Biodoc 26. La Culture du sarrasin

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Association Nature et Progrès
Association d’agriculture
écologique de l’Orne (AGRECO)
Groupement régional d’agriculture
biologique de Basse-Normandie (GRAB)
Document Biodoc n° 26
Mars 2012
Joseph Pousset
(tous droits de reproduction réservés)
La Culture du sarrasin
Eléments d’observation et de recherche
Beaucoup d’agriculteurs actuels, surtout parmi les plus jeunes, seraient incapables de décrire le sarrasin, faute
d’en avoir vu. Cette culture était pourtant très connue et pratiquée dans certaines régions de France jusque vers
les années 1900. Son abandon est dû à des causes techniques (insertion difficile dans une agriculture industrielle
intensive) et à des facteurs psychologiques que j’ai eu l’occasion de ressentir à plusieurs reprises chez certaines
personnes (on a tendance à le considérer comme dépassé et à le percevoir comme culture de pauvre).
Actuellement il connaît un modeste renouveau comme « couvert végétal ».
CARACTERISTIQUES BOTANIQUES DE LA PLANTE – IMPORTANCE DE SA CULTURE
Le sarrasin porte divers noms locaux. En Bretagne, c’est le blé noir ; dans l’Orne, on l’appelle plutôt carabin.
En France, à l’heure actuelle, on en cultiverait environ 10.000 hectares alors qu’il aurait couvert 750.000 hectares
au milieu du 19ème siècle. D’après Férault, la France au début des années 1980 importait par an 7 à 10.000 tonnes
de sarrasin provenant surtout du Brésil alors que, d’après Rousseaux (France Agricole du 15 avril 1984), les
importations françaises de sarrasin provenaient surtout du Canada.
Au niveau mondial, les pays de l’ex URSS fourniraient environ 90% du sarrasin produit et consacreraient environ
1,4 millions d’hectares à cette culture ; les autres pays ayant une production significative seraient la Pologne, le
Japon, le Canada, les Etats Unis, l’Afrique du Sud.
Le rendement moyen actuel en France serait de l’ordre de 12 à 16 qx/ha ; d’après Rousseaux (France Agricole du
20 avril 1984) le rendement moyen en Russie serait seulement de 5 qx/ha ; quant au rendement mondial moyen, il
serait, d’après Férault de 8 à 9 qx/ha. Je précise que je cite ces chiffres sous toutes réserves mais ils
correspondent à ce qu’on observe sur le terrain.
Sur le plan botanique, le sarrasin appartient à la famille des polygonacées (comme notre cher rumex) et constitue
le genre fagopyrum qui comprend lui-même plusieurs espèces, notamment :
– le sarrasin argenté (Polygonum fagopyrum L)
– le sarrasin de Tartarie (Polygonum tataricum L).
Ces deux espèces ont été cultivées en France mais, à l’heure actuelle, à ma connaissance, seule la culture du
sarrasin argenté est encore pratiquée. Certains parlent également d’un sarrasin « commun » dont les grains
seraient de couleur plus sombre, de forme plus irrégulière, moins bombée, je n’ai jamais eu l’occasion d’observer
ce type de sarrasin et j’ignore s’il s’agit d’une espèce particulière. Quant au sarrasin dit « chinois », cultivé non
seulement en Chine mais également en Amérique du Nord et en Europe Centrale, il donne des grains plus gros
que le sarrasin argenté, noirs, se décortiquant facilement. A priori, il paraît intéressant à cultiver mais il donne de
mauvais résultats chez nous, tout au moins dans les conditions où j’ai pu l’observer, j’ignore pourquoi. Par
ailleurs, je ne connais pas sa dénomination botanique exacte.
Le sarrasin de Tartarie serait plus précoce et s’accommoderait mieux des sols calcaires que le sarrasin argenté
mais ses grains sont moins beaux et sa farine serait légèrement amère, peu propice à l’alimentation humaine. A
l’œil, on le distingue facilement du sarrasin argenté car il a des feuilles plus larges et des fleurs plus petites et
verdâtres.
Les fleurs du sarrasin n’ont pas de pétales. Dans le cas du sarrasin de Tartarie, elles sont hermaphrodites et
autogames, c’est-à-dire que le pollen d’une fleur peut féconder les ovules de la même fleur. Chez le sarrasin
argenté, les fleurs sont également hermaphrodites mais hétérostyles. L’autogamie est encore possible mais rare,
c’est donc la fécondation croisée qui est de règle : le pollen d’une fleur va féconder les ovules d’une autre fleur.
Cette fécondation croisée suppose l’intervention d’agents extérieurs qui permettent le transport du pollen. Dans le
cas du sarrasin argenté, les insectes jouent un rôle considérable dans ce transport ; nous verrons que cela a de
l’importance. La végétation ne doit être trop dense pour que les insectes puissent y pénétrer facilement et
accomplir pleinement leur travail de pollinisateurs. Des facteurs climatiques (pluie, vent) peuvent aussi gêner la
fécondation croisée (c’est la coulure à laquelle le sarrasin de Tartarie est moins sensible). De la réussite de la
fécondation dépend en grande partie la réussite de la culture. Un plant bien développé produit de nombreuses
fleurs (plusieurs centaines) mais si ces dernières ne sont pas fécondées, elles ne donneront pas de graines.
CULTURE DU SARRASIN
A. A mon avis, le sarrasin présente des atouts, surtout dans le cadre de l’agriculture « écologique » :
1) Il se sème tard
La période optimale de semis dans le nord de la France me semble être la deuxième quinzaine de mai. Avant, on
risque les effets négatifs d’une période froide ; si on sème trop tard la sécheresse est à craindre et la plante la
supporte mal en début de végétation (risques de levée irrégulière et de développement hétérogène ; cela peut
toutefois être nuancé en fonction du climat de chaque région, ainsi j’ai vu des semis de juillet donner de bons
résultats !).
Ce semis tardif laisse beaucoup de temps pour préparer longuement la terre et lutter éventuellement contre les
adventices à fort enracinement (chardons, rumex, etc.) ou pour faire lever des graines dont on peut ensuite
détruire les plantules (moutardes) ; ces façons culturales dont le but est de détruire les « mauvaises herbes », ne
doivent pas être effectuées n’importe comment ni dans n’importe quelles circonstances ; elles doivent tenir le
plus grand compte des conditions climatiques du moment et si possible de celles à venir mais tout cela mérite une
réflexion à part.
Pouvoir semer tard permet également de cultiver des terres humides, mettant très longtemps à se ressuyer au
printemps et de les travailler dans de bonnes conditions sans les abîmer (mais, là, pas question de façons
culturales très précoces et prolongées) ces terres sont d’autant mieux valorisées que le sarrasin, peu exigeant, s’y
développe souvent assez bien (si nécessaire on le fume convenablement, ni trop, ni trop peu) malgré leur
caractère asphyxiant qui limite la vie microbienne et donc la libération des éléments nutritifs.
Enfin, il n’est pas exclu de semer du sarrasin après une culture récoltée au printemps (fourrage ensilé ou pâturé
par exemple) ou même après la moisson d’une céréale précoce (escourgeon).
2) Il peut être étouffant pour la flore spontanée.
