Le VIH est un rétrovirus qui infecte un
composant clé du système immunitaire de
l’organisme : les lymphocytes T positifs CD4.
Cette infection provoque l’affaiblissement
progressif du système immunitaire, qui
conduit à une ‘déficience immunitaire’ et
rend plus vulnérable à diverses infections.
Au cours des 25 années écoulées
depuis le début de la pandémie de VIH,
d’importants progrès ont été réalisés
dans la prise en charge et le traitement
des personnes chez qui le virus est
diagnostiqué. L’utilisation de la thérapie
rétrovirale hautement active (HAART)
– comme l’utilisation des inhibiteurs de
protéase dans une combinaison puissante
– a prolongé la vie de nombreuses
personnes. Lorsqu’ils sont combinés à
d’autres médicaments pour former un
‘cocktail’ de thérapie antirétrovirale,
les inhibiteurs de protéase empêchent
le développement du VIH en bloquant
la capacité du virus à se répliquer.
Meilleure prise en charge
risque accru
A l’heure actuelle, les traitements
permettent aux personnes infectées par le
VIH de vivre plus longtemps qu’auparavant.
De ce fait, diverses complications ont été
observées chez les personnes atteintes
du virus, notamment l’insensibilité
à l’insuline et le diabète. D’après les
estimations, l’incidence du diabète de
type 2 parmi les personnes atteintes du
VIH est considérablement plus élevée que
parmi le reste de la population.1 Dans une
étude, il a été démontré que le diabète
était quatre fois plus courant parmi les
hommes atteints du VIH qui recevaient
un traitement antirétroviral que parmi un
groupe d’hommes non atteints du virus
et, donc, non soumis au traitement.
Plusieurs facteurs ont été impliqués,
notamment certains médicaments
antirétroviraux et la présence d’autres
maladies concomitantes, comme
l’hépatite C, une condition fréquente
parmi les personnes atteintes du VIH.
Mais le lien le plus fort semble concerner
y Cecilia J Yoon
Plus de 39 millions de personnes à travers le monde seraient
infectées par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH).
L’introduction des inhibiteurs de protéase dans le cadre du
traitement anti-VIH a contribué àduire considérablement
le nombre de personnes qui décèdent du syndrome de
l’immunodéficience acquise (SIDA). Toutefois, l’utilisation de ces
médicaments a été associée à l’apparition du diabète de type 2 ;
des études récentes ont confirun taux plus élevé de diabète
parmi les personnes atteintes du VIH, par rapport au reste de la
population. Cela implique qu’un nombre important de personnes,
en plus de souffrir des effets du virus, pourraient être exposées
au risque de complications du diabète, comme la néphropathie
ou les maladies cardiaques. Dans cet article, Cecilia Yooncrit
les liens entre le VIH, son traitement et le diabète.
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Le diabète chez les personnes
atteintes du VIH
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Juin 2005 Volume 50 Numéro 2
Soins de santé
l’utilisation des inhibiteurs de protéase. Peu
après l’introduction de ces médicaments, des
rapports sont apparus liant leur utilisation
à un taux de glycémie excessivement
élevé (hyperglycémie). En 1997, la Food and
Drug Administration américaine a émis un
avertissement sur le rôle des inhibiteurs
de protéase dans le déclenchement
de l’hyperglycémie et du diabète.
La prévalence du diabète chez les personnes
atteintes du VIH qui suivent un traitement
à base d’inhibiteurs de protéase se situerait
entre 2 % et 7 %. Des données scientifiques
suggèrent que les inhibiteurs de protéase ont
un rôle causal direct dans le veloppement
de l’insensibilité à l’insuline et du diabète.
L’insensibilité à l’insuline est une premre
étape critique précédant le développement du
diabète de type 2. Parmi les différentes formes
de la condition chez l’être humain, le diate
provoqué par la protéase est celui qui se
rapproche le plus du diabète de type 2. D’après
les estimations, jusqu’à 40 % des personnes
atteintes du VIH qui suivent un traitement à
base d’inhibiteurs de protéase sont atteintes
de tolérance abaise au glucose (IGT).2,3
Comme les inhibiteurs de protéase,
l’infection du VIH elle-même et d’autres
traitements contre le virus, comme le
traitement par analogues de nucléoside, ont
été associés à l’insensibilité à l’insuline. En
outre, d’autres médicaments fréquemment
utilisés par les personnes atteintes de VIH
sont connus pour créer une prédisposition
au diabète. Ceux-ci incluent le mégestrol, la
pentamidine et la prednisone. Parallèlement
à ces médicaments, les facteurs de risque
connus du diabète, comme des antécédents
familiaux de la condition, le tabagisme et
l’obésité, sont également susceptibles de
contribuer aux taux élevés de diabète
parmi les personnes de ce groupe.
Le diabète, une complication
supplémentaire
Le diabète et l’insensibilité à l’insuline
font partie de l’ensemble de troubles
métaboliques observés dans une condition
appelée le ‘syndrome de la lipodystrophie’.
La lipodystrophie, qui semble être une
complication du VIH et de son traitement,
peut également inclure des taux de
cholestérol et de triglycérides anormaux.
Ce syndrome provoque des modifications
de la graisse corporelle totale ou locale.
On peut observer un gain de graisses
sous-cutanées dans des zones telles que
la poitrine, l’abdomen et/ou le cou ou une
perte de graisse au niveau du visage, des
bras, des jambes et/ou des fesses. En plus de
provoquer des problèmes de santé à long
terme, le syndrome de la lipodystrophie
a souvent un impact négatif sur la qualité
de vie car il altère l’apparence physique et
interfère avec le traitement antirétroviral.
