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DYSLEXIE : DE LA THEORIE A LA PRATIQUE
Intervention du 2 Avril 2007 par Drs CHERFAN et DAVID
Médecins de l’Education Nationale
Centre médico-scolaire HAGUENAU
Tel : 03 88 73 93 30
Plan
Cerveau lecture et dyslexie
La lecture
La dyslexie
Signes prédictifs, signes caractéristiques
Psychologie
En pratique, dépistage et remédiations
Le cerveau de l’enfant
Le fonctionnement modulaire du cerveau est une conception qui vient de la
neuropsychologie.
Un module est un réseau de neurones qui réalise une tache intellectuelle comme le langage
la programmation du geste moteur (praxies)…
Ces modules sont relativement autonomes les uns des autres. L’atteinte d’un module peut
être isolée. C’est pourquoi on parle de trouble cognitif spécifique.
Il n’y a pas de module spécifique pour la lecture. La lecture emprunte des circuits à d’autres
modules (du langage, de la vision de l’audition…). La lecture est apparue très récemment
dans l’histoire de l’homme, il y a 5000 ans. Le cerveau humain n’est donc pas « précab »
pour la lecture.
explique qu’on peut assister à des difficultés dans un domaine précis avec de
bonnes compétences dans d’autres domaines et une intelligence préservée.
La plasticité cérébrale chez l’enfant
Des zones précises du cerveau sont génétiquement prédestinées à se développer et se
spécialiser pour réaliser des tâches précises. Chez l’enfant il est possible que si une zone
est défaillante, la fonction se développe à partir d’un autre réseau neuronal mais de façon
moins performante. La performance d’un réseau neuronal augmente avec la stimulation de
ce réseau, il disparaît en l’absence de stimulation. (ex : chatons maintenus dans l’obscurité à
la naissance qui deviennent aveugles sans pouvoir récupérer la vision). Il en est de même
pour les fonctions intellectuelles qui doivent être stimulées pour se développer dans un délai
donné (si défaut de stimulation, fonction moins performante).
Si fonction défaillante au départ, entraînement nécessaire pour en améliorer la performance
un entraînement est toujours nécessaire et utile, que la fonction soit performante
ou non au départ
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La lecture : une activité neurologique
La région occipito-temporale G inférieure se situe entre les aires visuelles du cerveau
localisées au niveau occipital et les aires du langage qui se situent elles au niveau de la
partie inférieure du cortex frontal et de la région temporale.
Cette région a été mise en évidence grâce aux nouvelles techniques d’imagerie médicale,
IRMf.
Quand le cerveau est soumis à une séquence ordonnée de lettre codant pour un mot connu
l’aire temporale inférieure G s’active. Ce n’est pas le cas lorsqu’on présente au cerveau des
lettres qui ne correspondent pas à un mot connu par le sujet.
Cette région est a une localisation invariable, elle est la même quelque soit la langue ou
l’écriture.
Elle a un double rôle :
- créer une représentation visuelle abstraite des mots écrits,
- mettre en relation cette représentation visuelle avec les régions du langage codant
pour les sons et les sens.
Elle se développe de façon importante entre 6 et 10 ans (cela est mis en évidence par une
forte activation en imagerie fonctionnelle)
Elle continue à se développer si elle est stimulée même après l’adolescence.
Il y a une corrélation forte entre l’importance de l’activation de cette zone et la performance
en lecture.
Cette région est celle qui semble la plus spécifique de l’activité de lecture.
VIDEO
Présentation vidéo de l’intervention du Pr DEHAENE lors du séminaire sur la lecture en
mars 2006.
Extrait du DVD : « …apprendre à lire… » scérén (CNDP)/Ministère de l’Education Nationale ;
Présentation du fonctionnement neurologique lors de la tâche de lecture. Une zone cérébrale
(occipito-temporale gauche) intervient de façon systématique quelque soit la langue utilisée.
Il y a une corrélation forte entre l’importance de l’activation de cette zone et la performance
en lecture.
Le cerveau de l’enfant dyslexique
Les difficultés de l’enfant dyslexique ont un support neurologique.
