La pornocratie pontificale

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Sérieux comme…un pape !
Nestor Turcotte- Matane
Dans notre monde occidental déchristianisé, les catholiques
romains, centrés surtout sur les rites, ignorent la
connaissance du contenu de leur foi. Qui plus est, ils en
savent très peu sur l’histoire de l’Église à laquelle ils
adhèrent par atavisme. Ils imaginent alors un personnel
clérical sans tache, quasi angélique, et lorsqu’un scandale
éclate, aisément
maintenant
amplifié par les médias
électroniques, ils quittent sur la pointe des pieds, sans
bruit, une institution qui jadis les faisaient vivre et
leur assurait leur salut éternel.
L’Église leur apparaît comme une démocratie corrompue,
ayant à sa tête des dirigeants qui prêchent ce qui doit
être fait en oubliant de le faire eux-mêmes. Pire. Les
catholiques, comme tous les hommes de la terre qui oublient
de réfléchir, partent d’un cas, de certains cas, souvent
mal vérifiés, et généralisent. Le même phénomène s’observe
partout. Il s’agit de trouver un enseignant dans une région
qui s’est livré à des actes immoraux et répréhensibles pour
que la populace généralise et accuse le corps enseignant de
souffrir de la même maladie. La bêtise humaine n’a pas de
limite.
L’Église catholique romaine est une institution humanodivine. Le Christ, qui est la tête du Corps mystique, a
pris le risque de s’incarner dans le monde humain et
de
fonder son Église avec des gens bien ordinaires. Des
pêcheurs, des collecteurs d’impôts, des travailleurs au
quotidien. Le premier, Pierre, n’a guère donné l’exemple.
Il a trahi le fondateur. Judas, l’argentier des Douze, a
vendu son Maître pour quelques pièces d’argent. Et
l’histoire des deux mille ans de l’Église (700,000 jours !)
n’est pas toujours reluisante. D’autres ont trahi. D’autres
ont vendu le Maître. D’autres ont profité de l’institution
pour s’enrichir. D’autres, par contre, ont donné des fruits
de sainteté extraordinaire. Il
s’agit d’égrener les
siècles pour s’en convaincre. Ouvrez un martyrologe pour
voir les fruits de l’amour inconditionnel.
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Le trône pontifical a été maintes fois occupé par des
hommes ambitieux, dévoyés et cruels. Voici la liste, par
exemple, des papes qui ont été sexuellement actifs. Il y a
eu, dans l’histoire de la papauté, plus de 39 Papes actifs
sexuellement. Il y en a eu sans doute d’autres, mais ils
l’ont fait à la cachette.
Le Pape Pie II (1458–1464) avait deux enfants illégitimes
(un né a Strasbourg et l’autre en Scotland). Le Pape
Innocent VIII (1484–1492) a eu deux enfants illégitimes
avec deux maîtresses ! Le Pape Clément VII (1523–1534)
avait
un
enfant
illégitime.
Le
Pape
Gregoire
XIII
(1572–1585)
avait
un
enfant
illégitime.
Le Pape Jules II (1503–1513) avait au moins une fille
illégitime, Felice della Rovere née en 1483, 20 ans avant
son élection quelques sources indiquent qu’il avait deux
autres filles illégitimes. Le Pape Paul III (1534–1549) a
eu 4 enfants illégitimes avec sa maîtresse catholique sœur
Silvia Ruffini. Le Pape Pie IV (1559–1565) avait trois
enfants illégitimes. Le Pape Serge III (904–911) était le
père du Pape Jean XI qui avait une maîtresse catholique
sœur Marozia.
Le Pape Jean XII (955–963) a réussi à
transformer la basilique du saint Jean de Latran en un vrai
bordel. Il a été accuse d’adultère, de fornication et
d’inceste ! Le Pape Alexandre VI (1492–1503) a eu une longe
relation avec sa maîtresse sœur Vannozza dei Cattanei et il
a eu avec elle deux enfants illégitimes Cesare et Lucrezia.
Il avait beaucoup de maîtresses, une de ses maîtresses sœur
Giulia Farnese, était la sœur d’Alessandre Farnese qui va
devenir le Pape Paul III.
Voici la liste des Papes qui étaient mariées. D’abord,Saint
Pierre, dont le nom de la
belle mère est mentionnée dans
la Bible comme étant miraculeusement guérie (Math. 8 :15).
Le
Pape St. Hormisdas (514–523) était marié. Le Pape
Adrien II (867–872) était marié il a eu une fille.
