Table des Matières : Prise de vue Auteur(s) : ROMELAER Pierre # 1. La notion d'organisation Les diverses configurations de l'organisation Les conceptions spécifiques de l'organisation Les composantes de l'organisation # 2. Les types d'organisations Les organisations types Les organisations hybrides # 3. Mode d'emploi des organisations Avantages et inconvénients des types d'organisations Les regroupements variables d'unités de base Les éléments vitaux de l'organisation Bibliographie Articles liés ENTREPRISE (théories et représentations) FORCE DE VENTE (gestion) LOGISTIQUE (gestion) Prise de vue La plupart des activités humaines ne sont pas des activités individuelles et solitaires : elles sont le produit des actions concertées et coordonnées de plusieurs personnes. Dès qu'on aborde cet aspect de l'action, on a intérêt à étudier ce qu'est une organisation, comment elle est gérée, s'adapte, décide, et se transforme. L'organisation que constitue une entreprise intéresse aussi bien les dirigeants et les managers que les exécutants : tous à des degrés divers l'influencent et voient leurs actions influencées par son fonctionnement. 1 La notion d'organisation Une organisation est un ensemble de personnes qui ont entre elles des relations en partie régulières et prévisibles. Cette définition large présume bien de la diversité des configurations possibles. Les diverses configurations de l'organisation Beaucoup d'organisations sont composées de salariés de la même entreprise qui travaillent en un même lieu et sont directement sous l'autorité d'un même supérieur hiérarchique : un atelier d'usinage et un service contrôle de gestion ont souvent ces caractéristiques. Mais, dans certains cas, les membres de l'organisation sont géographiquement dispersés : dans une entreprise de vente et de réparation de photocopieurs, une bonne partie des salariés se voient peu, puisqu'ils passent l'essentiel de leur temps auprès de la clientèle. Parfois, les membres d'une organisation n'ont pas le même supérieur hiérarchique. Dans une grande entreprise du secteur « équipement automobile », il existe des contrôleurs de gestion dans les usines, dans les divisions et au siège. Chacun dépend de son patron dans sa propre structure, mais ces spécialistes d'une même « technique de gestion » forment aussi une organisation s'ils ont des réunions périodiques au cours desquelles ils échangent sur leurs problèmes et leurs méthodes. Il existe également des situations dans lesquelles les membres d'une même organisation ne sont pas salariés de la même entreprise, par exemple une usine dans laquelle des délégués-qualité des clients et des membres d'entreprises partenaires travaillent sur site avec les salariés de l'usine. Du cabinet conseil en stratégie de vingt salariés à Carrefour qui en compte 240000, les organisations sont de toutes tailles. Et chaque unité d'une organisation est aussi une organisation : des entités aussi diverses que le département achats textiles d'un grand magasin, une usine de fabrication de crèmes glacées, le département recherche et développement de Corning Glass, la filiale française de Nestlé ou la division pharmacie d'Aventis sont des organisations. Est à considérer également une autre catégorie d'organisations – sur laquelle nous ne concentrerons toutefois pas l'analyse – qui inclut les associations caritatives, les administrations publiques nationales ou régionales, l'O.C.D.E., les partis politiques, les syndicats professionnels, les familles et les groupes d'amis. Les conceptions spécifiques de l'organisation Dans le langage courant comme dans la conception de certains spécialistes, l'organisation, c'est aussi : – L'organigramme hiérarchique. Il donne des indications sur qui est supérieur hiérarchique de qui. L'organigramme fonctionnel y ajoute des intitulés de poste qui fournissent quelques indications sur ce que sont les missions principales des personnes. – Le flux régulier des activités de production et de transport. Cette description est couramment utilisée par les spécialistes de gestion de production et de logistique. – La disposition des machines et des matériels, le classement. Au sens de cette définition, une activité, ou une partie d'entreprise, est bien organisée si « tout est en ordre ». – Le format des informations, l'architecture du système d'information. Cette définition de l'organisation est par exemple celle des informaticiens. – L'ensemble des procédures. Cette définition est entre autre celle d'un département méthodes qui définira les modes opératoires pour les actions des ouvriers, par exemple pour l'assemblage d'un produit à partir de ses composants. – La structure juridique, la répartition