Des anomalies morphologiques
L’étude post mortem du cerveau de personnes dyslexiques met en évidence :
- des différences de forme et d’épaisseur de certaines régions du cerveau
(planum temporal) et
- des différences dans l’organisation des tissus nerveux (ectopies neuronales=amas de
cellules en position superficielle et perte de l’organisation en colonnes)
au niveau des différentes régions impliquées dans la lecture.
Des anomalies fonctionnelles
La lecture de mots active essentiellement 2 zones, pariétale gauche (aire du langage) et
temporale gauche inférieure.
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On constate chez le dyslexique :
- une sous-activation systématique de la région occipito-temporale G (= marque
fonctionnelle de la dyslexie) ;
- une sous-activation non constante de l’aire du langage ;
- parfois une activation plus étendues que pour des normolecteurs (marque de la
compensation neurologique).
S’il s’agit d’un trouble neurologique, cela signifie que ce n’est pas un « blocage
psychologique », ou de la mauvaise volonté. Cela nexclut pas les répercussions
psychologiques et n’enlève en rien l’importance de la place de la pédagogie.
Il n’y a pas de réponse médicale mais uniquement la rééducation et la
pédagogie.
Apprentissage de la lecture
La lecture consiste en :
1) l’identification des mots écrits : analyse visuelle puis mise en relation avec le lexique
mental (orthographique, phonologique, sémantique).
2) La compréhension des mots, phrases et /ou des textes lus. Dépend du vocabulaire,
de la syntaxe, des connaissances, discriminations phonémique..
L’apprentissage de la lecture est une activité non naturelle qui nécessite un apprentissage.
La lecture est une invention récente dans l’histoire de l’homme. Le cerveau n’est pas
précablé pour celle-ci et n’a pas pu se modifier pour faciliter l’apprentissage de la lecture.
Le langage est une prédisposition génétique d’espèce qui apparaîtra quelque soit la culture,
l’éducation, comme la marche.
Si la finalité de la lecture est la compréhension. Elle dépend :
- du niveau de compréhension du langage oral,
- de la maîtrise de l’identification des mots.
Pour avoir 1 niveau de compréhension correct en lecture, il faut maîtriser parfaitement la
lecture pour que le coût attentionnel soit le plus faible possible.
On considère qu’il existe une maîtrise des procédures d’identification des mots, lecteur
expert à partir du CM2 ou de la 6ème.
Ainsi on ne peut pas dissocier l’apprentissage de la langue orale et écrite.
Et l’apprentissage de la langue écrite s’appuie sur la langage oral.
Les étapes du développement de la lecture.
On distingue 3 stades qui s’étalent sur plusieurs années:
- le stade logographique,
- le stade alphabétique
- le stade orthographique.
Le stade logographique
correspond à :
- la familiarisation du système visuel avec la forme des mots écrits (contours, couleurs,
calligraphie de certaines lettres qui sont plus saillantes…),
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- la reconnaissance globale de certains mots ou sigles grâce à des indices visuels.
Mise en relation du mot parlé (par ex:/kokakola ) avec l’affiche du produit qui mentionne son
nom bien sûr, mais présente également la bouteille et les couleurs caractéristiques du
produit.
On dit que la relation établie par l’enfant est arbitraire dans la mesure où il n’a, à ce stade
aucune idée du fait que la forme écrite renferme des indices permettant d’évoquer la forme
orale correspondante
= Il traite le mot écrit comme un image dont il n’est pas capable d’analyser les parties
Cet apprentissage se fait entre 3 et 5 ans, spontanément, l’enfant baignant dans des
stimulations visuelles : publicités, signalisation des rues, TV.
Reconnaissance de mots perçues comme une image
accès à la signification du mot écrit sans accès au code alphabétique
pas de correspondance graphème-phonème
simplement connexion entre une forme visuelle et une forme sonore d’un même
mot ;
Le stade alphabétique
correspond à l’apprentissage explicite des relations entre les lettres ou graphèmes et les
phonèmes.
Dans certaines écritures, l’unité de codage de l’écrit va au dessous de l’unité de codage des
mots. Elle utilise des unités de codage sans signification qui sont les syllabes ou les
phonèmes en relation avec les graphèmes.
