File - La classe de madame blackmon

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Les enjeux particuliers pour les préadolescents et les adolescents
Publicité et consommation
Définir le marché des préadolescents (8 à 12 ans) est l’une des plus récentes tendances dans le domaine de la
publicité destinée aux enfants. N’étant plus de petits enfants et pas encore des adolescents, les préados commencent
à développer leur identité et à accorder plus d’importance à l’image qu’ils projettent. Les spécialistes du marketing ont
découvert qu’on peut faire beaucoup d’argent en traitant les préados comme des ados.
L’industrie du marketing incite les préados à grandir rapidement. Les études démontrent que les jeunes de 11 ans et plus ne se
perçoivent plus comme des enfants. La Toy Manufacturers of America a rajusté son public cible : elle vise désormais les enfants de la naissance à 10 ans
plutôt qu’à 14 ans.
Un rapport réalisé aux États-Unis en 2000 par la Federal Trade Commission indique qu’Hollywood recrute des préados (certains dès 9 ans) pour évaluer
des scénarios, des publicités, des bandes-annonces et des premiers montages de films cotés R (réservés aux adultes).
Dans son rapport au congrès de 2000, la Federal Trade Commission (FTC) des États-Unis exprime des préoccupations quant à la façon dont Hollywood
recrute systématiquement des préados (parfois dès l’âge de neuf ans) pour évaluer des scénarios, des publicités, des bandes-annonces et des premiers
montages de films cotés R (réservés aux adultes). Dans son rapport de 2009, la FTC remarque « un ciblage explicite et omniprésent des films classés PG13 auprès des très jeunes enfants » avec Hollywood qui continue à effectuer des études de marché sur les enfants, dès l’âge de sept ans, pour la publicité
de ces films. [1]
En traitant les préadolescents comme des consommateurs indépendants et matures, les spécialistes du marketing ont réussi à éloigner les parents du
tableau, ce qui rend les jeunes vulnérables à des messages potentiellement malsains sur l’image du corps, la sexualité, les relations et la violence.
Le marketing « cool » destiné aux adolescents
Les entreprises profitent des insécurités et les doutes qu’entretiennent les adolescents sur eux-mêmes en leur faisant croire que pour être vraiment cool,
ils doivent utiliser leurs produits.
Selon Naomi Klein, auteure de No Logo – La tyrannie des marques, les entreprises ont découvert au cours des années 90 que les jeunes étaient prêts à
payer très cher pour avoir l’air cool. Ces dernières s’évertuent depuis à mieux cerner ce concept flou.
Demeurer à l’avant-garde des tendances n’est pas une mince affaire, comme l’explique le critique culturel Douglas Rushkoff. « Par le temps qu’une
tendance cool est découverte, reconditionnée et vendue aux jeunes dans les centres commerciaux, elle a cessé d’être cool. Les ados se tournent alors
vers autre chose, et on reprend tout le processus. »
Certaines entreprises embauchent des « chasseurs de tendances cool » pour qu’ils infiltrent l’univers des ados et en ramènent les dernières tendances.
Toutefois, avec Internet accessible d’un simple clic, de nombreuses sociétés préfèrent plutôt laisser les adolescents venir à eux par des jeuxquestionnaires et des tests de personnalité en ligne. Souvent, ces formes de collecte de données utilisent le langage de la responsabilité et encouragent
les jeunes à passer le mot auprès de leurs amis. Par exemple, lorsqu’une fille remplit le COSMOgirl! Ultimate Profile Quiz, on l’incite à partager le quiz
avec ses amis sur les sites de réseautage social : COSMOgirl! a entendu pas mal d’histoires, ne nous trompons pas dans la vôtre. Qu’est-ce qui fait de
vous une CG!? Pensez à afficher cela sur votre site de réseautage social préféré, avec un lien vers cosmogirl.com — Vos amis seront certainement
intéressés par ce que vous dites (et nous aussi !).
La colère, l’activisme et l’attitude des adolescents sont devenus des produits que les spécialistes du marketing assimilent, conditionnent et revendent. Il
devient difficile de déterminer ce qui est apparu en premier : la culture adolescente ou la version de la culture adolescente mise en marché. Les médias
reflètent-ils ce que sont les jeunes d’aujourd’hui ou ces derniers sont-ils influencés par les images des jeunes véhiculées dans les médias ? Il est important
que les adolescents aient la possibilité de discuter de ces sujets et remettent en question les valeurs matérialistes véhiculées par les médias.
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L’image du corps et la publicité
Il est difficile pour les adolescents de développer une saine attitude à l’endroit de la sexualité et de l’image du corps quand bon nombre des publicités qui
leur sont destinées sont remplies de jeunes exceptionnellement minces, en forme, beaux et très attirants sexuellement. Le message sous-jacent est qu’il
existe un lien entre le sex-appeal, la beauté physique, la popularité, le succès et le bonheur.