Le sarrasin possède la réputation d’avoir une végétation rapide et puissante, capable de dominer celle de la
plupart des adventices. Cela est exact à condition que la culture démarre dans de bonnes conditions, c’est-à-dire
rapidement et de façon homogène. Un tel démarrage se produit lorsque le sarrasin est semé dans une terre non
tassée convenablement préparée (c’est-à-dire avec une proportion suffisante de terre fine mais quelques mottes ne
sont pas forcément nuisibles, au contraire), chaude mais, important, non desséchée.
Si une pluie fine et tiède survient deux ou trois jours après un semis effectué dans d’excellentes conditions, la
plante « explose » d’une façon surprenante et prend alors de vitesse la quasi-totalité des « mauvaises herbes ».
Cela ne signifie pas que celles-ci sont absentes mais elles restent naines ou au contraire, s’allongent, s’étiolent et
s’épuisent dans leur effort pour dépasser la culture et former leurs graines.
Une hypothèse selon laquelle les racines du sarrasin excréteraient dans le sol des substances inhibant fortement la
germination des graines concurrentes a également été émise.
Il est toutefois assez courant d’observer au-dessus de champs de sarrasin à maturité et réussis quelques
inflorescences de chardons, de chénopodes, de rumex ; les moutardes dépassent assez rarement mais certains
plants arrivent à former leurs graines entre les tiges de sarrasin.
Dans le cas d’une culture non réussie, implantée à un mauvais moment sur sol sale et mal préparé, il est judicieux
d’effectuer une destruction et un ressemis. Cela doit rester exceptionnel.
Lle sarrasin n’« assomme » les adventices que s’il pousse vite et bien, chose qui se produit s’il est implanté dans
les meilleures conditions (et, bien sûr, avec des semences de bonne qualité).
3) Ses exigences de fumure sont modestes
Le sarrasin est réputé pour être peu « exigeant » en engrais ; cette réputation n’est pas fausse mais il ne faut pas
se méprendre sur sa signification : elle souligne simplement que sur des sols pauvres libérant peu d’éléments
nutritifs la plante peut fournir une production honorable là où des végétaux plus gourmands mais plus fragiles ne
donneraient presque rien ou seraient carrément éliminés.
Pourtant une fumure bien pensée peut dans certains cas être bienvenue et permettre une intéressante
augmentation de rendement.
Cependant – c’est le deuxième point intéressant – les limites d’efficacité sont vites atteintes : une fumure trop
abondante provoque une végétation exagérément luxuriante sans augmentation correspondante du rendement en
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graines, les risques de verse sont amplifiés au point que la culture peut devenir rapidement impossible à récolter ;
par ailleurs, le mûrissement des graines, déjà très étalé, devient encore plus difficile.
Pour résumer, on pourrait dire qu’une fumure abondante du sarrasin est presque toujours inutile, parfois nuisible,
mais qu’une fumure modeste et adaptée peut être très efficace sur certains terrains pauvres.
Le tableau ci-dessous donne une idée des exportations du sarrasin :
Exportations du sarrasin pour une récolte de 20 qx/ha en grain et 26 qx/ha de paille
(D’après des données fournies par Lechartier en 1922 et rapportées par P. de Contes)
Grain
Paille
Total
N
42
28
70
P 2 O5
17
18
35
K2 O
11,5
74
85,5
Ca O
3
44
47
Mg O
7
19
26
4) Maladies et parasites ne sont guère à redouter
Peu sélectionné dans le sens du « productivisme », le sarrasin a conservé une faculté élevée de se défendre par
lui-même contre les parasites et les maladies. Je reproduis à la fin de cette fiche un extrait d’un article de
Christian Férault qui résume l’essentiel de ce qu’on peut dire sur la question en précisant que les considérations
qu’il rapporte ne se situent pas dans le cadre du cahier des charges de l’agriculture biologique.
5) Il s’insère facilement dans la rotation
Le cycle végétatif nécessaire au sarrasin pour faire mûrir ses graines est court : 100 à 135 jours environ ; c’est-àdire qu’on peut récolter à la moissonneuse-batteuse environ 4 mois après le semis. Si on fauche et qu’on laisse
mûrir en gerbes, comme cela se faisait traditionnellement autrefois, on peut faucher au bout de 3 mois de
végétation environ, laisser mûrir 3 semaines et battre à la batteuse.
Un cycle bref comme celui-ci peut dans certains cas s’insérer entre une culture récoltée au printemps ou en début
d’été et une autre mise en place en fin d’automne ou début d’hiver, ou au printemps suivant ; toutefois cela n’est
pas possible partout ni tous les ans.
6) Il peut procurer un revenu intéressant
A l’heure actuelle (2012), dans les circuits de l’agriculture « biologique », le sarrasin est payé 700 à 800 € la
tonne selon les acheteurs ; si on considère qu’un rendement de 12 qx/ha peut assez régulièrement être atteint, cela
fait un produit brut de 900 €/ha environ ; c’est inférieur à ce que peut procurer un bon blé mais c’est tout de
même intéressant, surtout si l’on tient compte du fait que la culture du sarrasin demande peu de frais.
7) Il s’accommode de nombreux types de sols
Le sarrasin n’est pas exigeant en ce qui concerne la nature du terrain. Il peut pousser sur des sols sableux ou
argileux, minces ou profonds, pierreux ou non ; ne pas croire pour autant qu’il peut pousser n’importe où. Nous
allons en reparler.
8) Il peut constituer un complément fourrager
Le sarrasin peut constituer un fourrage vert intéressant. Ce n’est pas un aliment très riche, bien que sa
composition à la floraison se rapprocherait de celle de la féverole ou de l’herbe de prairie au même stade.
Son atout réside là encore dans sa rapidité de végétation et dans le fait qu’il peut apporter de la matière verte en
plein été, à un moment où elle fait parfois défaut.
Il peut être ensilé ; il est recommandé dans ce cas d’effectuer un préfanage pour abaisser un peu la teneur en eau
des tiges et limiter la quantité de jus dans les tas.
9) On peut utiliser le sarrasin comme engrais vert
Là encore, vitesse de croissance, caractère étouffant, production assez importante de matière verte (15 à 20
tonnes si la culture est réussie) constituent des atouts intéressants qui font du sarrasin un bon engrais vert ; par
ailleurs, si on vise l’utilisation du sarrasin comme engrais vert (ou comme fourrage d’ailleurs), on n’est pas
soumis aux mêmes contraintes de période de semis que lorsqu’on vise la récolte en graines.
10) La valeur alimentaire de la « graine » de sarrasin est originale
En comparaison des graines de céréales habituelles, la valeur nutritive du grain de sarrasin est apparemment
assez faible, notamment en raison d’une teneur élevée en cellulose à cause de l’enveloppe qui occupe une place
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importante. Par contre, la farine tamisée de sarrasin serait plus riche en glucides et en lipides que la farine
tamisée de blé.
Par ailleurs, contrairement aux graines de céréales, celle du sarrasin n’est pas carencée en lysine, ce qui est une
particularité très intéressante quand on sait que la lysine est un acide aminé indispensable à la croissance.
A noter également qu’elle est riche en protéines totales et contiendrait une proportion intéressante d’oligoéléments.
Tout cela fait que le sarrasin présente au total une grande valeur alimentaire « qualitative », si l’on peut dire,
intéressante, surtout, peut-être, dans le domaine de l’alimentation humaine.