du capital, les participations dans d'autres sociétés, la répartition des pouvoirs de décision et de contrôle. Cette définition de l'organisation est celle des juristes. Chacune de ces définitions donne une vision très partielle de l'organisation. On ne peut comprendre et encore moins gérer une organisation en se cantonnant à une seule d'entre elles. Les composantes de l'organisation Une organisation se caractérise par un certain nombre de composantes dont l'importance relative varie selon le type d'organisation considéré. L'ensemble des activités qui constituent la raison d'être de l'entreprise forment ce qu'on appelle le centre opérationnel. Souvent, il s'agit des activités de production et de vente. Dans les entreprises qui ont un objectif d'innovationproduit, la R&D (recherche et développement) fait partie du centre opérationnel. La technostructure correspond à l'ensemble des activités qui consistent à standardiser le travail, les résultats et les qualifications, c'est-à-dire à, respectivement, définir les procédures, fixer les objectifs et les normes, et calibrer les compétences. Les départements méthodes, systèmes d'information et contrôle de gestion appartiennent classiquement à la technostructure. Le sommet stratégique objectifs stratégiques logistique sont celles (les services généraux désigne les activités qui définissent et adaptent les de l'organisation, tandis que les fonctions de support qui participent au fonctionnement sans être essentielles par exemple). Enfin, la hiérarchie opérationnelle rassemble les managers qui ont, parmi leurs subordonnés directs ou indirects, des opérateurs du centre opérationnel. Par opposition, on qualifie de « fonctionnels » les salariés dont les activités sont principalement dans la technostructure ou les fonctions de support logistique. 2 Les types d'organisations Il existe cinq principaux types d'organisations. Dans la pratique, environ deux tiers des organisations correspondent assez fidèlement à l'un de ces types, le tiers restant correspondant à des formes hybrides. Les organisations types La structure simple La structure simple se caractérise par une très faible standardisation. Le travail est défini et coordonné par le sommet stratégique. La technostructure est inexistante, ou bien elle existe mais est en permanence bridée par les ordres, les contre-ordres et les exceptions imposées par une direction générale omniprésente. Ce type de structure est courant dans les P.M.E. dirigées par de réels entrepreneurs. Mais, d'une part, toutes les P.M.E. ne sont pas « entrepreneuriales » et n'ont donc pas toutes ce type de structure simple. D'autre part, certaines fonctionnent comme une structure simple mais de façon très conservatrice, gérées en direct par un patron qui lance très peu de projets nouveaux. La structure mécaniste Dans une structure mécaniste, le travail du centre opérationnel est effectué sur la base de procédures élaborées par des départements spécialisés, de type méthodes dans l'industrie, ou informatique et organisation dans les entreprises de services. Les organisations de fabrication de masse et les entreprises de « services de masse » (compagnies d'assurances, banques, entreprises de télé-marketing) sont couramment de ce type, à condition qu'elles ne soient pas très fortement automatisées et robotisées ; ce sont sinon des « adhocraties » (voir plus loin). L'organisation taylorienne est l'exemple le plus connu de structure mécaniste. On la nomme ainsi parce qu'elle a été inventée à la fin du xixe siècle par Frederick Taylor. Elle possède une caractéristique qu'on ne rencontre pas dans toutes les structures mécanistes : une division très poussée du travail en tâches élémentaires très simples qui peuvent être effectuées par des personnes sans qualification. Les structures mécanistes ne sont pas toutes de grande taille : la performance d'une sandwicherie reposera en général sur une standardisation très poussée du travail de confection des sandwichs ; on a alors une P.M.E. qui n'a pas une structure simple. La structure basée sur les compétences Dans une structure basée sur les compétences, le travail de base de l'organisation (celui du centre opérationnel) est plutôt stable, et il est effectué d'une façon fortement indépendante par des professionnels très qualifiés. Les hôpitaux, les cliniques, les universités et grandes écoles ont ce type de structure, de même que certains cabinets de conseil ou certaines S.S.I.I. (sociétés de services et d'ingénierie informatique). Comme les professionnels ont une rémunération élevée, il est fréquent de trouver dans ces structures de nombreuses activités dans les fonctions de support logistique, où des