, terminale et spécialité EA.
Cela implique de veiller au suivi des élèves afin de s’assurer de la continuité des
apprentissages.
2 / Une évolution a été accentuée par les nouveaux programmes1 : l’accent est mis sur
l’appropriation de concepts et de modes de raisonnement (et non plus d’objets empiriques).
Exemple de problématique : l’instabilité des économies de marché (1ère : marché, Terminale :
fluctuations économiques, + spécialité EA : instabilité des marchés financiers)
Autre exemple : la coordination. Dans toute économie il existe un problème de coordination :
ex émission de GES décentralisée : une gestion mondiale et coordonnée est nécessaire pour
limiter ces émissions, idem pour les marchés financiers. On a donc l’occasion à plusieurs
reprises tout au long du cycle terminal, de voir que la coordination des actions des agents qui
prennent des décisions décentralisées est l’un des thèmes essentiels de l’analyse économique.
On peut aussi travailler à partir de plusieurs exemples la portée et les limites de la
coordination par le marché (importance de l’analyse des défaillances du marché). Le regard
croisé sur l’entreprise est l’occasion de confronter la coordination par le marché et la
coordination par la hiérarchie.
En sociologie, l’une des questions essentielles concerne la cohésion sociale. On l’étudie en
première (socialisation, réseaux sociaux) et en terminale à propos, de la stratification sociale,
du conflit, du lien social dans une société d’individus.
3 / « Oser faire simple » : le fort degré de complexité des manuels (et de certaines fiches
éduscol) ne doit pas nous empêcher de faire simple. Exemple : lecture d’un TCAM = exigible
mais inutile de savoir calculer un TCAM.
Penser à lier les différents thèmes des programmes :
Les questions démographiques ont un impact sur la finance
La fixation des prix influe sur le pouvoir de marché.
La partie 3 du programme de spécialité EA sera davantage développée, à la demande des
collègues assistant au stage.
Point 3 : instabilité financière et régulation
Il est question de l’instabilité endogène des marchés, en particulier financiers. Cela suppose
que soient mises en place des procédures de régulation car le marché n’est pas autorégulateur.
1
La génération précédente de programmes allait déjà dans ce sens.
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CR, L. Auffant
IC :
Présenter les marchés financiers en prenant un ou deux exemples
Expliquer pourquoi il y a instabilité
Les facteurs explicatifs
Les choix à opérer en matière de régulation
On peut partir d’une définition large du marché des capitaux : tous les marchés d’actifs
financiers = titres de créances (obligations, devises) et titres de propriété (actions).
Aujourd’hui, les matières premières (blé, pétrole…) sont aussi considérées comme un actif
financier (d’où l’exemple des marchés de matières premières cité dans les exemples de
marchés financiers dans la fiche éduscol mais aussi dans le livre de D. Marteau). Mais sur ces
marchés, la majorité des transactions sont des produits dérivés (pour spéculer ou pour se
couvrir).
On peut aussi ajouter le marché climatique = s’assurer contre le risque climatique (ex de tour
operator garantissant x jours de soleil pendant un séjour, ces tour operator se couvrent contre
un risque)
Expliquer ce que sont les marchés : on peut s’appuyer sur les acquis de 1ère (marché de
marchandises) et étudier le marché des actions (primaire/secondaire) : ex de l’introduction de
Facebook à la bourse de New York.
Montrer l’interdépendance des marchés : on peut utiliser le passage page 9 du livre de D
Marteau. Lien marché de matières premières- taux d’intérêt -taux de change (euro/dollar)
Autre exemple : le déclenchement du krach boursier de 1987 (débat sur le taux du marché
monétaire, contagion à la crise boursière puis à la crise de change et à la crise bancaire).
Autre exemple d’interdépendance entre marché des matières premières et marché financiers :
envol du prix des matières premières entre 2004 et 2007 (métaux, riz : cf. Mc Do qui diminue
de moitié la portion de riz dans ses menus pour que le prix reste abordable) puis après le krach
sur le marché immobilier américain, le cours des matières premières plonge (en 2009).
L’instabilité est liée à des phénomènes de contagion et peut avoir un effet systémique si un
nombre important de marchés est impacté.
