PARLEMENT EUROPÉEN
DIRECTION GÉNÉRALE DES ÉTUDES
Division des affaires internationales et constitutionnelles
PN/GG/ip/IV/WIP/2002/08/0048-0049
Luxembourg, le 11 octobre 2002
NOTE
SUR LA SITUATION POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE
DE LA RUSSIE ET SES RELATIONS
AVEC L'UNION EUROPÉENNE
Cette note a été préparée à l'attention des membres du Parlement européen. Les avis qui y sont
exprimés sont de l'auteur et ne reflètent pas nécessairement la position du Parlement européen.
Sources: Economist Intelligence Unit (EIU)
European Commission
Eurostat
Reuters
Oxford Analytica
Itar-Tass
World Markets Country Analysis
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SOMMAIRE
Page
I. SITUATION POLITIQUE ...................................................................................................... 4
II. SITUATION ÉCONOMIQUE .............................................................................................. 15
III. RELATIONS UE/RUSSIE ..................................................................................................... 22
* * *
Pour des informations complémentaires, veuillez contacter:
M. Pedro Neves, Parlement européen, DG IV, Luxembourg,
Division des affaires internationales et constitutionnelles,
Tél.: 4300-22548 / Fax: 4300-27724 / e-mail: [email protected].
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RESUME
Depuis la disparition de l'Union soviétique, la Russie est un Etat en recomposition. Après dix
années de transition marquées par des avancées en matière de démocratie (adoption d'une nouvelle
constitution en 1993, instauration du multipartisme, tenue d'élections libres), la Russie a entamé
une deuxième phase de réformes sous l'impulsion de Vladimir Poutine. Etant donné l'intense
activité législative de 2001, on peut considérer que sa formule-programme, "la dictature de la loi",
a été suivie à la lettre.. Les tentatives de réforme du judiciaire, les efforts de décentralisation, la
refonte de l'Etat sont autant de chantiers auxquels le président Poutine est attaqué. Selon des
analystes, la Russie poutinienne présente un double visage. En son sein, les droits de l'homme ne
sont pas toujours respectés, l'exemple le plus significatif étant le conflit tchétchène qui s'éternise.
On peut aussi déplorer la significative diminution de la liberté d'expression.
A l'échelle internationale, en revanche, la Russie a choisi le camp occidental dans la lutte contre le
terrorisme et s'est rapprochée avec un relatif succès d'organisations internationales: la création du
'format 20' de l'Otan et l'obtention du statut de membre à part entière du G8, en juin 2002,
l'attestent. Le différend qui l'oppose aux Etats-Unis concernant la question irakienne ne devrait pas
remettre en cause le rapprochement Russie/'monde occidental'.
Les mutations dans l'organisation de l'économie sont aussi profondes que contradictoires. La Russie
s'est remise de la crise d'août 1998. Grâce à la politique mise en œuvre, la croissance économique a
atteint 8% en 2000, 4,5% en 2001, ce qui témoigne d'un spectaculaire rebond et pourrait enfin
augurer d'un développement durable permettant l'amélioration des conditions de vie de la
population.Toutefois, la libéralisation sauvage a fait naître des éléments d'incertitude au sein de la
societé. Des exemples en sont les écarts entre nouveaux Russes et les couches marginalisées et une
dégradation des services publics. Le budget 2003 se veut optimiste et est non déficitaire pour la
deuxième fois depuis la fin de l'URSS
1
. La situation économique reste néanmoins fragile puisque la
croissance russe est étroitement liée aux cours énergétiques mondiaux.
A l'époque de la Guerre Froide, la Communauté européenne et l'Union Soviétique n'ont pas
entretenu de relations étroites. Cependant, depuis 1991, la CEE puis l'UE et la Russie ont enfin
compris qu'il était de leur intérêt mutuel de mettre en place un véritable partenariat. Un Accord de
Partenariat et de Coopération a donc été signé en 1994 et est entré en vigueur en 1997. Une
"Stratégie Commune" sur la Russie a également été adoptée par le Conseil européen en 1999. Elle
vise à instaurer une plus grande cohérence de la politique de l'UE envers la Russie en combinant les
politiques des Etats membres et celle de l'Union. Des sommets bi-annuels au plus haut niveau sont
aussi l'occasion de renforcer les liens en train de se mettre en place et d'échanger un certain nombre
d'idées. L'UE est un partenaire majeur de la Russie. Elle est en effet son principal partenaire
commercial et son plus large fournisseur d'aide. Le programme Tacis demeure le principal
instrument pour soutenir les réformes économiques et techniques. La situation en Tchétchénie reste
cependant un point d'ombre dans les relations entre les deux partenaires. L'autre source de tensions
provient de la question de Kaliningrad, pour laquelle les deux parties ont beaucoup travaillé depuis
la présidence suédoise du premier semestre 2001. D'autres défis vont prochainement servir de test
au rapprochement UE/Russie: l'élargissement de l'UE, le partenariat énergétique, la création d'un
Espace Economique Commun, l'architecture de la sécurité européenne... Etant donné l'importance
1
Le premier budget excédentaire a été présenté en 2002.
4
stratégique majeure que revêt ce rapprochement UE/Russie, et connaissant les acteurs actuels, il
paraît raisonnable de faire preuve d'optimisme quant au futur du couple UE/Russie.
