Droit - BTS 1°année
Chapitre 1 : la preuve des droits subjectifs -- actes et faits
juridiques.
I -- Les actes juridiques et les faits juridiques.
-- l'acte juridique se définit comme une manifestation de volonté dont l'objectif est de produire des effets de
droit.
Les actes juridiques peuvent être plurivolontaires -- il s'agit par exemple des contrats -- le contrat correspond en
effet à un accord de volonté dont le but est d'engendrer une ou plusieurs obligations. Il en est ainsi aussi bien du
contrat de vente que du contrat de transport ou du contrat de travail, etc..
Les actes juridiques peuvent être univolontaires -- par exemple, un testament ou une donation. Dans ce cas, une
seule volonté intervient : celle du testateur (dans le cas du testament) ou du donateur (dans le cadre de la
donation).
-- un fait juridique correspond au contraire à un événement qui est susceptible de produire des effets de droit.
Les faits juridiques peuvent être involontaires ( naissance ou accident de la circulation) ou volontaires (crime,
délit).
On parlera de faits de l'homme -- par exemple, un accident de la circulation génère des obligations à la charge de
l'auteur du dommage et au bénéfice de la victime (il s'agit ici d'une obligation délictuelle).
-- Le quasi-contrat se définit comme un fait licite et volontaire d'où découle des obligations soumises à un
régime s'apparentant à celui des contrats à la charge de son auteur et d'un tiers, non liés entre eux par une
convention. Deux exemples de quasi-contrats méritent d'être cités : il s'agit de « la gestion d'affaires », et de «
l'enrichissement sans cause ».
La gestion d'affaires : c'est le fait pour une personne, le gérant, d'accomplir des actes d'administration dans
l'intérêt d'un tiers, le géré ou maître d'affaire, sans que ce dernier l'en ait chargé. Par exemple, pendant une
absence de A, une tempête détériore le toit de sa maison. Son voisin, B., prend l'initiative, dans l'impossibilité
de joindre A et afin d'éviter une aggravation des dégâts, de faire réparer la toiture. Il s'agit d'une immixtion de
B. dans les affaires de A et ceci, sans le consentement de celui-ci. Cette immixtion est qualifiée de « gestion
d'affaires » et génère l'obligation pour A d'indemniser son voisin B. en fonction du montant des réparations
qu'il a pu effectuer pour son compte.
L'enrichissement sans cause : . Il s'agit de l'enrichissement d'une personne en relation directe avec
l'appauvrissement d'une autre, alors que le déséquilibre des patrimoines n'est pas justifié par une raison
juridique. La personne appauvrie peut exercer une action en justice intitulée « action de in rem verso ». Par
exemple, une personne A construit une maison sur un terrain appartenant à une personne B (la situation
peut se produire notamment en cas d'indivision après un héritage). En application de l'article 552 du Code
civil posant le principe suivant lequel la propriété du sol implique la propriété du dessus et du dessous, la
maison devient la propriété de B. Mais, B s'est enrichi sans cause -- de ce fait, il doit indemniser A.
II - A qui incombe la charge de la preuve ?
L'article 1315 du Code Civil précise que " celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de
l'obligation."
On voit donc que cet article précise le principe selon lequel la charge de la preuve incombe toujours au
demandeur.
En matière civile, le juge n'a qu'un rôle passif c'est-à-dire qu'il n'a pas à rechercher la preuve de ce que chacun
prétend. Il ne doit se prononcer qu'en fonction des preuves fournies. En matière pénale, le juge a un le dit «
actif » -- en effet, il doit rassembler les preuves afin de prouver la culpabilité de l'auteur d'une infraction.
Le principe posé par l'article 1315 du Code civil comprend, bien entendu, un certain nombre d'exceptions. En
effet, dans certains cas la loi dispensera le demandeur d'apporter la preuve de ce qu'il prétend. On dit qu'il existe
une présomption légale. Les présomptions constituent en effet une exception au principe selon lequel la charge
de la preuve incombe au demandeur.
On distingue deux sortes de présomptions : .
-- les présomptions simples.
-- les présomptions irréfagables
Une présomption est qualifiée de présomption simple lorsqu'elle peut être combattue par la preuve
contraire.
Par exemple, l'article 553 du Code civil précise que « toutes constructions, plantations et ouvrages sur un terrain
ou dans l'intérieur, sont présumés faits par le propriétaire à ses frais et lui appartenir, si le contraire n'est pas
prouvé... ». Cela signifie que tous les travaux d'une propriété sont censés avoir étés effectués par le propriétaire,
sauf si la preuve contraire peut être faite. C'est donc au locataire d'apporter la preuve de la réalisation de travaux
de manière à pouvoir obtenir éventuellement un remboursement de la part du propriétaire.
