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Module 2
Economie et sociologie du développement
Les inégalités de développement (partie 1)
Objectifs
La convergence ou la divergence des évolutions des économies conduit à s’interroger sur les inégalités de
développement et sur leurs origines. Après avoir décrit les formes prises par ces inégalités dans le monde
contemporain, il conviendra de s’interroger sur la pérennisation et la soutenabilité du développement dans un
monde aux ressources finies. Dans ce cadre, comme dans celui du développement en général, on mobilisera les
travaux économiques et sociologiques sur le rôle des institutions, notamment le marché et l’Etat.
2.3.1 Les inégalités de développement
2.3.2 Stratégies et soutenabilité du développement
2.3.3 Economie et sociologie des institutions et du développement
Commentaires
On étudiera les inégalités de développement en montrant qu’elles sont évaluées à l’aune d’un modèle, celui des
pays capitalistes avancés, et à travers de nombreux indicateurs. On montrera que leur appréhension n’est pas
exemple de références axiologiques et qu’elle est dépendante des instruments de mesure. On montrera que ces
inégalités existent entre les pays et au sein des pays.
On étudiera la notion de développement en s’interrogeant sur les stratégies qu’il est possible de mettre en œuvre.
On montrera que, face aux échecs de certaines stratégies et face à certaines tentatives d’imposition d’un modèle
unique, l’éclatement du tiers-monde pose la question de l’homogénéité du développement et renouvelle
l’économie du développement.
On étudiera la manière dont des contraintes nouvelles en termes d’écologie et de soutenabilité pèsent de plus en
plus sur le développement de l’ensemble du monde. On réfléchira aux conditions d’un développement durable,
cette soutenabilité du développement nécessitant des stratégies de coopération à l’échelle régionale et mondiale.
On étudiera enfin le rôle des marchés et d’autres institutions, comme l’Etat, dans l’émergence du
développement. On montrera que marché et Etat sont des constructions sociales qui ont eu, et ont encore, un rôle
dans le développement des pays, mais qui ne peuvent être déconnectées de leurs conditions sociales
d’émergence.
1. Qu’est-ce que le développement ?
1.1 Développement et sous-développement
Document 1
Le mot « développement » en est venu à incarner le modèle de croissance économique dont les pays occidentaux
ont été les pionniers, depuis la révolution scientifique du XVIIme siècle et à plus forte raison depuis la
révolution industrielle du XVIIIième siècle. La notion de développement a une source biologique (évolution
caractérisée par une croissance, extension, augmentation) au sens où l’embryon débouche sur l’animal ou
l’homme comme la chrysalide sur le papillon, et cette source a elle-même irrigué les interprétations et
dérivations historiques de l’évolution humaine (technique, économiques, philosophiques) jusqu’à passer pour la
clé de l’évolution des cultures et des civilisations : la marche irrépressible vers le mieux.
Comme l’a montré Jean-Jacques Salomon dans sa critique de l’impérialisme du progrès, « il s’agit toujours d’un
trajet et même d’une trajectoire qui doit mener d’un état de moins à un état de plus : la notion de développement
est à ce point rattachée à toute l’histoire de l’Occident qu’il est difficile, voire impossible, de la dissocier de la
notion de progrès. La notion de développement apparaît plus neutre que celle de progrès, elle est tout autant
messianique au sens l’on sort des limbes vers la civilisation, ou encore où l’on tourne le dos aux primitifs et
aux sauvages pour accéder aux sociétés règnent le droit, la raison ainsi que les vertus de la démocratie.
C’est pourtant ainsi que la notion de progrès a pollué la notion du développement : l’impérialisme de la notion
a imposé sa marque (…) », et elle a pollué, science aidant, en particulier celle des statistiques, en la présentant
comme une réalité mesurable et mesurée : le développement, long chemin qui mène de la tradition à la
modernité, des origines de l’humanité à toutes les étapes ultérieures de son évolution, se mesure en fait la
croissance du PIB, par quoi les organisations internationales et les instituts nationaux quantifient la manière dont
les uns progressent et les autres stagnent ou régressent. De ce point de vue, nous sommes tout à fait fondés à
dénoncer la logique économico-technique qui imprègne de part en part la notion de développement. On le voit
bien dans la distinction entre pays développés et pays sous-développés : comme chacun sait, cette formule a eu si
mauvaise presse qu’on parle plutôt aujourd’hui de pays en voie de développement, ce qui montre bien que, dans
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le trajet qui mène au « niveau » où nous en sommes arrivés, nous autres les pays industrialisés et donc
développés, ils sont, eux engagés sur un chemin ou une pente qui n’est qu’un ou deux premiers pas vers « le
développement ». (…) Désormais, cependant, l’enjeu véritable n’est pas tant de « dépasser » le développement
que de prendre acte de tout ce qui le rend précisément durable ni soutenable sous peine de catastrophe collective.