Pape Jean XVII (1003) était marié et a eu un fils qui est
devenu prêtre. Le Pape Clément IV (1265–1268)) était marié
et a eu deux filles. LePape Honorius IV (1285–1287) était
marié et a eu deux fils.
Quelques autres détails intéressants sur l’histoire de
l’Église du premier millénaire. L’évêque de Rome, jusqu’à
la fin du IVe siècle, en 384 plus précisément, ne portait
pas le titre de pape. C’était le titre courant des évêques
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d’Orient. Il y avait donc plusieurs papes…dans l’Église des
premiers siècles. Quelques évêques de l’Occident porteront
aussi le titre de Pape. C’est un anachronisme de dire que
Pierre a été le «premier pape» de l’Église catholique. Il a
été l’évêque de Rome et il était marié.
Jusqu’en 769, les évêques ne changeaient pas de diocèse.
Ils ne pouvaient pas, comme de nos jours, passer d’un
diocèse à un autre. Ils étaient nommés évêque à vie dans un
diocèse
bien
précis.
Jusqu’au
8e
siècle,
tous
les
catholiques pouvaient participer à l’élection de l’évêque
et qui plus est, un laïc pouvait être choisi comme évêque.
On l’ordonnait prêtre et évêque après le choix de la foule.
En 769, un synode vint barrer la route de l’épiscopat aux
laïcs. C’est en 882, pour la première fois de l’histoire de
l’Église catholique, qu’un homme déjà évêque d’un diocèse,
devint l’évêque de Rome et donc, devint le premier pape. Ce
geste sans précédent dérogeait à ce que l’Église faisait
depuis ses débuts.
Le Christ avait dit que son Royaume n’était pas de ce
monde. Sur ce point majeur, l’Église a détourné le message
du Maître. La formation des États pontificaux et tous les
problèmes qui en découleront le démontrent bien. Le pape
Étienne II, menacé par les Lombards, se tourne vers Pépin
le Bref qui vient lui porter secours. Pépin remet au pape
les terres qu’il arrache aux Lombards. Naissent ainsi les
États pontificaux. Le pape devient, en 755, un roi
temporel. Chaque nouvelle élection du pape va devenir un
cauchemar pour l’Église.
Ainsi donc, en 767, le duc Toto de Népi nomme lui-même son
propre frère Constantin, un simple laïc, au trône de Rome.
Le roi des Lombards essaie d’avoir aussi son pape. Le moine
désigné ne fait pas long feu et retourne dans son
monastère.
Le successeur
du premier pape-roi est remplacé par un
prêtre sicilien du nom d’Étienne. Il réunit vite un synode
et décrète que seul un prêtre ou un diacre pourra désormais
devenir pape. Les évêques en étant toujours exclus
puisqu’ils étaient nommés à vie évêque d’un diocèse qu’il
ne pouvait pas quitter.
L’histoire, par la suite, du pape Formose est digne d’un
roman policier. Après sa mort, il est sorti de son tombeau
qu’il occupait depuis neuf mois. On réussit à l’asseoir sur
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une chaise pour lui faire un procès. Le pape Étienne
préside le procès et un diacre est sommé de répondre au nom
du pape.
Écoutons Daniel-Rops
(un grand historien catholique) :
« Une cérémonie abominable suivit, où le mort fut dégradé,
dépouillé des vêtements pontificaux auxquels collaient les
chairs putréfiées, jusqu'au cilice que portait ce rude
ascète ; les doigts de sa dextre [main droite] furent
coupés, ces doigts indignes [selon ses juges], qui avaient
béni le peuple ». Le procès terminé, on plaça son corps
dans un tombeau ordinaire. Des enragés le sortirent et le
jetèrent dans le Tibre. Le pape Étienne VI, auteur de cette
mascarade, fut emprisonné et étranglé par la suite dans sa
chambre.
L’historien Augustin Fliche fait commencer avec Serge III,
pape de 904 à 911, la période la plus triste de l'histoire
de la papauté. C'est cette période — 904 à 935 — que le
cardinal Baronius désigna du nom de pornocratie.
