1. Après être parvenus à un consensus sur la doctrine de la justification, nous devons désormais
reprendre des sujets controversés, notamment l’ecclésiologie et les ministères ecclésiaux (cf.
UUS 66). Ainsi, les "Cinq réponses" publiées en juillet dernier par la Congrégation pour la
Doctrine de la Foi ont suscité perplexité et mauvaise humeur. L’agitation qu’a engendrée ce
document était pour le moins injustifiée, puisque le texte ne dit rien de nouveau mais
réaffirme de manière synthétique la doctrine catholique. Cependant, il serait bon de revoir la
forme, le langage et la présentation au public de ce genre de déclarations.
2. Les différences ecclésiologiques entraînent nécessairement des visions différentes de ce
qu’est l’œcuménisme. Ainsi, l’absence d’un concept commun d’unité ecclésiale rend
difficile l'objectif à atteindre. Ce problème est encore plus grave si l’on considère que, pour
nous catholiques, la communion ecclésiale est nécessaire à la communion eucharistique et
que l'impossibilité de communion eucharistique provoque de grosses difficultés pastorales,
surtout dans le cas de couples et de familles mixtes.
3. Pendant que nous nous efforçons de dépasser de vieilles controverses, de nouveaux
désaccords apparaissent au niveau éthique, notamment en matière de défense de la vie, de
mariage, de famille et de sexualité. Ces nouveaux fossés affaiblissent considérablement le
témoignage commun public, pour ne pas dire qu’ils le rendent impossible. La situation à
laquelle on est arrivé dans la Communion anglicane – ce n’est pas un cas isolé – est un
exemple type de la crise qui frappe les différentes communautés.
4. La théologie protestante, marquée dans les premières années du dialogue par la "renaissance
luthérienne" et par la théologie de la Parole de Dieu de Karl Barth, est désormais revenue aux
thèmes de la théologie libérale. Par conséquent, nous constatons que, du côté protestant, les
fondements christologiques et trinitaires qui étaient jusqu’à présent une base commune se
sont parfois transformés. Ce que nous considérions comme notre patrimoine commun a
commencé à fondre ici et là, comme les glaciers des Alpes.
Mais, en réaction à ces phénomènes, sont nées d'autres tendances. On constate dans le monde
entier une forte croissance des groupes évangéliques dont les positions coïncident souvent avec
les nôtres sur les questions dogmatiques fondamentales, en particulier dans le domaine éthique,
mais sont très divergentes en ce qui concerne l’ecclésiologie, la théologie des sacrements,
l’exégèse biblique et la compréhension de la tradition. Il y a des regroupements de High Church
qui souhaitent mettre en valeur dans l’anglicanisme et dans le luthérianisme des éléments de la
tradition catholique sur la liturgie et le ministère ecclésial. A cela s’ajoutent des communautés
monastiques de plus en plus nombreuses qui, vivant souvent selon la règle de saint Benoît, se
sentent proches de l’Église catholique. En outre, il existe des communautés piétistes qui, face
aux questions éthiques, se sentent assez mal à l’aise au sein des Communautés ecclésiales
protestantes et qui regardent avec bienveillance les prises de position claires du pape, qu’ils
avaient interpellé il n’y a pas si longtemps de manière beaucoup moins fraternelle.
Tous ces groupes forment des "réseaux spirituels" avec des communautés religieuses catholiques
ou les nouveaux courants spirituels, souvent regroupés autour de monastères tels que
Chevetogne, Bose et surtout Taizé ou dans des mouvements tels que les Focolari ou le Chemin
Neuf. Dès lors, nous pouvons dire que l’œcuménisme revient à ses origines en constituant de
petits groupes de dialogue, de prière, d’études bibliques. Récemment, ces groupes ont pris la
parole publiquement, par exemple lors des grands rassemblements des mouvements à Stuttgart,
en 2004 et en 2007. Ainsi émergent, à côté des dialogues officiels qui deviennent souvent plus
difficiles, de nouvelles formes de dialogue
.
Ce tour d’horizon nous montre donc qu’il n’y a pas seulement un rapprochement œcuménique,
mais aussi des scissions et des forces centrifuges au travail. Si nous prenons également en
compte les nombreuses "Églises" dites indépendantes qui continuent à naître en particulier en
Afrique et la prolifération de groupuscules souvent très agressifs, nous nous rendons compte que