3.1 Qu’est-ce que la globalisation financière ?
La globalisation financière s’amorce dans le dernier tiers des années 1970 et s’amplifie
durant les années 1980-90.
UE : libre circulation des capitaux complète depuis 1990 (auparavant l’accueil des IDE était
soumis à l’accord du ministre de l’économie et des finances : cf. installation de Ford en
Aquitaine).
USA : des années Roosevelt au début des années 1980 : taux d’intérêt plafond contrôlé par
l’Etat. La remise en cause de la séparation des banques d’affaires et des banques de dépôt date
de 1986 (contre 1984 en France). (La loi Glass et Steagall ou Banking Act datait de 1933).
Il existe de bonnes raisons à cette évolution.
Une des bonnes raisons : la situation démographique (vue dans point 1 de la spé EA)
A partir du moment où les échanges commerciaux se développent, il n’y a aucune raison de
penser que dans tous les pays l’équilibre I = S est respecté autrement dit aucune raison qu’il
n’existe pas de déséquilibre extérieur.
Le solde de la balance des transactions courantes est égal à la différence entre l’épargne et
l’investissement.
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Si S n’est pas égal à I (à cause de structures démographiques, ou de la dynamique de la
croissance économique dans le pays : USA) alors il faut combler des déséquilibres : ceux qui
sont en déficit doivent emprunter sur les marchés mondiaux. Par contre ceux qui sont en
excédent (Ex Chine dont taux d’épargne = 44 %, ou Norvège) doivent placer le produit de
leurs excédents sur le marché mondial.
Autre exemple : le recyclage des « pétrodollars » après les chocs pétroliers de 1973 et 1979.
La circulation internationale des capitaux est donc une réponse à un problème objectif (par
exemple les Etats-Unis ont été emprunteurs nets sur le marché mondial des capitaux de leur
naissance à 1914 : ce pays jeune et en forte croissance empruntait l’épargne des pays plus
vieux économiquement et démographiquement. Lénine parle de la « tonte des coupons »
pratiquée par les pays arrivés au « stade suprême du capitalisme »). La globalisation
financière est donc nécessaire mais cela ne signifie pas que la libéralisation des capitaux doit
être totale ni que l’on doit renoncer à tout dispositif de contrôle des risques.
2ème bonne raison : le système économique et financier mondial est devenu plus instable
à partir de mi 1970 (de 1933 à 1969 : prix de l’or stable à 35 dollars l’once).
1971-73 : changes flottants se mettent en place ce qui accroît la volatilité des taux de change
et des taux d’intérêt.
2 types de comportements : ceux qui ont une aversion pour le risque et cherchent à se couvrir
contre le risque, et ceux qui considèrent que plus de risque engendre un rendement plus élevé
et veulent gagner davantage dans un contexte de volatilité accrue. Sans les seconds, les
premiers ne pourraient pas se couvrir. La spéculation est fonctionnelle : elle permet le
transfert d’un risque. Si tous les individus avaient le même comportement face au risque, il
n’y aurait pas de couverture. Il est donc souhaitable que certains acceptent davantage de
risques (rémunérés par une prime de risque) et que d’autres acceptent de payer pour s’assurer
contre ce risque.
Le lien entre risque et rendement doit être expliqué aux élèves. Le risque est estimé par le
marché2 : rôle des anticipations et de l’information sur le risque. Les prix sur les marchés
incluent la prime de risque.
L’agrégation de ces deux types de comportement amplifie le risque systémique. Cependant,
une par une, il est difficile de savoir quelle opération est spéculative et laquelle ne l’est pas.
De nos jours, de nombreuses coopératives agricoles vendent par anticipation les futures
récoltes = elles se couvrent car elles garantissent un prix et en même temps elles le font selon
leurs anticipations. Lorsque la coopérative anticipe une hausse des cours, elle attend pour
vendre = spéculation. Toute personne qui n’est pas couverte contre un risque spécule (y
compris celui qui part en vacances à la dernière minute grâce à lastminute.com). La
spéculation est une cause d’instabilité.