Il se trouvait bien des gens pour déplorer que des
« vicaires du Christ » déshonorent ainsi leur fonction. Au
Concile de Basle de Verzy en 991, l’évêque d’Orléans prend
la parole. Il déplore les abus de toutes sortes des
prédécesseurs du pape en fonction, surtout de Jean XII,
«plongé dans le bourbier des débauches»
et dont les
dérèglements, sans nombre, scandaliseraient les âmes les
plus fortes, si je les énumérerais. L’évêque d’Orléans
déplore aussi les gestes de Boniface VII, « tout rouge du
sang de ses prédécesseurs ». Il conclut en ces termes :
« Est-ce à de tels monstres, gonflés d'ignominie, vides de
science divine et humaine, que les innombrables prêtres de
Dieu répandus par tout l'univers, distingués par leur
savoir et par leurs vertus seront légalement soumis ? En
conséquence, patientons au sujet des souverains pontifes
autant que nous le pourrons et, en attendant, cherchons
l'aliment de la parole divine partout où il nous est
possible de le trouver. »
Selon le philosophe Martin Blais,
- lire son livre Sacré
Moyen Âge -le discours du bon évêque d’Orléans n’améliora
pas les choses. En avril 1024, Benoît VIII décède. Son
frère, un simple laïc, encore une fois, malgré le décret
qui l'interdit depuis 769, paie le gros prix et se fait
élire pape. En un jour, on lui fait gravir, comme à Léon
VIII en 964, tous les degrés de la hiérarchie jusqu'au
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souverain pontificat, qu’il assumera sous le nom de Jean
XIX. Après huit ans de règne, cet incomparable « vendeur du
temple » décède et c'est un autre assassin qui le remplace,
Benoît IX.
On dit de Benoît IX (1032-1046), qu’il avait 12 ans quand
il coiffa la tiare, mais les mœurs et les crimes qu’on lui
attribue en supposent davantage : probablement trente. Il
fit refleurir au Latran les mœurs qui avaient déshonoré ce
palais au temps de Jean XII : les aventures galantes
alternent avec les actes de cruauté. C'est avec lui que se
termine, en 1046, la période la plus sombre de l'histoire
de la papauté, que Daniel-Rops décrivait ci-dessus.
Le pontificat de Benoît IX fut pour l'Église l'époque des
plus lamentables événements. Au lieu de s'assagir en
vieillissant, ce monstre devenait de plus en plus odieux.
« Encore s'il n'eût cédé qu'au démon de la luxure ! Mais,
violent et brutal, il ne reculait, au dire de ses
contemporains, devant aucun crime ».
Le synode du Latran, en avril 1059, vote un décret qui
réserve au collège des cardinaux, créé par Léon IX,
l'élection du pape. Le peuple, le clergé et l'empereur
d'Allemagne devront se contenter d'approuver. On procède
ainsi depuis ce temps.
On n'en finirait plus si l'on voulait relever tout ce qui
s'est passé d'incroyable dans l’histoire de la papauté. Je
ne dis pas un mot de ce qui advint après le Moyen âge,
particulièrement, au 15e siècle avec la famille des Borgia.
Le scandale est tout aussi grand.
Ces quelques faits historiques suffisent pour ébranler
l’opinion courante qui imagine la grande majorité des papes
comme étant des personnages austères, émaciés par les
jeunes et de longues prières. La plupart, dans l’histoire,
surtout depuis Constantin, ont été à genoux devant les
pouvoirs civils. Les mœurs d’un bon nombre d’entre eux
scandalisent, étonnent et laissent souvent à désirer.
Ces scandales n’altèrent en rien ma foi en l’Église
catholique romaine. Elle dure depuis 2000 ans. Avec la
kyrielle de scandales qui s’accumulent dans son histoire,
il est forcément d’inspiration divine. Aucune institution
purement humaine n’aurait traversé les temps avec des
fautes aussi graves. Dieu a pris le risque de travailler et
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de s’incarner dans l’humanité. Je ne peux expliquer son
geste mais j’accepte, malgré les horreurs des hommes, son
plan divin.
« J'ai
défaille
n'a pas
digne de
prié, dit Jésus à Pierre, pour que ta foi ne
pas. » Sa foi et celle de ses successeurs. Jésus
prié pour que la conduite de tous les papes soit
la fonction.
Jésus a dit aussi : « Je suis avec vous tous les jours
jusqu'à la fin du monde. » Il l’est toujours, mais il
n’intervient pas dans le choix que font les catholiques de
leurs dirigeants. Il laisse les salauds commettre leurs
saloperies. Ce n’est pas toujours beau mais c’est ce que
l’histoire lègue à la chrétienté. Malgré tout cela, des
hommes et des femmes, d’une éminente sainteté, tiennent
l’Église debout. Elle ne tombera pas. La tête tient
toujours, même si parfois, quelques parties du corps sont
très malades. Très malades. Il faut espérer la guérison. Et
voir tout le corps en parfaite santé.
Faut-il un autre Concile pour assimiler le dernier que
personne n’a compris ? Pas nécessairement. Il faut cent
ans, disent les théologiens, pour comprendre les décrets
d’un Concile. Il reste aux catholiques encore quelques
bonnes années pour y arriver.
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