Propositions didactiques pour le travail sur la temporalité

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Proposition de communication Colloque Chronos, section didactique
Genève, sept. 2004
Propositions didactiques pour le travail sur la temporalité
dans des récits fictionnels courts
À l’école primaire comme secondaire, on doit enseigner à lire et à écrire divers genres
fictionnels courts comme la fable, le mythe, le récit bref, la nouvelle littéraire. Un des ressorts
de la littérarité de ces genres relève du travail esthétique sur le temps, en particulier des choix
dans la perspective temporelle de la narration (perspective neutre, rétrospective, prospective)
et dans l’organisation du relief temporel : premier plan et arrière-plan (Weinrich, 1973, 1989;
Combettes, 1992). La temporalité s’exprime principalement à travers le système verbal, bien
que ce dernier n’en soit pas la seule réalisation, le lexique jouant également un rôle important.
Depuis longtemps (David et Dolz, 1992), on déplore le manque d’outils didactiques
pour l’enseignement-apprentissage de l’expression de la temporalité, élément essentiel pour la
compréhension/interprétation des textes littéraires et pour la production de genres narratifs à
l’école. Quelques propositions didactiques intéressantes ont été faites, mentionnons,
notamment, les manuels de français pour le collège de Combettes, Fresson et Tomassone
1977-1980; les travaux de Combettes et Fresson, 1975; Adam, 1976; Dolz, 1990; Pratiques,
1998. La construction d’un modèle didactique pour traiter de l’expression du temps dans les
genres narratifs reste à poursuivre.
Pourtant, cette question a été étudiée par maints chercheurs dans de nombreuses
disciplines, de la psychomécanique de G. Guillaume et ses applications pédagogiques
(Glatigny, 1980; Lesage, 1980; Paquet, 1997) à la stylistique de Charles Bally, la sémiotique
narrative (G. Genette), l’analyse des discours (D. Maingueneau, J.-P. Bronckart) et la
linguistique textuelle (J.-M. Adam) en passant par la linguistique de l’énonciation (É.
Benveniste), pour ne mentionner que les plus souvent cités, évoqués ou convoqués dans les
écrits en didactique du français, langue première.
En rupture avec l’applicationisme, les didacticiens considèrent que les savoirs savants
doivent faire l’objet d’une transposition didactique afin de devenir des outils pour
l’enseignementapprentissage (Chevallard, 1985/1991; Schneuwly, 1995; Canelas-Trevisi,
1997). Sur le plan didactique, le travail sur la temporalité met en jeu divers éléments, tant
strictement linguistiques (temps verbaux, marqueurs, lexèmes) que textuels (perspective de
narration, opposition des plans, organisation thématique).
Dans cette étude, nous nous proposons de sélectionner quelques éléments des théories
mentionnées compte tenu de leur pertinence didactique en considérant, entre autres, la
possibilité pour les élèves de les réinvestir dans leurs pratiques langagières (Bronckart et
Plazaola-Giger, 1998). Adoptant une perspective ascendante, nous en ferons la transposition
en vue de produire des outils didactiques pour travailler la compréhension/interprétation de
genres littéraires courts (en prenant appui sur une nouvelle littéraire) et la réécriture d’un texte
narratif d’élève du secondaire. La communication consistera à présenter le traitement
didactique de la temporalité dans des textes narratifs fictionnels étudiés ou produits au
secondaire. L’étude portera notamment sur les aspects qui suivent :
1) L’identification de la perspective temporelle de narration à l’aide des marqueurs de
temporalité. Certains marqueurs (cf. maintenant, désormais, etc.) indiquent clairement la
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perspective temporelle adoptée par le narrateur. Sémantiquement, ils portent sur toute la
phrase et s’opposent à d’autres marqueurs temporels dont la portée est limitée au prédicat.
La différence de comportement syntaxique entre ces marqueurs permet de les distinguer et
d’apprécier leur apport sémantique à la phrase et au texte.