Pb : cette agrégation de comportements rationnels risque d’amplifier l’instabilité des marchés,
la volatilité des cours des matières premières ou des cours du change par exemple. Mais ceux
qui opèrent sur les marchés spéculatifs ont de bonnes raisons de le faire : se protéger contre
des risques. Néanmoins cela ne signifie pas pour autant autoriser toutes les innovations
financières (telles que celles permettant de vendre un titre que l’on ne possède pas3).
Ce qui ne veut pas dire que le marché est efficient dans l’évaluation du risque. Ce dernier peut être surestimé
ou sous-estimé. Par exemple avant le déclenchement de la crise de 2007, le marché a mal évalué la montée des
risques. Ensuite certains risques ont été surestimés (éclatement de la zone euro) et on conduit à des variations
excessives de certains prix (taux d’intérêt sur certaines dettes souveraines).
3
Pendant la crise certaines ventes à découvert ont été interdites. L’Union européenne vient d’adopter une
législation qui interdit l’acquisition d’instruments de couverture (CDS) sur des titres que l’on ne possède pas
(CDS « à nu »).
2
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Lien entre innovations et finance (marché des options car les contrats à terme fermes ne
permettaient pas toujours de se protéger correctement et surtout empêchent de bénéficier
d’une évolution des cours favorable).
Option = se protéger contre l’évolution défavorable et saisir le gain si l’évolution du cours
nous est favorable. Ici la prime est plus élevée car celui qui vend l’option prend un risque
potentiellement illimité, alors que l’acheteur d’option risque dans le pire des cas de perdre le
prix d’achat de l’option (prime).
La globalisation est donc la réponse à la mondialisation des économies et à l’instabilité accrue
des marchés financiers. La question centrale c’est le décalage entre le développement des
nouveaux produits et des nouveaux marchés d’une part, et la mise en place des instances de
régulation d’autre part. Par exemple la négociation Bâle 1 a été lancée en 1987 à la suite du
krach financier mondial. La mise en place des mesures adoptées a été très lente. Elle s’est
étendue jusqu’en 1997… date de déclenchement d’un nouveau krach financier !
IC : les 3 D (ce triple mouvement a déjà été vu en 1ère). Deux points à présenter :
1er point : des acteurs sociaux ont promu cette décision : ce sont les Etats qui ont décidé des
3 D. ex loi bancaire de 1984 en France. Le système bancaire était alors perçu comme trop
rigide, le cadre semblait très peu concurrentiel.
Ce mouvement des 3 D a alimenté un développement de la finance de marché qui n’a
bénéficié, pour l’essentiel, qu’à deux acteurs : l’Etat (il peut émettre des bons du Trésor sur
un marché plus profond et plus liquide) et un petit nombre de grandes entreprises qui ont eu
accès au financement à court terme (émission de billets de trésorerie). Pour les ménages le
cadre reste peu concurrentiel (cf. démarches pour changer de banque…)4.
Réf : CEPII, L’économie mondiale 2013, La Découverte, Coll. Repères, 2012. Chapitre rédigé
par J. Couppey-Soubeyran et G. Capelle-Blancard
2ème point : les 3 D ont provoqué des changements effectifs : la pression de la contrainte
extérieure qui en 1982-83 concernait les transactions courantes s’est déplacée vers la sphère
financière (tensions internationales sur les taux d’intérêt).
3.2 Comment expliquer les crises financières et réguler le système financier ?
Idée de l’instabilité endogène des économies de marché : dette, boom, crise
Phase d’expansion du cycle alimentée par un climat de confiance, une offre de crédit par les
banques et une demande de crédit par les agents économiques non bancaires (la dette).
La dette commence par nourrir le boom : grâce au crédit, la demande augmente, le taux
d’utilisation des capacités de production augmente, la croissance s’accélère (optimisme,
euphorie).
Qu’est-ce qui déclenche la crise ? Pendant le boom, le taux d’endettement des agents non
bancaires a augmenté, à un moment les banques vont considérer que ce taux est trop élevé,
elles contractent l’offre de crédit ce qui crée un choc négatif sur la demande puis un processus
cumulatif de retournement lui-même autoentretenu (faillites, chômage…).
