1
Le mythe de l’enfant ‘sacrifié’ et par allégorie ‘maltraité’.
Le mot ‘sacrifier’ (XII. Siècle) provient du latin ‘sacrificare’ de sacrum facere
c’est à dire faire un acte sacré’. De la même façon ‘sacrifice’ dérive du latin
sacrificiumde sacrificare et indique l’offrande rituelle à la divinité, caractérisé par la
destruction (immolation réelle ou symbolique, holocauste) ou l’abandon volontaire de la
chose offert.
1
Le sacrifice éloigne du monde des hommes l’objet, l’être vivant, ou la partie du
corps, concerné, qui passe dans le monde des choses divines, dont les hommes ne doivent
pas toucher et le passage se traduit le plus généralement par une destruction au sens
commun, une dématérialisation, la mort, l’incinération, l’inhumation ou l’envoi sous
l’eau.
Il y a aussi des civilisations qui ont préféré le sacrifice des enfants, êtres
innocents, par excellence. Un exemple typique sont les sacrifices pratiqués par les
Carthaginois qui ont été accusés de cruauté des Romains et des pères de l’Eglise.
Dans la Palestine ancienne, les cultes cananéens pratiquaient le sacrifice des
enfants, adressé à Baal, divinisation du pouvoir politique. Les Phéniciens sacrifiaient
ainsi des enfants au dieu Baal, les carthaginois à Ba´al Hammon et/ ou Tahit pour obtenir
la faveur du dieu ou à Tamit, lors de rites de fécondité.
Le molk désigne dans le monde sémitique et carthaginois le sacrifice sanglant
constitué par l’offrande de nouveaux-nés des troupeaux, des premiers fruits de la récolte
ou de l’enfant premier-né.
Au Moyen Age, surtout pendant les épidémies de peste noire, les Juifs étaient
facilement accusés de sacrifier des enfants chrétiens et souffraient souvent des horribles
accusations.
Le terme "sacrifice" nous fait penser presque inconsciemment au sacrifice
dAbraham. Dans l’art même il y a une série de tableaux ayant comme thème le sacrifice
d’Abraham. Même le titre indique qu’il s’agit d’un sacrifice du père et non du sacrifice
du fils:
1
Petit Robert, pp. 1748-1749.
2
1. Le sacrifice d’Abraham (Abraham : πατέρας πλήθους, πολλών εθνών) Peinture
flamande -Petrus Paulus Rubens - Peinture sur bois au Musée du Louvre
2. Abraham, Sarah et l’Ange-Jan Provost-1520
3. Le sacrifice d’Abraham -Pieter Pietersz Lastman
4. Paysage avec l’offrande d’Abraham -Frans Francken
5. Paysage boisé avec Abraham et Isaac- Jan Brueghel l’Ancien
Le mot Abraham signifie père des plusieurs hommes, des plusiers nations et
indique que le sacrifice n’est pas seulement d’une question qui se limite à une famille ou
un groupe restreint mais plutôt d’un fait universel. L’événement est décrit dans Génèse:
Genèse 21-22
Après ces événements, Dieu mit Abraham à l'épreuvea. Il l'appela :- Abraham ! Et celui-ci répondit :- Me
voici. - Prends Isaac, ton fils unique, que tu aimes, lui dit Dieu, et va au pays de Morija. Là, tu me l'offriras
en sacrifice sur l'une des collines, celle que je t'indiquerait. Le lendemain, Abraham se leva de grand matin,
sella son âne et emmena deux de ses serviteurs ainsi que son fils Isaac ; il fendit du bois pour l'holocauste,
puis il se mit en route en direction de l'endroit que Dieu lui avait indiqué. Après trois jours de marche,
Abraham, levant les yeux, aperçut le lieu dans le lointain. Alors il dit à ses serviteurs :- Restez ici avec l'âne
; le garçon et moi, nous irons jusque là-bas pour adorer Dieu, puis nous reviendrons vers vous. Abraham
chargea le bois de l'holocauste sur son fils Isaac ; il prit lui-même des braises pour le feu et le couteau, puis
tous deux s'en allèrent ensemble. Isaac s'adressa à son père Abraham et lui dit :- Mon père ! Abraham dit :-
Qu'y a-t-il, mon fils ?- Voici le feu et le bois, dit-il, mais est l'agneau pour l'holocauste ? Abraham
répondit :- Mon fils, Dieu pourvoira lui-même à l'agneau pour l'holocauste. Et ils poursuivirent leur chemin
tous deux ensemble. Quand ils furent arrivés à l'endroit que Dieu lui avait indiqué, Abraham construisit un
autel et y disposa les bûches. Puis il ligota son fils Isaac et le mit sur l'autel par-dessus le bois. Alors
Abraham prit en main le couteau pour immoler son fils. À ce moment-là, l'ange de l'Éternel lui cria du haut
du ciel :- Abraham ! Abraham !- Me voici, répondit-il. L'ange reprit :- Ne porte pas la main sur le garçon,
ne lui fais pas de mal, car maintenant je sais que tu révères Dieu puisque tu ne m'as pas refusé ton fils
unique. Alors Abraham aperçut un bélier qui s'étai pris les cornes dans un buisson. Il s'en saisit et l'offrit en
holocauste à la place de son fils. du haut du ciel. je te comblerai de bénédictions, je multiplierai ta
descendance et je la rendrai aussi nombreuse que les étoiles du ciel et que les grains de sable au bord de la
mer. Ta descendance dominera sur ses ennemis. Tous les peuples de la terre seront bénis à travers ta
descendance parce que tu m'as obéi.