Et cette prise conscience commence bien entendu par une réflexion critique sur l’impérialisme de la notion de
progrès en termes vulgairement scientifique, en particulier sur les limites des comparaisons que fonde la mesure
du PIB.
Source : Jean-Paul Deléage in « Croissance, emploi et développement. Vol.I », La découverte, 2007, p.107
Document 2
La crise des années 1930, puis le contexte économique et politique de l’après-guerre, ont engendré des réflexions
sur la capacité de tous les pays du monde à atteindre les niveaux de vie occidentaux, qui ont débouché sur la
constitution d’une économie du développement. Cette dernière notion se différencie de celle de croissance : elle
désigne un processus plus qualitatif qui implique des transformations à la fois économiques, sociales et
politiques. Pour François Perroux l’un des économistes français les plus influents de l’après-guerre, tandis que la
croissance est « l’augmentation soutenue, pendant une ou plusieurs périodes longues d’un indicateur de
dimension, le développement est la combinaison des changements mentaux et sociaux qui rendent la notion apte
à faire croître, cumulativement et durablement, son produit global réel » (Perroux, 1961). Dès 1949, Harry
Truman distingue les pays « développés » des pays « sous-développés ». Sous l’impulsion des Etats-Unis, des
programmes d’aide au développement sont élaborés, afin qu’à long terme, les pays pauvres puissent « rattraper »
les pays riches. Il s’agit de mettre en place dans les pays du Sud, avec l’aide du Nord, des infrastructures
productives « modernes », à savoir des pôles industriels. (…) Tout au long des trente glorieuses, le
développement est essentiellement pensé dans les pays occidentaux comme un processus linéaire et déterministe,
dans lequel ces derniers bénéficieraient d’une longueur d’avance. Telle est la vision très controversée par la
suite se dégageant des travaux de W.W.Rostow (1963) qui décrivent le veloppement comme un
enchaînement de cinq étapes et analysent la pauvreté de certains pays comme un « retard ». (…) s la fin des
années 1960, le programme de travail des économistes va être confronté au maintien des écarts de
développement, à la crise de l’environnement, et à l’émergence de nouvelles valeurs et préoccupations (les
valeurs « post-industrielles »). Dans le monde des idées, on peut déceler à la fin des années 1960 un
basculement, se traduisant en l’occurrence par une critique de la croissance économique et du développement qui
apparaissent comme des vecteurs de domination de l’Occident sur le tiers-monde. (…) Hors du champ de la
science économique, des critiques émanent de la philosophie et de la sociologie, avec l’analyse des ressorts de la
société de consommation. La science économique va également être en butte aux résultats d’autres sciences
sociales, en particulier de l’anthropologie, qui étudie les sociétés non occidentales. Marshall Sahlins (1972) a
montré que, l’où on voyait grossièrement, depuis l’Occident, malnutrition et pauvreté, il existait en fait des
« sociétés d’abondance ». La redistribution l’emporte comme principe d’organisation sociale sur l’accumulation,
ce qui procure une croissance économique faible ou nulle au sens des économistes, mais crée néanmoins du
bien-être. Dans le même temps, les préoccupations environnementales deviennent l’objet des mobilisations
politiques.
Source : Christophe Demazière in « Développement et environnement », Cahiers Français n°337, 2007, p. 5-8
Questions sur les documents 1 et 2 :
1) qu’est-ce que l’ethnocentrisme ?
2) que cherche à décrire la notion de développement chez F.Perroux ?
3) pourquoi associer développement et progrès ?
4) quelle est la particularité des pays sous-développés par rapport aux pays développés ?
