Propriétés locales dans un espace topologique Dans ce qui suit, tous les espaces topologiques considérés sont des espaces séparés, c’est à dire que pour tout point x et y distincts, il existe deux ouverts disjoints U et V qui contiennent respectivement x et y. Définition (Base de voisinage) : Une famille V de parties d’un espace topologique E est appelée base de voisinage d’un point a si elle est formée de voisinages de a et si tout voisinage U de a contient un élément V de V (i.e. V ⇢ U ). Définition (Espace localement ⇤) : Un espace topologique E séparé est localement ⇤ si tout point de E admet une base de voisinages dont les éléments ont la propriétés ⇤. Exemples : · Un espace topologique séparé E est localement compact si tout point de E admet une base de voisinage compact. · Un espace topologique séparé E est dit localement connexe si tout point de E admet une base de voisinage connexe. · Un espace topologique séparé E est dit localement connexe par arcs si tout point de E admet une base de voisinage connexe par arcs. Dans la suite, nous allons voir plus en détail les di↵érentes propriétés locales. 1. Espace localement compact On montre une caractérisation pratique des espaces localement compacts. Caractérisation : E est un espace localement compact si et seulement si tout point de E admet un voisinage compact. Preuve : Si E localement compact, et si x est un point de E, x admet une base de voisinage compact, donc en particulier, il existe un voisinage compact de x. Réciproquement, supposons que tout point de E admette un voisinage compact. Soit x un point de E, K un voisinage compact de x et U un voisinage quelconque de x. On veut montrer qu’il existe un voisinage compact de x inclus dans U . U La frontière @(K \ U ) est fermée dans K compact, donc est compacte. De plus, puisque E est séparé, pour tout y appartenant à @(K \ U ) il existe deux ouverts disjoints Vy et Wy contenant respectivement y et x. La famille (Vy ) forme un recouvrement de @(K \ U ), qui est compact, il existe donc un sous recouvrement fini (Vy1 , . . . , Vyn ). L’intersection de Wy1 , . . . , Wyn forme un ensemble W ne rencontre aucun Vyi . L’adhérence de W est donc contenue dans K \ U . Ainsi W est un voisinage compact de x, contenu dans U . Vy x· Wy @(K\U ) K ⇤ · Espace localement compact non compact : un tel exemple n’est pas difficile à trouver : R est localement compact mais pas compact. En e↵et, si U est un voisinage de x, U contient une boule fermée centrée en x, qui est compacte. · En revanche, un espace compact est localement compact. En e↵et, avec la caractérisation précédente, si E est compact, alors E est un voisinage compact de chacun de ses points et donc E est localement compact. 2. Espace localement connexe Le cas des espaces localement connexes di↵ère de celui des espaces localement compacts. Un espace peut en e↵et être connexe sans que ses points n’aient de base de voisinages connexes. Réciproquement, un espace peut être localement connexe sans que celui ci soit connexe. 1 · Espace localement connexe non connexe : dans R, considérons deux intervalles ouverts disjoints. Leur réunion est localement connexe non connexe. · Espace connexe non localement connexe : Un tel exemple est plus difficile à trouver. Considérons le “peigne” dans R2 , c’est à dire l’ensemble [ E = ([0, 1] ⇥ {0}) [ ({r} ⇥ [0, 1]) r2Q\[0,1] On le munit de la topologie induite par celle de R2 . Alors E est connexe mais n’est pas localement connexe. En e↵et, si l’on considère un point x de E situé strictement sur les “dents” du peigne, et U un voisinage suffisamment petit de x (qui ne rencontre pas le “manche” du peigne), alors U ne contient aucun voisinage connexe de x. 3. Espace localement connexe par arcs · Espace localement connexe par arcs non connexe par arcs : De nouveau ici, si l’on prend deux intervalles ouverts disjoints de R, la réunion est localement connexe par arcs et non connexe par arcs. · Espace connexe par arcs non localement connexe par arcs : l’exemple du peigne du paragraphe précédent fonctionne ici aussi, pour les mêmes raisons. La propriété suivante est généralement utile : Propriété : Un espace connexe et localement connexe par arcs est (globalement) connexe par arcs Preuve : Soit E un espace connexe et localement connexe par arcs. Pour montrer que E est connexe