Dans ce cas le sacrifice est un acte de soumission à la volonté du Dieu et
l’enfant jusqu' à la fin il ne connait pas qu’il va être sacrifié. Il est sauvé et au moment du
sacrifice il est remplacé par un bélier.
3
Pourtant il y a d’autres cas les enfants sont sacrifiés, ou plutôt tués mais on les
présente comme des personnages muets, sécondaires, des victimes qui servent seulement
comme moyen de vengeance pour les adultes. C’est le cas de Médée qui tue ses enfants,
deux fils pour se venger de Jason. C'est la version du mythe lancé par Euripide qu’on voit
ici chez Anouilh:
Un me sang bat dans nos veines. Bêtes de la nuit, étrangleuses, mes soeurs! Μédée est une bête comme
vous! Μédée va jouir et tuer comme vous. Cette lande touche à d’autres landes et ses landes à d' autres
encore jusqu' à la limite de l' ombre, des millions de bêtes pareilles se prennent et égorgent en même
temps. Bêtes de cette nuit! Μédée est là, débout au milieu de vous, consentante et trahissant sa race. Je
pousse avec vous votre cri obscur. J’accepte comme vous, sans plus vouloir comprendre le noir
commandement. J’écrase du pied, j’éteins la petite lumière. Je fais le geste honteux. Je prends sur moi,
j’assume, je revendique. Bêtes! Je suis vous! Tout ce qui chasse et tue est Médée!
Elle tue les enfants et s’écroule dans les flammes qui redoublent et enveloppent la roulotte. (p. 393)
JASON
Qu’un de vous garde autour du feu jusqu' à ce qu’il n' ait plus que des cendres, jusqu' à ce que le dernier os
de Médée soit brûlé. Venez, vous autres. Retournons au palais. Il faut vivre maintenant, assurer l’ordre,
donner des lois à Corinthe et rebâtir sans illusions un monde à notre mesure pour y attendre de mourir. (p.
398)
La scène de l’enfant sacrifié ou plutôt maltraité est présentée de façon implicite
ou explicite chez Euripide, Sénèque, ou V. Cornaros (dans Sacrifice d' Abraham).
Chez Cornaros, qui reprend la scène de la Bible, par exemple l’enfant demande
d’être sauvé mais le père préfère se soumettre à la volonté de Dieu. Il s’agit du sacrifice à
la signification propre du terme:
Vers 803 (c’est Isaac qui parle)
Isaac: Et le temps où tu me serrais étroitement dans tes bras
Le temps où vous me nourrissiez dans votre sein
Le temps où vous me cajoliez
Où vous me contempliez m’endormir et me réveiller
Tu m’as élevé pour me faire livrer au feu
Pour me faire couper la tête comme un mouton, comme un chevreau
Abraham: C’est l’ordre du Dieu le Tout Puissant
De faire brûler tes membres tendres
Excuse ton père aigri
4
Ce n’est pas mon ordre, mais celle du maître
Πουν’ τα σφιχταγκαλιάσματα, Κύρη μου; Εδιαβήκαν;
Οι σπλαχνικές ανατροφές ελησμονηθήκαν;
Τα κανακοφιλήματα που μέλλω να τα’ αφήσω;
Που βλέπετε να κοιμηθώ και πάλι να ξυπνήσω.
Για να με δώσεις τση φωτιάς, μ' ανάθρεψες, γονή μου,
Και να κόψης, σαν ριφιού κι ’αρνιού, την κεφαλή μου;
Αβραάμ
Υε μ’, ο παντοκράτορας ορίζει, κ'έτσι θέλει
’ς τον τούτο να καγούν τα τρυφερά σου μέλη.
Συμπάθησε μου καλογυιέ, του πικραμένου κύρη,
Δεν είν’ δικό μου θέλημα, μάναι του νοικοκύρη.
Il y a aussi dans la mythologie grecque une série de cruautés contre les enfants
surtout pour des raisons de succession. Cronos dévore ses enfants dans la mythologie
grecque pour des raisons de succession. C’est l’image des cruautés de Cronos qui dévore
Déméter, Hestia, Hadès, Poséidon.
5
Héra aussi jette Héphaistos dans la mer à cause de son apparence
physique. Mais quand elle voit ses créations lui crée un atelier à Olympe. Mais de
nouveau quand Héphaistos aide Héra, Zeus son père le jette de nouveau
d’Olympe.
Une autre victime est Dionysos. Sémélé, sa mère, aimée de Zeus, meurt au
sixième mois de la grossesse, foudroyée à la vue de son amant divin dans toute sa
gloire: Le dieu arrache l’embryon du sein de Sémélé et le porte cousu dans dans
cuisse, jusqu' à terme.
Pélops aussi: Tantale immole son fils Pélops et en fait un mets qu’il sert aux
dieux. Pour un de ces crimes, son châtiment aux Enfers est exemplaire. Seule
Déméter se trompe et dévore une épaule. Les dieux indignés punissent Tantale et
rendent la vie à Pélops en remplaçant l’épaule dévorée par une épaule artificielle,
faite d’ivoire.
Léto: devient l’une des nombreuses maîtresses de Zeux encourant la colère d'
Héra. Cette dernière interdit à la terre d’accueillir la parturiente, et fait poursuivre
cette dernière par le serpent Python. Léto erre jusqu' à trouver l’île d' Ortygie, qui,
flottant entre la terre et la mer, n’encourt pas la malédiction d' Héra.
1 / 12 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !