L`approche stratégique des relations professionnelles

LE DIALOGUE SOCIAL,
UN ELEMENT DE LA PERFORMANCE DE L’ENTREPRISE
TABLE DES MATIERES
Définitions
La rationalité limitée des acteurs
Le processus de régulation
L’approche stratégique
La théorie de la régulation conjointe
Dialogue social et performance
L’approche systémique des relations professionnelles
L’approche stratégique des relations professionnelles
Méthodologie de la recherche
Bibliographie
Définitions
Avant de nous intéresser au lien entre dialogue social et performance, il nous faut
préalablement définir ces termes.
Une définition du dialogue social nous est apportée par l’Organisation Internationale du
Travail (OIT). Celle-ci peut être consultée sur le site internet, http://www.ilo.org
Cette définition débute en ces termes : « L’OIT définit le dialogue social comme incluant tous
les types de négociation, de consultation ou simplement d’échange d’informations entre les
représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs sur des questions
présentant un intérêt commun relatives à la politique économique et sociale… La concertation
peut être informelle ou institutionnalisée, et elle conjugue souvent ces deux aspects. Elle peut
intervenir au niveau national, au niveau régional ou à celui des entreprises. Elle peut être
interprofessionnelle, sectorielle ou présenter toutes ces caractéristiques à la fois… Le dialogue
social peut prendre diverses formes, depuis le simple échange d’informations jusqu’aux
formes de concertation plus abouties… »
Nous entendons ainsi sous le vocable « dialogue social », l’ensemble des consultations entre
les partenaires sociaux c'est-à-dire les représentants des employeurs et ceux des salariés.
Le dialogue social est inclut au sein des relations professionnelles. Le terme relations
professionnelles peut se définir comme « l’étude des relations entre l’Etat, les employeurs, les
employés et leurs organisations individuellement ou collectivement, entre eux et avec leur
environnement technique, économique, politique et social » Rojot (1989). Ce terme n’a pas
été retenu par tous les auteurs. Les termes « relations industrielles » (qui est la traduction
littérale de « industrial relations ») ou « relations sociales » lui sont parfois préférées. Pour
notre part, et comme le propose Rojot (1989) nous considérerons l’ensemble de ces termes
comme synonymes.
Le terme de performance, quant à lui, est largement utilisé en sciences de gestion sans que sa
définition fasse l’unanimité parmi les chercheurs (Bourguignon, 1996). De nombreux travaux
ont été menés afin d’appréhender l’ensemble des dimensions entrant dans le champ de la
performance. Nous retiendrons la définition de Morin, Savoie et Beaudin (1994) qui ont
élaboré une typologie sur le sujet. Ceux-ci énumèrent quatre grandes approches théoriques de
la performance.
Une première approche économique reposant sur la capacité de l’entreprise à dégager des
profits et à rémunérer les capitaux investis. Cette approche est le plus souvent énoncée en
terme économique ou financier (par exemple, la valeur boursière).
L’approche sociale, quant à elle, prend en considération les dimensions humaines de
l’organisation. Cette approche met l’accent sur la cohésion et le moral des salariés qui sont
supposés améliorer l’intensité et la qualité du travail et, par conséquent, la performance de
l’organisation.
Une troisième approche s’est développée, par opposition aux précédentes, préconisant non pas
un modèle idéal d’organisation mais plutôt un modèle adapté à l’environnement assurant la
pérennité de l’organisation. Dans cette conception les critères d’appréciation de la
performance sont liés à la protection et au développement des ressources financières
(rentabilité), du marché (compétitivité) et de la qualité des produits et services. Ces critères
révèlent la capacité de l’organisation à s’adapter à son environnement.
L’approche politique, enfin, repose sur une remise en cause des trois approches précédentes.
Chacune de ces approches entend la performance soit comme la mesure d’un résultat, soit
comme l’action qui aboutit au résultat. Au contraire, l’approche politique ne se focalise plus
sur la réalisation des objectifs de l’organisation mais considère que tout individu peut avoir
ses propres critères pour juger la performance d’une organisation. La performance ne pourrait
s’apprécier dans l’absolu, mais par rapport à un référentiel dont le choix appelle un jugement,
une interprétation. La performance serait ainsi, une construction sociale qui dépend du point
de vue des acteurs.
Le modèle de Morin, Savoie et Beaudin permet de faire ressortir les caractères
multidimensionnel et subjectif du concept de performance.
Le lien dialogue social- performance de l’entreprise a fait l’objet de nombreuses études,
principalement dans les pays anglo-saxons, sous son aspect « quantitatif » (Pour un
développement récent voir la thèse de P. Laroche : « L’influence des organisations syndicales
de salariés sur la performance économique et financière des entreprises »).