Les créateurs de mode, comme Calvin Klein, Abercrombie & Fitch et Guess, recourent à des campagnes agressives mettant des jeunes en scène. Ces
pubs vendent bien plus que des vêtements : elles vendent également une sexualité adulte.
Les études démontrent que même s’ils puisent la plupart de leurs connaissances sur le sexe dans les médias (magazines, télévision, radio et cinéma), la
majorité des adolescents déclarent que ce sont leurs parents qui influencent le plus leurs décisions dans ce domaine. Il est donc important que les parents
insistent sur des pratiques sexuelles saines et dénoncent les images qui exploitent le corps.
Les images véhiculées par les médias peuvent inciter les jeunes à entretenir de la haine, voire de la répugnance, à l’égard de leur propre corps, ce qui
peut conduire à des troubles alimentaires. Longtemps considéré comme un sujet typiquement féminin, l’image corporelle préoccupe de plus en plus les
garçons et engendre chez eux aussi des troubles alimentaires. Une étude de 2012 révèle que 50 % des garçons et des filles de 10ème année estiment être
trop maigre ou trop gros.[2]
Les études ont également révélé que les garçons, tout comme les filles, pouvaient commencer à fumer dans l’espoir de perdre du poids.
[3]
Le tabac et l’alcool
Les compagnies de tabac et d’alcool ciblent les jeunes depuis longtemps déjà dans l’espoir de développer une fidélité à la marque qui durera toute la vie.
Comme le tabagisme tue plus de 45 000 Canadiens par année et des milliers de personnes cessent de fumer,
[4]
il est essentiel pour l’industrie du tabac de
recruter de jeunes et nouveaux fumeurs.
Au Canada, les tentatives du gouvernement de limiter la publicité des produits du tabac ont abouti en 2007 à une décision de la Cour suprême du Canada
de maintenir la validité constitutionnelle de la législation fédérale limitant la publicité des produits du tabac, interdisant la commandite d’événements par les
cigarettiers et exigeant la présence d’avertissements de plus grande taille sur les paquets de cigarettes.
[5]
Cette décision est importante quand il s’agit des
jeunes car des études démontrent clairement que les adolescents non-fumeurs qui sont plus conscients de la publicité sur le tabac ou plus réceptifs à
celle-ci sont plus susceptibles de commencer à fumer un jour.
[6]
Les filles sont une cible particulière de l’industrie du tabac, avec des marques aux États-
Unis comme les Superslims Lights et les Camel No. 9 conçues spécifiquement pour les femmes.
Les restrictions au Canada ne signifient pas nécessairement que les jeunes Canadiens ne sont pas exposés aux publicités sur le tabac.
L’influence médiatique s’exerce de façons subtiles, notamment des célébrités fument à la télévision ou au cinéma (en 2004, 81 % des adolescents ont vu
des fumeurs à la télévision ou dans les films);
[7]
la cigarette est intégrée à des jeux vidéo (une étude récente sur la cigarette dans les jeux vidéo révèle une
augmentation de 0,8 % en 2005 à 12,6 % en 2011 pour les jeux classés comme étant appropriés pour les 10 ans et plus);
[8]
des articles promotionnels
sont distribués – notamment pour des personnages « nostalgiques » comme Joe Camel ou des images comme celles des anciens emballages de
cigarettes Players; un lien est établi entre la consommation de cigarettes (et d’alcool) et le fait d’être sexy, cool, indépendant et amateur de risques
(particulièrement de nature physique);
les cigarettes aromatisées et colorées font l’objet d’une commercialisation agressive;
les jeunes sont exposés aux publicités sur la cigarette présentées dans les revues américaines.
Tout comme l’industrie du tabac, l’industrie des boissons alcoolisées dépense chaque année des milliards de dollars pour capter l’attention de
consommateurs de tous âges – et avec raison. Lorsqu’il est question des jeunes, les recherches indiquent que la publicité sur l’alcool normalise la
consommation d’alcool, change les attitudes des jeunes face à l’alcool et est liée au fait de commencer à boire et à prendre des risques à un âge précoce.
La législation relative à la publicité sur l’alcool est moins restrictive que celle sur le tabac et offre plus souvent l’occasion de faire participer les jeunes. Aux
États-Unis, le Center on Alcohol Marketing and Youth (CAMY) souligne que, selon certaines études, l’exposition à la publicité télévisée sur la bière, les
annonces d’alcool dans les magazines et sur les panneaux publicitaires, les étalages de bière en magasin, les concessions de bière lors d’événements
sportifs et la consommation d’alcool dans les films augmentaient la probabilité pour les jeunes de consommer de l’alcool.