Puis le niveau d’endettement ayant été réduit, les agents économiques non bancaires les plus
fiables se remettent à emprunter…
(à relier au ch 1.2 de sciences éco : cycle du crédit)
Voir l’étude critique de la désintermédiation dans le livre de J. Couppey-Soubeyran, Monnaie, banque, finance,
PUF, Coll. Licence, 2ème éd. 2012
4
Stage EA, A. Beitone
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CR, L. Auffant
Schéma n° 21tiré du livre de R Boyer « Les financiers détruiront-ils le capitalisme ? »
(Economica, 2011)
1ère cause : élargissement du marché des acheteurs de logement aux USA, les ménages ont été
démarchés par des intermédiaires avec des contrats leur disant que rembourser le crédit était
équivalent à payer un loyer. Contrats attractifs : taux d’intérêt bas et fixe… mais seulement
pendant 3 ou 4 ans ensuite taux variables plus élevés (mais lors de la signature du contrat les
ménages n’en avaient pas conscience).
Le déclenchement de la crise a commencé quand des contrats ont basculé du taux fixe au taux
variable et que les remboursements ont doublé ou triplé. Cela a engendré une forte hausse du
taux de défaut des crédits.
Avril 2007 : le deuxième opérateur sur le marché américain des crédits subprimes annonce
qu’il est en faillite car trop de défauts de paiement, puis effet de contagion.
On notera l’importance de l’information : des agents économiques ont signé des contrats
qu’ils ne comprenaient pas.
Le système d’incitations est pervers : les courtiers, payés à la commission, n’ont pas
sélectionné les risques5.
Le phénomène s’est amplifié avec la titrisation. Les banques ont transféré ces créances
(produits structurés). Le modèle « originate and distribute » se généralise.
La diffusion de ces crédits a alimenté la bulle à la fois de crédit et immobilière. La bulle
s’autoentretient tant que les anticipations sont haussières6.
La prise de risque est pro cyclique : le boom. Certains savent qu’ils prennent un risque mais
pensent avoir une rémunération plus forte donc le niveau de risque augmente. La bulle finit
par exploser.
Le schéma précise « réverbération » : ce qui se produit sur un marché se diffuse à l’ensemble
du système économique.
Schéma n° 5 de R Boyer : les mécanismes conduisant à l’explosion de la prise de risque
notamment production d’informations de mauvaise qualité (conflit d’intérêt dans les agences
de notation), notamment aussi les innovations permanentes sur des produits complexes :
information incomplète dans les banques. Les dirigeants des banques ont pris des risques en
acquérant des actifs dont ils ne comprenaient pas le contenu.
De nombreuses incitations ont amplifié la prise de risque, l’éclatement de la bulle était
inévitable.
Doc du CAE (Rapport sur La crise des subprimes, disponible intégralement et gratuitement
sur le site du CAE)
Un changement institutionnel : les changements des normes comptables : les actifs sont
comptés à leur valeur de marché. Or il y a deux effets pervers :
1 / C’est massivement pro-cyclique, cela amplifie l’accélérateur financier décrit en 1989 par
B. Bernanke.
Quand le prix des actifs monte, la probabilité d’obtenir des crédits augmente donc on peut
acheter plus d’actifs ce qui fait grimper le prix des actifs et du bilan d’où de nouveaux
crédits…
Par contre, quand la valeur des actifs baisse, le montant des prêts diminue, les projets
d’investissement sont révisés à la baisse…7
C’est un cas typique d’aléa moral. Les courtiers ne supportaient pas les risques des crédits. Ils recevaient une
commission et n’étaient plus concernés par la suite. De même les banques, dès lors qu’elles titrisent les crédits,
ne supportent plus les risques correspondant à ces crédits.
6
Voir le dernier chapitre du livre de Didier Marteau sur les fondements microéconomiques de la crise de 2007.
55
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L’instabilité du système est renforcée = phénomène endogène d’amplification du cycle.
2 / La part de l’actif des organismes financiers qui ont un prix est extrêmement faible car ils
ont dans leur bilan des titres qui n’ont pas de prix de marché. Ils ont donc un modèle de
valorisation qui fixe un prix par convention.
Les 3 blocs du doc du CAE
En haut à gauche : « paradoxe de la tranquillité » Hyman Minsky = période à l’origine du
boom. Dans le cas des subprimes ce paradoxe repose sur la réussite des banques centrales à
endiguer l’inflation (1979 USA, 1983-84 UE). La désinflation est interprétée comme une
preuve de la capacité des banques centrales à maîtriser la politique monétaire.
