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Diagno-photo
le clinicien juin 2010
Une femme de 61 ans, fumeuse,
se présente à l’urgence pour un
tableau de dyspnée, de fièvre et
d’augmentation d’expectora-
tions purulentes. Elle n’est pas
en choc et sature bien sans
oxygène. Elle a une leucocytose
à 17 000/mm3avec une petite
déviation à gauche. Deux mois
auparavant, elle aurait eu des
symptômes compatibles avec le
H1N1 non prouvé par PCR
(polymerase chain reaction). De
plus, elle fut investiguée en
pneumologie quatre mois aupa-
ravant pour des hémoptysies
importantes. Elle n’est pas
vaccinée contre le H1N1 et le
pneumocoque. Une radiogra-
phie pulmonaire est demandée.
Poumons éprouvés
Quel est le diagnostic?
Une pneumonie lobaire droite est évidente
sur la radiographie (grande flèche,
photo 1).Toutefois, en regardant
attentivement la trame pulmonaire, on
constate la présence de multiples
micronodules sur l’ensemble de la plage
pulmonaire (petites flèches, photo 1). Une
tomodensitométrie thoracique est
demandée rapidement et confirme une
pneumonie multilobaire ainsi que la
présence de multiples bronchiectasies
impliquant également les petites bronches
(flèches, photo 2). Les bronchiectasies des
petites bronches ont un aspect dit de
«tree-in-bud ».Les hémoptysies étaient
probablement secondaires à ces
bronchiectasies.
Quel est le traitement?
La pneumonie est considérée acquise en
communauté, car la patiente n’a pas été
hospitalisée pendant le dernier mois. De
plus, comme elle n’a pas eu plusieurs
traitements antibiotiques dernièrement, il
n’y a pas de raison de couvrir le
Pseudomonas empiriquement, et ce, malgré
les bronchiectasies.Une coloration de
Gram d’un échantillon des expectorations
est demandée et permet de s’assurer qu’il
n’y a pas abondance de bacilles à Gram
négatif (BGN). Un traitement empirique
couvrant le pneumocoque, l’Haemophilus, le
Moraxella catarrhalis (maladie pulmonaire
obstructive chronique probable) et les
atypiques est débuté (ici la ceftriaxone et la
moxifloxacine). Il est important d’obtenir
de bonnes cultures d’expectorations pour
restreindre, par la suite, le traitement
antibiotique.
Après l’épisode aigu, la patiente devrait
être vaccinée contre le H1N1 ainsi que le
pneumocoque (vaccin polysaccharidique).
Les bronchiectasies prédominantes dans la
lingula sont plus souvent associées, dans la
littérature, aux mycobactéries. Dans son
cas, cette hypothèse avait déjà été écartée
lors de l’investigation des hémoptysies.
Dr Jean-François Roussy
Résident 3, microbiologie-infectiologie
Dr Alain Martel
Microbiologiste-infectiologue, interniste
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Photo 1
Photo 2