1.2 – COMMENT RENDRE COMPTE DE LA MOBILITE SOCIALE

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1.2 – COMMENT RENDRE COMPTE DE LA MOBILITE SOCIALE ?
Mobilité intergénérationnelle : Un changement de position sociale entre les
générations.
Mobilité intragénérationnelle : Un changement de position sociale au cours de la vie
active d’un individu.
Fluidité sociale : Une société fluide est une société ou la position sociale des
individus n’est pas déterminée par leur origine sociale.
Déclassement : correspond à l’idée selon laquelle des individus occupent plus
fréquemment des positions sociales moins élevées.
Paradoxe d’Anderson : l’obtention d’un meilleur diplôme que ses parents ne garantit
pas une promotion sociale
Socialisation primaire : Socialisation qui a lieu durant l’enfance
Socialisation anticipatrice : Ensemble des valeurs et des normes d’un groupe social
qu’un individu acquiert en vue de l’intégrer.
Groupe d’appartenance : groupe auquel appartient l’individu. Il définit le rôle social
que l’individu devrait adopter.
Groupe de référence : groupe que l’individu voudrait intégrer et sur lequel il va
chercher à aligner son rôle. Il recourt à la socialisation anticipatrice.
Capital social : Ensemble des ressources dont un acteur peut bénéficier grâce à ses
relations sociales.
A. QU’EST-CE QUE LA MOBILITE SOCIALE ?

Les formes de mobilité sont multiples. On peut distinguer la mobilité géographique *un
changement de lieu de travail, de la mobilité professionnelle *un changement de secteur
professionnel.
 Dans les deux cas le niveau social de la personne peut rester équivalent.
 On parlera alors de mobilité horizontale >> c’est à dire qu’il n’y a pas de
changement hiérarchique.
La mobilité sociale est une forme de mobilité particulière.
 Elle se définit comme le passage d’un individu ou d’un groupe social d’une
catégorie sociale à une autre.
 L’analyse de la mobilité par la sociologie
1

On doit le concept de mobilité sociale au sociologue américain, d’origine russe, Pitirim Sorokin
 Pour lui cela se définit comme le déplacement d’individus dans l’espace social c’est à dire
passer d’une classe à une autre
 La conception moderne s’intéresse quand à elle plus au passage d’une PCS à une autre.

Les sociologues de la stratification sociale font une différence entre :
la mobilité intergénérationnelle
et
la mobilité intragénérationnelle
Un changement de position sociale
entre les générations.

Un changement de position sociale
au cours de la vie active d’un
individu.
La mobilité intergénérationnelle est la plupart du temps une mobilité verticale c’est à dire le
passage d’un statut social à un autre dans la hiérarchie sociale.
 Celle ci pourra alors être ascendante ou descendante.
Mais cette mobilité peut aussi être horizontale c’est à dire qu’il n’y a pas de changement
hiérarchique pour l’individu mais seulement une mobilité sectorielle, professionnelle.
 C’est essentiellement à la mobilité intergénérationnelle verticale que les sociologues
s’intéressent.
 L’ensemble du parcours d’un individu au cours de sa vie est appelé trajectoire sociale.
 Comment mesurer la mobilité

Pour mesurer la mobilité sociale entre les générations, l’INSEE construit des tables de
mobilités.
Elle collecte depuis 1953, dans l’Enquête emploi et depuis 1970 dans l’Enquête formation et
qualification professionnelles, les données nécessaires à l’établissement de ces tables
 Elles permettent de décrire la position sociale d’une génération d’hommes en
fonction de la position sociale de celle de leur père.

Elles sont établies à partir d’échantillons représentatifs
- Les enquêtes portent sur des hommes de 40 à 59 ans car l’on estime que l’individu a, à
cet âge, à peu près accompli sa trajectoire
- On ne s’intéresse qu’aux hommes car le taux d’activité des mères des femmes de 40 à
59 ans est encore trop faible pour réaliser des études pertinentes sur la mobilité
féminine.