[9]
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Bon nombre de stratégies utilisées par l’industrie du tabac peuvent également s’appliquer à la publicité sur l’alcool. Les industries du tabac et de l’alcool
ciblent les jeunes en :
diffusant leurs annonces durant des émissions écoutées par une forte proportion de jeunes, comme Les Simpsons, South Park ou des événements
sportifs ;
publiant de la publicité dans les magazines lus surtout par les ados, comme Rolling Stone,Maxim ou People ;
commanditant des concerts rock et des événements sportifs ;
fabriquant et en faisant une large promotion de produits alcoolisés sucrés qui ne goûtent pas l’alcool (comme la Mike’s Hard Lemonade).
établissant des liens entre les publicités à la télévision et dans les magazines et des vidéos en ligne ou des sites Web immersifs sur le mode de vie qui font
participer les jeunes consommateurs.
La télévision est encore le meilleur moyen pour atteindre les jeunes. CAMY indique que l’exposition des jeunes à la publicité sur l’alcool à la télévision
américaine a augmenté de 71 % de 2001 à 2009. [10] En outre, les publicités télévisées fournissent souvent des liens directs vers des sites Web et des
plates-formes de médias sociaux comme YouTube, Flickr, Twitter et Facebook.
Les industries de l’alcool et de la bière ont rapidement saisi l’efficacité d’Internet pour atteindre les jeunes. Le Web offre aux spécialistes du marketing un
support qui compte pour beaucoup dans la culture adolescente. Sans compter qu’Internet n’est pas réglementé et fait l’objet de très peu de supervision
parentale. En 1999, le US Center for Media Education a révélé que 62 % des sites de bière et d’alcool affichaient des contenus et des activités
susceptibles de plaire aux adolescents et préadolescents. En 2011, CAMY a publié un rapport sur le marketing numérique par l’industrie de l’alcool
concluant notamment que :
dix des principales marques d’alcool comptent plus de 16,5 millions de « J’aime » sur leur page Facebook;
dix marques d’alcool populaires auprès des jeunes avaient téléchargé 35 725 photos et 377 vidéos sur leur page Facebook;
les adeptes des marques populaires auprès des jeunes avaient téléchargé 15 416 photos et 98 vidéos sur les pages Facebook des marques, rendant ainsi
leurs messages viraux;
des photos suggestives ou illustrant une consommation excessive d’alcool étaient affichées sur les sites de médias sociaux de l’industrie;
les technologies exigeant de dire son âge pour contrôler l’exposition des mineurs à ces sites Web étaient dénuées de sens.
[11]
Enfance « prête à porter »
Alors même qu’ils passent de l’enfance à l’adolescence, les préados (8 à 12 ans) sont continuellement bombardés de messages médiatiques leurs
présentant de façon stéréotypée ce que c’est qu’être une fille ou un garçon à notre époque. Cette enfance « prête à porter » leur est vendue, non
seulement à travers la publicité et les produits, mais aussi la télévision, la musique, les films, les magazines, les jeux vidéo et Internet.
Selon les messages médiatiques destinés aux enfants, les préadolescentes sont mignonnes et sexy, et ne vivent que pour les garçons, la mode, les pop
stars, les copines et le magasinage. Les petites filles, tout particulièrement, sont la cible des publicitaires, et le contenu de leurs messages – la beauté, la
sexualité, les relations et le consumérisme- inquiètent les parents. Selon Sharon Lamb et Lyn Mikel Brown, auteures de Packaging Girlhood, cette
représentation des filles comme étant « sexy, obsédées par le magasinage et les garçons » peut être nuisible à leur développement. A un âge où les filles
« pourraient développer des habiletés, des talents et des intérêts qui leur serviront toute leur vie, on les attire vers un mirage de célébrité fait de pop stars
et de sexualisation ».
Les stéréotypes que les médias présentent des garçons ne sont pas moins nuisibles : ceux-ci sont représentés comme essentiellement actifs et « durs à
cuire » par les médias, avec, comme pour les filles, une emphase sur l’apparence physique : la publicité et les films mettent en valeur le message « body
building » ; l’idéal masculin dans notre culture est représenté par un corps en V très musclé. De fait, en l’espace de 20 ans, GI Joe a pris plus de muscle
que le plus assidu des body-builders. Les vidéos Rap et Hip Hop popularise encore cette image étroite de l’homme : particulièrement suivie par les jeunes,
cette culture musicale à l’origine riche et diversifiée, s’est progressivement stigmatisée en une image unique de la masculinité et des rapports entre sexes.
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