Autre exemple : lorsqu'un enfant blesse un de ses camarades, celui-ci est irresponsable civilement car ce sont les
parents qui, juridiquement, sont considérés comme responsables du fait de leurs enfants mineurs. Les
demandeurs ( parents de l'enfant blessé) n'ont pas à fournir la preuve de la faute des parents de l'auteur du
dommage. On dit qu'il existe une présomption simple de responsabilité des parents en raison du fait de leurs
enfants mineurs. Toutefois, les parents de l'auteur du dommage peuvent apporter la preuve de leur non-
responsabilité.
Une présomption est qualifiée de présomption irréfragable lorsqu'elle ne peut être combattue par la
preuve contraire.
Par exemple, l'adage « nul n'est censé ignorer la loi » implique une présomption de connaissance de la loi par
l'opinion publique et par-là même consacre sa force obligatoire. Il est, bien entendu, impossible de prouver le
contraire. Par ailleurs, la loi n'a pas à être prouvée dans la mesure où c'est le rôle du juge de connaître les lois.
Autre exemple :. L'article 1282 du Code civil précise que « la remise volontaire du titre original sous signature
privée par le créancier au débiteur, fait la preuve de sa libération. ». Cela signifie que si un créancier remet à son
débiteur l'écrit constatant que le débiteur a payé, il n'est plus possible pour le créancier de prouver qu'il n'a pas
été payé. La remise de l'écrit constitue ce que l'on appelle une présomption irréfragable de paiement.
Quant aux moyens de défense du défendeur, celui-ci peut opposer des exceptions qui pourront paralyser l'action
du demandeur. Par exemple, lorsqu'un débiteur n'a pas payé, il pourra prouver que cela est dû à un cas de force
majeure. Dans tous les cas, lorsqu'un défendeur oppose une « exception » il devra en rapporter la preuve.
III -- les moyens de preuve.
À partir du moment où l'on admet le principe selon lequel toute chose jugée représente la vérité, le juge ne pourra
appuyer sa décision que sur des preuves sérieuses. Le régime juridique de la preuve est donc très formaliste et
la réglementation qui existe en ce domaine est très précise.
C'est l'article 1316 du Code civil qui précise les moyens de preuve : -- on en distingue trois catégories :
1. La preuve écrite ( ou preuve littérale) -- il s'agit des actes authentiques ou des actes sous seing privé.
2. La preuve testimoniale (témoignages).
3. Les présomptions (voir plus haut).
En principe, un acte juridique devra toujours être prouvé par écrit tandis qu'un fait juridique peut être prouvé par
tous les moyens.
Par ailleurs, la loi classe les modes de preuve et les hiérarchise.
Certaines preuves sont qualifiées de preuves "parfaites" tandis que d'autres sont des preuves dites « imparfaites
».
L'écrit, l'aveu, et le serment décisoire constituent des preuves parfaites dans la mesure où le juge ne peut que les
accepter-- les témoignages, les présomptions, et le serment supplétoire constituent des preuves imparfaites car
le juge est libre de les admettre ou non.
A -- la preuve par écrit ( preuve littérale)
En tant que preuve parfaite, l'écrit présente à la fois l'avantage de constater les éléments du contrat mais encore
de constater les obligations qui en découlent. C'est la raison pour laquelle on qualifie l'écrit de moyen de preuve
N°1.
L'article 1341 du Code Civil dit en substance que tout acte juridique doit être constaté par écrit chaque fois que sa
valeur excède 5000 F. Par conséquent, en principe, aucune preuve testimoniale ne peut être reçue contre un
écrit. Donc, lorsque la valeur de l'acte est inférieure à 5000 F, celui-ci peut-être prouvé par tout moyen.
Toutefois, quelques exceptions confirment la règle :.
Lorsqu'un acte juridique est supérieur à 5000 F, il est tout de même possible de prouver son existence par ce que
l'on qualifie de « commencement de preuve par écrit » -- il s'agit, par exemple, de lettres, de commandes, de
factures, etc.. Il en est ainsi dans trois cas :.
Lorsqu'il s'agit d'un quasi-contrat.
Lorsque l'une ou l'autre des parties n'a pas eu la possibilité morale ou matérielle de se procurer un écrit (contrat
entre un médecin et son malade par exemple).
Lorsque , en raison d'un cas de force majeure, la preuve écrite a été perdue ou détruite (catastrophe naturelle,
incendie, etc..).
Il existe deux types d'écrit : les actes "authentiques" et les actes "sous seing privé"
-- l'acte authentique.
C'est un acte obligatoirement rédigé par un officier public (huissier, greffier, notaire). En aucun cas, un particulier
ne peut rédiger lui-même un acte authentique. C'est la raison pour laquelle on qualifie les actes authentiques
d'actes solennels.
