Introduction du rapport du Conseil économique, social et environnemental, « Les indicateurs du développement
durable et l’empreinte écologique », 2009
L’ensemble du rapport est disponible sur le site internet du Conseil économique et social.
Élaboré aux États-Unis pendant la « Grande Dépression », le Produit intérieur brut (PIB) est devenu un indicateur de
référence pour évaluer et comparer les performances économiques des différents pays du monde, voire le bien-être de leurs
citoyens. Autrefois apanage d’une minorité condamnant le mode de croissance, les critiques envers cet agrégat ont été
placées sur le devant de la scène par l’émergence des questions environnementales.
Certes, des économistes avaient depuis longtemps reconnu la nécessité de prendre en considération les effets de l’activité
sur les ressources épuisables (on songe notamment à Harold Hotteling, Franck Ramsey et Arthur Cecil Pigou dans les
années 1920 et 1930). Pour s’en tenir à notre pays, en mai 1966, Bertrand de Jouvenel avait proposé à la Commission des
comptes de la nation la « prise en compte dans la comptabilité nationale des services rendus à titre gratuit, des nuisances
et des prélèvements sur la nature » (cf. Arcadie, essais sur le mieux-vivre, Futuribles, Sedeis, 1968). Mais le renouveau de
l’intérêt accordé à la préservation de l’environnement depuis le début des années 1970 (et notamment le rapport « Halte à
la croissance » du Club de Rome) a avivé l’attention pour ces questions. La publication, en 1987, du rapport Brundtland
(du nom de la présidente de la Commission mondiale sur l’environnement et le développement (CMED), mise en place par
les Nations Unies) et la promotion par celui-ci de la notion de « développement durable » ou « soutenable » (sustainable
development) visant à concilier, sur le long terme, les dimensions économiques, sociales et environnementales de la
croissance, ont notamment encouragé la quête d’indicateurs relatifs à l’impact de l’activité humaine sur les écosystèmes.
La problématique du réchauffement climatique a encore accru l’opportunité de cet effort.
Il y a, en effet, un hiatus de plus en plus criant entre la place attribuée, dans le débat public, au développement durable,
désormais inscrit dans le Traité de l’Union européenne et élevé en France au rang de principe constitutionnel, et les
instruments utilisés pour juger du progrès ou de la richesse. Cette situation, dont les ressorts ont été décrits par les travaux
précurseurs de Dominique Méda (Qu’est-ce que la richesse ?, Alto, Aubier, 1999) et Patrick Viveret (Reconsidérer la
richesse, rapport de la mission Nouveaux facteurs de richesse, secrétariat d’État à l’économie solidaire, janvier 2002)
souligne la nécessité de mettre au point des indicateurs spécifiques. C’est le sens de la déclaration d’Istanbul signée en juin
2007 par les représentants de la Commission européenne, de l’Organisation de coopération et de développement
économiques (OCDE), de l’Organisation de la conférence islamique, du Programme des Nations Unies pour le
développement (PNUD) et de la Banque mondiale (auxquels se sont joints depuis le Fond monétaire international (FMI) et
le Bureau international du travail (BIT)), invitant à « aller au-delà des indicateurs habituels tels que le PIB par habitant ».
La Commission européenne, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et le Parlement
européen ont eux-mêmes organisé, en novembre 2007, une conférence dont le titre (« au-delà du PIB, mesurer la richesse
véritable, le progrès et le bien-être des nations ») indique assez bien le consensus croissant qui se dessine sur cette
question.