5) quelle critique peut-on faire à la notion de développement ?
Document 3 : les caractéristiques du sous-développement
Même si on a pu assister à une divergence forte entre PED au cours des quarante dernières années, certains
caractéristiques sont propres au sous-développement. Ces pays sont en premier lieu composés de populations
pauvres. (…) même si la pauvreté est une caractéristique importante du sous-développement, les inégalités sont
également fortes dans ces pays. Une partie des ressources a souvent été accaparée par une élite au détriment de la
majorité de la population. c’est le cas de la propriété terrienne dans un pays émergent comme le Brésil les
latifundia (propriétés de 1000 hectares et plus) représentent plus de 40% des surfaces cultivées pour moins de
1% des exploitations agricoles. (…) Par ailleurs, les PED présentent une structure dualiste de leur économie
opposant un secteur traditionnel et un secteur moderne. La tradition, en particulier dans le monde rural, conduit à
une activité économique « encastrée » au sens il s’agit d’une économie de subsistance ne visant pas
l’accumulation du capital et qui reste organisée de manière artisanale. Inversement, le secteur moderne s’inscrit
dans une dynamique d’accumulation capitaliste. Et si ces deux secteurs coexistent, leur rencontre a pu donner
naissance à un secteur informel important. Celui-ci correspond aux activités économiques peu capitalistiques,
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généralement urbaines, qui ne sont pas déclarées. C’est le cas des vendeurs de brochettes ou des cireurs de
chaussure (…). Selon une étude de l’OCDE, 60% de l’emploi était informel dans les PVD en 2009, et 75% en
afrique subsaharienne. Enfin le sous veloppement a souvent été associé à une mographique galopante. Il
semble cependant que la transition démographique ait débuté dan un grand nombre de PVD, et qu’elle soit
terminée dans certains d’entre eux, en premier lieu la Chine.
Source : Manuel « Economie, sociologie et histoire du monde contemporain », A.Colin
Questions :
1) en quoi les PVD se distinguent-ils des Pays développés ?
2) quelles devraient être les conséquences du développement de ces pays ?
1.2 De la notion de développement à celle de développement durable
Document 4 : les piliers du développement durable
Tout d’abord, comment définit-on plus précisément la soutenabilité et le développement durable ? La notion
n’est pas nouvelle. Dès les années 1970, dans un contexte qui était déjà un contexte de critique du PIB, Nordhaus
et Tobin avaient propola construction d’un produit intérieur net corrigé visant à mesurer le niveau maximum
de bien-être pouvant être indéfiniment reproduit d’une année sur l’autre par l’économie américaine. La définition
proposée en 1987 par le rapport Brundtland fait écho à cette tentative. (…) Le développement durable est celui
qui répond aux besoins du présent sans compromettre celui des générations futures à satisfaire les leurs. Chaque
terme de la définition est important. Il s’agit d’une notion dynamique. Elle compare implicitement un niveau de
bien être courant et des niveaux de bien-être futur. Elle ne se limite pas a priori aux aspects environnementaux :
la durabilité du développement suppose évidemment la préservation de l’environnement, mais également de
l’ensemble des facteurs de production ou des institutions nécessaires à assurer les besoins des générations
futures. C’est l’approche dite des trois piliers, mettant en parallèle les dimensions économique, sociale et
environnementale du développement. L’initiative de Nordhaus et Tobin, et le rapport Brundtland sont les deux
principales racines à partir desquelles se sont développées les nombreuses tentatives de quantification de la
durabilité du développement.
Source : Didier Blanchet in revue Regards croisés sur l’économie, « Les économistes peuvent-ils sauver la
planète ? », La découverte, p. 88
Questions :
1) quelle est la définition du développement durable ?
2) quels sont les trois piliers du développement ?
