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ne tourne peut-être pas tout à fait en rond. Mais pour ça il faut qu'on revienne à
l'argument lui-même. Donc je le répète, mais je vais le répéter sans doute un peu plus
rapidement que la fois dernière, puisque je l'ai déjà exposé. Le découpage phrase par
phrase... Le texte est court, mais évidemment très dense. Donc la première chose c'est
effectivement de demander à Dieu de comprendre, de reconnaitre, d'intelliger ce qui est
la doctrine, la croyance des chrétiens. C'est-à-dire ce qu'est et comment est Dieu. Ce
qu'est Dieu, comment est Dieu.
Comment identifie-t-il ce contenu? C'est ça sa découverte, notamment, d'Anselme : ce
dont rien de plus grand ne peut être penser. Dieu c'est ce dont rien de plus grand ne
peut être pensé, et donc j'abbrévie en QRG, "Quelque chose dont Rien de plus Grand",
pour ne pas s'embrouiller tout à l'heure quand il faudra répéter...
On prend ensuite le point de vue de celui qui nie l'existence du QRG, et on va montrer
que même quand on le nie, en niant cette existence, on aboutit à ce que cette existence
soit nécessaire. La négation de cette existence est introduite par une citation d'un
psaume : "L'insensé a dit dans son coeur : Dieu n'est pas." Mais quand l'insensé dit
Dieu n'est pas, l'insensé dit quand même Dieu, d'une certaine façon, et s'il dit Dieu, pour
Anselme, ça veut dire qu'il entend ce que je dis. Pardon. Qu'il reconnait ce qu'il entend.
Donc ici il faut faire attention au verbe "entendre", il ne s'agit pas d'entendre de
l'entendement, mais il s'agit de l'ouïe, le sens de l'ouïe. Parce que parmi les
nombreuses traductions d'intelligere, dont je vous ai parlé, je préfère dire intelliger pour
qu'il n'y ait pas de confusion. Donc parmi les deux traductions les plus courantes, on a
"comprendre" et "entendre", mais au sens de l'entendement, dans la philosophie
française. Et donc ce n'est pas ça ici.
Ici c'est bien comprendre ou intelliger, ce qu'on entend par l'ouïe (???). Donc quand il
entend le mot "Dieu", pour Anselme, l'insensé comprend "ce dont rien de plus grand ne
peut être pensé". Il pense donc un contenu à ce mot "Dieu" et donc il a dans l'intellect,
puisqu'il l'intellige, il a dans l'intellect ce dont rien de plus grand ne peut être pensé. Là
Anselme a réintroduit le schème de l'artisan en disant... Pour montrer que c'était
différent pour une chose d'être dans la pensée, d'êre dans la pensée, d'être dans
l'intellect et différent d'être dans la réalité. Une chose peut être soit dans l'intellect, soit
dans l'intellect ET dans la réalité. Quand le peintre, ou quand un artisan va réaliser une
oeuvre, avant qu'il l'aie réalisée, il a cette oeuvre dans sa pensée, dans son intellect.
Une fois qu'il l'a réalisée, elle est dans la réalité, puisqu'elle est réalisée, mais en même
temps il l'a aussi encore dans son intellect.
Et c'est là le ressort de l'argument. Si on applique ceci au QRG, à ce dont rien de plus
grand ne peut être pensé, si l'insensé a ce dont rien de plus grand ne peut être pensé
dans son intellect, cela ne peut être seulement dans l'intellect. Cela doit nécessairement
être aussi dans la réalité. Pourquoi? Parce que pour Anselme être dans l'intellect ET
dans la réalité c'est plus grand que d'être seulement dans l'intellect. Donc si ce dont rien
de plus grand ne peut être pensé est seulement dans l'intellect, on peut trouver quelque
chose de plus grand que ce dont rien de plus grand ne peut être pensé, à savoir cela
même qui serait à la fois dans l'intellect et dans la réalité. Donc, ce dont rien de plus
grand ne peut être pensé, à partir du moment où il est pensé est nécessairement dans