Pour ce qui est de l’alimentation animale, il faudrait se méfier des risques de démangeaisons provoquées par une
consommation excessive de sarrasin, sous forme de fourrage ou de grains (ce phénomène curieux porte le nom de
fagopyrisme) : il ne faudrait pas, en ce qui concerne le concentré, dépasser une proportion de 1/3 de grains de
sarrasin. Ces données publiées par certains auteurs paraissent assez vagues et ne donnent notamment aucune
précision sur la ration totale (nature et quantité) qui était distribuée dans les cas étudiés, ni sur le niveau de
production, la race, l’état de santé des animaux considérés. Personnellement, je n’ai pas eu l’occasion de vérifier
ces affirmations et je ne peux donc ni les confirmer ni les infirmer ; si quelqu’un a en sa possession des éléments
plus précis, je serai heureux d’en prendre connaissance.
11) Le sarrasin est très mellifère
La fécondation des fleurs de sarrasin argenté se faisant de façon croisée, des agents extérieurs à la plante doivent
intervenir pour que cette fécondation soit réalisée. C’est le cas notamment des abeilles ; par beau temps les
champs de sarrasin en fleurs bourdonnent d’abeilles. Ils donnent en quantité abondante un miel assez réputé et les
apiculteurs le savent. Hélas la raréfaction des insectes pollinisateurs en général tendrait à faire diminuer le
rendement du sarrasin.
12) Une utilisation particulière : couvert et nourriture à gibier
Dans les régions où l’on pratique beaucoup la chasse, comme la Sologne, il est assez courant de semer du
sarrasin car cela permet d’attirer le gibier, de le nourrir et de lui fournir un certain couvert.
13) Dans certains cas, le sarrasin peut constituer une culture de rattrapage
Si on a raté une culture de printemps précoce (avoine, blé…) et qu’on est obligé de la retourner, il est possible de
semer du sarrasin pour la remplacer ; la mise en place n’est alors pas toujours effectuée dans les meilleures
conditions mais permet tout de même de limiter la perte.
B. Ces atouts, à mon avis intéressants, ne doivent cependant pas faire oublier des limites certaines et des
précautions à prendre.
1) Le sarrasin est à la fois tolérant et exigeant en ce qui concerne le milieu
Pour ce qui est du climat : il redoute le froid au moment de la levée et pendant la floraison ; il redoute également
la sécheresse (au moins jusqu’à la floraison).
En ce qui concerne le sol, le sarrasin craint énormément le tassement en période humide et le croûtage de la
surface. Il faut être très soigneux sur ce plan en ne travaillant que si la terre est bien ressuyée et bien réchauffée ;
il faut obtenir de la terre fine mais laisser quelques mottes est prudent si on veut éviter un risque de croûtage
ultérieur dû à de fortes averses.
Comme le sarrasin craint la sécheresse estivale, il est certain que les terrains peu épais sur sous-sol rocheux ne lui
sont pas favorables en année sèche. On peut cependant obtenir une récolte honorable de sarrasin sur de tels sols à
condition de semer très tôt mais il faut alors que le climat ne soit pas trop froid au début du printemps. On touche
là une des limites de la culture du sarrasin.
Les climats doux et humides de l’ouest de la France lui conviennent bien.
Les terres argileuses et humides mal structurées qui collent quand elles sont mouillées et deviennent dures quand
elles sont sèches ne lui réussissent pas toujours.
Les terrains acides ne lui font pas peur, les calcaires non plus, paraît-il (mais j’en ai rarement vu sur sol calcaire).
Le temps doux et frais jusqu’à la floraison, sec et chaud ensuite est un élément de bonne récolte.
2) Le sarrasin est une plante fragile
Il est riche en eau, les tiges sont assez cassantes, surtout en début de végétation, me semble-t-il. Je n’ai jamais
essayé de herser une culture de sarrasin comme on le fait dans le cas des céréales pour éliminer certaines
mauvaises herbes, telles que la moutarde sauvage. Ce serait intéressant d’essayer mais je crains que la culture en
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souffre beaucoup. Peut-être serait-ce possible en utilisant une dose de semences nettement plus élevée que la
normale.
Par ailleurs, j’ai cru remarquer qu’il ne fallait pas piétiner les plantules lorsqu’elles sortent de terre car certaines
donnent alors l’impression d’être définitivement écrasées.
3) Façons culturales : pas de difficultés particulières mais du savoir faire et de l’observation
a) Semis
Date :
–
–
–
deuxième quinzaine de mai en général
première quinzaine de mai si le printemps est précoce et sur terrain craignant la sécheresse estivale
première quinzaine de juin si le printemps est froid et sur terrain gardant bien la fraîcheur en été
Dose de semences :
D’une façon générale elle doit plutôt être faible. On dit dans certaines régions qu’il faut semer « 3 graines
dans un cercle de tonneau », tout dépend de la taille du tonneau évidemment mais on comprend aisément
qu’il s’agit là d’une formule signifiant qu’il faut semer clair ; les semences ne doivent pas être trop vieilles.
Le sarrasin dispose d’une étonnante aptitude à couvrir le terrain à partir d’un certain stade de végétation.
Dans la plupart des cas, la dose/ha de semences peut être comprise entre 20 et 40 kg/ha. 20 kg/ha suffisent
sur les sols riches et/ou bien fumés, où mes tiges de sarrasin vont être grosses et se ramifier fortement. 40
kg/ha peuvent être nécessaires sur les terrains très maigres, peu ou pas fumés, où les tiges auront tendance à
être grêles et peu ramifiées.
Mais il faut savoir que les meilleurs rendements sont presque toujours obtenus avec des pieds vigoureux,
gros, bien ramifiés, disposant d’un espace individuel suffisant.
Semer une forte dose de semences sur un terrain riche et/ou bien fumé en espérant un rendement supérieur
est une erreur : les tiges se concurrenceront fortement, se développeront en longueur à la recherche de
lumière, pouvant atteindre une hauteur étonnante (j’ai vu chez moi un champ de sarrasin où certains pieds
mesuraient plus de deux mètres) mais avant la maturité elles risquent de s’affaisser puis de rester toujours
plus ou moins vertes même lorsque les grains seront mûrs ; la culture est alors inrécoltable, la moitié des
grains reste dans le champ et au bout du compte on est largement perdant.
Choix de la variété :
On ne peut pas véritablement parler de variétés de sarrasin mais plutôt de « populations » car cette plante n’a
pas été sélectionnée de façon rigoureuse comme la plupart des végétaux cultivés dans les pays industriels.
Nous avons vu que deux espèces de sarrasin sont cultivées mais qu’on ne trouve pratiquement plus chez
nous le sarrasin de Tartarie ; au sein de l’autre espèce (Polygonum fagopyrum) c’est la « variété » dite
sarrasin argenté qui constitue l’essentiel des cultures.
La recherche agronomique a tiré du sarrasin argenté une sélection baptisée « La Harpe » dont les grains sont
en moyenne un peu plus gros que ceux du sarrasin argenté ordinaire. Pour ce qui est du rendement, je n’ai
pas l’impression qu’il soit très supérieur, bien que meilleur d’une façon générale, mais je ne dispose pas d’un
nombre suffisant de résultats d’observations pour pouvoir porter un jugement sûr.
En Bretagne on cultivait autrefois (le trouve-t-on encore ?) une population locale à petits grains appelée le
« petit breton ».
Dans la pratique, il me semble que le sarrasin argenté est le plus intéressant à l’heure actuelle et tout
spécialement la variété « La Harpe » qui n’est cependant pas la seule.
