Un quinqua bien branché
18 mars 2005
Ordinateur: le mot est entré dans notre lexique, son utilisation dans les mœurs.
Et pourtant, il n'y a "que" cinquante ans qu'il a été inventé, ou plutôt proposé,
par un linguiste à la firme IBM.
En 1955, la société IBM France s'apprête à commercialiser les
premières machines électroniques destinées au traitement de
l'information. Aux États-Unis, ces nouvelles machines étaient
désignées sous le vocable Electronic Data Processing System ou
EDPS. Le mot «computer» était plutôt réservé aux machines
scientifiques et se traduisait aisément en «calculateur» ou
«calculatrice».
La branche française d'IBM décide alors de trouver un terme
précis pour lancer son produit. Mais lequel ? Le responsable de la
publicité se souvient d'un de ses anciens maîtres, Jacques Perret, professeur de philologie
latine à la Sorbonne, qu'il sollicite. Que diriez-vous d'ordinateur ?, répond le philologue le 16
mars 1955. C'est un mot correctement formé, qui se trouve même dans le Littré comme
adjectif désignant Dieu qui met de l'ordre dans le monde. Un mot de ce genre a l'avantage de
donner aisément un verbe "ordiner", un nom d'action "ordination". L'inconvénient est que
"ordination" désigne une cérémonie religieuse, mais les deux champs de signification
(religion et comptabilité) sont si éloignés et la cérémonie d'ordination connue, je crois, de si
peu de personnes que l'inconvénient est peut-être mineur.
Il est vrai que l'ordinateur, par sa capacité à gérer une grande quantité de données, les
ordonne, c’est-à-dire les trie. Oui, mais jusqu'à présent du moins, c'est nous ou les compétents
programmateurs qui lui ordonnons de faire ceci ou
cela. Ou qui lui donnons des noms d'oiseaux quand
il comprend mal nos ordres.
Une progression lente mais foudroyante
Curieusement, avant que l'ordinateur ne
s'impose comme nouvel outil de
communication et vecteur d'informations via
l'INTERNET, le mot n'était pas encore en
tête de la définition dans les dictionnaires.
Ainsi, un Robert de 1986 ne signale son
existence qu'en troisième position.
L'acception d'alors nous apparaît aujourd'hui quelque peu surannée ou du moins incomplète:
"Grosse calculatrice électronique dotée de mémoires à grande capacité, de moyens de
traitement des informations à grande vitesse, capable de résoudre des problèmes
arithmétiques et logiques complexes grâce à l'exploitation automatique de programmes
enregistrés".