Texte du collège des enseignants d’Endocrinologie-Nutrition-Métabolisme, légèrement modifié
(O Chabre) et illustré (S.Ribotta)
Pré-requis :
L'unité fonctionnelle de la thyroïde est la vésicule thyroïdienne. Dans le tissu conjonctif on
retrouve d'autres cellules les cellules C d'origine neuro endocrine synthétisant la calcitonine.
La cellule thyroïdienne est polarisée, elle exprime sur la membrane basale le récepteur de la TSH,
le symporteur de l'iodure et sur sa membrane apicale au contact de la colloïde la thyroperoxydase
et le système régénérateur d'H2O2..
La biosynthèse des hormones thyroïdiennes requiert des apports réguliers en iode, les besoins
sont évalués à 150 µg/j, ils sont plus importants chez la femme enceinte.
La croissance de la thyroïde est sous la dépendance de la TSH et d'autres facteurs de croissance.
La disponibilité en iodure interagit avec la sensibilià la TSH, en carence iodée les cellules
thyroïdiennes sont plus sensibles à la TSH et la croissance de la thyroïde est favorisée.
GOITRE
1. LE GOITRE :
1.1. Définition :
Goitre : Le goitre est une augmentation du volume de l'ensemble de thyroïde. Il est en
rapport avec une augmentation du capital folliculaire, du nombre ou de la taille des
vésicules. Il peut faire partie d’une pathologie thyroïdienne (Basedow, Hashimoto,
goitre multinodulaire toxique, goitre lié à un trouble de l’hormonogénèse, voire
cancer occupant toute la glande). On appelle goitre « simple » un goitre qui ne fait
pas partie des pathologies citées plus haut.
Le goitre simple est largement favorisé par une carence iodée, même modeste.
L’évolution naturelle du goitre simple est d’augmenter de volume et de devenir
« multinodulaire ».
Quelle est la taille normale de la thyroïde ?
Elle dépend de l'âge, de la taille, des apports iodés. La définition OMS est que la taille palpée des
lobes est > à la 1ère phalange du pouce du patient Pour un adulte en France, on parlera de goitre
pour un volume thyroïdien mesuré en échographie > 18 ml chez la femme, > 20 ml chez
l'homme. Pour chaque lobe le volume V en cm3 = ml peut être estimé à partir de la hauteur (h),
largeur (l) épaisseur (e) selon la formule : V=hxlxe/2. Les dimensions normales « maximales »
d’un lobe chez l’adulte sont (environ) h=5cm, l=2cm, e=2cm
1.2. Le diagnostic de goitre :
clinique : suffit pour affirmer le diagnostic si le goitre est franc et la thyroïde bien
palpable (se rappeler les repères anatomiques voir figure 1).. L’examen clinique est
difficile lorsque le cou est adipeux, et impossible lorsque le larynx est trop bas, ce qui est
fréquent chez les personnes âgées : le cricoïde arrive à peine au-dessus du manubrium
sternal : la thyroïde est en position endothoracique et on ne peut en sentir que les pôles
supérieurs.
l'échographie permet un calcul précis du volume thyroïdien et donc affirme le diagnostic.
Elle est précieuse lorsque la palpation est difficile, mais elle ne permet pas de bien
mesurer les goitres endothoraciques : si les pôles inférieurs ne sont pas perçus à l’examen
clinique il est impératif de demander une radiographie pulmonaire de face, où on
recherchera une opacité médiastinale et une compression ou déviation de la trachée
Tableau 1 : PRINCIPALES ORIENTATIONS DIAGNOSTIQUES A L'EXAMEN CLINIQUE
EXAMEN CLINIQUE
CONTEXTE
STATUT
CLINIQUE
ORIENTATION
Goitre homogène
Goitre (Multi)nodulaire
Goitre diffus ferme, vasculaire
Goitre diffus ferme, bosselé
Goitre nodulaire dur ou évolutif
Goitre ferme et sensible
Goitre diffus
Familial, puberté, grossesse
(femme+++)
Carence iodée endémique
Familial, prédominance
féminine+++
Auto-immunité, exophtalmie
Auto-immunité
Compressions, adénopathie
Infectieux, transitoire, récent
Congénital
EU
EU/
Hypo
EU
Hyper
Hyper/EU
Hypo/EU
EU
Hyper
Hypo
Goitre « simple »au début de son
évolution
Goitre endémique
(hypothyroidie que si carence
iodée très sevère)
Goitre « simple » devenu
multinodulaire
Maladie de Basedow
Maladie de Hashimoto
Evoquer un cancer
Thyroïdite subaiguë (strumite)
Trouble de l'hormonogénèse
EU : Euthyroïdie ; Hypo : hypothyroïdie ; Hyper : Hyperthyroïdie
Figure 2 : Goitre modéré
Noter que l’isthme de la thyroïde doit être
recherché juste au dessous du cartilage cricoïde
Os Hyoïde
Cartilage
thyroïde
Trachée
Aorte
Thyroïde
(goitre)
Insertion du
muscle sterno-
cleido-mastoïdien
Figure 1 : Anatomie de la glande thyroïde
2. LES GOITRES SIMPLES :
2.1. Physiopathologie :
2.1.1. Facteurs nutritionnels :
Par définition le goitre simple est un goitre non associé à une pathologie thyroïdienne connue, et
sans complication (mais l’évolution naturelle du goitre simple est souvent de se compliquer).
