Autant la béance verticale se guérit d’elle-même par le
simple arrêt de la succion, autant le retour vers l’arrière
des incisives supérieures est bien plus difficile à obtenir
spontanément, surtout si les dents sont retenues en
dehors par la lèvre inférieure qui s’interpose.
Retentissement sur les molaires
Le retentissement de la succion du pouce peut s’exercer
aussi sur les molaires, dans le sens transversal, par
contraction des muscles buccinateurs et interposition de la
langue. Les petites fossettes, si mignonnes au coin des
lèvres, en sont souvent le témoin.
Absence de conséquences dentaires
Enfin, il arrive qu’un tic de succion ne provoque aucune
déformation de l’arcade dentaire. Cette absence de conséquences est indépendante du temps passé à cette
activité mais dépend des mouvements des muscles associés. Dans ces cas-là, il est important d’insister sur le fait
qu’il n’est pas nécessaire, d’un point de vue stomatologique, de demander de cesser cette habitude puisqu’elle
n’est pas nocive pour les dents. La décision pourra être prise, mais pour d’autres motifs (hygiène, psychologie et
selon l’avis du pédiatre).
Principes de la prise en charge
Souvent, les parents sont très inquiets de la succion du pouce de leur enfant et c’est un sujet de conflit quotidien.
Chez le petit enfant
Le retentissement de la succion du pouce sur les dents de lait est sans importance notable, et c’est pourquoi il est
peut-être nécessaire de « laisser tranquille » un enfant en denture lactéale. Les déformations imposées à ces
dents disparaîtront avec elles, au moment de l’éruption des dents définitives. Il est normal de téter lorsqu’on est
petit, et si l’on commence à vouloir intervenir trop tôt, l’enfant risque de ne pas comprendre et de refuser de
participer.
Vers 5-6 ans
L’âge où les premières incisives définitives font leur éruption, c’est-à-dire vers 5 ou 6 ans, est un bon moment
pour commencer à convaincre l’enfant que ses dents de grand évoluent et qu’il est temps d’adopter des «
comportements de grand ». Les parents cherchent souvent à s’imposer et profitent de cette consultation pour dire
« qu’il faut écouter le docteur », « que ce n’est pas trop tôt, depuis le temps qu’ils lui demandent d’arrêter ». Il est
important à ce moment de parler à l’enfant, de lui dire que s’il souhaite arrêter, on peut lui donner les moyens de
réussir mais il lui faut le souhaiter réellement. Il n’est pas question de le menacer, bien au contraire, il suffit
simplement de lui proposer de l’aider. On lui demande d’y réfléchir puis de donner son avis. Dans 9 cas sur 10,
l’enfant exprime le souhait d’arrêter mais dit qu’il n’y arrive pas.
Plusieurs moyens simples peuvent être mis à sa disposition. On lui propose de mettre un gant ou une chaussette
« propre » autour de la main la nuit ou de mettre de côté le doudou, la tétine ou le biberon.
Il faut lui expliquer que si sa seule volonté est suffisante pour arrêter de sucer son doigt en s’endormant, il ne
pourra pas se contrôler au cours du sommeil, où, inconsciemment, le doigt revient dans la bouche lorsqu’il rêve.
C’est lui et lui seul qui doit le faire. C’est son doigt qui entre dans sa bouche, et ses dents qui seront déformées ;
c’est à lui de se prendre en charge. On peut lui garantir que s’il suit la consigne, les améliorations seront déjà
mesurables au bout d’un mois et demi. Il est important de répéter aux parents, en présence de l’enfant, qu’il est
capable d’y arriver seul et qu’on lui fait confiance, qu’il est assez malin pour réussir. Souvent, l’enfant, trop
content de pouvoir montrer à ses parents qu’il devient grand, arrête de sucer son pouce le jour même de la
consultation (figure 6).
Figure 5. Béance incisive sagittale, dents en avant et
interposition des lèvres.
a. Bouche fermée, b. Bouche ouverte de face, c. Bouche
ouverte de profil.