2) L’opposition entre premier plan et arrière-plan. Le premier plan se caractérise par la
présentation chronologique des événements; l’arrière-plan, plus hétérogène, plante en
quelque sorte le décor et introduit des référents hors de cette chronologie. Le travail
didactique inclut l’étude de passages l’opposition entre les deux plans s’avère
particulièrement claire grâce à l’utilisation des temps verbaux (passé simple ou passé
composé, d’une part, et imparfait, d’autre part).
3) Les effets du choix des temps verbaux sur le relief temporel. Le temps verbal choisi a
un effet sur l’appartenance d’un événement au premier ou à l’arrière-plan et, partant, à sa
prise en compte dans la chronologie des événements présentés. Il est possible de faire
expérimenter aux élèves les effets du choix des temps verbaux par un travail de
substitution dans un extrait de texte.
4) L’identification du temps des verbes dans les phrases passives. Les verbes de phrases
passives semblent employés à un temps composé qui les ferait relever du second plan,
alors qu’au plan sémantique l’effet obtenu est celui du temps simple correspondant. Cet
effet est à la thématisation de l’objet du verbe : l’interprétation des phrases passives
implique à la fois les plans du texte, l’emploi des temps verbaux et l’opposition
thème/rhème.
Références bibliographiques
Adam, J.-M. (1976). « Langue et texte : imparfait/passé simple », Pratiques, no 10, 49-68.
Bronckart, J.-P. et Plazaola Giger, I. (1998). «La transposition didactique. Histoire et
perspectives d’une problématique fondatrice ». Pratiques no 97-98, 35-58.
Canelas-Trevisi, S. (1997). La transposition didactique dans les documents pédagogiques et
dans les interactions en classe. Thèse de doctorat, Université de Genève, F.P.S.É.
Chevallard, Y. (1985/1991). La transposition didactique. Du savoir savant au savoir
enseigné. Grenoble : La pensée sauvage.
Combettes, B. (1992). L’organisation du texte, Metz : CASUM.
Combettes, B., Fresson, J. et Tomassone, R. (1979-1980). De la phrase au texte 4e; De la
phrase au texte 5e , Paris : Delagrave.
Combettes, B. et Fresson, J. (1975). «Quelques éléments pour une linguistique textuelle ».
Pratiques, no 6, 25-35.
David, J. et Dolz, J. (1992).« Les différentes entrées possibles en formation sur la catégorie
verbale et la gestion des temps », Études de linguistique appliquée, no 87, 91-105.
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Dolz, J. (1990). Catégorie verbale et action langagière. Le fonctionnement des temps du
verbe dans les textes écrits des enfants catalans, Thèse de doctorat, Université de
Genève, F.P.S.É.
Glatigny, M. (1980). «Psychomécanique et enseignement des temps verbaux en français ». In
Langage et psychomécanique du langage. Études dédiées à Roch Valin. A. Joly et
W.H. Hirtle (éd.). Lille, Québec : Presses universitaires de Lille, Presses de
l’Université Laval, 445-456.
Lesage, R. (1980). «La chronogénèse peut-elle servir à l’enseignement ?». In Langage et
psychomécanique du langage. Études dédiées à Roch Valin. A. Joly et W.H. Hirtle
(éd.). Lille, Québec : Presses universitaires de Lille, Presses de l’Université Laval,
457-464.
Paquet, R. (1997). «Psychomécanique du langage et enseignement du français au secondaire :
le système verbal ». Mémoire de maitrise, Québec, Université Laval.
Pratiques (1998). no 100, «Les temps verbaux ».
Schneuwly, B. (1995). « De l’utilité de la ‘‘transposition didactique’’ ». In Didactique du
français. État d’une discipline. J.-L. Chiss, J. David, Y. Reuter (éd.). Paris :
Nathan.
Weinrich, H. (1973). Le temps. Le récit et le commentaire. Paris : Seuil.
Weinrich, H. (1989). Grammaire textuelle du français, Paris: Didier/Hatier.
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