
l’utilisation), le modèle construction intégration de Kintsch (1998) ou encore d'autres
modèles, la particularité du processus d'écoute est de se dérouler de manière instantanée et de
mettre à l'épreuve la capacité limitée de la mémoire de travail (Rost, 1994; Graesser et
Britton, 1996). Lors de l'utilisation de la langue maternelle, la reconnaissance et le décodage
sont automatisés, tandis que les apprenants de la L2 travaillent sous la contrainte d'une
mémoire de travail surchargée (Goh, 2000). Pour tenter de comprendre un discours en L2, les
apprenants utilisent des mécanismes mentaux que les chercheurs appellent « stratégies »
(Goh, 2000), empruntant le terme à la psychologie cognitive. Dans ce domaine, le terme de «
stratégie » fait référence aux étapes mentales ou aux opérations mises en œuvre pour
accomplir des tâches cognitives, comme lire un plan, mémoriser, traiter l'information et
résoudre un problème (Flavell et al., 1993).
Dans le domaine de la compréhension de l'oral, les psychologues de la cognition et les
linguistes s'accordent donc sur le concept de « stratégie d'écoute ». Si ce concept est central
dans les théories d'apprentissage et d'enseignement de la compréhension de l'oral, c'est parce
que les stratégies semblent susceptibles de compenser des lacunes lexicales ou de décodage et
présentent de ce fait un intérêt pédagogique non négligeable. L’identification des stratégies
qui contribuent à optimiser les processus et les procédés de compréhension et à en améliorer
ainsi le résultat permettrait ensuite de les enseigner aux apprenants qui ne s’en servent pas
encore.
Un autre élément qui peut contribuer à la définition des stratégies, c'est le degré de conscience
de leur utilisateur. Schiffrin et Schneider (1977), (Schneider et al., 1984), mais aussi Rost
(1990) ou encore Chamot (2005) font de la conscience une des caractéristiques clés du
comportement stratégique. Pour eux, les processus automatiques sont des processus acquis
qui ne sont pas coûteux lors du traitement de l'information. Les processus contrôlés, en
revanche, sont conscients, ils demandent de l'attention et peuvent être utilisés de manière
flexible lorsque les circonstances changent. Les processus de compréhension qui peuvent être
automatisés sont la reconnaissance des mots et l'analyse syntaxique. Lorsque ces processus de
bas niveau sont automatiques, le sujet dispose de davantage de ressources pour des processus
de haut niveau comme par exemple les inférences. Parallèlement, lorsque des difficultés de
perception ou de reconnaissance syntaxique subsistent, les ressources disponibles pour les
processus de haut niveau sont moins nombreuses. Les apprenants en L2 rencontrent très
souvent ce problème lors des tâches d'écoute et de compréhension orale.
Une autre caractéristique du concept de stratégie est son utilisation dans un but précis. Selon
Graesser et al. (1994) trois buts peuvent susciter une activité stratégique. Goh (2002) les
reprend et les applique à la compréhension de l'oral en L2 : l'auditeur utiliserait des stratégies
pour atteindre le but qu'il poursuit en écoutant un discours particulier a) pour établir la
cohérence locale ou globale d'un texte qu'il souhaite comprendre, b) pour expliquer des
actions, des événements ou des phénomènes du discours entendu. Ce besoin d'explication
inclut celui d'établir des liens de cause à effet, d'élucider les anaphores, d'éclaircir le thème et
les rôles des différents acteurs dont il est question dans le discours. Pour Rost (1990 : 7) la
poursuite d'un but est un élément caractéristique d'un comportement stratégique : « les gens