Répartition des graines :
Autrefois on semait le sarrasin à la volée. Dans certaines régions (centre de la France) les graines étaient
enfouies par un labour très léger en planches qui modelait sur le terrain de petits billons et ramenait la
semence sous ces billons. De cette façon le sarrasin poussait sous forme de bandes assez écartées, disposait
d’une aération plus grande, était plus accessible aux abeilles. Cette façon de faire aurait permis des
rendements meilleurs que le semis « à plat » ordinaire mais je n’ai jamais eu l’occasion de vérifier cela.
Quelqu’un aurait-il des informations sur ce sujet ?
A l’heure actuelle on sème le plus souvent le sarrasin avec un semoir à céréales et en adoptant le même
écartement entre les rangs que pour les céréales (15 à 20 cm). Des écartements plus grands seraient-ils
intéressants ? Peut-être mais il ne faudrait pas que cela conduise à mettre trop de graines sur le rang. Je pense
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que des essais pourraient être faits en terre riche où le sarrasin peut « brancher », en semant à 20 ou 25 kg/ha
et en fermant un tube de descente sur deux. On aurait ainsi un écartement entre les rangs de 35 cm environ
pour une densité sur le rang qui resterait raisonnable. En terrain maigre il me paraît souhaitable de conserver
pour l’instant l’écartement habituel adopté pour les céréales, c’est encore plus vrai si ce terrain a tendance à
être froid car la culture va démarrer lentement et laisser libre pendant une trop longue période des espaces
importants qui auront tendance à être envahis par les adventices.
On a intérêt à semer à une profondeur aussi régulière que possible ; une profondeur de semis irrégulière n’est
pas trop gênante sur terrain humide mais sur terrain sec elle donne une levée hétérogène et échelonnée. Dans
ce dernier cas ce sont les grains enterrés le plus profondément (2 ou 3 cm par exemple) qui lèvent les
premiers – donc, pas de semis trop superficiel. D’autant plus que les semences visibles risquent d’être
mangées par les oiseaux.
b) Préparation du sol pour le semis
Le lit de semence convenable est le même que pour les céréales comme l’orge ou l’avoine de printemps.
De nombreuses manières d’opérer sont envisageables pour y parvenir selon la rotation culturale, la nature du
terrain, le matériel dont on dispose, la conception que l’on a du travail du sol, etc.
Quelques exemples :
– Le précédent est un blé d’hiver récolté fin juillet. Une légumineuse annuelle ou bisannuelle a été
installée au printemps dans la céréale (trèfle de Perse, mélilot, trèfle violet, lotier corniculé, trèfle
hybride…). Cet engrais vert peut se développer après la moisson qui, en enlevant la céréale, lui permet de
trouver l’air et la lumière dont il a besoin. S’il gèle pendant l’hiver on effectue au printemps les façons qui
permettent de l’incorporer convenablement au terrain, avec ou sans labour selon la manière dont on travaille
habituellement.
Pour ma part je m’efforce toujours de mettre en œuvre des façons culturales légères, inversées et
progressives (façons LIP) étalées sur un mois ou un mois et demi avant le semis, la plupart du temps sans
labour. Cela me permet de réduire le stock de graines d’adventices, d’incorporer petit à petit les matières
organiques à la terre, de préparer peu à peu le lit de semence, d’arracher racines et rhizomes des vivaces et
de le nettoyer par un faux semis bien positionné. Cette manière d’opérer mériterait une description plus
approfondie qui sortirait du cadre du présent document.
Voyez éventuellement le chapitre traitant du travail du sol dans l’ouvrage « Agro écologie » (éditions de la
France Agricole).
Quand l’engrais vert n’a pas gelé son incorporation peut être précédée par fauche ou broyage si son
développement le justifie.
– Même précédent mais sans engrais vert installé au printemps ; on peut effectuer après la moisson
quelques déchaumages pour faire lever et détruire des plantes spontanées. On peut également en profiter
pour arracher racines et rhizomes des vivaces pour les exposer au soleil, puis installation d’un engrais vert ;
au printemps suivant : incorporation de l’engrais vert et installation du sarrasin.
– L’engrais vert d’hiver peut être un fourrage annuel fauché ou pâturé au printemps. Attention dans ce cas
à ne pas compacter un terrain humide par le piétinement des animaux ou la circulation des machines.
– Le précédent est une culture récoltée tardivement (maïs à grains, betteraves…). Si c’est possible installer
un engrais vert à la volée (seigle, avoine…) incorporé par un passage d’outil à disques ou à dents.
– Si la teneur du sol en argile est très élevée un labour d’hiver qui va geler est parfois utile pour faciliter la
reprise au printemps. Il présente cependant l’inconvénient de laisser la terre nue longtemps et il vaut mieux
opérer autrement chaque fois que possible.
On peut aussi travailler de manière plus traditionnelle en effectuant des déchaumages après la moisson d’un
précédent céréale et un labour en fin d’hiver dès que le ressuyage de la terre est suffisant. On laisse ensuite
ce labour « mûrir » pendant un mois puis on réalise des façons superficielles avec des outils à dents,
vibroculteur par exemple. Le lit de semence se trouve ainsi préparé peu à peu.
Quand un éleveur installe du sarrasin après fourrage annuel ou prairie il est parfois tenté de labourer très
tardivement, juste avant le semis, pour profiter le plus longtemps possible de la production fourragère de sa
parcelle. L’opération n’est pas vouée à l’échec mais sa réussite peut être compromise par des matières
organiques mal décomposées, des repousses de plantes spontanées mal détruites, un lit de semence mal
débarrassé de ses graines d’adventices…
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Pour ma part j’ai pendant longtemps installé le sarrasin en effectuant un labour en mars puis des façons
superficielles à partir de fin avril.
J’ai ensuite adopté par la suite les façons LIP qui me semblent préférables.
Rouler le semis n’est utile que si le terrain est particulièrement sec ou trop motteux.
c) Façons culturales éventuelles après le semis
Après le semis, je n’ai jusque là jamais effectué de façons culturales, sauf une fois pour détruire une culture
envahie par les adventices (chénopodes et moutardes sauvages). Je craignais une augmentation excessive du
stock de graines de ces dernières dans le sol et je savais que cette culture sale ne produirait pas grand chose.
Autrefois, dans certaines régions, on n’hésitait pas à retourner ainsi une culture de sarrasin ratée pour
effectuer un nouveau semis.
Ce ratage peut être dû à une très mauvaise levée, elle-même consécutive à un semis mal réalisé (graines
enterrées à des profondeurs trop différentes en sol sec par exemple) ou à une sortie très abondante et brutale
de mauvaises herbes qui risquent de concurrencer de façon excessive les jeunes plants de sarrasin et
également, pour certaines, d’amener leurs graines à maturité avant que ce dernier soit récolté.
Autre façon culturale possible après le semis : le sarclage. Il vaut mieux pour cela que les rangs soient plus
écartés que dans le cas des cultures de céréales car les plants de sarrasin sont fragiles et il ne faut pas les
abîmer avec la bineuse. Personnellement je n’ai jamais sarclé le sarrasin.
d) Végétation du sarrasin : une pousse en deux temps
Lorsque le semis a eu lieu dans de bonnes conditions (terre bien réchauffée, lit de semence bien préparé,
semis régulier et à la bonne profondeur, terre fraîche…) et que le temps est doux et humide, la levée
intervient après deux semaines environ. Je trouve que l’idée communément admise selon laquelle la
végétation du sarrasin est très rapide n’est pas entièrement exacte. Au départ le sarrasin ne me semble pas
pousser plus vite que les autres cultures de printemps, surtout si les conditions climatiques lui sont
défavorables (temps froid et sec, par exemple).
