Cléricalisme
et anticléricalisme
« Le cléricalisme ? Voilà l’ennemi ! » Léon Gambetta, Discours à la chambre des députés, 1877
ous le Second Empire,
l’armée et l’église sont privilé-
giées et assurent une indispen-
sable assise au pouvoir impérial.
L’église jouit, presque exclusive-
ment, de la liberté de diffuser
sa presse et sa littérature. Face
à l’activisme clérical et à son
refus du modernisme, l’anticlé-
ricalisme se fait de plus en plus
radical et athée.
Reconstruction des églises
Le gouvernement augmente le budget des cultes. L’ac-
croissement de la population et une certaine hausse du
niveau de vie des campagnes conduit à un mouvement
sans précédent de construction de nouvelles églises, ren-
du possible par les aides de l’État et la baisse des coûts de
construction grâce à la standardisation du néo-gothique.
En Haute-Garonne, on totalise 100 églises nouvelles et
100 autres remaniées. Dans le même temps, de nom-
breux presbytères sont édifiés.
Le développement des congrégations s’accélère. Grâce
à elles, l’encadrement clérical des populations et l’in-
fluence des jésuites se renforcent. Les pèlerinages
(à sainte Germaine de Pibrac, canonisée en 1867 ;
à Lourdes, où les apparitions de la Vierge à Bernadette
Soubirous ont lieu en 1858), les processions, les mis-
sions… envahissent l’espace public.
Au moment où l’unité italienne fait disparaître le pou-
voir temporel du pape, celui-ci n’a jamais été aussi puis-
sant sur le plan spirituel. Le Syllabus (1864) vient résu-
mer la doctrine de l’Église et son refus de la science et du
monde moderne ; le premier concile de Vatican (1870)
affirme l’infaillibilité pontificale.
L’anticléricalisme
Les libéraux, favorables à la monarchie constitution-
nelle, choqués par le coup d’État de Napoléon III, se
rallient peu à peu à l’idée d’une République modérée et
pensent, sous l’influence d’Edgar Quinet, que le catho-
licisme romain est l’ennemi de la liberté. Socialistes et
anarchistes sont des anticléricaux intransigeants ; pour
les radicaux, le concordat est incompatible avec la Répu-
blique. Les accointances du clergé avec les royalistes et
l’Empire désignent le cléricalisme comme l’ennemi. Dès
1869, par le manifeste de Belleville, rédigé à l’occasion
des élections législatives, Gambetta demande la suppres-
sion du budget des cultes, la séparation de l’Église et de
l’État, la liberté de la presse… Ce manifeste fait office de
programme pour les Républicains.
La Commune
Après la défaite de Napoléon III à Sedan (1870) et le dé-
saveu du gouvernement de Défense nationale, la Com-
mune de Paris se constitue le 18 mars 1871. L’éphémère
pouvoir révolutionnaire prolétarien vote la séparation de
l’Église et de l’État, la suppression du budget des cultes
et la nationalisation des biens des congrégations.
L’ordre moral
Au lendemain de la Commune se noue une coalition de
conservateurs et de monarchistes qui porte Mac-Mahon
au pouvoir. Le régime de l’ordre moral est en fait un re-
tour à la Restauration. C’est l’ultime poussée cléricale
en France au XIXe siècle. Son symbole en reste le Sacré-
Cœur de Montmartre, édifié pour expier la défaite et la
Commune.
La loi du 12 juillet 1875 permet la création de l’ensei-
gnement supérieur libre. Face aux universités napo-
léoniennes de tradition gallicane, des universités catho-
liques sont créées dès 1876 (Paris, Lille, Angers, Lyon).
À Toulouse, fondé grâce à une souscription publique,
l’Institut catholique est inauguré solennellement le
15 novembre 1877 dans l’ancien couvent des clarisses
du Salin, dit hôtel de la Fonderie.
Statue de Sainte Germaine
de Pibrac
L’église de L’Union (1864), typique des église néo-gothiques
construites sous le Second empire
Armand Duportal (1814-1887)
Laïcité et République : un parcours historique
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