I. SITUATION POLITIQUE
1. Introduction
Aux VIIe et VIIIe siècles, les territoires actuels de l'Ukraine et du Bélarus sont essentiellement
peuplés de tribus slaves, d'origine indo-européenne. Au IXe siècle, un regroupement de forces
politiques et culturelles diverses aboutit à la formation de ce que l'on nomme la "Rus kiévienne".
Cet état (nommé plus tard le "premier" Empire russe) est victime des invasions mongoles du XIIe
siècle. Le centre de gravité des Slaves se déplace, alors, vers la Moscovie au nord-est.
En 1490, le prince moscovite Ivan III met fin à deux siècles et demi de domination mongole.
L'expansion russe peut alors commencer
2
. François Thual a résumé cette expansion par cette
formule: "Pendant trois cent ans, l'empire russe s'est formé par une avancée quotidienne de 140
km2". Vers le milieu du XIXe siècle, l'Empire russe s'étend sur trois continents: Europe (orientale),
Asie (toute la partie septentrionale et le Turkestan récemment conquis) et Amérique (l'Alaska, plus
tard vendu aux Américains). Cependant, l'Empire russe se révèle un géant aux pieds d'argile: le
tsarisme est incapable d'adapter son système politique à l'évolution économique et sociale de la
Russie du XIXe siècle. La première Guerre mondiale et les révolutions de 1917 favorisent la chute
de l'Empire et son remplacement par l'URSS (1922).
A son tour, le régime soviétique, secoué par la guerre en Afghanistan, par la montée des
nationalismes régionaux (Républiques baltes, Caucase) et incapable de faire face aux nouveaux
défis technologiques de la fin du XXe siècle, entre en agonie. La tentative de putsch
néocommuniste d'août 1991 précipite la fin de l'URSS. Le 29 décembre 1991, le drapeau russe
remplace le drapeau soviétique sur le Kremlin, donnant naissance à 15 Etats indépendants sur les
ruines d'un empire s'étendant sur "le sixième des terres émergées". Retournés à leurs frontières du
XVIIe siècle, "... l'espoir des Russes est l'achèvement d'une Russie civilisée rejoignant enfin et de
manière définitive les grandes nations occidentales."
3
Avec une superficie de 17.075.400 km2, la Russie est encore le pays le plus vaste du monde, une
sorte d'amphithéâtre ouvert sur l'Océan arctique, bordé de montagnes au sud et à l'est. Elle a des
frontières avec de nombreux pays d'Europe et d'Asie: Norvège, Finlande, Estonie, Lettonie,
Lituanie, Pologne, Bélarus, Ukraine, Géorgie, Azerbaïdjan, Kazakhstan, Mongolie, Chine et Corée
du nord
4
.
Prise en tenailles entre un taux de mortalité qui ne cesse de croître (14,7 o/oo) et une natalité qui
n'en finit pas de chuter (8,4 o/oo), la Russie connaît, depuis les années 1990, un net déclin de sa
2
Voir annexe II.
3
Hélène Carrère d'Encausse, La Russie inachevée, Fayard, Paris, 2000.
4
Voir annexe I.
5
population - passée de 147,8 millions en 1989 à 145 millions en 2001. Les Russes constituent
81,5% de la population composée également de 3,8% de Tatars (ou Tartares) et de 3% d'Ukrainiens.
2. Institutions et politique intérieure
La Constitution russe a éadoptée par référendum le 12 décembre 1993. Elle affirme, dans l'article
1, que "la Russie est un Etat de droit". La séparation des trois pouvoirs - législatif, exécutif et
judiciaire - est énoncée dans l'article 10. La Cour constitutionnelle veille à la constitutionnalité des
lois et des actes normatifs du président, du gouvernement, de la Douma et du Conseil de la
Fédération. Les lois et tout acte juridique normatif concernant les droits de l'homme et du citoyen
doivent être publiés. L'indépendance de la justice est garantie par l'inamovibilité et inviolabilité des
juges.
2.1. L'exécutif
a) Président: Le Chef de l'Etat est Vladimir Poutine, élu le 26 mars 2000 avec 52,2% des voix. Il a
succédé à Boris Eltsine qui a été, le 12 juin 1991, le premier président russe élu au suffrage
universel. Le président est élu pour un mandat de 4 ans. La prochaine élection est prévue pour mars
2004.
b) Premier ministre: Mikhail Kassianov, nommé le 18 mai 2000, est le septième chef de
gouvernement depuis la dissolution de l'URSS.
Selon la Constitution, le gouvernement exerce le pouvoir exécutif. Il adopte des ordonnances et des
arrêtés, il dispose de l'initiative législative (environ la moitié des lois adoptées par la Douma
provient d'une initiative gouvernementale). Mais la marge d'initiative du gouvernement russe est
étroitement subordonnée au président. C'est en effet ce dernier qui nomme le Premier ministre avec
l'accord de la Douma ainsi que les ministres sur proposition du chef du gouvernement. Le président
peut mettre fin aux fonctions du gouvernement, comme il l'a fait avec les 5 premiers chefs de
gouvernement de la période post-soviétique.
2.2. Le législatif
Le premier parlement russe (Douma) élu au suffrage universel depuis 1917, fut mis en place le 4
mars 1990 et porta Boris Eltsine à sa présidence. Les élections législatives du 19 décembre 1999 ont
inauguré la 3ème gislature. Le parti communiste a obtenu (comme lors de la précédente
législature) le plus grand nombre de sièges (94) et a donc réussi à imposer son candidat, M.
Guennadi Seleznev, à la tête du Parlement
5
. Les prochaines élections législatives sont prévues pour
décembre 2003.
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Voir annexes III et IV.
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