Par contre, il est vrai qu’à partir d’un certain stade (début de floraison), la croissance des tiges s’effectue à
une allure assez impressionnante et prend alors de vitesse la quasi totalité des adventices, en même temps
qu’on note une ramification aboutissant à un couvert particulièrement dense et étouffant.
e) Récolter au bon moment et de la bonne façon
Comment récolter ?
Autrefois la récolte du sarrasin en France se faisait en deux temps : on commençait par faucher et mettre le
sarrasin en gerbes qui étaient placées debout dans le champ ; on laissait ces gerbes ainsi pendant deux ou
trois semaines ou même davantage ; les grains encore verts finissaient de mûrir, la paille séchait également.
La pluie pouvant survenir pendant cette période ne gênait pas, sauf cas exceptionnel, ce phénomène de
mûrissement.
Les gerbes étaient ensuite chargées sur des charrettes et amenées à la ferme pour être battues.
Ce système permettait en principe de battre un sarrasin bien mûr et une paille ayant perdu une grande partie
de son eau.
A l’heure actuelle, les gens qui cultivent du sarrasin le battent le plus souvent directement à la moissonneusebatteuse. Ce procédé est évidemment plus rapide et moins compliqué mais il les oblige à prendre certaines
précautions.
A quel moment récolter ?
Voilà une question que se posent souvent avec perplexité et inquiétude ceux qui cultivent pour la première
fois du sarrasin.
En effet, le sarrasin ne paraît jamais mûr. Il subsiste longtemps des grains verts et la paille reste molle et
riche en eau.
A mon avis, et sauf cas particulier, dans le cas de récolte à la moissonneuse-batteuse il faut attendre au moins
4 mois après le semis pour moissonner ; la quasi totalité des grains doivent être bien gris et les pailles avoir
bien viré du vert au rouge et perdu leurs feuilles supérieures. Si le temps et la saison permettent d’attendre
plus longtemps, il ne faut pas hésiter. Plus le sarrasin est fauché mûr, plus la récolte et la conservation sont
faciles.
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Dans le cas d’une culture semée très tard (après la fin juin), on est parfois obligé de récolter avant 4 mois par
peur du mauvais temps. On risque d’avoir des pailles encore vertes et des grains trop mous. Toute cette
matière végétale peut alors s’écraser en bouillie à certains endroits de la moissonneuse, comme les jonctions
entre les vis. Dans les cas extrêmes, cette formation de bouillie peut ralentir sensiblement la marche des
organes en mouvement et faire patiner les courroies. Il faut alors s’arrêter sans tarder et nettoyer les endroits
engorgés. Parfois ce nettoyage se fait de lui-même par l’ouverture d’une trappe bien placée et en faisant
tourner la machine. Dans d’autres cas il faut nettoyer avec un morceau de bois ou à la main, après avoir bien
sûr pris l’indispensable précaution de débrayer la machine. Surtout garder son calme et travailler avec
patience et précision. J’insiste bien sur le fait que ce genre d’incident n’arrive jamais avec du sarrasin
suffisamment mûr et récolté dans des conditions normales.
L’engorgement des grilles peut aussi être provoqué ou accentué par de mauvais réglages dont nous allons
reparler.
En ce qui concerne le temps atmosphérique pendant la récolte, il est évidemment préférable qu’il fasse beau
et sec mais un temps couvert n’est pas gênant. Même si on est très bien équipé pour le séchage du grain, il ne
faut cependant pas moissonner lorsque les tiges sont encore humides d’une pluie récente car cette humidité
peut provoquer les phénomènes de bouillie précédemment évoqués.
Il faut par ailleurs noter que le mauvais temps n’égrène pas le sarrasin autant qu’on pourrait le croire. La
pluie n’est pas gênante (sauf si elle est violente). C’est peut-être le vent violent sec qui risque le plus de faire
tomber les grains car il dessèche les pédoncules et secoue les « grappes ».
Récolte à la moissonneuse-batteuse : des règles à respecter
Il faut tout d’abord battre dans les conditions de maturité et de temps atmosphérique précédemment
évoquées.
En ce qui concerne le réglage du batteur, rien de très compliqué. Se souvenir qu’il faut surtout éviter le
battage brutal, inutile car les grains se détachent assez facilement et même franchement nuisible car il brise
les tiges et arrache les feuilles, introduisant des débris végétaux supplémentaires dans le grain et augmentant
son degré d’humidité. Pour ce qui est des grilles, même dimension de trous que pour le blé ou dimension
juste en dessous.
Il est inutile de faucher ras car on introduit inutilement dans la machine une masse de végétation plus ou
moins humide, surtout si de l’herbe a poussé au pied du sarrasin. Faucher à un niveau suffisant pour récolter
tous les grains, rien de plus.
Veillez bien à ne pas recouper les chaumes, ce qui arrive parfois quand on fauche un peu plus ras qu’au
passage précédent et en n’utilisant pas convenablement toute la largeur de la coupe. On introduit alors dans
la machine de petits tronçons de paille difficiles à éliminer et qui risquent fort de se retrouver dans la trémie
avec le grain.
Il ne faut pas avancer trop vite mais pas trop lentement non plus. Dans le cas de sarrasin bien mûr on peut
avancer à peu près à la même vitesse que pour battre du blé. Sur les machines munies d’un convoyeur à vis
on note parfois des enroulements autour de ce dernier. Ces enroulements, soudains et imprévisibles, peuvent
être importants et gênants, surtout si on continue à avancer. Il faut s’arrêter dès que l’enroulement commence
à se produire, en laissant la machine tourner, en général les tiges enroulées se dispersent d’elles-mêmes après
quelques dizaines de secondes. Si on ne s’arrête pas assez vite, l’enroulement devient vite important et se
durcit, il est alors beaucoup plus difficile de s’en débarrasser sans descendre de la machine. Inutile de
préciser que dans ce dernier cas il faut évidemment débrayer la coupe.
J’ai remarqué sans trouver d’explication à chaque fois au phénomène que ces enroulements avaient tendance
à se reproduire dans certaines zones précises des champs.
Quand les tiges de sarrasin sont longues, molles, trop serrées, elles s’enroulent parfois autour des rabatteurs,
surtout si en plus elles sont couchées.
Une scie à colza peut rendre service.
Réglage du vent : en général moins fort que pour le blé car les grains de sarrasin sont plus légers ; il faut tout
de même que les fragments de paille soient bien éjectés.
Dans tous les cas il ne faut pas hésiter à descendre de la machine, au moins au début de la récolte de la
parcelle, pour vérifier que le battage est bon et que des pertes ne se produisent pas derrière les secoueurs.
Une façon de faire couramment pratiquée dans certains pays (au Canada par exemple) consiste à faucher
d’abord le sarrasin assez haut (pour que l’air puisse circuler sous les tiges couchées sur les chaumes). Il peut
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ainsi sécher pendant quelques jours. On le bat ensuite avec une moissonneuse-batteuse ordinaire ou, mieux,
munie d’un pick-up. Ceci est surtout intéressant lorsqu’on ne peut pas, pour une raison quelconque, obtenir
un mûrissement satisfaisant du sarrasin sur pied.
