Document polycopié n°6 Les limites de la nomenclature
L‘objectif affiché par les concepteurs du code [des PCS] n'est pas pour autant atteint intégralement, ni exempt de critiques. L’«
homogénéité sociale » de plusieurs groupes du code de 1954 était discutable : ainsi en allait-il en particulier des patrons de l'industrie et du
commerce (malgré la distinction entre « gros » et « petits»), des cadres moyens et des agriculteurs exploitants. La nomenclature de 1982 [et
celle de 2003] apporte des améliorations mais certains aménagements apparaissent discutables (en particulier le regroupement des employés
et des personnels de services). D'une manière générale, toute société complexe est un enchevêtrement de multiples sous-systèmes sociaux. Il
n'y a pas de « bonne » catégorie ou de « bon » groupe en soi, indépendamment des perspectives prises en compte. [... ]
Par construction, la nomenclature des CSP (ou PCS) ne prétend pas cerner tous les aspects de la différenciation sociale. Si l'on laisse de
côté le problème des classes, d'autres différenciations apparaissent :
- L’existence de minorités ethniques et/ou religieuses à la source de différences, éventuellement de discriminations sociales. Les
travailleurs immigrés et en particulier maghrébins occupent le plus souvent des postes déqualifiés, ont des conditions d'existence difficiles et
constituent, du point de vue culturel et politique, un ou des groupes sociaux spécifiques dans la société française.
- Des univers professionnels plus ou moins structurés peuvent constituer une réalité se superposant aux découpages socioprofessionnels :
ainsi les enseignants, toutes catégories confondues (instituteurs, enseignants des collèges, professeurs du secondaire et, à certains égards, du
supérieur), ont en commun, malgré leurs différences, un certain nombre de caractéristiques professionnelles et sociales typées : origine
sociale, profil d'études et rapport au savoir, déroulement de « carrière », organisations syndicales spécifiques, etc. [...]
- Les élites ne sont pas distinguées dans la nomenclature. Sans entrer dans la discussion de ce concept, on peut difficilement récuser
l'existence de cercles dirigeants dans un certain nombre de « champs » de la réalité sociale (monde des affaires, administration publique,
université, recherche, arts et sciences, monde politique et syndical). [...] Pour certains d'entre eux (les affaires, la haute administration),
l'origine sociale et la trajectoire scolaire (grandes écoles) sont des éléments supplémentaires de proximité sociale.
S. Bosc, Stratification et transformations sociales, Nathan, 4e édition, 2001.
1) Expliquez quels sont les deux grands ordres de critiques qu’il est possible de faire au code des PCS ? Evitez d’énumérer toutes les
critiques présentées dans le texte. Il faut les regrouper en deux grandes catégories.
2) Pourquoi n’est-il pas possible à une nomenclature de prendre en considération toute la complexité du social ?
3) Quelle influence l’« oubli » des élites a-t-elle sur la correspondance entre le code des PCS et la réalité sociale ?
Exercice n°3
Remplissez le tableau suivant avec les termes ou expressions suivants :
Différenciation religieuse – de droit - de fait – très forte – parfaite – forte - Inde traditionnelle – Ancien Régime - Profession, niveau
d’instruction, pouvoir, prestige – différenciation juridique – Sociétés modernes
Source de
différenciation
Groupement de droit/de
fait
Quelques définitions utiles pour étudier les documents polycopiés n° 7 à 10.
Force de travail : ensemble indissociable de qualités physiques et intellectuelles qui existent dans le corps d’un homme et qu’il met en
mouvement dans le procès de production
Rapports sociaux de production : modalités selon lesquelles les hommes (et les classes sociales) entrent en relation pour produire, échanger
et répartir les richesses.
Lutte des classes : Antagonisme entre classes sociales à partir d’intérêts contradictoires et pouvant prendre la forme extrême de la guerre
civile.
Plus-value : Différence entre la valeur créée par l’emploi de la force de travail et la valeur d’échange de cette force de travail (donc sa
rémunération).
Exploitation : Rapport social asymétrique selon lequel un groupe s’approprie sans contrepartie directe le produit du travail d’un autre
groupe.
Classe en soi : Classe sociale sans conscience de classe. Ses membres partagent les mêmes conditions objectives (place dans les rapports de
production).
Classe pour soi : Classe sociale dont les membres partagent la même place dans les rapports de production, ont conscience d’appartenir à
une même classe et s’organisent pour défendre leurs intérêts communs. Pour Marx, seule la classe pour soi est une « vraie » classe sociale.
Classes sociales (définition moderne, fortement inspirée de la théorie marxiste) : groupes sociaux de grande dimension, nés de la division
sociale du travail, des inégalités de conditions d’existence et des relations de pouvoir. Elles ont une existence de fait et non de droit. Ces
groupements plus ou moins homogènes (différenciation interne) sont caractérisés par des conditions matérielles d’existence et un mode de
vie qui leur sont propres, par une tendance à l’hérédité des positions (reproduction sociale) ; inégalement structurés, ils peuvent constituer
des communautés et agir comme acteurs collectifs.
Classe sociale au sens de Weber : groupes d'individus qui sont dans une situation économique semblable, partageant les mêmes chances
d’accès à un certain nombre de biens sociaux (dont certains ne sont pas économiques comme le prestige, le pouvoir, le savoir, etc.). Ces
groupes hiérarchisés en fonction de critères divers sont séparés par des différences de degré (en termes de plus ou moins) et non de nature.
Cette analyse considère que les frontières entre ces groupes sont plutôt fluides contrairement à l’analyse marxiste. En ce sens, il conviendrait
plutôt de parler de strates sociales.
Analyse nominaliste : la structure sociale est une construction dépendante de l’observateur et non une représentation de la réalité.
Analyse réaliste : Les classes sociales existent réellement, elles sont les moteurs de l’histoire, notamment par le conflit qui les oppose.