personnels moins qualifiés (donc moins coûteux) effectuent les tâches exigeant moins d'expertise. Il peut exister une technostructure dans ces organisations, mais elle ne concernera que les aspects budgétaires et logistiques (planning d'utilisation des salles d'opérations dans un hôpital par exemple). Généralement, ces types d'organisations mobilisent de nombreuses commissions permanentes dans lesquelles siègent des membres des divers services : dans un hôpital, on trouvera, par exemple, une commission médicale d'établissement, une commission informatique, etc. Ces commissions travaillent souvent avec une bonne dose d'ajustement mutuel. L'adhocratie Dans une adhocratie (le terme vient du latin « ad hoc »), le travail dans le centre opérationnel change de nature en permanence. La méthode suivie pour faire le travail n'est pas définie a priori dans ce type d'organisation : elle est souvent déterminée au fur et à mesure de l'avancement de l'activité, avec une dose considérable d'ajustement mutuel entre les salariés. Le chef de projet et le cahier des charges jouent souvent un rôle non négligeable. Comme la définition du travail évolue sans cesse et que l'essentiel de la coordination se fait par ajustement mutuel, le fonctionnement d'une adhocratie est un « bouillonnement » d'activité, qui, vu de l'extérieur, peut apparaître désordonné. Ce n'est pas un hasard si Renault appelle « la ruche », la partie du technocentre de Guyancourt, dans laquelle des groupes-projets développent les futurs modèles de la marque. Les adhocraties sont couramment composées de plusieurs équipes-projets temporaires : quand un projet est terminé, les membres de l'équipe sont réaffectés à un projet suivant. On parle alors d'adhocratie de projets. On trouve ce type d'organisation dans bon nombre d'entreprises de haute technologie, et dans certains cabinets conseils. Ces derniers auront une structure basée sur les compétences si leur portefeuille d'activité est assez stable, une structure d'adhocratie s'ils font en permanence du « sur-mesure ». Parmi les adhocraties, on peut aussi mentionner les organisations de production et de distribution de masse très fortement automatisées et robotisées : tout le travail prévisible a été incorporé dans des machines ou dans des logiciels, les membres de l'organisation doivent quant à eux gérer les changements et les imprévus, ce qui implique une structure de type adhocratie. La structure basée sur les résultats Une organisation a une structure basée sur les résultats si ses membres sont largement indépendants les uns des autres dans leur travail, chacun étant piloté par des objectifs et des normes qui lui sont imposés. Un Service commercial national est souvent organisé de cette façon : l'objectif de vente global est réparti en objectifs de ventes imposés aux directions régionales des ventes, et chacune d'entre elles répartit son propre objectif entre les vendeurs. Ce type de structure comporte naturellement un système d'information qui permet de contrôler la réalisation des objectifs. Ce type d'organisation peut aussi prévoir des « aides à la vente » : système d'information commercial, enquêtes clientèles périodiques, résultats de panels Nielsen, logiciel de gestion des programmes de prospection, etc. Ces aides font partie des fonctions de support logistique. Les organisations hybrides Une organisation peut présenter des caractéristiques communes avec plusieurs des cinq organisations types présentées plus haut : c'est alors une « structure hybride ». Essor des structures hybrides Pour chaque ensemble de deux structures différentes, il existe un hybride dont on a observé l'existence en pratique. On peut donner deux exemples : –Depuis les années 1980, de nombreuses banques et compagnies d'assurances se professionnalisent en laissant plus d'initiative à des personnels – chargés d'affaires ou chargés de clientèle – qui reçoivent une formation importante. Dans la forme ancienne d'organisation, ces personnels avaient pour mission d'appliquer des procédures standards en réponse aux demandes des clients. Dans la nouvelle forme d'organisation, ils disposent de pouvoirs d'initiative pour développer leur clientèle, par exemple, d'une marge de liberté dans l'offre de produits et dans les conditions proposées. Ces entreprises passent ainsi d'une structure de type mécaniste à une forme intermédiaire entre la structure mécaniste et la structure basée sur les compétences. –Dans une partie de ses activités, Air liquide assure pour des clients industriels la conception d'installations utilisant des gaz liquéfiés. L'organisation est classiquement une adhocratie de projets. Mais l'entreprise a trouvé utile de