Ne laissez pas la trémie pleine pendant trop longtemps, ne serait-ce que pendant une nuit car si le sarrasin est
humide ce laps de temps est suffisant pour qu’il commence à chauffer. De plus l’humidité ainsi présente
risque de provoquer un début d’oxydation de certaines parties métalliques.
Pour la même raison, après la moisson du sarrasin il faut très soigneusement vider la trémie, enlever les
grains restés dans les coins et qui risquent de moisir.
Il faut par ailleurs ouvrir toutes les trappes et faire tourner la machine pendant quelques minutes pour qu’elle
« crache » le maximum de débris végétaux et de grains résiduels. Nettoyer manuellement autant qu’il est
possible les recoins où des débris humides ont pu s’accumuler. Pour terminer, je pulvérise du fuel sur la
coupe et à l’intérieur de la machine partout où c’est possible (notamment dans les conduits des vis). On peut
aussi asperger de la paille de céréale bien sèche avec un mélange de fuel et d’huile de vidange et l’introduire
dans la machine en mouvement mais je trouve, après avoir essayé les deux techniques, que c’est moins
efficace que la pulvérisation de fuel soigneusement réalisée avec un pulvérisateur à dos.
Moyennant ces précautions et soins, la récolte du sarrasin dans des conditions habituellement bonnes ne
semble pas abîmer les moissonneuses. Je précise quant même que je n’ai pas eu l’occasion d’observer des
machines récoltant de grandes surfaces de sarrasin (cent hectares ou davantage) chaque année.
Récolte à la faucheuse et battage à la batteuse
C’est la technique ancienne, difficile à mettre en œuvre aujourd’hui car elle demande de la main d’œuvre et
un matériel (batteuse notamment) qui a le plus souvent disparu de nos campagnes. Son intérêt, comme on l’a
vu précédemment, est de permettre au sarrasin de mûrir et de sécher en gerbes. On obtient ainsi un grain plus
sec et plus facile à conserver.
Son inconvénient est de demander des manipulations nombreuses pouvant entraîner un certain égrainage.
Il faut faire des gerbes assez petites dans lesquelles l’air peut pénétrer facilement.
4) Conservation du sarrasin : particulièrement délicate
Même dans d’excellentes conditions, le sarrasin récolté à la moissonneuse-batteuse dose rarement moins de 20%
d’humidité. Si le temps est humide ou si on est obligé de battre trop précocement, le pourcentage d’humidité du
grain peut être bien supérieur à ce chiffre.
Dans la quasi totalité des cas, il faut donc faire sécher le sarrasin. Si le grain est peu humide et la quantité à
conserver peu importante, on peut se contenter d’étaler le grain en couche mince (10 cm) dans un grenier bien
sain et le remuer tous les jours pour l’aérer.
On peut aussi le mettre dans un silo à grain ordinaire muni de gaines de ventilation et ventiler avec de l’air
ambiant non réchauffé. Cela peut marcher si l’épaisseur de grain dans la cellule n’est pas trop importante, si la
ventilation est puissante et fréquente. On peut même laisser le grain chauffer un peu, en le surveillant de près et
déclencher la ventilation lorsqu’il a atteint une certaine température : la vapeur d’eau sort alors plus facilement
que lorsque la masse de grain est tout à fait froide. Toutefois c’est une manière d’opérer risquée qui conduit
souvent à obtenir des grains qui ont une odeur de moisi.
Lorsqu’on agit ainsi sans réchauffage de l’air, que ce soit par pelletage ou ventilation froide, il est presque
indispensable de trier le grain avant de le stocker. En effet, les petits brins de paille riche en eau mélangés au
grain sont des sources d’humidité, ils moisissent facilement ; en les éliminant, on facilite le séchage et la
conservation. Ce nettoyage doit être fait tout de suite après la récolte.
En ce qui concerne la propreté de la récolte, toutes les moissonneuses ne permettent pas d’obtenir le même
résultat. Certaines possèdent un système de double nettoyage. En les réglant bien et en battant au bon moment et
dans de bonnes conditions, on peut obtenir un grain d’une propreté presque parfaite. D’autres machines, moins
bien conçues sur le plan du nettoyage, laissent passer beaucoup d’impuretés dans la trémie. Les machines
nettoyant le mieux sont souvent d’anciens modèles.
A propos du séchage par pelletage : au lieu d’étaler directement le grain dans un grenier, on peut le mettre sur
une surface bien propre à l’extérieur, au soleil. Le résultat obtenu est excellent mais il faut bien sûr être en
mesure de couvrir le grain rapidement ou de le rentrer lorsque la pluie menace. Le séchage sera encore plus facile
si on étale la récolte non pas sur le sol mais sur une surface laissant passer l’air (tôle perforée, par exemple, ou
grillage fin soutenu par une armature métallique).
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Dès que le volume de récolte atteint un certain niveau (plus de 10 ou 20 quintaux par exemple) il devient presque
nécessaire d’effectuer un séchage à l’air chaud. Ce séchage effectué, on peut stocker le grain sans inconvénient
dans une cellule munie tout de même, par précaution, d’un système de ventilation. Le sarrasin séché
convenablement dès la récolte se conserve par la suite aussi bien que n’importe quelle céréale.
Le matériel pour le séchage à l’air chaud est coûteux ; on ne trouve guère de séchoirs neufs complets (c’est-à-dire
l’ensemble brûleur + ventilateurs + cellules grillagées + installation électrique plus ou moins sophistiquée…)
pour moins de 20.000 €. Il est bien évident que la récolte annuelle de 5 ou 10 tonnes de sarrasin ne justifie pas un
tel achat (bien que, notons-le au passage, il puisse servir le cas échéant pour les autres céréales récoltées sur la
ferme). Préférer les séchoirs verticaux aux horizontaux car ils prennent beaucoup moins de place. On peut se
tourner vers le matériel d’occasion mais les bons séchoirs d’occasion de dimensions convenant à l’utilisation
envisagée ici sont rares. Ce qui ne veut pas dire qu’ils soient introuvables.
Une autre solution est de fabriquer soi-même une installation de séchage à l’air chaud. On peut disposer un
double fond en tôles inoxydables perforées dans une cellule assez large et pas trop haute (par exemple de 4 m de
hauteur et de 3 m de diamètre). Le volume du double fond est à calculer en fonction du débit du ventilateur qui
va y envoyer de l’air. Sur ce double fond, on adapte une entrée d’air alimentée par un ventilateur assez puissant ;
devant le ventilateur on place une source d’air chaud qui peut être un brûleur à gaz ou à fuel, à condition que les
fumées ne pénètrent pas dans la récolte, ou tout autre moyen de chauffage. La puissance du brûleur est fonction
du débit d’air du ventilateur et de l’élévation de température de l’air qu’on souhaite. Pour que le séchage soit
efficace et rapide, il faut que cette élévation de température soit significative : si la hauteur de grains dans la
cellule est par exemple de 2 ou 3 mètres, il faut que la température de l’air soit au moins de 40° ou 50° C.
