Il n'y avait rien d'alarmant dans l'état de notre cher malade; il souffrait peu, n'avait pas
de fièvre, le docteur ne voyait qu'une faiblesse extrême, causée, disait-il, par les privations,
par les austérités du bon frère Supérieur. Le mardi on avait permis de donner un peu de
nourriture au malade. Le mercredi et le jeudi nous croyions à la convalescence. Le vendredi
la fièvre reparut; le docteur crut qu'on avait trop donné de vin; il fut retranché. Le samedi,
persistance de la fièvre, gêne dans la respiration, mal de gorge. Je n'avais plus espoir, mais,
dans la maison, on espérait toujours. Je priai le cher frère Adolphe de venir veiller. La nuit
ne fut point plus mauvaise que la précédente. Le malade buvait de temps en temps; il disait
même quelques paroles quand on l'interrogeait, mais avec difficulté à cause du mal de
gorge. Vers les quatre heures du matin la respiration parut plus gênée, le malade plus
affaissé; de chaque côté de la bouche il y avait un peu d'écume. Les Assistants furent
appelés, je descendis aussi. L'aumônier arriva aussi tôt que nous, l'extrême-onction fut
administrée. Le malade avait toute sa connaissance: il faisait des signes de croix; il se
séchait les lèvres avec son mouchoir; il donnait la main et fermait les lèvres pour les
onctions... Quand l'aumônier eut fini il sortit pour aller dire la messe aux enfants. Il était 5
heures 5. J'accompagnai l'aumônier jusqu'au milieu du corridor. Nous rentrâmes aussitôt. Le
Frère Polycarpe venait de s'endormir pour jamais !
Frère André, Directeur de l’internat, témoin de la mort du Frère Polycarpe, Positio p. 208.
1968, publication de la Positio, le livre qui contient toute la documentation sur le frère
Polycarpe.
Pour démontrer l'ampleur de la recherche effectuée pour la préparation de cette Positio, il
suffit de penser que 93 archives et bibliothèques ont été consultées, reparties sur 69 villes.
Celles de Rome et du Vatican ont été personnellement examinées par mgr. Papa, les autres,
par les collaborateurs externes de la Section historique. (Positio XI)
Partis de France le 8 octobre 1846, les Frères du Sacré-Cœur n’arrivèrent à Mobile que le
13 janvier de l'année suivante. Là, ils eurent à diriger un asile qui comptait trente-cinq
orphelins que l'on confia bientôt aux soins et au zèle du frère Patrick. En même temps, ils
furent chargés de l'école de la paroisse Saint-Vincent, fondée pour les enfants du peuple, et
en 1848, ils eurent, encore la direction de l'établissement de la cathédrale où de nombreux
élèves recevaient avec la science élémentaire, les bienfaits de l'éducation religieuse. (Positio
p. 307).
Pendant les quinze jours qui s'écoulèrent avant sa mort, les vertus qui éclatèrent le plus en
lui avec l'obéissance, la résignation, la patience et l'humilité, ce furent l'amour de Dieu et un
détachement absolu de toutes choses. Il ne pensait plus qu'à Dieu.
Il nous demanda pardon de tout ce qui en lui avait pu nous scandaliser, de tout ce qui
aurait pu n'être pas conforme aux devoirs de son état ; et nous pria de demander pardon pour