créer, à côté des groupes-projets, des « groupes de compétences » dans plusieurs domaines : technologies, process, exploitation, etc. Chaque groupe rassemble à temps partiel des praticiens de son domaine pour recueillir les connaissances, les systématiser et les diffuser. Ceux-ci font à la fin de chaque projet un point systématique sur l'ensemble de ce qui a été appris : essais, erreurs, trouvailles, inventions, idées. Ces éléments pourront alors être diffusés lors de séminaires de formation, et apportés sous forme de conseil ponctuel en fonction des besoins des divers projets ultérieurs. L'organisation devient alors intermédiaire entre une adhocratie de projet et une structure basée sur les compétences. Les structures divisionnalisées Parce qu'elles sont composites, les « structures divisionnalisées » sont par nature des organisations hybrides. Une organisation a une structure divisionnalisée si elle est scindée en unités assez largement indépendantes les unes des autres, qui peuvent elles-mêmes être des organisations complexes et de grande taille. Toutes les structures divisionnalisées ne sont pas de grandes entreprises, mais presque toutes les très grandes entreprises sont des structures divisionnalisées, notamment quand elles ont plusieurs domaines d'activité distincts (par exemple les groupes prétroliers, actifs dans l'exploration, le raffinage, le trading, la chimie, etc.) et plusieurs marchés internationaux. Les grandes entreprises ont souvent une structure à trois étages : le siège, les divisions, et les établissements et filiales. Une des questions à examiner quand on analyse une structure divisionnalisée est celle du type d'organisation de chacune des unités : on rencontre dans la pratique chacun des cinq types principaux et leurs hybrides. Une seconde question relative à ces structures est celle des relations entre le siège et les filiales. Plusieurs cas de figure se présentent : –Dans la « structure divisionnalisée de type féodal », le siège pilote les unités en plaçant des personnes de confiance aux postes clés, par exemple, à la direction des unités et des filiales. L'organisation n'est pas sans faire penser à celle de la société féodale dans laquelle les barons ne dépendent que du roi, et peuvent parfois devenir très puissants dans leur « baronnie ». –Dans la « structure divisionnalisée de type standard », le siège pilote les unités sur la base de ratios, qui sont souvent financiers et à court terme, de type « taux de croissance de la part de marché », ou « résultat net/capitaux propres ». Selon les cas, il peut y avoir un seul ratio ou plusieurs (jusqu'à une cinquantaine). Les ratios imposés à une unité sont calculés localement selon des procédures standard et sont communiqués au siège périodiquement (par exemple tous les trimestres). Cette communication est couramment appelée le reporting. Un département d'audit rattaché au siège a le redoutable pouvoir d'aller dans les filiales pour voir si les ratios sont respectés. Une mauvaise appréciation peut, dans certains cas, donner un coup d'arrêt à la carrière du dirigeant local, voire amener la fin de sa carrière dans l'entreprise. La structure divisionnalisée de type standard est encore très répandue. Depuis les années 1990, ce type de structure évolue dans deux directions. D'une part, en renforçant les liens entre les unités pour accroître les synergies, par exemple, par des carrières transversales et des groupes de travail transversaux. D'autre part, en décentralisant l'initiative stratégique comme l'ont fait à des degrés divers des entreprises comme ABB, Intel ou General Electric. Dans cette dernière entreprise, le président-directeur général laisse à chaque directeur de business unit une grande marge de manœuvre, à condition qu'il devienne l'un des trois premiers opérateurs mondiaux dans son domaine ; sinon le directeur cède sa place ou voit sa division vendue. Le succès rencontré par Jack Welch lui a valu de nombreux imitateurs. Dans certaines organisations divisionnalisées, l'essentiel de la coordination entre les unités ne se fait pas par les mécanismes qu'on vient d'énoncer, mais par des décisions et des outils de gestion négociés entre les unités. On dit alors qu'il s'agit d'une organisation en réseau (on utilise l'expression « réseau d'entreprises » si les unités sont juridiquement indépendantes). Connaître le type de structure permet de déterminer les méthodes les plus efficaces dans des domaines aussi divers que la gestion des investissements, la conception des nouveaux produits ou la gestion des ressources humaines : si une méthode est en phase avec le type de structure, elle sera mise en œuvre plus rapidement, avec moins d'efforts et de risques d'échec. Autrement dit, la connaissance du type d'organisation éclaire son mode d'emploi. 