L’avantage de cette formule est d’exiger un minimum de manipulations puisque l’espace qui sert au séchage sert
également au stockage. En ce qui concerne le prix, il peut être assez élevé si on achète du matériel neuf. Un gros
brûleur à gaz ou à fuel coûte cher (quelques milliers d’euros), les matériaux inoxydables nécessaires pour réaliser
le double fond également. Par ailleurs, sécher dans la cellule de stockage présente un inconvénient : la vapeur
d’eau qui se forme dans le grain sous l’action du courant d’air chaud a tendance à se condenser sur les parois
métalliques froides. Il peut en résulter un ruissellement sur ces parois et on est alors assuré que le grain se
trouvant au contact avec elles ne sera jamais sec et risque de moisir, pouvant dans certains cas communiquer une
mauvaise odeur à l’ensemble du lot. Une solution, pas complètement satisfaisante, est d’isoler les parois de la
cellule. Les formules qui permettent de sécher le grain en dehors de la cellule de stockage ne présentent pas cet
inconvénient.
On peut enfin faire sécher son sarrasin chez un agriculteur ou dans un organisme équipé pour ce faire ; c’est
souvent une bonne solution, pas trop coûteuse et efficace ; son inconvénient est de demander des manipulations
et du transport.
Quel que soit le mode de séchage choisi, chez soi ou ailleurs, ne pas oublier qu’en agriculture biologique le
cahier des charges ne tolère pas le séchage direct, sauf s’il est au propane. Les séchoirs à fuel doivent donc être
munis d’un échangeur qui permet d’éliminer les fumées de la combustion sans qu’elles passent dans l’air chaud
qui traverse le grain. Il faut toutefois reconnaître qu’un brûleur à fuel bien réglé émet peu de fumées.
La prudence étant mère de sûreté, il ne faut pas oublier de jeter régulièrement un coup d’œil sur le sarrasin stocké
car avec cette marchandise on n’est jamais complètement à l’abri d’une mauvaise surprise.
5) La commercialisation du sarrasin dans les circuits biologiques : une demande modeste, une offre très faible
Dans le circuit biologique, la demande en sarrasin n’est pas très importante mais comme l’offre est modeste (tout
au moins en Europe) les débouchés sont intéressants.
La « graine » du sarrasin peut être utilisée de différentes façons dans l’alimentation humaine ; certaines
préparations sont à base de farine, la graine de sarrasin est écrasée, d’autres à base de sarrasin décortiqué (comme
la « kacha », plat russe à base de sarrasin et d’orge décortiqués).
Le sarrasin cultivé en Europe (en France en tout cas) étant le sarrasin argenté (difficile à décortiquer), nous ne
pouvons guère alimenter que le circuit de fabrication de farine.
A l’heure actuelle, les acheteurs paient le sarrasin biologique entre 700 et 800 € la tonne comme nous l’avons vu.
Ces prix sont intéressants à partir du moment où le rendement est de l’ordre de 10 à 12 quintaux/hectares.
A ma connaissance, il n’y a pas de besoin de laissez-passer pour le transport du sarrasin et la vente de la farine
est libre : on peut en tout cas faire de la farine avec le sarrasin qu’on récolte et la vendre directement aux
consommateurs.
Les transformateurs de céréales biologiques utilisent parfois du sarrasin d’importation qu’ils paient un peu moins
cher mais qui n’aurait pas toujours une garantie sûre de culture biologique. Je pense qu’ils pourraient faire un
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effort pour s’approvisionner davantage en sarrasin européen garanti de culture biologique, à condition bien
entendu qu’il soit de bonne qualité.
Une autre voie de commercialisation qui ne concerne pas spécialement la culture biologique est la fameuse autant
que nébuleuse « filière rutine ».
Là il ne s’agit plus d’utiliser les grains du sarrasin mais ses feuilles dont on extrait un produit pharmaceutique
appelé « rutine » (glucoside ayant une activité vitaminique P). Il faut pour cela récolter le sarrasin en vert puis le
déshydrater. Un certain secret entoure curieusement cette production, très peu développée pour l’instant, semblet-il. L’ennui est, bien sûr, la nécessité de la déshydratation mais si on arrive à résoudre cette question de manière
« écologique », la production devient intéressante dans la mesure où elle peut concerner une culture dérobée
semée par exemple après la moisson.
Que les personnes intéressées et/ou possédant des informations sur la question n’hésitent pas à prendre contact
avec moi.
Je ne parlerai pas ici des possibilités de vente du grain dans les circuits classiques, elles ne nous concernent pas
directement et sont de toute façon relativement peu intéressantes (mis à part les contacts pour la production de
semences où les prix seraient voisins de ceux pratiqués pour la vente de sarrasin « biologique »).
C. Perspectives d’avenir.
On ne peut pas prévoir de façon précise comment la production et la consommation de sarrasin vont évoluer dans
le circuit biologique. On peut toutefois supposer que la demande en sarrasin va croître en même temps que la
demande de produits biologiques en général.
Quant à la production, elle peut augmenter car elle est pour l’instant insuffisante. Je ne pense pas qu’elle
atteindra des sommets car pour être économiquement intéressante elle demande une certaine expérience, un
équipement spécialisé et des terrains particuliers.
Insistons à nouveau sur l’intérêt du sarrasin pour améliorer la rotation et maîtriser la flore spontanée.
Certains pensent que des travaux de sélection pourraient augmenter notablement ou même considérablement le
rendement du sarrasin dont le potentiel serait, paraît-il, voisin de 100 quintaux/hectare.
Mais il est bien évident qu’une telle augmentation de rendement ne serait pas sans inconvénient au niveau de la
résistance au parasitisme et, peut-être, de la valeur nutritionnelle des grains. Pour ma part, je pense que les
populations actuelles améliorées, comme la Harpe, permettent déjà des résultats corrects et à ma connaissance
bien moins irréguliers qu’on le dit parfois. Bien entendu pour réussir il faut, là comme ailleurs, un minimum de
connaissances, d’expérience et de soins.
Pour conclure, je propose une réflexion, déjà ancienne mais toujours d’actualité, de M. Férault,
phytopathologiste qui s’intéresse au sarrasin. On y trouve quelques éléments d’information qui résument à peu
près les connaissances actuelles en matière de maladies et parasitisme dans la culture du sarrasin.
« En 1983, les conditions climatiques exceptionnelles du printemps ont conduit un certain nombre d’agriculteurs
à rechercher tardivement des spéculations printanières ou estivales de remplacement à celles qui furent détruites
ou n’avaient pu être semées. Le choix n’était pas grand et le sarrasin fut implanté sur un millier d’hectares
supplémentaires (Saône-et-Loire, Eure, Mayenne…) avec pour objectif une production de grain. Ces expériences,
mises en route souvent très tard (fin juin / début juillet), ont bénéficié ensuite de conditions estivales et
automnales favorables. Elles ont abouti, en général, à des rendements de 15 à 20 quintaux permettant de dégager
des marges brutes intéressantes. Pourquoi ?
Les charges proportionnelles liées à la culture du sarrasin sont très faibles ; en particulier, on apporte peu
d’engrais et aucun traitement n’est réalisé.
Même à l’époque où le blé noir était largement cultivé, les problèmes parasitaires étaient considérés comme
négligeables : « C’est une plante résistante aux maladies et étouffante pour les mauvaises herbes » disaient
volontiers nos Anciens.
Qu’en est-il actuellement en France où les parcelles sont, le plus souvent, petites et dispersées, mais aussi dans
les autres pays, notamment en Union Soviétique qui constitue, et de loin, le principal producteur avec 90% des
1,5 millions d’hectares emblavés de par le monde ? Y a-t-il des risques de déconvenues dans ce domaine ?
