Les épargnants forgent-ils des anticipations rationnelles ?
DOCUMENT 1 : L’hypothèse d’anticipations rationnelles
DOCUMENT 2 Modèles standard et non standard de l’épargnant
DOCUMENT 3 : L’endettement des ménages en % du revenu disponible brut
DOCUMENT 4 : Les déterminants des variations du taux d’épargne en France
DOCUMENT 5 : Evolution des anticipations des ménages en France entre 2007 et 2009
DOCUMENT 1 : L’hypothèse d’anticipations rationnelles
Les deux principales conclusions que l’on peut tirer de l’étude des données relatives aux
anticipations sont les suivantes :
1. Dans un secteur, les anticipations sont en moyenne meilleures que celles de modèles
naïfs et le sont autant que celles de systèmes d’équations, bien qu’il existe de considérables
différences d’opinion en coupe instantanée.
2. Les anticipations observées sous-estiment généralement l’ampleur des changements
qui se produisent effectivement.
Afin d’expliquer ces phénomènes, j’aimerais suggérer que les anticipations, étant des
prédictions fondées d’événements futures, sont essentiellement les mêmes que celles de la théorie
économique pertinente. Au risque de mêler cette hypothèse purement descriptive à des opinions sur
ce que les entreprises devraient faire, nous appellerons de telles anticipations « rationnelles ». On
affirme souvent que l’hypothèse de rationalité en économie conduit à des théories incohérentes avec
les phénomènes observés, ou incapables de les expliquer, particulièrement en ce qui concerne leurs
changements au cours du temps. Notre hypothèse est basée sur un point de vue totalement opposé :
les modèles économiques dynamiques ne supposent pas assez de rationalité.
L’hypothèse peut être reformulée un peu plus précisément de la façon suivante : les
anticipations des entreprises (ou, plus généralement la distribution de probabilité subjective des
résultats) tendent à être distribuées, pour un même ensemble d’information, au voisinage de la
prédiction de la théorie (ou de la distribution de probabilité « objective » des résultats).
L’hypothèse affirme trois choses : (1) L’information est rare et généralement le système
économique ne la gaspille pas. (2) La façon dont les anticipations sont formées dépend
spécifiquement de la structure du système pertinent décrivant l’économie. (3) Une « prédiction
publique » dans le sens de de Grunberg et Modigliani (« The Predictability of Social Events »,
Journal of Political Economy, 1954) n’aura pas d’effet substantiel sur le fonctionnement du système
économique (à moins qu’elle soit basée sur de l’information interne). Cela n’est pas tout à fait la
même chose que de poser que le revenu marginal tiré de la science économique est nul car les
anticipations d’une entreprise seule peuvent encore être sujettes à une plus grande erreur que la
théorie.
Elle n’affirme pas que le débroussaillement effectué par les entrepreneurs corresponde de
quelque manière que ce soit au système d’équations ; elle ne pose pas non plus que leur prédictions
sont parfaites ou que leurs anticipations sont toutes les mêmes. Aux fins de l’analyse, nous
utiliserons une forme particulière de l’hypothèse. En particulier, nous supposons que :
1. Les perturbations aléatoires sont normalement distribuées.
2. Des équivalents certains existent pour les variables à prédire.
3. Les équations du système, y compris les formules d’anticipation, sont linéaires.
Ces hypothèses ne sont pas aussi fortes qu’elles pourraient le paraître à première vue, chacune
d’elles implique virtuellement les deux autres.
John MUTH, « Anticipations rationnelles et théorie des mouvements de prix », Econometrica, 1961.
Traduction Gilbert ABRAHAM-FROIS & Françoise LARBRE,
La macroéconomie après Lucas, Economica, 1998, pp.48-49