Les phonèmes, ce sont les plus petites unités de l’oral qui permettent de différencier dans
une langue donnée deux mots différents. Ex : vol et bol.
Les lettres ou graphèmes sont l’équivalent écrit des phonèmes.
Pourquoi on parle de graphème ?
Idéalement ça devrait être les lettres qui sont reliées aux graphèmes mais on a emprunté un
alphabet, l’alphabet latin venu des grecs, qui ne codait pas exactement les mêmes sons que
nous. Ex : ne sont pas codé par une lettre dans l’alphabet ain, on an…
Ce stade est précédé d’une période entre 3 et 5 ans où l’enfant acquiert une conscience des
syllabes et phonèmes qui constituent le langage oral.
Le stade orthographique
Il se met en place progressivement après l’étape précédente dont il se nourrit.
Le stade orthographique permet d’atteindre une lecture adulte et experte.
La lecture devient rapide et l’évocation du sens est quasi-immédiate
Il consiste dans le stockage, au fur et à mesure des apprentissages, grâce à la confrontation
répétée avec des mots, de la suite ordonnée des lettres qui constituent les mots courants.
Ce stock orthographique va être utilisé en lecture et en orthographe.
Les voies de lecture
Il existe une entrée visuelle et donc un réseau neuronal qui va traiter l’information visuelle et
un réseau neuronal qui va traiter l’information du langage oral et qui contribue en partie à la
voie analytique, et une structure neuronale qui va faire la jonction entre les deux. L’élément
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important qui va faire la différence entre un apprenti lecteur et un lecteur performant est
l’automatisation du processus de conversion graphème/phonème.
Rappel sur les deux voies de lecture :
On appelle voie de lecture alphabétique (phonologique/par assemblage ou sublexicale) la
procédure qui met en relation un phonème avec le graphème correspondant.
Le mot à lire est segmenté en graphème (unité visuelle), chaque graphème est ensuite
converti en unité sonore, les phonèmes qui sont ensuite fusionnés pour reconstituer la forme
sonore globale du mot. La reconnaissance du mot se faire à partir de sa forme sonore. Celle-
ci est mise en relation avec un lexique phonologique et sémantique.
Cette voie s’automatise progressivement et permet au lecteur de lire en de plus en plus
rapidement des mots qu’il ne connaît pas.
On appelle voie de lecture orthographique ou voie directe, orthographique, par
adressage : c’est la voie qui permet de reconnaître le mot de façon globale mais dans ses
détails orthographiques; différent de la voie logographique ;
Ce qui détermine la reconnaissance du mot c’est donc la séquence ordonnée des lettres
compose le mot.
Cette séquence ordonnée est invariable ce qui explique que l’on perçoit les mots même si on
change la taille ou la police des lettres.
Le stade de l’apprenti lecteur :
Approche analytique : lente
coûteuse en énergie
compréhension faible
Automatisation progressive
Le stade du lecteur performant
Les tâches vont progressivement s’automatiser (ex : fusion phonémique), le processus
cognitif mis en œuvre devient inconscient. La lecture devient de plus en plus rapide avec un
coût énergétique de plus en plus faible.
Les règles acquises peuvent être généralisées à d’autres situations, ce qui correspond à une
compétence intuitive. L’apprentissage des règles est par contre formel et doit être bien
explicité ainsi que les exceptions aux règles.
Si défaut d’automatisation et de généralisation : difficulté à maintenir des acquis, erreurs
différentes d’un essai à l’autre, coût cognitif important d’où fatigabilité ;
Idem pour l’apprentissage d’un geste moteur ; ex : faire du ski, au début chutes fréquentes
car impossible de penser à la fois à toutes les composantes musculaires et d’équilibre
nécessaire pour maintenir une position jusqu’à automatisation des schémas moteurs. On a
ensuite plus conscience de comment on fait. Quand on maîtrise le ski, il est plus facile et
rapide d’accéder aux autres sports de glisse (généralisation des procédures).
L’accès au sens du texte lu : il ne dépend pas de la méthode de lecture ; la reconnaissance
des mots n’est qu’un préliminaire à la compréhension ; c’est l’importance du bagage lexical
et syntaxique qui détermine le niveau de compréhension ;
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