1.3 Comment mesurer le développement ?
1.3.1 Les limites de l’utilisation du PIB
Document 5 : la mesure du bien-être
Le fait que dans certains pays (tels que les États- Unis) le PIB soit revenu au niveau d'avant la crise ne rend
compte en aucune manière de la perte de bien-être qui a résulté de celle-ci. Avec près d'un Américain sur six
exclu de l’emploi à temps plein le reste étant confronté à l’angoisse de perdre sa maison ou son salaire et les
coupes sombres annoncées dans les dépenses publiques et sociales de base, la perte de bien-être est en réalité
considérable. La situation en Espagne est encore pire, avec un taux de chômage supérieur à 20 % en moyenne et
presque un jeune sur deux prid’emploi. Les événements tragiques survenus au Japon cette année peuvent être
considérés comme une métaphore de nos problèmes de mesure. Certains suggèrent que, bien que dans le court
terme le PIB japonais décline, dans le long terme, il se relèvera suite aux efforts de reconstruction du pays. La
catastrophe nucléaire a non seulement angoissé la population, mais elle pourrait bien avoir des effets significatifs
sur la santé d’un grand nombre de Japonais. aussi, les dépenses nécessaires pour répondre à cette menace
pour- raient augmenter le PIB, peut-être même assez pour sortir le Japon de sa lancinante langueur économique.
Mais nul ne prétendra que le Japon est en meilleur état après la catastrophe de Fukushima. Il faudrait une énorme
augmentation du PIB pour compenser la destruction de capital, de tous les types d'actifs, que l'événement a
causée, et pour atténuer l’angoisse face à l’avenir que tant de Japonais ressentent. Or nous ne sommes pas bien
équipés nos indicateurs ne sont pas correctement adaptés pour mesurer la valeur des actifs perdus ou détruits.
Source : Jean-Paul Fitoussi et Joseph E. Stiglitz, Revue de l’OFCE / Débats et politiques 120 (2011), p. 312-
313
Question :
1) pourquoi l’évolution du PIB ne permet-elle pas de rendre compte de l’évolution du bien être d’une
société ?
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1.3.2 Quels indicateurs pour le développement ? Du PIB à l’IDH (et ses variantes)
Document 6 : le revenu moyen par habitant de la Banque mondiale
La Banque Mondiale classe les pays en fonction du revenu moyen par habitant (rapport Revenu national
brut/population). Le revenu national brut correspond à la somme entre le PIB et le solde des flux de revenus
primaires avec le reste du monde. Ce choix méthodologique récent est important, en particulier pour les pays en
développement qui peuvent recevoir des ressources de leurs citoyens expatriés et voir des revenus quitter le
territoire. Ainsi pour la Banque Mondiale, 70 économies ont un revenu élevé, mais on trouve dans ce groupe des
pays qui pour certains sont considérés en développement ou émergents. Généralement, les économies à faible
revenu et à revenu intermédiaire sont qualifiées d’économies en développement. Cependant, si on considère le
revenu par tête de l’ensemble des pays pour chaque tranche, les écarts restent très élevés : 510$ pour les
économies à revenus faibles, 3 764$ pour les économies à revenu intermédiaires et 38 658 $ pour les économies
à revenu élevé.
Classification
Revenu national brut annule par
habitant (RNB/H) en $
Nombre de pays
Economies à faible revenu
RNB/h < 1025$
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ex : Madagascar
Economies à revenu intermédiaire
de la tranche inférieure
1026$ < RNB/h < 4 035$
54
ex : Inde
Economies à revenu intermédiaire
de la transche supérieure
4036$ < RNB/h < 12 475$
54
ex : Chine
Economies à revenu élevé
RNB/h < 12 476 $
70
ex : Arabie Saoudite
Question :
1) quel est le critère de classement de la banque mondiale ?
Source : Manuel « Economie, sociologie et histoire du monde contemporain », A.Colin
Document 7 : la pauvreté
http://ceriscope.sciences-po.fr/pauvrete/content/part1/quelles-mesures-pour-quantifier-la-pauvrete?page=show
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Document 8: l’IDH du PNUD
L’indicateur de développement humain est un indicateur synthétique développé par la Programme des Nations-
Unies pour le Développement (le PNUD).
Questions :
1) quel économiste est à l’origine de l’élaboration de l’IDH ?
2) quels sont les éléments pris en compte dans la mesure de l’IDH ?
3) en quoi cet indicateur se distingue-t-il du RNB/Habitant ?
4) pourquoi rajouter le qualificatif « d’humain » à cet indicateur ?
Document 9: du PIB à l’IDH
Question :
1) quelles différences apparaissent lorsque l’on compare la France et les Etats-Unis avec le PIB ou avec
l’IDH ?
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