Le VIH est considéré comme un
rétrovirus parce qu’il utilise
l’enzyme ‘transcriptase inverse’
pour transformer l’ARN en ADN.
Le virus VIH se reproduit en
utilisant des protéines, comme
la protéase, et des substances
chimiques dans les cellules. Les
médicaments appelés inhibiteurs
de protéase bloquent l’action
de cet enzyme pour empêcher
les cellules infectées par le
VIH de se reproduire.
Reportez-vous à la page 11
pour une explication du terme
tolérance abaissée au glucose.
Reportez-vous à la page 11
pour une explication du
terme triglycérides.
© Dreamstime.com
Contrôle glycémique
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Le syndrome de la lipodystrophie a
également été attribué à certains régimes
antirétroviraux. L’accumulation de graisses
semble être associée au traitement basé
sur les inhibiteurs de protéase tandis que la
perte de graisses a été davantage associée
aux médicaments à base d’analogues
de nucléoside comme la stavudine.
Un diabète est
observé dans le cadre
du syndrome de la
lipodystrophie, une
complication du VIH
et de son traitement.
Certaines personnes peuvent développer
un syndrome mixte ou soit accumuler
ou soit perdre des graisses. Bien que les
scientifiques tentent de mieux comprendre
ce phénomène, on n’explique pas encore
pourquoi certains traitements provoquent
ces changements chez certaines personnes.
Gestion et traitement
La forte prévalence du diabète chez les
personnes atteintes du VIH qui suivent un
traitement HAART suggère la nécessité
de réaliser des mesures régulières des
taux de glycémie à jeun. La glycémie à
jeun doit être évaluée avant et pendant
un traitement antirétroviral, surtout
si la personne traitée développe une
lipodystrophie. Un traitement à base
d’inhibiteurs de protéase peut provoquer
des altérations de la tolérance au glucose
chez certaines personnes ou aggraver
des problèmes existants chez d’autres.
Par conséquent, il est important que les
personnes concernées se soumettent
à une évaluation des facteurs de risque
traditionnels du diabète. Bien que certains
de ces facteurs, comme l’obésité, peuvent
être réduits par un changement du
mode de vie, il faut envisager d’éviter
l’utilisation d’inhibiteurs de protéase chez
les personnes qui sont exposées à un
risque élevé de développer la condition.
Les directives générales établies pour le
traitement du diabète doivent être suivies
pour les personnes atteintes du VIH,
notamment le régime thérapeutique et
les modifications du style de vie, et, le cas
échéant, un traitement pharmacologique.
Une perte de poids et une activité physique
régulière doivent être recommandées
aux personnes obèses. Une évaluation
de la maladie coronarienne doit être
réalisée, notamment chez les personnes
des tranches d’âge supérieures.
Passer des inhibiteurs
de protéase à un
médicament alternatif
peut permettre de
contrôler le diabète.
Bien que cette option ne s’applique pas à
tous, passer des inhibiteurs de protéase ou
d’autres agents en cause à un médicament
alternatif peut permettre de contler
l’hyperglycémie et le diabète. Les traitements
pharmacologiques des personnes atteintes
de diabète et du VIH sont généralement
ceux recommandés pour les personnes
atteintes de diabète de type 2. Actuellement,
des médicaments oraux sont utilisés pour
réduire l’hyperglycémie et améliorer la
sensibilité à l’insuline. Dans la mesure
du possible, le traitement des personnes
atteintes de diabète séropositives doit
inclure l’utilisation d’un médicament
oral insulino-sensibilisant, comme la
metformine ou les thiazolidinediones.
Prise en charge et éducation
En résumé, les personnes atteintes du VIH
qui suivent un traitement antirétroviral
doivent être surveillées afin de détecter
l’apparition d’un diabète, surtout
lorsqu’elles utilisent des inhibiteurs
de protéase. L’association entre les
médicaments antirétroviraux et le diabète
peut être plus forte chez les personnes
à plus haut risque en raison de leur
âge, de leur ethnicité ou de l’obésité.
Si une personne développe le diabète,
notamment lorsqu’elle prend des inhibiteurs
de protéase, le traitement antirétroviral
doit être modifié dans la mesure du
possible, et le traitement adéquat mis
en oeuvre. Elle devra être informée du
risque de maladies cardiaques ou d’autres
complications et recevoir une formation
sur les bienfaits des modifications du style
de vie telles que l’arrêt du tabac, l’exercice
physique et une alimentation saine.
y Cecilia J Yoon
Cecilia J Yoon est professeur assistante de
médecine, spécialisée dans la médecine du
VIH, Division of International Medicine and
Infectious Disease, New York Presbyterian
Hospital-Weill Medical College of Cornell
University, New York, Etats-Unis.
Références
1 Dube MP. Disorders of glucose metabolism in
patients infected with human immunodeficiency
virus. Clin Infect Dis 2000; 31: 1467-75.
2 Aberg JA, Gallant JE, Anderson J, Oleske JM,
Libman H, Currier JS, Stone VE, Kaplan JE; HIV
Medicine Association of the Infectious Diseases
Society of America. Primary care guidelines for
the management of persons infected with human
immunodeficiency virus: recommendations of the
HIV Medicine Association of the Infectious Diseases
Society of America. Clin Infect Dis 2004; 39: 609-29.
3 Walli R, Herfort O, Michl GM, Demant T, Jager H,
Dieterle C, Bogner JR, Landgraf R, Goebel FD.
Treatment with protease inhibitors associated with
peripheral insulin resistance and impaired oral
glucose tolerance in HIV-1–infected patients. AIDS
1998; 12: 167–73.
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