3 Mode d'emploi des organisations Aucune organisation concrète ne correspond exactement à l'une des cinq organisations types présentées. Mais, dans la majorité des cas, une organisation concrète se rapproche de l'un des types et se distingue nettement des quatre autres, ou bien prend l'allure d'une structure hybride. Quand on sait qu'une organisation pour laquelle on travaille est proche d'un seul des cinq principaux types d'organisations, on en déduit des informations très utiles pour la gestion. Avantages et inconvénients des types d'organisations Chaque type de structure présente des avantages et des inconvénients qui lui sont spécifiques. Par exemple, les structures mécanistes peuvent faciliter l'expansion géographique de l'entreprise car on peut assez facilement les dupliquer. En revanche, elles peuvent dériver vers un esprit procédurier, et les conflits entre technostructure et hiérarchie opérationnelle y sont fréquents. Le rôle de la hiérarchie dans les structures mécanistes est, en effet, de faire appliquer des procédures à des salariés qui n'ont souvent pas du tout été impliqués dans la définition de ces dernières, d'où un risque élevé de conflits d'intérêts. Les adhocraties, notamment les adhocraties de projets, tirent leurs avantages de leur souplesse. Cette dernière les rend plus à même de satisfaire aux exigences spécifiques des clients et de réaliser des projets qui exigent la collaboration de plusieurs spécialités de haut niveau. Les premières adhocraties ont d'ailleurs été repérées dans l'industrie électronique et dans les activités spatiales au cours des années 1960. Mais ces structures ne sont pas non plus sans problèmes. L'organisation du travail change tout le temps. De ce fait, même les opérateurs et les managers peuvent avoir des difficultés à comprendre comment l'organisation fonctionne. Ces organisations favorisent le stress : les changements constants sont fatigants à la longue et chaque opérateur doit se coordonner avec de nombreuses personnes qui ont des exigences parfois incompatibles. Les adhocraties sont elles aussi souvent marquées par le conflit : les chefs de projet se battent pour les budgets et pour avoir les meilleurs spécialistes dans leur équipe. À l'évidence, il n'existe pas d'organisation idéale, mais seulement des organisations plus ou moins bien adaptées à la stratégie de la direction, aux moyens disponibles et aux pressions de l'environnement (concurrence, technologie, etc.). Un restaurant organisé sous forme de structure mécaniste (par exemple, dans la restauration rapide) a une productivité très importante pour une gamme peu étendue de produits standardisés. Cette forme d'organisation ne convient pas aux restaurants de haut de gamme, qui ont besoin de personnels spécialisés : cuisiniers, sommeliers, chefs de rang. Ces restaurants ont souvent une structure basée sur les compétences, qu'on ne peut pas rendre mécaniste sans devoir changer de clientèle. Chaque type d'organisation connaît aussi des tendances naturelles d'évolution. Par exemple, les structures simples de grande taille ne sont pas viables, et les organisations de type adhocratie ont tendance à être instables à moyen et long terme, notamment parce qu'elles essayent de capitaliser sur leurs succès : si une SSII organisée à la façon d'une adhocratie réussit l'informatisation d'une clinique, elle aura tendance à exploiter ce marché, dans lequel elle a développé des compétences et de la crédibilité. L'adhocratie devient alors progressivement une structure plus stable basée sur les compétences. Les regroupements variables d'unités de base Le mode de regroupement des unités de base est une autre caractéristique du fonctionnement des organisations. On peut ainsi avoir une organisation « par fonction », si le département production s'occupe de tout ce qui relève de sa fonction pour tous les produits de l'entreprise (et de même pour les autres fonctions comme R&D et ventes). Le mode de regroupement est différent dans les organisations « par produits », « par région », « par type de client », etc. Par exemple, dans une organisation par région, chacune des régions (Sud-Ouest France, Île-de-France, etc., ou Amérique latine, Asie Sud-Est, etc.) dispose de l'ensemble des services dont elle a besoin : production, vente, finance, etc. Dans certaines organisations, dites « matricielles« , le responsable de chaque unité de base a deux supérieurs hiérarchiques : par exemple, le directeur de production France dépend à la fois du directeur de la filiale française et du directeur de production Europe. Ces