A droite : boucle avec le choc de productivité. Fin 1990 forts gains de productivité (USA,
résolution du paradoxe de Solow) : cercle vertueux avec effet de richesse qui alimente la
croissance + accélérateur financier.
Bas à gauche : innovations financières et recherche de rentabilité
Choc de productivité et croissance : les excédents des pays émergents engendrent des
placements qui contribuent à alimenter la liquidité. Les pays émergents ont aussi contribué à
la désinflation (ex prix du textile) alors que la surchauffe (à droite) aurait dû engendrer
l’inflation.
Des forces de rappel n’ont pas joué parce que les banques centrales étaient crédibles et aussi à
cause des pays émergents. De plus, la hausse du prix des actifs n’est pas considérée comme
un signe d’inflation car ils ne sont pas comptés dans l’indice des prix à la consommation.
A long terme, les taux d’intérêt diminuent car faible inflation anticipée + capitalisme
actionnarial donc les banques sont dans une situation de tension. La rentabilité des opérations
de crédit est plus faible alors que les actionnaires demandent une rémunération plus élevée.
Solutions : les innovations financières, moins de sélectivité dans l’octroi de crédits.
Paradoxalement, les banques prennent plus de risques car la situation macroéconomique est
jugée comme stable.
Dans un premier temps, la baisse des taux à long terme enclenche le boom du cycle du crédit.
Dans un second temps, la situation se retourne. Crise financière (moins de crédits octroyés)
puis répercussions sur l’économie réelle.
Doc P Artus (une analyse marxiste de la crise, Flash Economie Natixis, 6 janvier 2010)
Crise financière en partie car aléa moral et incitations inadéquates mais il existe aussi des
problèmes de fond plus importants. La crise financière est une résultante de l’accumulation du
capital et du partage des revenus (montée des inégalités).
Rappels : 2 types de crise : demande (sous consommation) / rentabilité
Derrière l’aspect financier on a le risque de baisse tendancielle du taux de profit.
Pendant le boom, chaque entreprise essaie d’augmenter son stock de capital pour
gagner des parts de marché et réaliser des gains de productivité. Cela conduit à l’excès
de capital. Face à cette suraccumulation de capital soit l’entreprise rentabilise ce
capital, soit elle est éliminée du marché. Les entreprises réagissent alors en
comprimant les salaires (sauf France et Italie) voire en diminuant les salaires réels. Le
partage de la VA se modifie en faveur des entreprises. Le mouvement de concentration
des entreprises s’est accéléré (recherche d’économies d’échelle), les entreprises ont
aussi essayé d’élargir leurs débouchés via les exportations.
7
Ce mécanisme peut être relié à celui de la déflation par la dette décrit par I. Fischer.
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CR, L. Auffant
Années 1980 à nos jours : moindre dynamique des revenus salariaux, montée des inégalités et
de la pauvreté8, remise en cause du compromis salarial fordiste. Réponse aux USA :
gonflement de la dette qui a contribué à la bulle immobilière.
Régulation de la finance
Figure 37 R Boyer
Éléments importants :
Politique fiscale et budgétaire : rémunération soit agir ex ante (réglementer les rémunérations,
ex : bonus à évaluer sur plusieurs années) ou agir par la législation fiscale.
Politique monétaire (+figure 39) : les banques centrales ont réussi à éviter une crise de
liquidité mais au prix d’un fort accroissement de la masse monétaire mondiale. Quand la crise
est survenue, les banques ont été inquiètes de la solvabilité des autres banques elles ont donc
fortement contracté leur offre de liquidité sur le marché interbancaire et elles ont aussi
contracté les crédits accordés à leurs clients (credit crunch). Les dépôts des banques de 2nd
rang auprès de la banque centrale ont augmenté malgré des rémunérations à 0% (préférence
pour la liquidité plutôt que prêter à des agents économiques dont on ne connaît pas la
solvabilité). Le risque est que la surliquidité serve de base à une nouvelle bulle spéculative, à
un gonflement du crédit (surtout si le cadre institutionnel de la régulation reste le même, c’està-dire insuffisant).