On collecte donc la profession du fils au moment de l’enquête et celle du père au moment où
son fils avait fini ses études. Les retraités ou les chômeurs sont ainsi classés dans leur dernière
PCS connue.
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

A partir de ces données brutes, on réalise un tableau à double entrée qui croise les deux séries
de données.
Cette table de mobilité peut prendre deux formes. *En l’absence d’indications, il faut regarder
où sont situés les « 100% »
-
une table de destinée >> Elle décrit le destin socioprofessionnel des individus en
fonction de la PCS de leur père
>> Elle répond ainsi à la question « que deviennent les fils de ? »
 Elle se lit en colonne
-
une table de recrutement >> Elle décrit l’origine socioprofessionnelle des individus
appartenant aux différentes PCS. *ainsi on peut lire que ¼ de nos cadres proviennent
de la PCS ouvrier ce qui traduit une mobilité ascendante
>> Elle répond à « Dans quelle PCS a-t-on recruté les
individus appartenant à telle ou telle PCS ? ».
 Elle se lit en ligne
 Observer la mobilité sociale est un enjeu important. Dans les sociétés démocratiques, les
positions sociales ne sont pas supposées être héritées de génération en génération.

Ces tables ont pour objectif de se rendre compte de l’ampleur de la mobilité et de l’immobilité
sociale.
Il y a reproduction sociale/immobilité sociale si la catégorie sociale du fils est la même que celle
de son père.
 En observant les diagonales, on peut se rendre compte des PCS ayant la plus forte ou
la plus faible mobilité sociale et celles qui sont les plus ouvertes en terme de
recrutement.
Ainsi :
- Ce sont les employés, les agriculteurs et les artisans qui ont la plus forte mobilité sociale
même si leurs trajets sont relativement courts.
- Les cadres et les ouvriers ont quant à eux une faible mobilité sociale.
*50% des deux catégories deviennent comme leur père. = Forte immobilité.
Et :
- Certaines catégories s’auto-recrutent comme les agriculteurs ou les ouvriers.
- D’autres sont ouvertes comme les employés ou les profession intermédiaires
 Au total 65% des individus masculins de plus de 40 ans ont eu une mobilité sociale
intergénérationnelle c’est à dire qu’ils n’occupaient pas la même position sociale que
leur père.
 Les différentes mobilités

Cependant si la mobilité observée peur révéler une certaine égalité des chances elle provient
également des effets de la structure. C’est pourquoi on distingue :
La mobilité structurelle
à la
Mobilité nette
Conséquence de l’évolution des
structures sociales
= déplacement « involontaire » des
individus dans la structure sociale
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Différence entre la mobilité totale et la
mobilité structurelle.
Elle ne résulte pas des transformations de la
société.

Cette distinction est remplacée depuis la fin des années 1970 par l’analyse de :
la mobilité observée ou brute
et la
fluidité sociale ou mobilité relative
Proportion d’individus qui
connaissent une mobilité
sociale
= (effectif total – effectif de la
diagonale) / effectif total
x100

Une société fluide est une société ou la position
sociale des individus n’est pas déterminée par
leur origine sociale.
La progression de la fluidité est mesurée par les « odd ratio ».
 C’est un rapport des chances relatives d’accès aux différentes positions sociales.
 Cet indicateur permet de mesurer les chances respectives de deux groupes sociaux
d’accéder aux bonnes positions sociales plutôt qu’aux mauvaises.
*Il est de 26,5 aujourd’hui contre 51 à la génération précédente. C’est à dire qu’un fils de cadre a
26,5 fois plus de chance de devenir cadre à son tour qu’un fils d’ouvrier.
= Probabilité qu’un fils de cadre devienne cadre / Proba qu’un fils de cadre devienne ouvrier
Probabilité qu’un fils d’ouvrier devienne cadre / Proba qu’un fils d’ouvrier devienne ouvrier
 La mesure imparfaite de la mobilité