Tout acte authentique requiert un certain nombre de formalis. Prenons par exemple un acte notarié :.
Après avoir constaté la comparution des parties en personne, l'acte notarié doit être libellé en français. L'original
de l'acte conservé par le notaire constitue la « minute ». La copie qui est remise au créancier s'appelle la «
grosse ». L'acte authentique est un moyen de preuve incontestable et sa rédaction est obligatoire en matière de
vente immobilière.
Autre exemple : un constat d'huissier sert à authentifier un fait juridique. Un fait juridique constaté par acte
d'huissier sera beaucoup plus facile à prouver dans l'éventualité d'un litige.
-- l'acte sous seing privé.
Un acte sous un privé est un écrit qui est librement rédigé entre les parties.
En principe, un acte sous un privé est soumis aux règles découlant des articles 1325 et 1326 du code civil.
L'article 1325 précise qu'il doit y avoir autant d'originaux qu'il y a de parties au contrat.
L'article 1326 précise que tout acte sous seing privé doit être signé et porter une mention manuscrite comportant
la somme en toutes lettres et en chiffres. Si les règles découlant des articles 1325 et 1326 ne sont pas
respectées, cela ne signifie pas que l'acte est nul mais qu'il ne vaudra que comme commencement de preuve par
écrit.
Prenons l'exemple de la télécopie, de la preuve informatique, et de la photocopie :.
Concernant la télécopie, la question qui se pose concerne la valeur de la preuve du document transmis.
Lorsqu'une photocopie est transmise, l'original du document est conservé par l'émetteur. En droit civil, l'original
est exigé comme moyen de preuve mais en droit commercial la preuve est libre. Finalement, le droit a besoin de
certitudes dans l'identification des destinataires, le contenu des documents, et la date leur d'envoi. Sur ce point, il
faut bien reconnaître que la télécopie ne peut être considérée comme moyen de preuve tout à fait satisfaisant.
La preuve informatique, quant à elle est aujourd'hui possible sans aucune restriction pour tous les cas une
preuve par écrit n'est pas exigée.
Quant à la photocopie, si celle-ci représente une reproduction d'un original qui a disparu, elle constitue une
preuve complète mais cette preuve pourra être attaquée par tout moyen. Par contre, la photocopie « certifiée
conforme » à la valeur de l'original en tant que moyen de preuve.
B. -- Le témoignage ou preuve testimoniale.
La preuve par témoins, en Droit Civil, est admise dans trois cas :.
En cas de perte par le créancier de son titre de créance en raison d'un cas de force majeure.
En cas d'impossibilité pour le créancier de se procurer une preuve écrite lors de la conclusion du contrat.
En cas d'existence d'un commencement de preuve par écrit (par exemple une lettre faisant état d'une dette,
etc..). Dans ce cas, une preuve testimoniale pourra intervenir de manière complémentaire.
C - les autres moyens de preuve.
1 -- L' aveu.
L'aveu est un moyen de preuve assez couramment utilisé. Lorsqu'il y fait devant un tribunal, il s'agit d'un aveu
judiciaire et peut être admis en tant que moyen de preuve. En revanche, lorsque l'aveu est non judiciaire c'est-à-
dire qu'il a été prononcé du tribunal il ne constitue pas un moyen de preuve spécial ( en Droit Civil).
2 -- Le serment.
Le serment est très rarement utilisé en tant que mode de preuve. Il consiste à faire une affirmation solennelle
devant un tribunal. Le faux serment est constitutif d'un délit réprimé par le code pénal. Une distinction doit être
opérée entre le serment dit « décisoire » et le serment dit « supplétoire ».
En cas d'absence totale de preuve le juge peut, en dernier recours, utiliser la technique du serment décisoire :
Par exemple, une personne A réclame à une personne B. une somme d'argent. La personne B. conteste la
créance de A. A offre de renoncer à sa créance si B jure qu'il ne doit rien. Si B refuse de jurer, il doit verser à A la
somme d'argent qui est l'objet du litige. Mais, B peut déférer le serment à A , c'est-dire offrir de s'en remettre lui-
même au serment de son adversaire. Au bout du compte, c'est celui qui jure qui a gain de cause. Le juge est lié
par le serment décisoire.
S'il existe d'autres moyens de preuve (témoignage par exemple), et que le juge estime que celles-ci sont
incomplètes ou insuffisantes, le serment pourra être déféré à l'une ou l'autre des parties. Dans ce cas, le serment
est dit « supplétoire » dans la mesure il intervient en complément d'autres moyens de preuve et dans la
mesure où il laisse le juge libre de son pouvoir d'appréciation pour résoudre le litige.
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