- la différenciation du produit : les acheteurs sont habitués à une marque déterminée à laquelle ils sont fidèles, parce qu’ils sont
persuadés, à tort ou à raison, qu’elle leur procure un rapport qualité/prix meilleur que tout autre achat concurrent : ce qui, là
encore, requiert des investissements en publicité, en notoriété et en qualité très coûteux ;
- les désavantages de coûts indépendants de l’échelle de production : existence de brevets, réductions de coût dues à l’expérience,
conséquences de l’action publique (n’importe qui ne peut pas ouvrir une pharmacie ou s’installer comme taxi), du nombre limité
d’emplacements favorables (hypermarchés), etc.
Denis CLERC (1998), « Une concurrence ni pure ni parfaite », Alternatives Economiques n° 156, février.
Théorie des jeux : la coopération est-elle possible ? p 68 et 69 du manuel
Dans un contexte concurrentiel, une firme cherche à deviner ce que va faire le concurrent.
Il faut donc étudier la théorie des jeux, dont l’originalité est « d’analyser les actions prises par des décideurs
conscients que leurs actions ont des conséquences sur chacun d’entre eux. »
En effet, « Les comportements
ludiques sont révélateurs […] de la nature profonde des [joueurs]. L’information, les coalitions entre
acteurs, les attitudes coopératives, ou non, sont bien des éléments fondamentaux de la vie économique et
sociale. [La théorie des jeux permet] de dépasser la représentation simplifiée d’un homo œconomicus
agissant avec une information parfaite et dans un monde idéal où règne la concurrence pure. »
L’intérêt d’un jeu comme le dilemme du prisonnier est de comprendre que « la décision de l’un dépend de ce
qu’il pense de ce que va faire l’autre. »
Les résultats sont tout de même décevants : le jeu montre que la
stratégie dominante adoptée par des joueurs rationnels est une stratégie sous-optimale : en recherchant leur
intérêt individuel, ils provoquent une situation défavorable pour tous les deux qu’ils auraient évitée s’ils
avaient été altruistes. « Avec le dilemme du prisonnier, […] les économistes libéraux eux-mêmes […] vont
démontrer que le marché est inefficace. »
Les firmes ont donc intérêt à s’entendre : c’est l’équilibre
coopératif. Mais elles ne le font pas. Et lorsque la coopération n’est pas possible, elles doivent tenir compte
du comportement de la concurrence : c’est l’équilibre non coopératif.
LA THEORIE DES JEUX
En 1944 paraît Théorie des jeux et comportement économique, par John Von Neuman (1903-1957) et Oscar
Morgenstern (1902-1977), qui révolutionnent l’étude des jeux, domaine bien gardé jusque-là par les mathématiciens.
La théorie des jeux (ou théorie de la décision interactive), issue du développement des mathématiques appliquées à
l’économie, donc, est un instrument de recherche, une méthode d’analyse et d’interprétation des décisions et des
comportements des agents économiques engagés dans des situations interactives.
Une interaction signifie que la décision d’un joueur fait suite à celle d’un autre qu’elle va contrer ou conforter. Un
jeu, c’est l’étude d’une « partie » au cours de laquelle des joueurs vont se rencontrer dans un cadre doté de règles
définies. Leurs comportements sont donc soumis à des normes selon lesquelles ils doivent prendre des décisions
successives lors de leur confrontation. Chaque décision est sanctionnée par une issue du jeu (gain ou perte). L’objectif
de chacun est de maximiser ses gains et symétriquement de minimiser ses pertes. Schématiquement, la matrice des
gains comporte, en lignes, les décisions possibles pour un joueur A et, en colonnes, les décisions possibles pour un
joueur B. L’intersection d’une ligne et d’une colonne donne la somme positive ou négative du gain de A ou de la
perte de B. La décision, qu’il convient de prendre, dépendra du critère de choix retenu : minimax, maximin,
maximisation de l’espérance mathématique, minimax regret.
La théorie des jeux a donc pour objectif de comprendre les comportements des joueurs, les décisions qu’ils prennent
et les interactions qui naissent lorsqu’ils réagissent les uns aux autres. Autrement dit, l’objectif est de comprendre le
plan d’action que les joueurs vont développer pour jouer, plan qui comprend l’ensemble des décisions que le joueur
va devoir adopter pour l’ensemble des coups, et cela, en réagissant à toutes les décisions des concurrents et
partenaires.
Les critères sont multiples : le choix d’une action (unique ou répétitive), le jeu simultané ou successif, l’antagonisme
des joueurs (total ou partiel), l’information (parfaite ou imparfaite, hasard ou pas), la connaissance des règles
(exhaustive ou incomplète), l’information identique pour tous ou asymétrique, la communication possible ou pas entre
les joueurs, le dédommagement (paiement latéral ou pots de vin) entre les joueurs possible ou pas. Dans tous les cas,
chaque joueur dispose d’un ensemble de stratégies et connaît l’ensemble des résultats associées à ces stratégies. Les
Eric RASMUSSEN (1989), Jeux et information, De Boeck Université, Bruxelles, 2004, p. 46.
Alain GELEDAN (1988), « Stratégies, informations, conflits », in Maurice BASLE, Camille BAULANT, François BENHAMOU, Jean-Joseph
BOILLOT, Catherine CHALAYE-FENET, Bernard CHAVANCE, Alain GELEDAN, Histoire des pensées économiques, les contemporains, Paris,
Sirey, « Synthèse + », p. 157.
Bernard MARIS (2003), Antimanuel d’économie, tome 1. Les fourmis, Rosny, Bréal, 2006, p. 118.
Ibid, p. 116.