ROLE DE L`IDE en CRF auprès du patient douloureux

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ROLE DE L'IDE en CRF auprès du patient douloureux
S.ROGATIONS – E.GOGO / CRF Le Normandy GRANVILLE (50)
Nous, Edith GOGO et Sylvie ROGATIONS, infirmières au Centre de Rééducation et Réadaptation
Fonctionnelles Le Normandy à Granville, allons vous s présenter notre travail sur la prise en charge du
patient douloureux.
Nous retracerons notre cheminement intellectuel puis la méthodologie utilisée :
 Premièrement pour mettre en place l'outil d'évaluation
 Deuxièmement pour y sensibiliser le personnel
 Troisièmement pour en évaluer les répercussions
 Et enfin nous conclurons
I CHEMINEMENT INTELLECTUEL
Selon le décret 93.221 DU 16/02/1993 relatif aux règles professionnelles des infirmiers, infirmières
et le décret 93.345 du 15/03/1993 relatif aux actes professionnels et à l'exercice de la profession
d'infirmier, il est de notre champ de compétences de " prévenir et évaluer la souffrance et la détresse
des personnes, participer à leur soulagement. ..et de concourir au recueil des informations et aux
méthodes qui seront utilisées par le médecin pour établir son diagnostic .."
Par la circulaire du 22 septembre 1998 , Bernard Kouchner, Secrétaire d'Etat à la Santé, définit le
plan d'action triennal de lutte contre la douleur dans les établissements de santé publics et privés qu'il
conclue de façon manuscrite ainsi :
" Je suis particulièrement attaché à ce que vous preniez toutes les mesures nécessaires pour que la
douleur des malades soit réellement et efficacement prise en charge ".
D'autre part ,le manuel d'accréditation de l' A.N.A.E.S précise au chapitre Organisation de la Prise en
Charge du patient sous la référence 5 : " les douleurs aiguës ou chroniques et la souffrance psychique
sont recherchées ,prévenues et prises en charge ".
Le fait que le C.R.R.F. Le Normandy de Granville soit dans une démarche d'assurance qualité nous a
incitées à nous engager dans cette prise en charge qui est à la fois nécessité et obligation.
Mais qu'est-ce que la douleur ?
La douleur ,selon l'International Association for the study of the pain est une " expérience sensorielle
et émotionnelle désagréable associée à un dommage tissulaire présent ou potentiel ou décrite en
termes d'un tel dommage ".
Pour la prendre en charge il s'agissait donc dans un premier temps de faire le point sur notre savoir
infirmier dans ce domaine, puis d'apprendre la juste distance" soignant - patient douloureux "pour
enfin travailler à l'élaboration d'un outil d'évaluation.
Dans le cadre de la formation continue, nous avons effectué un stage de deux semaines organisé par le
G.R.I.E.P.S.de Lyon (Groupe de Recherche et d'Intervention pour l'Education Permanente des
Professions Sanitaires et Sociales) sur le thème " Evaluer et soulager la douleur ".
Les objectifs de cette formation étaient les suivants :
- Améliorer la qualité de l' écoute du patient douloureux
- Identifier les différents mécanismes de résistance des soignants à la reconnaissance de la
douleur du patient
- Connaître les principales théories ( neurophysiologiques, anthropologiques qui sous-tendent de
nouvelles approches du sujet douloureux)
- Découvrir et utiliser les questionnaires et les échelles d'évaluation quantitative et qualitative.
- En mesurer les limites.
- Comprendre les différentes stratégies thérapeutiques en fonction des différents types de
patients douloureux et le rôle spécifique de chacun des professionnels de santé dans leur mise en
œuvre au sein d'une équipe
II METHODOLOGIE
Un groupe de travail s'est constitué afin de déterminer des objectifs pour la prise en charge des
patients douloureux.
Il s'est avéré que différents professionnels du C.R.R.F. (médecins, kinésithérapeutes, IDE,
pharmacien} étaient sensibilisés par cette prise en charge et plus particulièrement le Médecin
Coordonnateur, le Médecin Psychiatre et l'Infirmière Générale.
1 ) Notre premier objectif
Elaborer une grille d'évaluation de la douleur
Disposer d'une grille d'évaluation de la douleur nous paraissait présenter de nombreux avantages :
 Identifier les patients douloureux
 Améliorer la qualité de la relation soignant-soigné, en montrant au patient que sa plainte est
écoutée ,qu'il n'est suspecté ni de l'inventer ni de la majorer
 Faciliter la prise de décision pour adapter le traitement analgésique à l'intensité de la douleur
 Permettre d'établir un langage commun lors des transmissions au sein de l'équipe
 Et conserver une traçabilité
Nous sommes partis de la grille du Docteur Boureau de l'hôpital SAINT ANTOINE et de la figurine de
la feuille d'observation médicale utilisée au Normandy pour préciser :
- la localisation (où)
- l'intensité sur 24 H avec l'Echelle Visuelle Analogique (quand et combien)
- les qualificatifs (comment)
- les traitements mis en place
Cette grille est datée, signée et mise dans le dossier du patient.
Elle permet de visualiser l'efficacité du traitement antalgique.
Cette grille est remplie soit par le patient seul, soit avec l'infirmière.
Y sont notées donc en regard de la case horaire d'une part l'intensité chiffrée de la douleur à une
heure précise, les éléments majorant exemple séance de kinésithérapie, lever au fauteuil, les éléments
calmant :balnéothérapie, position couchée vessie de glace ,électrothérapie etc…
Dans un premier temps, elle a été utilisée pour chaque modification de traitement des patients opérés
du genou ou de la hanche.