Figure 39 R Boyer, quatre propositions
Proposition la moins importante : la standardisation (exemple arrêter les CDS au cube = 3
couvertures enchaînées, interdiction des CDS à nu)
2ème proposition : examen ex ante des nouveaux instruments financiers, création d’une autorité
créant l’autorisation de mise sur le marché, contrôler les nouveaux produits (intérêt et niveau
de risque assuré par le nouveau produit). A quelle échelle ?
La stabilité financière est un bien collectif. Un groupe de pays peut choisir d’être plus strict
pour assurer plus de stabilité. Le dumping réglementaire n’est cependant pas toujours
gagnant. Accord européen voire international serait préférable.
3ème proposition : interdiction des opérations de gré à gré (OTC : over the counter, sous le
comptoir) : les transactions financières doivent avoir lieu sur un marché organisé, avec une
chambre de compensation = organisme qui, quand le niveau de risque augmente, procède à
des appels de marge. Elle oblige les agents économiques à verser des provisions s’ils prennent
trop de risques, sinon le contrat est annulé et plus personne n’est exposé à un risque.
Risque de contrepartie : très important à cause des effets de contagion que cela peut
déclencher.
Risque systémique : un grand nombre d’agents fait défaut en même temps.
Les organismes financiers ont intérêt à ce que la législation soit la moins contraignante et la
moins coûteuse. C’est au pouvoir politique de défendre le bien commun contre des intérêts
particuliers.
4ème proposition : chambre de compensation + accès par les autorités de marché à
l’information privée. La chambre qui a une fonction tutélaire doit être informée. Cela suppose
une réglementation. Le régulateur du marché a besoin d’un certain nombre d’informations
surtout si on pense qu’il existe des distorsions de prix pour savoir dans quelle mesure telle
évolution de prix (hausse ou baisse) correspond à des données fondamentales ou pas.
Tableau 23 de R Boyer : débat à organiser dans la classe : laisser faire ou encadrer la finance ?
Ce point est aujourd’hui solidement décrit par des travaux du FMI, de l’OCDE, de Piketty et Landais, etc. Voir
notamment le dernier livre de J. Stiglitz (Le prix de l’inégalité) et les contributions de J.L. Gaffard sur le blog de
l’OFCE.
8
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CR, L. Auffant
1 Economie et démographie
Références :
Rapport du CAE (2002) Aglietta, Blanchet et Héran: résumé de 4 pages en ligne
Dictionnaire de démographie, A Colin
1.1 Comment la dynamique démographique influe-t-elle sur la croissance économique ?
1ère idée importante : transition démographique et pression créatrice
Quand la population augmente, cela accroît la croissance économique.
Exemples : XIXe RU, USA (mouvement naturel puis migratoire), XVIIe Pays-Bas (vague
d’innovations), Chine : la croissance absolue de la population a alimenté la croissance
économique.
Allemagne : population en phase de déclin absolu + idem au Japon, en Italie, en Espagne
Référence : Gérard Cornilleau : article sur situation démographique de la France et de
l’Allemagne (disponible sur le site de l’OFCE).
2ème idée importante : lien épargne - croissance
La croissance économique suppose l’accumulation du capital qui elle-même suppose
l’épargne. Un pays qui épargne plus, accumule plus ce qui nourrit la croissance (notamment si
l’accumulation incorpore du progrès technique). Débat : faut-il une épargne préalable ?
Il existe un lien entre épargne et structure démographique : une population jeune épargne peu
alors qu’une population vieillissante achète des titres.
L’élévation de la longévité pose le problème de l’assurance dépendance. La dynamique
démographique provoque des variations de la structure par âge de la population qui ont des
répercussions sur l’économie via la demande (pression créatrice) et l’offre (épargne et
accumulation du capital).