organisations sont souvent instables et difficiles à vivre au quotidien. Une même organisation peut fonctionner suivant des modes de regroupement divers. Dans une clinique, par exemple, le service cardiologie est plutôt « par produit » alors que le service pédiatrie est plutôt « par type de client ». Chaque mode de regroupement a des avantages et des inconvénients qui dépendent du contexte. Le mode de regroupement ne s'impose pas dans tous les cas. Si on prend l'exemple d'un atelier d'assemblage de micro-ordinateurs organisé selon une structure mécaniste, le regroupement des unités peut tout aussi bien se faire « par fonction » (chaque poste de travail est spécialisé dans une seule des activités, comme le montage du disque dur, du lecteur de DVD-ROM, de la carte mère, etc.) ou « par produit » (chaque poste est chargé de l'ensemble des opérations de montage). Les éléments vitaux de l'organisation La bonne gestion de l'organisation dépend encore de nombreux autres éléments vitaux pour l'organisation, dont certains ne sont pas directement liés au pilotage des dirigeants et des managers : –les objectifs à atteindre, les projets de changement, les processus de décision ; –les systèmes de gestion (par exemple le planning de fabrication) ; –les relations hiérarchiques, non hiérarchiques et informelles, qui incluent les relations entre les opérationnels et les fonctionnels. En ce qui concerne les relations hiérarchiques, l'évolution actuelle va vers des « hiérarchies aplaties » dans lesquelles on compte moins de niveaux hiérarchiques, et plus de responsabilisation des subordonnés ; –les groupes. Il en existe de nombreuses sortes : groupes formels, informels, internes à une unité ou transversaux, permanents ou temporaires. On peut mentionner les comités qui actualisent les définitions de postes, le comité d'investissement, les groupes de travail créés pour gérer la mise en œuvre d'une fusion, et les groupes informels du système de pouvoir ; –les compétences individuelles et collectives. La gestion des compétences est une des tendances actuelles les plus marquantes dans les organisations ; –l'histoire de l'organisation, ses cultures et ses langages ; –les relations externes de l'entreprise, avec les fournisseurs et les clients, mais aussi avec les confrères, les syndicats professionnels, les pouvoirs publics et les États. Les relations externes, dont l'intensité varie sensiblement d'une entreprise à une autre, jouent un rôle fondamental dans le fonctionnement de l'organisation. Le département marketing aura une organisation différente selon qu'il fait faire ponctuellement des études de marché par des prestataires ou qu'il gère en direct une grosse base de données, actualisée en permanence, sur les comportements d'achats des clients. La coordination de ce département avec les autres ne sera pas la même dans une entreprise « orientée vers le client » et dans une entreprise où le marketing est considéré comme l'égal des départements vente et production. Les relations externes sont aussi très liées aux décisions que prend l'entreprise sur ce qu'elle fera toujours elle-même et ce qu'elle externalisera. Quand Novotel externalise le nettoyage des chambres de ses hôtels, elle remplace une organisation interne par le pilotage des relations externes avec un prestataire. La tendance est actuellement à l'externalisation massive des fonctions de support logistique. L'entreprise peut même, comme Benetton dès les années 1980, sous-traiter la production et faire faire la commercialisation par un réseau de franchise. On se trouve alors en présence d'une « organisation virtuelle ». Chacun des cinq principaux types d'organisations, que nous avons vus, peut être plus ou moins virtuel ; tout dépend du volume d'activités externalisées. Une organisation est d'autant plus virtuelle qu'une partie importante du travail consiste à piloter des relations externes. Tous ces éléments diffèrent d'une organisation à une autre. Ils jouent un rôle essentiel, à la fois dans la stabilité de l'organisation (faire le travail malgré les aléas), dans l'adaptation (aux évolutions des clients, des produits, des marchés, des technologies), ainsi que dans l'innovation et le changement (changement stratégique, innovation, restructuration). La prise en compte de chacun de ces éléments est nécessaire pour apprécier la pertinence et l'efficacité d'une organisation, donc pour prendre les décisions de gestion appropriées dans le cadre du type d'organisation auquel on a affaire. Source Universalis Analyse de l’organisation d’un groupe de projet http://www.dauphine.fr/crepa/ArticleCahierRecherche/Articles/StephanieDameronFonquernie/SDF%20%20AIMS%202000.pdf