La mesure de la mobilité sociale comprend des limites.
Les tables de mobilité sont restreintes à certaines règles :
- elles ne permettent pas de repérer la mobilité intra-catégorielle
- elles ne prennent pas en compte la dévalorisation de certaines professions
Ainsi dans cette optique, une immobilité sociale n’en est pas forcément une si la profession en
elle même a évolué. *journaliste, professeur du secondaire
-
incertitude autour de la PCS indépendant : Il est plus facile de classer la population
salariée que les indépendants pour lesquels on ne sait pas exactement sur quels critères
se baser pour déterminer si leur trajectoire est ascendante ou descendante.
-
les PCS sont un outil français
- elles reposent sur des conventions d’âge ou de sexe
Ne retenir que les que hommes peut apparaître comme un limite car l’homogamie est relative +
retenir que les hommes âgés de plus de 40 ans : la mobilité peut se faire avant 40 ans et dans
une moindre mesure après 59 ans.
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B. QUELLE MOBILITE EN FRANCE ?
 Les grandes tendances de l’après-guerre à aujourd’hui

En France sur le long terme, la mobilité observée a augmenté.
 Deux tiers des hommes environ n’occupent pas la même position sociale que leur père.
 L’immobilité a diminué, la mobilité est la norme *nombre d’immobiles divisé par deux.

La société est donc devenue plus mobile et la mobilité est surtout ascendante : beaucoup
d’emplois se sont en effet transformés vers le haut.
- On crée des postes de plus en plus qualifiés *ingénieurs, cadres supérieurs.
- L’accès des femmes a l’emploi a permis aux hommes de s’élever socialement. Les femmes
au même titre que les immigrés ont commencé par occuper des postes peu qualifiés.
 L’ascenseur social est-il en panne ? – Le déclassement

Cette augmentation de la mobilité observée reste toutefois à nuancer :
- On constate une prédominance des trajets courts
- D’autre part la tendance à l’immobilité est plus forte aux deux extrémités de la hiérarchie
sociale. *ouvriers, agriculteurs, cadres supérieurs.

Enfin cette augmentation est surtout vérifiable jusqu’en 1993 et ainsi aujourd’hui elle régresse.
L’ascension sociale est plus difficile.
1) Entre 1977 et 1993, on remarque une évolution positive de la mobilité sociale en France :
2) En revanche, on constate une stagnation de la mobilité sociale entre 1993 et 2003
 On parle de « panne de l’ascenseur social » touchant la jeune génération actuelle.
L’analyse de la fluidité sociale est plus débattue : Louis-André Vallet, ayant beaucoup travaillé
sur la mobilité, concluait dans une étude célèbre qu’il existait une tendance à la progression de
l’inégalité des chances.

Les analyses récentes de la mobilité sociale mettent en évidence un ralentissement de la
mobilité ascendante et une augmentation de la mobilité descendante.
 Le déclassement et la peur du déclassement, qu’il soit réel ou non, serait « une des
caractéristiques aujourd’hui de la classe moyenne » selon Louis Chauvel.
On observe une trajectoire nettement descendante des enfants de cadres dont certains
deviennent employés, ouvriers.
 Baisse de la reproduction sociale

Le déclassement
>> Il a un risque plus important qu’avant d’avoir une
mobilité sociale descendante.

Correspond à l’idée selon laquelle
des individus occupent plus
fréquemment
des
positions
sociales moins élevées.
Le déclassement peut s’expliquer par :
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-

le vieillissement de la population : les gens restent en poste plus longtemps
ralentissement dans la création d’emplois les plus qualifiés
alors qu’il y a une augmentation de nombre de diplômés : trop peu de création de poste
élevés par rapport au nombre de gens diplômés qui souhaitent s’élever.
Cela peut toutefois être atténué par la transmission du capital culturel *un enfant dont le père et
le grand père sont cadres a moins de chances de connaître un déclassement qu’un enfant dont
seul le père serait cadre.
C’est l’effet de lignée
C) QUELS SONT LES DETERMINANTS DE LA MOBILITE SOCIALE ?
 Le rôle discuté de l’Ecole

Depuis les années 60, on a assisté en France à la démocratisation et à la massification scolaire ce
qui a joué un grand rôle dans la mobilité sociale. .