30 Glorieuses en France : peu d’actifs, nombreux jeunes et pourtant croissance économique
forte (2 explications : les mouvements migratoires et les gains de productivité = accumulation
du capital)
Modèle du cycle de vie : ce modèle pose des questions sur le lien entre dynamique
démographique et dynamique économique via l’épargne. Critiques sur la portée heuristique de
ce modèle : ce modèle fait l’impasse sur les transmissions intergénérationnelles. Sauf si erreur
de calcul, dans ce modèle le patrimoine est nul au décès. Or beaucoup d’individus veulent
avoir un patrimoine positif et le léguer à leurs descendants : cela dépend du niveau de
patrimoine, des revenus et d’être en mesure de constituer une épargne qui continue de faire
augmenter le patrimoine. Ces comportements individuels s’éloignent de ce que décrit le
modèle. Ce modèle ne prend également pas en compte les variables institutionnelles (système
de retraites, protection sociale) : exemples de la Chine, du Japon.
1.2 Quel est l’impact des variables économiques et démographiques sur le financement
de la protection sociale ?
Le vieillissement démographique impacte les systèmes de protection sociale. Quand la
structure par âge change, il faut attribuer une partie de la valeur produite par les actifs occupés
aux autres qui ne produisent plus (vieux) et qui sont dans l’incapacité de produire (jeunes).
Quand les parts des trois groupes d’âge (jeunes-actifs-vieux) changent, soit on modifie la
répartition, soit une partie de la population s’appauvrit. Débat : quelle répartition choisir ? ex
Stage EA, A. Beitone
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CR, L. Auffant
de choix pendant le baby boom en faveur des jeunes (hausse durée de scolarisation
obligatoire) et aussi choix en faveur des retraités (minimum vieillesse) : 2 mesures possibles
grâce aux gains de productivité et car les actifs ont accepté d’avoir un accroissement de la
valeur qui leur revenait moindre que le surcroît de revenu global. L’appel à l’immigration a
aussi aidé à « supporter » le coût des baby-boomers lorsqu’ils étaient enfants puis jeunes.
Le vrai débat, le vrai choix de société est la répartition des revenus par groupe d’âge.
(Attention : un faux débat à évacuer : idée selon laquelle la solution est le passage à la
capitalisation)
(Faux débat en matière de système de santé : la montée des coûts relatifs, il y a débat non pas
à cause de la hausse des dépenses de santé mais parce que ces dépenses sont prises en charge
par la collectivité = solidarités collectives, ce débat ne provient pas de la démographie ellemême même si elle a un impact. Référence : site du Cepremap : livre de Brigitte Dormont sur
les dépenses de santé).
(Comment gérer la solidarité alors que le système de protection sociale a perdu son sens, sa
visibilité ?)
Une façon de lisser le surcoût du vieillissement est d’emprunter aux générations plus jeunes
(en créant des fonds de réserve).
PO : incitations pécuniaires, aléa moral, sélection adverse
Réflexion dans les hôpitaux publics : budget global (enveloppe annuelle) pour remplacer la
tarification à l’acte (T2A : chaque examen est facturé à la sécu ce qui crée des
comportements sous optimaux car la Sécu est incapable de vérifier si l’examen était indiqué
thérapeutiquement ou pas. Or l’hôpital peut augmenter le nombre d’IRM pour rentabiliser
l’appareil). Le budget global a néanmoins un effet pervers : le rationnement. La T2A existe
toujours dans le secteur privé donc ce secteur a intérêt à maximiser les actes prescrits (effet
pervers).
Quand on a un degré de socialisation des dépenses de santé, on peut se demander quel est le
système le mieux adapté, le plus efficace, compte tenu d’une contrainte budgétaire.
ARS : agences régionales de santé : logique de maximisation, de rationalisation administrée
Médecine ambulatoire : logique marchande + différents secteurs : conventionnés ou pas +
avec honoraires libres d’où des inégalités dans l’accès aux soins.
Dilemme du mode de fonctionnement : 2 extrêmes possibles :
 Tout est soumis à la régulation marchande, régulation par les prix
 Davantage un système administré mais pb on ne parvient pas à le réguler (exemple
GB).
Une autre solution : mode coopératif ou communautaire : cf. secteur mutualiste (cf. solution
d’E Ostrom dans la gestion des biens communs).
Autre pb : l’activité des seniors (cf. stratégie de Lisbonne) alors qu’ils ne trouvent pas
d’emploi et que leurs droits à la retraite diminuent car ils n’ont pas trouvé d’emploi (double
peine).