Notre recherche, quant à elle, propose d’étudier ce lien dialogue social- performance sous son
aspect « qualitatif ». Nous nous focaliserons sur le processus par lequel les acteurs mettent en
œuvre leurs stratégies dans le cadre de la négociation collective ; et tenterons de rapprocher
ce processus de la performance de l’entreprise.
Puisque nous souhaitons démonter les mécanismes de la négociation collective, il nous faut
comprendre, d’une part, le comportement des acteurs concernés par ce processus et, d’autre
part, comment les règles se forment.
LA RATIONALITE LIMITEE DES ACTEURS
Ce concept est l’œuvre de Simon (1947). Par la suite, de nombreux auteurs ont repris cette
hypothèse de rationalité limitée des individus ( Boudon (1979), Crozier et Friedberg (1977)
notamment).
La rationalité limitée peut, tout d’abord, être explicitée en reprenant l’approche adoptée par
March et Simon (1957).
Les choix des individus s’appuient sur « un schéma simplifié, limité et approximatif de la
situation réelle ». Les éléments de ce schéma sont « le produit de processus psychologiques et
sociologiques, comprenant les activités propres de celui qui choisi, et celles des autres dans
son milieu ». Les auteurs illustrent la différence entre la rationalité absolue et la rationalité
limitée par un exemple concret : « L’exploration d’une meule de foin pour y trouver la plus
fine aiguille, et l’exploration pour en trouver une assez fine pour pouvoir coudre, sont d’ordre
différent », la plus fine correspond à un optimum, la rationalité absolue, une assez fine pour
pouvoir coudre correspond à la rationalité limitée.
Pour approfondir ce concept, nous pouvons nous référer à un ouvrage de Rojot (1994) qui
nous offre une vue synthétique de ce concept. En voici un extrait :
« « En néral, la rationalité concerne la sélection de branches d’alternatives de comportement préféré dans les
termes d’un système de valeurs quelconque à travers lequel les conséquences de ce comportement peuvent être
évaluées. »° Cependant, l’on ne peut s’attendre à ce que des individus soient parfaitement et totalement
rationnels et se comportent comme tels. Par exemple, il n’est pas possible pour un individu de définir clairement
ou même simplement de deviner les principaux comportements alternatifs qu’il lui serait loisible d’adopter
quand il se trouve dans une situation donnée. Dans la plupart des cas, il y a trop de possibilités et de directions
d’actions pour qu’il lui soit possible de les découvrir toutes et même simplement de les énumérer. Il n’est pas
possible de considérer ensemble, dans leur totalité, celles qui vont être évoquées car cela dépasse les capacités de
traitement des informations d’un cerveau humain. Il est encore plus difficile d’appliquer complètement les
mesures d’un système de valeurs stable et cohérent aux branches d’alternatives évoquées et à ceux de leurs
aspects considérés car une situation est trop riche en détail et il n’y a pas assez d’informations disponibles. Enfin,
il est totalement impossible, en terme absolu de faisabilité, de dérouler les chaînes possibles et probables de
conséquences qui découlent de chaque branche d’alternative, car le futur est trop incertain. Trop de branches
d’alternatives s’ouvrent, se ferment avec trop de conséquences imprévisibles. Tenter de comprendre ou
simplement de deviner les conséquences d’une action donne, au mieux, toujours des résultats fragmentés et
jamais complets. En d’autres termes « les limites de la rationalité dérivent de l’incapacité de l’esprit humain à
faire porter sur une simple décision tous les aspects des valeurs, connaissances et comportements qui seraient
pertinents .»°
° SIMON H.A., Administrative Behavior, New-York, The Free Press, 1947
Traduit et cite dans l’ouvrage : ROJOT J., La négociation , Paris, Vuibert, 1994
Les individus ne peuvent donc être parfaitement et « objectivement », au sens de Simon, rationnels, pas plus
qu’ils ne peuvent avoir un comportement prédéterminé ainsi que cela vient d’être dit. Cependant, cela ne veut
pas dire non plus qu’ils vont agir au hasard ou de manière irrationnelle. Dans le cadre de leurs connaissances
limitées, de leurs capacités réduites, et des moyens d’action dont ils pensent disposer, ils vont sélectionner une
branche d’alternative qui est celle que, dans ces circonstances, ils préfèrent. Donc, ils ne sont pas irrationnels,
mais leur rationalité est liée, limitée. »
Nous adopterons tout au long de nos développements cette hypothèse de rationalité limitée.
En effet, les choix des acteurs du dialogue social, comme ceux de n’importe quel individu, ne
se font pas en recherchant l’optimum, mais en choisissant une solution qui leur parait
« satisfaisante » c'est-à-dire une solution qui est réaliste et qui donne des résultats acceptables.
LE PROCESSUS DE REGULATION
L’activité de régulation peut être analysée à travers différentes théories. Si une approche
stratégique peut être entreprise, nous ne pouvons faire l’économie d’une analyse redonnant un
caractère politique à l’activité de gulation : nous entendons par les développements issus
des travaux portants sur la régulation conjointe. Une approche de type interactionniste peut
nous éclairer quant aux mécanismes de coordination.
L’approche stratégique
Cette vision a été adoptée par Schelling (1986) ainsi que par Walton et Mc Kersie (1965) et
consiste à appliquer la théorie des jeux au conflit social.
Schelling propose d’examiner la stratégie ainsi que les coups joués par les acteurs.
Walton et Mc Kersie proposent, quant à eux, d’analyser les gociations intra parties, les
zones de contrat, les points de résistance ainsi que le caractère distributif et intégratif des
négociations.
Les négociations intra parties
Lors du processus de régulation, le négociateur de chaque partie est mandaté par un groupe
d’individus qui n’est jamais totalement homogène, aussi bien du point de vue de leurs intérêts
objectifs que de leurs perceptions des problèmes.
On ne peut donc comprendre une activité de régulation sans mettre en lumière les différences
de point de vue au sein de chaque partie.
Les zones de contrat
Selon Walton et Mc Kersie, les individus prennent leurs décisions en fonction des limites
qu’ils s’autorisent, leurs points de résistance, et de leur appréciation des points de résistance
de l’autre partie.
Un point de résistance peut se définir comme une situation lors de laquelle un des
négociateurs préfère renoncer à la perspective d’un accord plutôt que d’accepter ce qui lui est
proposé. Un accord n’est possible que s’il existe une zone de contrat c'est-à-dire une zone au
sein de laquelle un compromis peut être trouvé. La zone de contrat a pour limite les points de
résistance des acteurs de la négociation.
Cette analyse permet de connaître les raisons pour lesquelles un accord a été trouvé ou, au
contraire, les motifs d’un blocage sur un thème particulier.
Négociation distributive et négociation intégrative
Selon Walton et Mc Kersie, une négociation porte toujours sur deux types d’enjeux : des
enjeux relevant d’un modèle de jeu à somme nulle, chacun gagnant ce que l’autre perd ; alors
que d’autres enjeux relèvent d’un jeu à somme non nulle, une des parties pouvant gagner plus
que l’autre ne perd et réciproquement. Il existe, ainsi, des situations plus avantageuses à l’une
et l’autre des parties.
Dans une situation de gociation distributive, les intérêts des acteurs sont antagonistes. Au
contraire, lors d’une situation de négociation intégrative, même si les intérêts des acteurs sont
opposés, une meilleure solution pour les différents protagonistes peut être recherchée, ce qui
est communément appelée une solution « gagnant-gagnant ».
Cependant, et comme le propose Adam et Reynaud (1978), les enjeux de nombreuses
négociations empruntent à la fois un caractère distributif et un caractère intégratif.
Les auteurs parlent de « jeux mixtes » car une négociation intégrative possède toujours un
caractère conflictuel puisque, même si des gains sont possibles pour les deux parties, les
intérêts des acteurs restent divergents.
Nous considérons ainsi que toute situation de négociation collective ne peut être comprise
sans intégrer sa dimension conflictuelle, à savoir l’affrontement des intérêts et des rationalités
des employeurs et des salariés.
La théorie de la régulation conjointe
Celle-ci ajoute à l’approche économique, pour laquelle les acteurs de la négociation se
caractérisent avant tout par des intérêts divergents ; une approche plus politique pour laquelle
les acteurs possèdent des « formes de rationalités différentes » (Gavini, 1998). Ainsi, les
acteurs ne sont pas uniquement animés par des considérations économiques, comme le
prétendent les tenants d’une approche économique, mais agissent selon des conceptions de la
justice ou de l’équité différentes.
Ce courant se propose d’analyser le processus de régulation au sein d’un collectif. Au sein
d’une entreprise, de nombreuses sources, niveaux et domaines de régulation existent
(Reynaud, 1994).
Les sources de la régulation
Deux sources de régulation peuvent être distinguées
La régulation de contrôle : Il s’agit des règles officielles émises par une autorité supérieure.
Ces règles émanent de la direction et de l’encadrement. Elles visent à fixer ou orienter
l’activité, l’organisation, la cadence de travail ou la qualité des résultats d’un groupe.
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