Médicaments : quand les laboratoires sont rémunérés à la performance
CATHERINE DUCRUET - LES ECHOS | LE 03/03/2015
Des laboratoires sont désormais prêts à rembourser le prix d'un traitement à l'Assurance-maladie s'il
n'est pas efficace. Le succès ou non du traitement est fonction de l'examen des données cliniques de
chaque patient.
Comment rémunérer l'innovation dans la pharmacie ? A l'instar du Sovaldi, le traitement contre
l'hépatite C à plus de 50.000 euros, l'arrivée sur le marché de nouveaux médicaments, très efficaces mais
à des prix très élevés, menace de faire imploser les caisses des systèmes de santé. Pour limiter ce risque,
la France a décidé de définir des enveloppes de remboursement. Au-delà de celles-ci, les laboratoires
payent une pénalité. En Grande-Bretagne, si le rapport coût- efficacité n'est pas jugé positif, le produit
n'est pas pris en charge. Pour pouvoir continuer à innover et à croître, l'industrie tente aujourd'hui de
proposer des solutions. Celgene, l'une des premières sociétés de biotechnologie mondiale, s'est ainsi
engagée auprès des autorités françaises sur l'efficacité de l'Imnovid, un médicament contre un cancer du
sang, le myelome multiple, en contrepartie d'un prix rémunérateur. Elle a obtenu l'été dernier un prix de
8.900 euros pour 21 jours de traitement, mais s'est engagée à rembourser l'Assurance-maladie si le
patient ne répond pas.
Des données d'efficacité pour chaque patient
Pour cela, Celgene a créé un registre permettant de consigner pour chaque patient soigné les données
d'efficacité et de sécurité. « L'idée, c'est que le traitement n'est supporté par l'Assurance-maladie que
lorsqu'il marche ", explique Frank Auvray, directeur général de Celgene en France. Aujourd'hui, le
registre compte 1.000 patients pour une population cible de 2.000. « Pour garantir l'objectivité de la
procédure, la gestion du registre est confiée à une CRO (un sous-traitant) et les critères d'efficacité
retenus sont ceux d'experts internationaux de référence regroupés dans l'International Myeloma
Working Group », précise Frank Auvray. Le dispositif promu par Celgene vise à apporter la preuve que le
médicament est efficace dans la « vraie vie " et pas seulement dans les conditions d'expérimentation très
particulières des essais cliniques. D'autres laboratoires comme GSK avec l'antiépileptique Trobalt ou le
belge UCB avec le Cimzia contre la polyarthrite rhumatoïde sont dans des démarches voisines. Pour le
Cimzia, lancé en août 2010, dont un an de traitement coûte entre 11.000 et 12.500 euros et concerne
16.000 à 20.000 patients, c'est lors du réexamen du prix en avril 2013 que le dispositif a été mis en place.
Pour obtenir le maintien de celui-ci, UCB s'est engagé à réaliser une étude « en vie réelle » portant sur
750 patients pendant trois ans. Ici, pas de création de registre, ce sont les données de l'Assurance
maladie qui sont utilisées. A travers les remboursements, on peut en effet suivre le parcours médical du
patient, savoir s'il a changé de traitement, etc. Et comme dans le cas de Celgene, si l'efficacité n'est pas
au rendez-vous, UCB remboursera.
Ce type de contrat a le mérite de récompenser par des prix attractifs de véritables innovations. A priori, il
doit aussi conférer au produit concerné un avantage par rapport à ses concurrents par une preuve
encore plus solide de son efficacité et un meilleur prix. Pour autant, la mise en oeuvre des contrats de
performance n'est pas si simple. Tout d'abord, les critères de succès ou d'échec qui conditionnent la
prise en charge par l'Assurance-maladie doivent être très précisément définis. C'est ce qu'a fait Celgene
en reprenant la définition qui en est donnée par le Myeloma Working Group. Autre difficulté, « les
médecins qui doivent nourrir le registre, le font en plus de leur activité habituelle, observe Robert Dahan,
ancien patron de l'industrie pharmaceutique et consultant, et ils sont moins payés que pour un essai
clinique. " D'où une moindre motivation. Or la qualité des données consignées est déterminante. « Enfin,
observe Robert Dahan, lors de la signature du contrat, chacun fait un pari. Or, quand les résultats sont là,
il y a forcément un perdant. De longues contestations sont donc à craindre. » C'est pourquoi, Jean-Michel
Joubert, responsable des affaires publiques d'UCB, estime que de tels accords ne sont possibles « que s'il
existe une relation de confiance avec l'autorité de santé, et si le laboratoire accepte de contribuer à la
prise en charge financière des patients traités ".
Les contrats prix-performance, constituent donc une piste intéressante pour sortir de la maîtrise
comptable des dépenses de médicaments, mais ce ne sera sans doute pas la seule.
En savoir plus sur http://www.lesechos.fr/03/03/2015/LesEchos/21889-062-ECH_medicaments---quand-
les-la-boratoires-sont-remuneres-a-la-performance.htm#lRX4TUACwBtTftQj.99
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