Stage EA, A. Beitone
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CR, L. Auffant
2 / Stratégies d’entreprises et politique de la concurrence dans une
économie globalisée
2.1 Dans quelles circonstances les entreprises peuvent-elles exercer un pouvoir de
marché ?
Le PO évoque la CPP et le relâchement des hypothèses. Il est préférable de voir la
concurrence comme un processus plutôt que comme un état car dans un univers de CPP les
entreprises n’ont pas de stratégie : elles sont price taker, les techniques de production
déterminent la quantité produite. C’est donc la lecture autrichienne du marché et de la
concurrence qui est sans doute ici la plus féconde pour comprendre les enjeux.
Idée de stratégie : dans un contexte donné, les entreprises essaient de diminuer la pression
concurrentielle dont elles font l’objet, elles cherchent au maximum à limiter la concurrence
pour augmenter leurs profits9. En effet, en CPP, le revenu est égal au coût des facteurs donc le
profit pur est nul.
Les entreprises vont tenter de limiter la concurrence (barrières à l’entrée, cartels de
producteurs, stratégies de concentration) pour avoir un prix supérieur au coût marginal.
Le prix fixé dépend alors de la stratégie de rente (pour maximiser les revenus), de l’élasticité
prix de la demande de biens et de la quantité produite.
Le pouvoir de marché désigne toute situation où les producteurs sont en mesure d’influencer
le prix des biens qu’ils vendent.
Le monopole discriminant : il vaut mieux commencer par parler de discrimination par les
prix en général et d’envisager le monopole discriminant comme un cas particulier de
discrimination par les prix. En dehors de la CPP, tout producteur peut pratiquer la
discrimination par les prix.
Exemples : cinéma : heures des séances, statut du public afin de maximiser le remplissage des
salles : le public est segmenté, a des élasticités prix de la demande variables en fonction de
son statut ; SNCF ; séjours hors vacances scolaires…
On peut combiner différenciation des produits et discriminations par les prix : exemple d’un
produit vendu sous marque distributeur et sous grande marque (ou le low cost).
2.2 Quel rôle pour la politique de la concurrence ?
Asymétrie entre producteurs et consommateurs : des institutions doivent rééquilibrer le
rapport de forces entre les eux, sinon le marché n’a pas les effets positifs attendus.
Pb : arbitrer entre concurrence et compétitivité, entre concurrence et dynamique économique.
Ex du New deal : suspension du Sherman Act et subventions aux agriculteurs pour mettre des
terres en jachère. Le but est la reflation car on a une déflation par la dette et il faut donc faire
remonter les prix. La diminution de la concurrence permet de faire remonter les prix.
Dans certains cas, une concurrence trop forte a des effets nuisibles sur l’investissement, la RD, les innovations et la compétitivité.
A. Smith soulignait déjà ce point : les capitalistes cherchent à se mettre à l’abri de la concurrence. Ceux qui
assimilent le capitalisme et la « concurrence libre et non faussée » commettent donc une erreur d’analyse.
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Exemple : grands champions nationaux (G. Pompidou) : mesure pour diminuer la concurrence
et augmenter la concentration (Péchiney, moteurs d’avion, automobiles…).
Politique industrielle : aujourd’hui l’UE intervient pour interdire des concentrations (ex
Danone n’a pas pu racheter Perrier, c’est Nestlé qui a racheté Perrier… : l’UE a-t-elle marqué
contre son camp ?)
Autre exemple : interdiction des aides d’Etat aux entreprises en difficulté : cela n’accélère-t-il
pas la désindustrialisation ?
Dans certains cas on a un conflit entre la politique concurrentielle et la politique industrielle.
Suivre actualité sur nombre de constructeurs automobiles dans l’UE
Quelques références bibliographiques essentielles
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Aglietta M. Les dérives du capitalisme financier, Odile Jacob
Boyer R., Les financiers détruiront-ils le capitalisme ?, Economica, 2011
Marteau D., Les marchés de capitaux, Armand Colin, Coll. Cursus, 2012
Orléan A., De l’euphorie à la panique, CEPREMAP (disponible gratuitement en
ligne sur le site du CEPREMAP)
http://www.cepremap.ens.fr/depot/opus/OPUS16.pdf
(112 pages)
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