La carence iodée est à l'origine des goitres simples, pathologie rencontrée à l'état endémique
dans de larges zones du globe (plus d'1,5 milliards d'individus touchés), demeurant sporadique
inférieur à 10 % de la population en France.
Le développement du goitre répond à un mécanisme adaptatif thyroïdien à type d'hyperplasie
assurant la persistance d'une synthèse hormonale de T4 et T3 malgré des apports nutritionnels en
iode insuffisants (apports conseillés > 150 µg/j). Cette adaptation se fait sans élévation du taux
circulant de TSH, par une augmentation de la sensibilité des cellules thyroïdiennes à l'hormone,
induite par le déficit en iode lui même.
2.1.2. Facteurs génétiques :
Cette pathologie se concentre souvent dans quelques familles. Importance des antécédents
familiaux à préciser dans les observations.
2.1.3. Facteurs hormonaux :
Les femmes sont les plus concernées : 6 femmes pour un homme.
Rôle des œstrogènes ?
et surtout rôle des grossesses : il existe une augmentation de volume de la thyroïde de 10 à 20
% durant toute grossesse, augmentation plus importante en cas de carence iodée. Beaucoup de
goitres ne régressent pas après l'accouchement.
2.1.4. Le tabac est un facteur favorisant
2.2. Histoire naturelle du goitre simple :
Le goitre se révèle vers l'adolescence ( 6 à 7 % ).
Il s'agit alors d'un goitre diffus avec hyperplasie homogène susceptible de régresser, de rester
stable ou de se compliquer selon les facteurs favorisants (génétique, grossesse, environnement).
Lorsque le goitre se complique, cela survient à long terme, très progressivement. La question du
traitement ne sera souvent soulevée tort, car il faudrait prendre en charge les patients plus tôt
en surveillant convenablement l'évolution des goitres) que chez des patients âgés, présentant des
pathologies associées, qui rendent plus difficiles la prise en charge.
2.3. Le goitre multi-nodulaire:
Le goitre, au début homogène, va au bout de quelques
années être le siège de tumeurs (adénomes , rarement
cancers) ou de pseudotumeurs (zones de remaniement
définissant des nodules limités par des zones de fibrose).
Cliniquement le goitre devient multi-nodulaire (voir
diapos 2), les lésions sont irréversibles.
3. LES COMPLICATIONS :
3.1. Le goitre multi-nodulaire toxique :
Quand les nodules néoformés sont fonctionnels (nodules chauds captant l'iode) et autonomes vis
à vis de la TSH (synthèse de T4 ou T3 indépendante de la TSH circulante), leur activité
s'additionne au fur et à mesure des années, pour faire virer le goitre vers l'hyperthyroïdie (goitre
multi-nodulaire toxique). La prise exogène d'iode est un facteur qui favorise ce passage à la
toxicité. Ces excès d’iode ne sont pas alimentaires mais iatrogènes (amiodarone,produits de
contraste iodés, antiseptique iodés, cf cours Hyperthyroidie)
3.2. Le goitre compressif :
L'augmentation du volume du goitre et l'acquisition de nodules peut entraîner des signes de
compression locale d'autant plus dangereux que le développement se fera en intra thoracique
(goitres plongeants (voir diapos 3)) avec possibilité de syndrome asphyxique par compression
trachéale.
Les signes de compression sont : la dyspnée inspiratoire par compression trachéale, plus rarement
la dysphonie par compression du nerf récurrent, la dysphagie par compression œsophagienne, le
développement d'un syndrome cave supérieur par compression veineuse profonde. Il faut
souligner que les signes cliniques ne surviennent que très tardivement, en général sur des goitres
anciens mais négligés ou oubliés (classique « guérison » spontanée d’un goitre cervical qui est en
fait entièrement descendu dans le médiastin..). Cette évolution souligne la nécessité de faire une
radiographie thoracique dès que l’on a une suspicion de goitre endothoracique (poles inférieurs
de la thyroide non palpables)
Figure 3 : Pièce d’exérèse
chirurgicale d’un goitre
multinodulaire. Noter le caractère
hétérogène (fibrose, nécrose)
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