Si le nombre de bacheliers a beaucoup augmenté, le rattrapage a surtout profité aux enfants
d’ouvriers (création des bacs technologiques et professionnels, multiplication des moyens
publics)

Toutefois, sur la plan qualitatif, cela est plus discutable.
Selon la PCS on n’obtient pas le même diplôme *¾ ouvriers ont un bac professionnel et ¾ des
cadres ont un bac général.
 Le rôle de la famille

La famille joue un rôle essentiel dans la mobilité ou la reproduction sociale.
-
Elle le fait d’abord en tant qu’instance socialisation primaire en transmettant ce que
Pierre Bourdieu a appelé du capital culturel, social ou économique
Les familles possèdent inégalement ces capitaux et c’est leur transmission qui va influencer la
destinée sociale des individus.
-
Le choix du conjoint est aussi un élément de reproduction sociale :
 L’homogamie est dominante
-
La taille de la famille peut aussi perturber la mobilité: des personnes ayant une fratrie
nombreuse sont plus souvent en mobilité descendante (conditions moins favorables)
 Les interprétations de la reproduction sociale

On oppose deux interprétations pour expliquer la forte tendance à la reproduction sociale :

Pour Bourdieu, l’école favorise la reproduction sociale parce qu’elle valorise la culture des
classes dominantes.
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 Elle diffuse la culture légitime, les valeurs de la bourgeoisie. *L’engagement dans la société,
dans les associations ou les partis politiques est valorisé par les milieux supérieurs et donc
par l’école.
Elle exerce une « violence symbolique » sur les enfants des milieux populaires.
 dénigrement de la culture populaire à l’école.

Raymond Boudon s’oppose à Bourdieu dans L’inégalité des chances (1973)
Pour lui, l’inégalité des chances résulté plutôt d’un comportement rationnel des individus qui
tiennent compte des coûts et des avantages de la poursuite de la scolarité.
>> une surestimation des coûts et une minimisation des avantages dans les milieux
défavorisés conduit le plus souvent à choisir des filières courtes.
 L’importance du diplôme discutée
L’obtention d’un meilleur diplôme que ses parents ne garantit pas une promotion sociale : c’est
le paradoxe d’Anderson.
*Seulement la moitié des hommes ayant obtenu un diplôme plus élevé que leur père vont
accéder à une PCS plus élevée.
L’explication tient au fait que le nombre de diplômés dans la population active augmente plus
vite que le nombre d’emplois dans les professions supérieures.
 Marie Duru-Bellat parle ainsi « d’inflation scolaire ».

Le diplôme reste cependant déterminant pour l’obtention de statuts dans la société.
Son obtention est liée à la PCS des parents, à leur propre niveau de diplôme qui garantit ou non
la réussite scolaire.
 Il y a en effet bien un lien non négligeable entre le niveau de diplôme et l’ascension
sociale même si cela est à nuancer.

Eric Maurin, estime quant à lui qu’il y a un creusement entre ceux qui ont et ceux qui n’ont
pas de diplôme.
 Le diplôme prend ainsi une valeur d’autant plus forte qu’il garantit d’accéder à un
emploi et il protège du chômage bien plus qu’avant.
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Aujourd’hui le diplôme et donc l’éducation deviennent un enjeu majeur *dérogation, choix du
lien d’enseignement
 Il y a un creusement entre les établissements scolaires.
 La mixité sociale recule

La reproduction sociale pénalise donc surtout les enfants des milieux populaires qui seraient
tirés vers le haut par une plus grande mixité sociale dans les établissement scolaires.
>> Les actions comme les ZEP ne parviennent pas à régler la situation. Leur efficacité est assez
faible.
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