par arcs, on va montrer que les composantes connexes par arcs sont ouvertes et fermées. Considérons C une composante connexe par arcs non vide de E. · C est ouvert : si x 2 C, puisque E est localement connexe par arcs, il existe un ouvert U connexe par arcs contenant x, donc U ⇢ C, et donc C est ouvert. · C est fermé : l’ensemble des composantes connexes par arcs de E forme une partition. Donc le complémentaire de C est une réunion de composantes connexes par arcs, qui sont ouvertes par ce qui précède. Donc C est fermé. Ainsi, C est ouvert et fermé non vide dans E connexe, donc C = E, et E est connexe par arcs. ⇤ 4. Espace localement simplement connexe Dans ce paragraphe, tous les espaces topologiques sont connexes par arcs. Définition : Un espace est localement simplement connexe si tout point admet une base de voisinage simplement connexe. Détaillons cette définition : E est un espace localement simplement connexe, si pour tout point x de E et tout voisinage V de x, il existe un voisinage U de x simplement connexe, c’est-à-dire que tout lacet tracé dans U est homotope dans U à une constante. · Espace localement simplement connexe non simplement connexe : Considérons R2 {0}. Cet espace n’est pas simplement connexe, par exemple le lacet de centre 0 et de rayon 1 n’est pas homotope à une constante. En revanche, R2 {0} est localement simplement connexe. Un voisinage d’un point de R2 {0} contient une boule de R2 dont 0 ne fait pas partie, et cette boule est simplement connexe. · Espace simplement connexe non localement simplement connexe : dans le paragraphe suivant, on donne un exemple d’espace simplement connexe (et semi-localement simplement connexe) mais non localement simplement connexe. 5. Espace semi-localement simplement connexe : Dans ce paragraphe, tous les espaces topologiques sont connexes par arcs. Définition : Un espace E est dit semi-localement simplement connexe si tout point x admet un voisinage U tel que tout lacet dans U est homotope dans E à une constante. 2 · Espace semi-localement simplement connexe non localement simplement connexe : pour tout entier n, notons 1/n le disque de R2 de centre 0 et de rayon n1 . On considère l’ensemble E= S n2N⇤ 1/n E est communément appelé “boucles hawaı̈ennes”. Cet espace, muni de la topologie induite par celle de R2 n’est ni simplement connexe, ni localement simplement connexe, ni semi-localement simplement connexe. Nous allons considérer le cône topologique de E, . CE = (E ⇥ [0, 1]) (E ⇥ {0}) Où le quotient est définit de la manière suivante : E ⇥ [0, 1] est le “cylindre” de base E, et la relation d’équivalence identifie tous les points de E ⇥ {0} en un seul, les autres classes d’équivalences étant les singletons. Autrement dit, si l’on note ⇠ la relation d’équivalence, alors 8x, x0 2 E, (x, 0) ⇠ (x0 , 0) et 8t 6= 0, 8x 2 E, (x, t) ⇠ (x, t) – CE est simplement connexe. En e↵et, CE est contractile : il se rétracte par déformation sur son sommet, par l’homotopie Ht : C E ! CE (x, s) 7 ! (x, ts) Ht est bien une homotopie entre H1 = IdCE et H0 : (x, s) ! (x, 0) = (0, 0) qui est bien constante. – CE n’est pas localement simplement connexe. Notons O le point d’intersection de tous les cercles. Soit U un voisinage de ce point. Il contient alors un cercle centré en O, qui n’est pas homotope dans U à une constante. Donc CE n’est pas localement simplement connexe. – CE est semi-localement simplement connexe. Les points qui posent problème sont les points (0, t) avec 0 6 1 6 t. Faisons le raisonnement pour le point O (il est identique pour tous les autres points). Si l’on considère un voisinage de O, il contient des cercles indéfiniments petits. Mais chacun de ces cercles est homotope dans E à une constante. En e↵et, si l’on se donne un tel cercle, et si t est un réel compris entre 0 et 1, on peut considérer l’homotopie qui part de O, monte jusqu’à l’ordonnée t, fait le tour du cylindre correspondant au cercle considéré, et revient au point O. Par cette homotopie, le cercle est homotope au lacet qui fait l’aller retour du point O au sommet du cône, et ce même lacet est homotope à une constante. Références : [1] Éléments de Mathématique : Topologie générale 1 4 : Chapitres 1 4, N. Bourbaki, Springer, 2009 [2] Topologie, calcul di↵érentiel et variable complexe, J. Saint-Raymond, Calvage et Mounet, 2008 3