Cet outil de travail a été validé par la Commission Médicale de l'Etablissement.
Un an après, l'utilisation de cette grille a été généralisée à tous les patients douloureux.
2 ) Notre deuxième objectif
Sensibiliser le maximum de professionnels du C.R.R.F.
Deux soirées conférences ont été organisées avec l'aide de laboratoires pharmaceutiques.
Lors de la première soirée, Sylvie et moi avons présenté :
-la grille d'évaluation
et la pharmacienne :
-les paliers de classification des antalgiques ainsi que l'évolution des prescriptions dans
l'établissement.
Lors de la seconde soirée, le médecin responsable de la consultation douleur et le neurologue de
l'hôpital Avranches-Granville ont traité: " Actualités thérapeutiques dans la prise en charge des
douleurs centrales et périphériques ".
Ensuite, il nous a semblé nécessaire de sensibiliser les personnes non venues aux soirées.
Nous avons donc organisé des réunions d'une durée de trois heures qui s'inscrivaient dans le
programme Interne de formation continue de l'établissement .Toutes les infirmières du centre ont
suivi cet enseignement ainsi qu'un grand nombre d'aides-soignantes.
Programme de cette formation :
 les bases neurophysiologiques,
 les différents types de la douleur (douleur par excès de nociception, douleur neurogène,
douleur psychogène),
 l' évaluation de la douleur avec l'EVA,
 les traitements pharmacologiques
 le rôle propre de l'IDE (écoute et relation d'aide)
 et le protocole d'utilisation de la fiche
Nous avons insisté sur
 :) l'importance du " non-jugement " face à l'évaluation chiffrée. Ce qui est important, c'est la
façon dont la note est ramenée à zéro.
 les "petits " moyens (vessie de glace, bouillotte, etc.) , l'acquisition des " bons " gestes face à
la douleur ( installation au lit, toilette ,etc ...)
Chaque membre de l' équipe quel que soit son rôle a sa place pour répondre aux besoins fondamentaux
du patient douloureux.
Cette intervention était suivie d'une table ronde organisée par le Médecin Psychiatre afin d'étudier
les difficultés rencontrées auprès des patients en " souffrance ".
Ont été abordés :
 La culture
 Les croyances
 L'effet placebo
L'analyse des questionnaires d'évaluation de ces interventions a fait ressortir une demande de
protocoles de prescription et de délivrance d'antalgiques. Ceci reste à concrétiser…
3 ) Notre troisième objectif
Evaluer l'impact de cette grille dans l'établissement.
Pour ce faire, une analyse sur l'ensemble de l'établissement une semaine donnée, a été effectuée.
Nous avons procédé ainsi :
 étude de tous les dossiers de toutes les unités la semaine 28 (210 dossiers)
Recueil pour photocopie de toutes les fiches d'évaluation de la douleur ainsi que de l'ordonnance
correspondante après les avoir rendues anonymes puis comptage du :
 nombre de fiches remplies
 nombre de fiches remplies par le patient lui-même
 nombre de fiches remplies par le patient avec l' aide d'un soignant
 analyse des répercussions sur le traitement antalgique :
- Combien de changement de paliers ?
- Combien d'autres soins adjacents sont notés ?
- Combien de réévaluation ?
En parallèle la Pharmacienne compare l' évolution de la consommation d'antalgiques par rapport aux
années précédentes.
Ces documents étant interne à l'établissement, par confidentialité ,nous ne publions pas ces résultats.
Nous pouvons cependant citer un fait constaté: certains patients " sous tableau B " n'avaient pas de
fiche.
Malgré un investissement fort de notre part et la volonté marquée de l' encadrement qui s'est
concrétisée par un capital temps alloué de 140 h(hors formation), nous ne pouvons que nous interroger
sur les causes du manque d'impact actuel de cette fiche d'évaluation de la douleur.
Faible implication de l'ensemble des médecins ?
Utilisation systématique dans le dossier IDE non intégrée ?
Explication auprès du patient de l'utilisation de la fiche et de sa finalité prenant trop de temps ?
Routine des acteurs qui privilégient des réponses pharmacologiques rapides ?
III CONCLUSION
Au terme de cet exposé sur la prise en charge de la douleur en C.R.R.F où nous avons relaté le
cheminement d'une équipe, il est utile de rappeler que la profession d'infirmière nous donne par la
législation deux rôles: le rôle prescrit et le rôle propre et qu'ils sont tout particulièrement importants
dans ce type de prise en charge.
La reconnaissance de notre rôle propre n'est pas toujours aisée mais avec persévérance, humour et
l'aide de nos chers alliés, nous avançons au fil des marées.
La prise en compte des douleurs aiguës ou chroniques ,comme phénomènes préoccupants pendant
l'hospitalisation ,a conduit à inscrire dans la loi, des aménagements des pratiques soignantes.
Cependant l'enjeu de la prise en charge de la douleur dépasse le cadre des procédures qualité ou
d'accréditation.
Il convient d'actualiser un débat véritablement éthique sur la souffrance, la plainte et le soulagement
des patients, de penser ces questions à partir des spécificités des services et d'actualiser des
réponses en terme de recueil des plaintes, de protocoles antalgiques par pathologie ,de formation à
l'écoute des soignants.
Aujourd'hui ,nous n'avons plus le droit de dire que seule la douleur de l'autre est supportable
Faisons en sorte que le schéma suivant devienne une évidence… .
DOULEUR
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