Cet article tente de faire le point en appuyant son information d’une part sur des références bibliographiques
souvent anciennes et parfois incertaines, d’autre part sur de nombreuses observations. Il ne fait pas état des
« curiosités » qui n’intéressent que les rares spécialistes et les naturalistes.
LES MALADIES
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UN Mildiou, étudié en premier lieu en Bretagne au début du siècle, puis en Pologne, est dû à Peronospora
ducometi, parfois nommé P. fagopyri-fagopyri, champignon très voisin des autres Peronospora affectant les
Polygonacées. Ses attaques se traduisent par la formation de taches décolorées étendues, qui peuvent apparaître
dès après la levée. Lorsque le temps est humide, un feutrage de conidiophores et de conidies se forme à la face
inférieure des feuilles.
Un Oïdium, causé par Erysiphe polygoni, peut envahir les feuilles et les tiges. Son extension est rapide par temps
sec et chaud alternant avec des périodes humides. Ce champignon affecte aussi des Polygonacées sauvages des
genres Polygonum et Rumex.
Ces deux maladies ont actuellement une faible importance et demeurent localisées.
Huit virus ont été signalés comme pouvant infecter de façon systémique le sarrasin. Pour certains, il s’agit de
simples relations de réactions de plantes en tant qu’hôtes différentiels. D’autres, la Mosaïque du tabac et la
Frisolée du pélargonium, n’ont pas été identifiés en France sur sarrasin et leur importance dans les pays
producteurs n’est pas précisée.
Enfin, la Mosaïque du concombre constitue une maladie plus préoccupante, signalée anciennement par Wellman
en 1935 et fréquemment observée dans les cultures françaises. Ses caractères, précédemment indiqués (Phytoma
n° 315, février 1980), sont les suivants : les symptômes apparaissent souvent très tôt, un mois après le semis par
exemple, et consistent en un éclaircissement internervaire suivi d’une mosaïque vert jaune. Des bandes bien
vertes entourent les nervures (« veinbanding ») et limitent des espaces jaunes. Des taches rougeâtres apparaissent
ensuite irrégulièrement qui deviennent nécrotiques, provoquant un dessèchement du limbe.
Ces différents symptômes peuvent être observés simultanément sur une même plante : les feuilles âgées
présentent des nécroses alors que les plus jeunes ne manifestent qu’un éclaircissement. La taille des plantes
atteintes précocement est réduite de 20 à 30 centimètres.
Cette maladie qui affecte un très grand nombre de plantes cultivées (concombre, melon, laitue, haricot, piment,
tomate…) est transmise par plusieurs espèces de pucerons selon le mode non persistant. Elle ne semble pas
véhiculée par la graine de sarrasin.
LES RAVAGEURS
Les références à des dégâts de ravageurs sont très peu nombreuses et les observations effectuées dans les
parcelles confirment la faiblesse des attaques.
Le premier rapport en cette matière est dû à Miège (1910) qui évoque les dégâts du nématode Tylenchus
devastatrix dont la position taxonomique fut ensuite revue. Les plantes atteintes, groupées en plages plus ou
moins étendues, demeurent rabougries. Leurs feuilles sont gaufrées et enroulées. Il s’agissait, sans doute, de
Ditylenchus dipsaci (nématode des tiges et des bulbes), espèce commune et très polyphage dont Bonnemaison
(1961) décrit les effets : les plantes attaquées présentent, très jeunes, une coloration rouge violacé. Les articles
plus récents concernant ce nématode ne mentionnent plus, ou presque, le sarrasin. Rappelons que ce ravageur est
important sur céréales d’extension modeste (avoine et seigle) ainsi que sur betterave, pomme de terre et plantes
maraîchères. Il peut en conséquence poser des problèmes en cas d’implantation en sols infestés.
Signalons, ensuite et enfin, les pucerons qui, sans être très abondants sur le sarrasin y sont fréquemment
rencontrés (Mysus persicae notamment) et véhiculent le virus de la Mosaïque du concombre.
LES MAUVAISES HERBES
On sait que le sarrasin est considéré comme une plante étouffante pour les adventices et que son caractère
« nettoyant » (sur défriches de landes ou de prairies en particulier) fut autrefois vanté. Cela est dû à son cycle
végétatif très court (de 90 à 120 jours) et, notamment, à sa rapidité de levée, sa forte croissance initiale, son port
étalé et son feuillage « couvrant ». Quelques semaines après le semis, on ne peut plus pénétrer dans les cultures
sans leur causer des dommages importants.
Est-ce à dire que le blé noir ne souffre pas de la compétition avec les mauvaises herbes ? Celle-ci s’exerce très tôt
après le semis et provient de plantes à croissance rapide, notamment de la Ravenelle. Compte tenu du moment
tardif de semis, des façons culturales superficielles préalables limitent beaucoup ces infestations. Il est néanmoins
parfois obligatoire d’enfouir une première implantation très envahie et de ressemer (pratique appliquée en
Corrèze).
Il n’existe, en effet, aucun désherbant auquel le sarrasin ne soit pas sensible. Des résultats fragmentaires font
cependant état de sa tolérance au dalapon et au diclofop-méthyl efficaces contre le vulpin et la folle avoine qui
peuvent porter léger préjudice à des semis précoces.
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Des questions de rémanence peuvent se poser, surtout en cas d’implantation en remplacement d’une culture non
levée ou détruite, ainsi qu’en culture dérobée (pour engrais vert par exemple). On signale ainsi la sensibilité du
sarrasin à l’atrazine et à la trifluraline.
De tels problèmes ne devraient pas se poser en culture principale. Des recherches de molécules sélectives sont
actuellement poursuivies.
AUTRES ENNEMIS
Une dernière question est celle des dégâts d’oiseaux en fin de végétation. Le sarrasin est souvent implanté en
parcelles de taille réduite et sa maturité n’intervenant qu’en septembre/octobre, il peut alors subir les ravages
d’oiseaux (de gibier également) fortement attirés à cette époque. Le problème est d’ailleurs bien connu des
sélectionneurs qui doivent avoir systématiquement recours à des filets de protection. Seuls une taille suffisante
des parcelles et l’emploi éventuel des moyens classiques d’effarouchement peuvent limiter les prélèvements.
UNE CULTURE INTERESSANTE
Le sarrasin –plante peu améliorée- présente un bon comportement à l’égard des problèmes parasitaires.
En serait-il de même si les surfaces emblavées étaient étendues de façon notable, concentrées, et si des
« variétés » modernes étaient proposées aux producteurs ? Il n’est bien sûr pas possible de se prononcer de façon
tranchée. Un élément de réponse peut toutefois être trouvé dans l’expérience actuelle de l’Union Soviétique dans
ce domaine : les problèmes parasitaires y sont faibles.
La question principale à régler est certainement celle du désherbage. Rappelons aussi que le sarrasin est une
plante très sensible aux aléas climatiques : gelées tardives au printemps et précoces à l’automne, sécheresse
prolongée et fortes chaleurs estivales. Il y a lieu de noter toutefois que l’expérience de 1983 incite à être prudent
en raison du bon comportement manifesté alors par la plante.
Il faut cependant rester vigilant en raison de la dispersion actuelle des surfaces dans des milieux et sous des
conditions variées. Que les producteurs et les techniciens informent le plus largement possible des « nouveautés »
qu’ils pourraient constater dans leurs cultures. »
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